Les plantes médicinales ont toujours eu une place importante dans l’arsenal thérapeutique de l’humanité. La médecine traditionnelle demeure le recours principal d’une grande majorité des populations pour résoudre leurs problèmes de santé, non seulement du fait qu’elle constitue un élément important du patrimoine culturel, mais aussi pour les moyens financiers limités face aux produits conventionnels (Kone, 2009). Selon l’organisation mondiale de la santé, près de 80% des populations dépendent de la médecine traditionnelle pour des soins de santé primaire (OMS, 2002). En dehors de la fréquente efficacité de ces remèdes traditionnels, plus de 25% des médicaments prescrits dans les pays industrialisés dérivent directement ou indirectement des plantes (Newman et al., 2000).
Le stress oxydatif est impliqué dans un large spectre de maladies qui ont un impact énorme sur la santé des populations. Ce stress oxydatif s’installe lorsqu’il y a un déséquilibre entre la production des radicaux libres et leur élimination. De nombreuses plantes, alimentaires ou médicinales, renferment des constituants antioxydants. L’apport régulier en phytonutriments possédant des capacités antioxydantes significatives est associé à une faible prévalence de maladies liées au stress oxydatif (cancers, maladies cardiovasculaires et athérosclérose) et à un faible taux de mortalité (Anderson et al., 2001). Par ailleurs, le Sénégal est un pays producteur de mangues. Il est classé en 5éme position après Nigeria, Niger, Guinée et Mali au niveau de l’Afrique de l’Ouest. Ainsi, l’exportation de fruit connait une certaine incidence économique. De même l’utilisation de certaines parties de la plante dans diverses pathologies dans la pharmacopée traditionnelle est constatée depuis très longtemps. Enfin, le Laboratoire de Chimie Organique et Thérapeutique s’inscrit depuis quelques années dans l’évaluation de l’activité antioxydante de différentes parties de la plante. Ceci justifiant notre étude qui porte sur la recherche de l’activité antioxydante des feuilles, des racines et des écorces de tiges de Mangifera indica var. kent.
Généralités
Définition des radicaux libres
L’oxygène est un élément essentiel pour les organismes multicellulaires parce qu’il permet de produire de l’énergie en oxydant de la matière organique. Cependant, nos cellules convertissent une partie de cet oxygène en métabolites toxiques : les radicaux libres organiques (Lessard, 2000). Un radical libre est une espèce chimique possédant un électron célibataire. Cette propriété le rend très réactif du fait de la tendance de cet électron à se réapparier, déstabilisant ainsi d’autres molécules. Les molécules ainsi transformées deviennent à leur tour des radicaux libres et initient ainsi une réaction en chaine.
Origine des radicaux libres
La chaine de transport des électrons peut laisser « fuir » une certaine proportion d’électrons qui vont réduire l’oxygène, mais en partie seulement. C’est ainsi qu’environ 2% de l’oxygène subit une réduction monoélectronique (addition d’un seul électron , conduisant à la formation du radical superoxyde O2·- , au niveau de l’ubiquinone (ou coenzyme Q).
De même, la NADH-déshydrogénase située dans la membrane mitochondriale interne, ainsi que la NADPH oxydase présente au niveau des cellules vasculaires endothéliales, peuvent conduire à la formation de radicaux O2·- . Par ailleurs, l’apparition de radicaux superoxydes peut résulter de l’autooxydation (oxydation par l’oxygène) de composés tels que des neuromédiateurs (adrénaline, noradrénaline, dopamine…), des thiols (cystéine), des coenzymes réduits (FMNH2 , FADH2), mais aussi de la détoxification des xénobiotiques (toxiques, médicaments) par le système des cytochromes P450 présent au niveau du réticulum endoplasmique. L’eau oxygénée (ou peroxyde d’hydrogène, H2O2) peut résulter de la réduction biélectronique de l’oxygène en présence d’oxydase (aminoacide oxydase, glycolate oxydase, urate oxydase…) qui se trouve dans les peroxysomes.
Rôles des radicaux libres dans l’organisme
La grande majorité des radicaux libres est impliquée dans l’entretien et le fonctionnement de l’organisme particulièrement dans le processus de la fécondation, de la maturation et du mouvement cellulaires. Ils jouent aussi un rôle majeur dans la production de médiateur cellulaires, l’élimination des produits toxiques et la défense contre l’invasion des microbes et des virus, de même que contre les cellules tumorales. Mais dans d’autres cas, les radicaux libres peuvent être impliqués dans la pathogenèse des maladies qui peuvent éventuellement conduire au dérèglement de l’organisme et à son vieillissement.
