Les réseaux électriques : Organisation et fonctionnement technique et économique
Un premier constat permet de s’apercevoir que la consommation mondiale d’électricité représente environ 20% de la consommation totale d’énergie (donnée 2008) [IEA_13b]. Ce pourcentage illustre l’importance du vecteur électrique dans le schéma énergétique mondial. De plus, les champs d’application de plus en plus étendus de l’énergie électrique font de l’électricité un vecteur particulièrement «flexible » (éclairage, chauffage, transport, etc.). Cependant, une spécificité de ce vecteur énergétique est qu’il ne se stocke pas en l’état. Ainsi, la production de l’énergie électrique et sa consommation doivent être reliées par une infrastructure. Une définition des réseaux électriques peut alors être vue comme «l’ensemble des équipements et systèmes de conversion destinés à la production, au transport et à la distribution de l’électricité depuis la centrale de génération jusqu’aux maisons de campagnes les plus éloignées » [INP_11].
Structure et caractéristiques des réseaux électriques
En se basant sur la définition des réseaux électriques donnée précédemment, on peut assimiler la structure d’un réseau électrique comme l’association de trois blocs : La production, l’acheminement (transport et distribution) et la consommation. Aujourd’hui, la topologie des réseaux électriques fait que ces trois blocs sont séparés géographiquement. D’un côté, les sites de production ont privilégié des localisations où la topologie du terrain et les ressources étaient adaptées. Ainsi, un groupe de production hydraulique nécessitera un certain débit d’eau et un certain dénivelé, il en est de même pour les centrales nucléaires qui ont besoin d’une certaine capacité de refroidissement et nécessitent donc, par exemple, la présence d’un fleuve. D’un autre côté, les sites de consommation correspondent aux zones habitées généralement diffuses sur l’ensemble ou une partie d’un territoire avec des densités très différentes selon qu’on soit en milieu urbain ou rural. Ainsi, le réseau électrique a également pour objectif d’assurer le lien entre les sites de production et les sites de consommation.
On peut observer sur cette figure que l’acheminement de l’électricité est généralement divisé en deux parties : le transport et la distribution. Cette distinction est fondamentale dans la compréhension du fonctionnement des réseaux électriques actuels puisque ces deux « réseaux » d’acheminement ont des propriétés et des mécanismes de réglages complètement différents.
Caractéristiques générales des réseaux électriques
La quasi-totalité des réseaux électriques dans le monde utilise le courant alternatif. Il semblerait que ce choix (par rapport au courant continu) n’a pas été fait uniquement pour des raisons économiques, mais également pour des raisons techniques et historiques. A l’origine, il n’était pas possible de transformer les niveaux de tension en courant continu (réalisé seulement à partir des années 60). A l’inverse, le courant alternatif a permis très tôt l’utilisation des transformateurs pour modifier la tension à une valeur souhaitée et permettre le transport de l’énergie sur de longues distances avec un minimum de pertes [INP_11]. Le changement du niveau de tension s’est très tôt avéré nécessaire pour le transport de l’électricité. En effet, les pertes dans les lignes et câbles étant directement proportionnelles au carré de l’intensité (effet Joule), pour le transport d’une puissance donnée, il est plus intéressant d’augmenter la tension (et donc de diminuer l’intensité). Cependant, les progrès réalisés en électronique de puissance permettent aujourd’hui la transformation de tension en continu et relancent le débat sur le choix du courant alternatif, en particulier pour le transport de l’électricité sur de grandes distances (supergrids) ou pour l’intégration de nouvelles sources d’énergies renouvelables (micro-réseaux).
Le choix de la fréquence des réseaux électriques n’a cependant pas connu le même consensus puisque l’on trouve aujourd’hui deux fréquences utilisées dans le monde, le 50Hz et le 60Hz (de plus petits réseaux indépendants peuvent fonctionner à des fréquences différentes ). Il est essentiel de comprendre que la fréquence du réseau est la même en tout point de ce dernier. On parle de réseaux interconnectés synchrones lorsque deux réseaux sont connectés sur la même fréquence (la fréquence est la même en tout point des deux réseaux). Par exemple, le réseau électrique européen est un ensemble de réseaux interconnectés synchrones à 50 Hz.
La production d’énergie électrique
Il existe plusieurs caractéristiques pour distinguer les différents groupes de production d’électricité qui peuvent être connectés au réseau, selon la nature de l’énergie primaire utilisée ou encore selon la puissance installée. Dans ce chapitre, on se placera du point de vue du réseau et on distinguera les groupes de production selon des critères impactant le réseau électrique tels que :
◆ Le point d’injection de la puissance
◆ Les temps de démarrage/arrêt/réaction des unités de production
◆ La variabilité et prévisibilité de la production
Point d’injection
La production électrique peut être aujourd’hui injectée aussi bien sur le réseau public de transport (RPT) que sur le réseau public de distribution (RPD). La puissance installée est le paramètre déterminant pour sélectionner le point d’injection. Ainsi, une centrale de production de forte puissance (tranche nucléaire, centrale thermique, etc.) nécessitera une infrastructure comme le réseau de transport pour « évacuer » la puissance produite. Une installation photovoltaïque d’une puissance de 250kW sera elle, par exemple, connectée sur le réseau de distribution. En France, dès lors qu’une installation dépasse 12 MW (17 MW dans le cadre d’une dérogation), elle se doit d’être raccordée au réseau de transport [RTE_13a].
