Robotique pédagogique et créativité

Robotique et pédagogie

Le mot « robot » vient du tchèque et signifie « corvée » (Čapek, 1920). Toutefois sous le terme de robot se cachent quatre catégories selon la classification de l’AFRI (Association Française de Robotique Industrielle) citée chez Coiffet (2008). Deux catégories nous intéressent particulièrement ici: le robot dit «programmable» versus « intelligent ».
Le premier est un système automatisé, étant « asservi de manière continue (…); programmable par apprentissage et/ou par langage symbolique ». C’est le cas de la voiture par exemple, ou encore du lecteur MP3, ou du thermomètre digital, etc. Ils ont été programmés pour réagir comme on le leur a ordonné.
Le second est un système robotisé, étant « capable d’analyser les modifications de son environnement et de réagir en conséquence » (p.5). L’ascenseur en est un, puisqu’il se doit de réagir intelligemment aux différents ordres qui lui sont donnés.
Les robots dans leur sens le plus général entourent les élèves et composent leur quotidien, c’est pourquoi il semble difficile à l’heure actuelle d’en faire abstraction, d’où l’intérêt pour la robotique dite « pédagogique ». La différence avec la définition du robot donnée précédemment réside dans le fait que les robots utilisés en classe doivent servir à certains apprentissages et qu’ils ne doivent pas juste faire office ‘‘d’animateurs’’. Genevey (2011) souligne à point nommé que « la robotique pédagogique est donc l’utilisation de robots dans un but pédagogique » (p.8).
Beaucoup de chercheurs se sont penchés sur la question de la Robotique Pédagogique (désormais RP). Chez Rabardel (1995), on comprend que l’utilisation d’instruments dans le sens large permet de nombreuses activités matérielles et cognitives puisque cela engendre des contraintes sur les «possibilités d’action qui s’offrent au sujet» et «sur l’activité cognitive» (p.62). En effet, un individu ayant entre ses mains un instrument ne saura pas forcément au premier abord comment l’utiliser car il n’est pas dans la tête du créateur et ne peut pas savoir initialement ce pourquoi l’instrument a été construit, quelle est son utilisation première. Peut-on considérer le robot pédagogique comme un instrument? Rabardel (1995) définit l’instrument comme étant un « artefact matériel ou symbolique » que l’utilisateur s’est approprié (on parle d’ailleurs de genèse instrumentale) (p.64).

Robotique Pédagogique dans le PER

Le constat demeure toutefois que la RP est peu répandue dans les classes de manière générale. Ce fait se confirme dans une étude sur les classes vaudoises qui cherchait premièrement à y faire l’état du matériel et des pratiques pédagogiques, mais qui a finalement pu permettre de constater qu’il y a une grande absence de données et que peu d’individus se sont penchés sur le sujet pour les récolter (Genevey, 2011). L’auteur suppose que ceci est dû au fait que la RP n’était pas incorporée à l’ancien Plan d’Etudes Vaudois (PEV), mais cela se confirme actuellement dans le Plan d’Etudes Romand (PER). En effet, si on regarde dans la discipline des MITIC (FG 21), on voit qu’il est prescrit de mener les élèves à pouvoir « décoder la mise en scène de divers types de messages » tout d’abord par le fait qu’ils utilisent un environnement multimédia, ensuite en les éduquant aux médias, en leur faisant  produire des réalisations médiatiques, et finalement en leur faisant échanger, communiquer et rechercher sur internet. La RP n’apparaît point, mais le terme de « média » est prégnant dans trois des quatre éléments de la progression des apprentissages. Il peut être traduit de deux manières différentes.
Selon le Lexique de la Formation générale du PER, Média est défini comme tel: « pluriel de «medium», support ou canal pouvant véhiculer ou transmettre des informations. Les médias désignent l’ensemble des moyens de communication modernes : les journaux et les magazines, la musique enregistrée, la photographie, le cinéma, la radio, la publicité, la télévision, la vidéo, l’Internet, les jeux vidéo et les appareils de téléphonie mobiles. »
En parlant de support, on peut donc dire que le média est un objet technique transmettant un message. Autrement dit, le média peut être considéré comme une TIC, utilisant « sa propre technique, son propre langage afin de produire des effets particuliers susceptibles de retenir toute l’attention du public » (CSEM, 2014). En parlant de « médium », on parle alors de ‘‘médiateur’’ puisqu’en latin, media est le pluriel de médium (Le Grand Dictionnaire terminologique) c’est-à-dire intermédiaire (Dictionnaire de l’Académie Française).
La robotique peut-elle être considérée comme un média? C’est un débat que j’ai mené au cours de ma dernière année de formation. En effet, « pour qu’un objet soit considéré comme un média, il doit présenter deux éléments [… : une] couche symbolique [… c’est-à-dire] un concept, une idée […] par l’intermédiaire de codes [ainsi qu’une] couche technique [c’est-à-dire] un matériau » (CSEM, 2014). Les auteurs donnent plusieurs exemples. Prenons celui de la bague de mariage: sa couche technique est le fait qu’elle soit constituée d’or. Sa couche symbolique est le fait qu’elle représente l’alliance, la fidélité. Si l’on suit cette logique, la bague peut être considérée comme un média. Il est important de noter au passage qu’une certaine éducation à ce « média » est à faire: aucun individu n’achètera un objet si cher et si petit pour le donner même à la personne aimée s’il n’y a pas conféré un sens particulier.