Stress oxydatif
Définition
Le stress oxydatif, dénommé également stress oxydant, résulte d’un déséquilibre de la balance « pro-oxydants – antioxydants » en faveur des oxydants, c’est-à-dire d’une situation où la cellule ne contrôle plus la présence excessive de radicaux oxygénés toxiques. Ce qui se traduit par des dommages oxydatifs de l’ensemble des constituants cellulaires (Sergent, 2000).
Origine du stress oxydatif
La rupture d’équilibre, lourde de conséquence peut avoir de multiples origines. L’organisme peut avoir à faire face à une production beaucoup trop forte pour être maitrisée, qui sera observée dans les intoxications aux métaux lourds, dans l’irradiation, dans les ischémies/reperfusions, suivant des thromboses. Par ailleurs, la rupture d’équilibre peut provenir d’une défaillance nutritionnelle ou de carence en un ou plusieurs des antioxydants apportés par la nutrition comme les vitamines ou les oligo-éléments présents dans les aliments (Favier, 2003).
Conséquences du stress oxydatif
Les radicaux libres sont responsables de dommages sur toutes les molécules biologiques comme les acides nucléiques, les lipides, les protéines (Favier, 2003).
❖ Au niveau de l’ADN, les radicaux libres peuvent induire des effets oxydatifs et mutagènes ou un arrêt des réplications. Ils agissent en provoquant des altérations de base, des pontages ADN-protéines ou des ruptures de brins (Shimizu, 2004).
❖ Les ERO produites par les cellules endothéliales, les cellules musculaires lisses et les monocytes-macrophages sont susceptibles d’oxyder les lipoprotéines, notamment les lipoprotéines de basse densité (LDL) conduisant à la formation de stries lipidiques, première étape dans la formation de la plaque d’athérome (épaississement des artères par un dépôt composé, en partie, d’esters de cholestérol).
❖ Les radicaux, issus des rayonnements ionisants, entrainent essentiellement des réactions d’oxydation des protéines. Les protéines les plus sensibles aux attaques des radicaux libres sont celles qui comportent des acides aminés possédant un atome de soufre (cystéine, méthionine). C’est le cas de nombreuses enzymes cellulaires et protéines de transport. Par exemple, les résidus cystéine des protéines sont facilement oxydés par des ERO pour former un radical thiol. Quant aux résidus méthionine, ils peuvent être oxydés rapidement en sulfones. Les protéines modifiées deviennent inactives et plus sensibles à l’action des protéases (Nadal, 2009).
Pathologies liées aux stress oxydatif
En raison de leur réactivité élevée, les espèces réactives interagissent avec toute une série de substrats biologiques conduisant à l’altération de l’homéostasie cellulaire de l’organisme. Le dysfonctionnement des systèmes de régulation de l’oxygène et de ses métabolites est à l’origine de phénomènes du stress oxydant dont l’importance dans de nombreuses pathologies comme facteur déclenchant ou associé à des complications lors de leur évolution est maintenant démontré.
En fait, de nombreuses études, tant épidémiologiques que cliniques, indiquent que le stress oxydant est potentiellement impliqué dans le développement de plus d’une centaine de pathologies humaines différentes en passant par l’athérosclérose, les maladies neurodégénératives, le diabète, etc. (Roberts et Sindhu, 2009) .
Stress oxydatif et athérosclérose
L’organisation mondiale de la santé (OMS) décrivait l’athérosclérose en 1958 comme une association variable de remaniement de la couche interne des artères de gros et moyen calibre. Elle consiste en une accumulation de graisses (les lipides), de glucides complexes (les sucres), de sang et de produits sanguins, de tissus fibreux et de dépôts de calcaires. Le tout est accompagné de modification de la structure interne de l’artère. Lors de l’athérogénèse, est constatée une lésion anatomique touchant les artères. A l’origine, les lipoprotéines, en particulier les LDL, peuvent demeurer prisonnières de protéoglycanes sécrétés par les cellules endothéliales au niveau de l’intima des artères. Les cellules endothéliales produisent des radicaux libres qui peuvent venir attaquer l’apo B des lipoprotéines prisonnière de l’intima ou les lipoprotéines qui ne font que traverser la paroi artérielle. La molécule d’apo B ainsi modifiée sera reconnue par le système immunitaire comme étant une substance étrangère et les macrophages recrutés au niveau de la lésion pourront alors les internaliser par les récepteurs spécifiques ou le récepteur des LDL oxydées. Les macrophages accumulent alors massivement du cholestérol et sont ainsi convertis en cellules spumeuses riches en cholestérol. Cette oxydation crée une inflammation au niveau de l’endothélium déclenchant ainsi le recrutement et l’infiltration de monocytes circulant dans l’intima et conduisant à la constitution de stries graisseuses, dites stries lipidiques, à la surface luminale. Une plaque mature d’athérosclérose est composée de deux éléments : un cœur lipidique et une matrice.