Temps de démarrage/arrêt/réaction
Une des caractéristiques d’un groupe de production vis-à-vis du réseau est son temps de réaction nécessaire à un changement de consigne de fourniture de puissance. Cette caractéristique est déterminante pour le pilotage et le bon fonctionnement du réseau. La consommation n’étant pas intégralement prévisible, il sera nécessaire d’ajuster la production à la consommation et ce, sur des laps de temps très courts. Par conséquent, selon le temps de réaction d’un groupe de production, il ne pourra pas rendre le même « service » au réseau.
Prévisibilité de la production
La prévisibilité de la production joue un rôle majeur dans le pilotage du réseau électrique. En effet, la majorité de la production électrique est « planifiée » à l’avance en fonction de prévisions de consommation. Un ajustement en temps réel est nécessaire pour assurer l’égalité parfaite entre consommation et production, mais cette puissance nécessaire à l’ajustement (positive ou négative) est très faible comparée à la partie planifiée. Par conséquent, la possibilité de prévoir la production d’une centrale peut s’avérer essentielle pour rapprocher au maximum la production de la consommation. Les productions peu prévisibles, qui sont essentiellement de nature renouvelable (solaire, éolien, énergies marines) introduisent dans les réseaux électriques des contraintes de gestion supplémentaires. Etant donné le nombre de groupes de production à puissance contrôlable, l’ajout de productions intermittentes ne perturbe pas, outre mesure, le fonctionnement du réseau. Ces dernières « utilisent » la flexibilité des autres groupes de production pour pouvoir s’intégrer. Cependant, face à la forte croissance de ces productions intermittentes sur le réseau, la flexibilité générale peut devenir insuffisante et de nouvelles stratégies d’intégration doivent donc être trouvées (stockage, modulation de consommation, fonctionnement dégradé, etc.). Nous reviendrons sur ce point plus tard.
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Table des matières
Introduction générale
1ère Partie : Rôle du stockage dans les réseaux électriques et introduction de la plateforme Odyssey
Chapitre 1: Problématique du stockage de l’énergie dans les réseaux électriques
1 Introduction
2 Les réseaux électriques : Organisation et fonctionnement technique et économique
3 Les rôles du stockage dans les réseaux électriques
4 Conclusion
Chapitre 2 : Périmètre des travaux de thèse et cahier des charges de l’outil
1 Introduction
2 Périmètre et problématique de la thèse
3 Etat de l’art des outils de simulation/optimisation de systèmes EnR-stockage
4 Cahier des charges de l’outil à développer dans le cadre de la thèse
5 Conclusion
Chapitre 3 : Structure et fonctionnement de la plateforme Odyssey
1 Introduction
2 Paradigme de programmation et choix du support
3 Structure et éléments constitutifs de la plateforme Odyssey
4 Fonctionnement de la plateforme Odyssey
5 Inventaire des briques technologiques implémentées et modèles associés
6 Conclusion
Conclusion de la 1ère Partie
2ème Partie : Illustration des fonctionnalités de la plateforme Odyssey sur des cas d’application
Chapitre 4 : Alimentation d’un site isolé par un système PV-hydrogène (cas PVH2-SI)
1 Introduction
2 Description du cas d’étude
3 Dispositif expérimental, conditions d’utilisations et résultats accessibles
4 Modélisation de l’expérimentation avec Odyssey
5 Comparaison des résultats expérimentaux et des résultats de simulation
6 Conclusion et perspectives
Chapitre 5 : Centrale PV-stockage en milieu insulaire répondant aux critères de l’appel d’offres de la commission de régulation de l’énergie (cas AO-CRE-PV)
1 Introduction
2 Description de l’appel d’offres
3 Architecture des systèmes et stratégies de gestion
4 Données d’entrée : éclairement, température et profil de charge
5 Configurations étudiées
6 Hypothèses techniques et économiques
7 Résultats technico-économiques d’optimisation et de simulation
8 Conclusion, limites et perspectives d’étude
Chapitre 6 : Participation d’une centrale PV-stockage au marché de l’électricité EPEX SPOT day-ahead (cas PV-STO-DA)
1 Introduction
2 Description du cas d’étude: contexte et hypothèses technico-économiques
3 Résultats technico-économiques de simulation
4 Conclusion, limites et perspectives d’étude
Conclusion de la 2ème Partie
Conclusion