Situations d’apprentissage possibles

Toutefois, rappelons que l’objet « ne devient média que dans les dispositifs qui permettent de créer et de le transmettre » (CSEM, 2014). En d’autres termes, il s’agit de réfléchir à l’utilisation que l’on fait du robot pour faire de lui un média à part entière.
J’ai pensé intéressant d’utiliser Thymio non pas en restant au niveau de ses comportements comme on peut observer la mise en œuvre dans certaines classes vaudoises, mais de pousser plus loin et d’utiliser l’interface visuelle de programmation, ce qui n’a jusqu’alors jamais été travaillé en classe chez des jeunes élèves de 6e Harmos.
L’interface dont il est question permet de coder en texte (d’écrire par le clavier en toutes lettres pour donner un ordre au robot) avec un langage de type LOGO (par exemple : pour programmer le robot afin qu’il fasse le tour d’une surface carrée, on écrirait « répète 4 / AV 100 / TD 90 » ). Toutefois, des jeunes enfants seraient incapables d’entrer dans ce langage 1 puisque cette ‘‘discipline’’ est abordée plutôt en secondaire (comme j’ai pu l’observer dans une classe vaudoise) mais c’est là une pratique bien rare. En revanche on peut facilement accéder à l’interface qui permet de coder par images : les icônes à gauche sont les événements qui peuvent arriver à Thymio, les icônes à droite sont les actions que Thymio fait quand un événement se produit. La manière de programmer n’est pas séquentielle comme c’est le cas des Lego Mindstorm NXT, dont les actions programmées se font l’une après l’autre.
Inversement, Thymio peut procéder par actions simultanées c’est-à-dire  à titre d’exemple qu’il peut en même temps faire de la musique et avancer. C’est une programmation événementielle. Quand on parle d’interface, on touche au domaine de l’ergonomie – l’ergonomie sert à améliorer la relation entre l’Homme et la machine, donc à modifier constamment la machine (ou plus largement l’outil) pour qu’il réponde aux critères d’évaluation (Boucher, 2003).
J’aurais pu utiliser les critères définis par les chercheurs tels que Bastien & Scapin (1993), mais je n’aurais alors évalué que la compréhension par les élèves de l’affordance de l’interface visuelle, c’est-à-dire comment, au premier abord, les élèves la découvrent et la comprennent. Or comprendre l’utilisation d’une interface n’aboutit finalement qu’à un enseignement de type behavioriste, c’est-à-dire ‘‘j’enseigne, tu obéis’’. En revanche, ce qui est intéressant dans l’enseignement c’est la catachrèse, c’est-à-dire ce que mettent en place les élèves pour détourner l’utilisation première d’un objet. C’est là qu’il pourrait y avoir un apprentissage sans doute un peu différent de l’ordinaire; l’enseignant n’est alors plus un simple transmetteur de savoir.

Créativité à l’école

Selon un article de Gopnik (2011), le fait qu’un enseignant lambda fasse son travail de « transmetteur » limite l’apprentissage des enfants; pas tant au niveau des compétences des tests standards (comme les tests PISA) mais vraiment au niveau de la créativité et de la curiosité. En revanche, Gopnik cite l’étude qu’ont fait Schulz et son équipe avec des enfants âgés de 4 ans, les séparant en un groupe test et un groupe contrôle. Dans le groupe test, l’adulte n’a pas agi comme un enseignant mais plutôt comme quelqu’un de surpris, de non connaisseur, découvrant l’objet en question en même temps que les enfants. L’équipe a constaté que les enfants ont ensuite passé beaucoup plus de temps que le groupe contrôle (enseignement traditionnel, démonstratif) à manipuler ce jeu et à découvrir toutes ses facettes cachées. Gopnik en conclut que l’instruction directe n’a pas permis au groupe contrôle d’être curieux et de vouloir découvrir de nouvelles informations. Gopnik décrit une autre étude similaire aboutissant de manière générale aux mêmes résultats. Bien que l’enseignement direct permette aux élèves d’obtenir rapidement les réponses et que probablement le travail soit plus vite accompli, ce style d’enseignement réduit visiblement la marge d’action des élèves qui se contentent d’imiter. Peu de marge donc à la spontanéité et à la créativité.
Ce concept de créativité prend néanmoins de l’importance. Lubart (2003) ajoute que la créativité sera le moyen pour les entreprises de concurrencer/de survivre, puis il cite Romer (1994) qui indique que la croissance économique du 21e siècle ne sera pas basée sur la production de masse rapide ou sur un coût amoindri de produits déjà de qualité, mais bien sur de nouveaux services et produits. De plus, aux Etats Unis, l’ASCD (Association for Supervision and Curriculum Development) propose d’intégrer la créativité et l’innovation parmi les quatre compétences décrites dans le cadre du « 21st Century Skills Movement ». La Créativité est donc la compétence du 21e siècle.
Pour comprendre ce qu’est la créativité, Leuba, Didier, Perrin, Puozzo & Vanini De Carlo (2012) proposent un détour historique. Il faut comprendre que les activités dites créatrices et manuelles (ACM) des années 60 étaient basées sur l’apprentissage de procédures (savoirs-faire), avec au final peu de marge de manœuvre laissée aux élèves pour réellement mettre en pratique leur compétence créative. Tous étaient tenus de suivre une démarche écrite à la lettre, et on est en droit de se demander pourquoi cette discipline portait une telle nomination. Était-on si réticent à promouvoir la créativité parce qu’elle a gardé pendant très longtemps un statut mystique ? En effet, pendant l’ère du Christianisme, create en terme juridique signifiait bien l’acte de création totale, c’est-à-dire créer à partir de rien du tout impliquant une présence et une volonté divine (Barbone, 2011).

Pensée créatrice ou pensée créative: un choix réfléchi

Que trouve-t-on dans le PER à propos de ce concept? Dans les Capacités Transversales, la créativité prend le nom de « Pensée CréatriCE ». On se frotte alors à un problème certain: selon les auteurs Puozzo Capron et Martin (2014), « l’élève peut effectivement créer un produit sans avoir été créatif ». Pour être créatif, il s’agit de « combiner et fusionner différents objets pour créer quelque chose de nouveau » (p.13). L’intérêt réside pourtant dans le fait que l’élève crée quelque chose de nouveau par des processus créatifs plutôt qu’il ne reproduise un modèle sans s’engager cognitivement d’où l’utilisation du terme de la pensée.
Il s’agit de trouver un consensus entre le PER et la théorie issue de la recherche. En effet, le PER énumère trois descripteurs dont un qui retient mon attention: le « développement de la pensée divergente » qui est décrit notamment par le fait que l’élève « [varie] ses sources d’inspiration », « [exprime] ses idées sous de nouvelles formes » et « [expérimente] des associations inhabituelles ». Ces trois descriptions sont une manière de reformuler les sous-dimensions du facteur cognitif que l’on retrouve chez Lubart , mais force est de constater que l’organisation et la hiérarchie n’est pas la même, c’est-à-dire la manière d’articuler les concepts et ses dimensions n’est pas équivalente entre le PER et ce qui figure chez le chercheur.

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Table des matières

1. Introduction
2. Problématique
3. Revue de la littérature
3.1 Robotique et pédagogie: définitions
3.2 Robotique Pédagogique dans le PER
3.3 Situations d’apprentissage possibles
3.4 Créativité à l’école
3.5 Pensée créatrice ou pensée créative: un choix réfléchi
3.6 Discipline de référence
4. Questions de recherche
4.1 Question de recherche
4.2 Sous-questions de recherche
4.3 Opérationnalisation des concepts
5. Méthodologie
5.1 Contexte de la recherche et choix méthodologique
5.2 Population
5.3 Méthodes et outils de recherche
5.4 Récolte et analyse des données
6. Résultats, analyse et interprétation
6.1 Résultats et analyse
6.2 Synthèse des résultats
6.3 Interprétations et discussions
7. Conclusion
7.1 Bilan personnel
8. Bibliographie
8.1 Articles et ouvrages
8.2 Sites internet
8.3 Index des figures
8.4 Index des tableaux
9. Annexes
9.1 Situation d’apprentissage n°1
9.2 Situation d’apprentissage n°2
9.3 Situation d’apprentissage n°3
9.4 DVD: production finale des élèves
Résumé

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