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : Etude bibliographique
Chapitre I : Stress oxydatif
I. Généralités
I.1. Définition des radicaux libres
I.2. Origine des radicaux libres
I.3. Rôles des radicaux libres dans l’organisme
II. Stress oxydatif
II.1. Définition
II.2. Origine du stress oxydatif
II.3. Conséquences du stress oxydatif
III. Pathologies liées aux stress oxydatif
III.1. Stress oxydatif et athérosclérose
III.2. Stress oxydatif et maladie d’Alzheimer
III.3. Stress oxydatif et maladie de Parkinson
III.4. Stress oxydatif et le diabète
III.5. Stress oxydatif et autres maladies
IV. Méthodes de diagnostic d’un état de stress oxydatif
V. Antioxydants
V.1. Définition
V.2. Antioxydants endogènes
V.2.1. Systèmes enzymatiques
V.2.2. Systèmes non enzymatiques
V.3. Antioxydants exogènes
Chapitre II : Rappels bibliographiques sur Mangifera indica
I. Etude taxonomique
I.1. Nom scientifique
I.2. Position systématique
I.3. Description botanique
II. Origine et répartition géographique
III. Chimie de la plante
III.1. Composés phénoliques
III.1.1. Acides phénoliques
III.1.2. Esters phénoliques
III.1.3. Flavonoïdes
III.1.4. Xanthones
III.1.5. Tanins
III.2. Caroténoides
III.3. Triterpènoїdes et stéroïdes
III.4. Acides aminés
III.5. Acides gras
IV. Pharmacologie
IV.1. Etude ethnobotanique
IV.2. Etude pharmacologique
IV.2.1. Propriétés antioxydantes
IV.2.1.1. Propriétés antioxydantes d’extrait de feuilles
IV.2.1.2. Propriétés antioxydantes d’extraits de l’épicarpe de la mangue
IV.2.1.3. Propriétés antioxydantes d’extraits de l’écorce
IV.2.2. Autres propriétés pharmacologiques
Chapitre III : Différentes méthodes de détermination de l’activité antioxydante
1. Réduction du DPPH∙
2. Test ABTS (Acide-2,2’-azinobis (3-éthylbenzothizoline-6-sulfonique)
DEUXIEME PARTIE : PARTIE EXPERIMENTALE
I. Cadre d’étude
II. Matériel et Méthodes
II.1. Matériel végétal
II.2. Appareillage
II.3. Réactifs
III. Méthodes d’étude
III.1. Extraction
III.2. Préparation des extraits
III.3. Préparation de la solution méthanolique
III.4. Screening phytochimique
III.4.1. Réactions de caractérisation
III.4.1.1. Composés phénoliques
III.4.1.1.1. Tanins catéchiques ou condensés
III.4.1.1.2. Tanins hydrolysables
III.4.1.1.3. Flavonoïdes
III.4.1.2. Alcaloïdes
III.4.1.3. Saponosides
III.4.2. Identification par chromatographie sur couche mince
III.4.2.1. Flavonoïdes
III.4.2.2. Alcaloïdes
III.5. Dosage des composés phénoliques totaux (PPT)
III.5.1. Principe
III.5.2. Mode opératoire
III.6. Evaluation de l’activité antioxydante par la méthode spectrophotométrique avec le DPPH
III.7. Expression des résultats
III.8. Evaluation de l’activité antioxydante par la méthode de l’ABTS
III.9. Expression des résultats
Chapitre IV : Résultats et Discussion
I. Résultats
I.1. Extraction
I.2. Screening phytochimique
I.2.1 Réactions de caractérisation
I.2.1.1 Composés phénoliques
I.2.1.2. Tanins catéchiques
I.2.1.3. Tanins hydrolysables
I.2.1.4. Flavonoïdes
I.2.1.5. Alcaloïdes
1.2.1.6. Saponosides
I.2.2. Identification par chromatographie sur couche mince
I.2.2.2. Alcaloïdes
I.3. Dosage des composés phénoliques
I.4. Evaluation de l’activité antioxydante par la méthode spectrophotométrique utilisant le DPPH
I.5. Evaluation de l’activité antioxydante par la méthode ABTS∙+
II. Discussion
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE