Risque cardiovasculaire au cours de la polyarthrite rhumatoïde

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Formation des plaques d’athérome

Les concepts et théories sur l’histoire naturelle de l’athérosclérose ont beaucoup évolué. Mais aujourd’hui, il est admis que l’athérosclérose est une pathologie inflammatoire chronique liée à l’interaction entre plusieurs éléments :
 Des éléments cellulaires : les cellules inflammatoires (macrophages dérivés des monocytes circulants et lymphocytes T), les cellules endothéliales et les plaquettes
 Des médiateurs (cytokines, facteurs de croissance)
 Des enzymes (métalloprotéases et inhibiteurs des métalloprotéases)
 Des lipoprotéines modifiées : les LDL (low density lipoproteins), les VLDL (very low density lipoproteins) et les IDL (intermediate density lipoproteins) et la Lp(a) (lipoprotéine a) [20].
Les mécanismes responsables de la formation des plaques athéroscléreuses peuvent être découpés grossièrement en deux grandes phases : l’initiation, la progression.

L’initiation

Elle dépend essentiellement de deux événements : la présence de lipoprotéines ayant subi un phénomène d’oxydation et la dysfonction endothéliale.
La première étape est la pénétration des lipoprotéines athérogènes de faible densité dans l’espace sous-endothélial, sans aucune lésion de l’endothélium. Cette diffusion des lipoprotéines a lieu par l’intermédiaire de plusieurs facteurs parfois combinés :
 Facteurs hémodynamiques : au niveau des zones soumises à un flux sanguin perturbé (pression, forces de cisaillement, turbulences, stagnation de l’écoulement sanguin). Ceci explique la topographie hétérogène des plaques qui apparaissent de façon privilégiée dans certains sites : courbures, bifurcations, origines des branches [17].
 Une dysfonction endothéliale : augmentation de la perméabilité par destruction endothéliale [20].
 Une concentration élevée de lipoprotéines sériques [20].
Les lipoprotéines de faible densité sont ensuite piégées dans l’intima par les protéoglycanes de la matrice extracellulaire. Elles subissent alors une oxydation dans la paroi artérielle. Les lipoprotéines de haute densité (HDL) présents également dans l’intima, ont un rôle anti-oxydant en captant les lipides oxydés à partir des LDL. Mais leur effet protecteur est insuffisant pour contrebalancer les modifications des LDL et leurs conséquences [17].
Une LDL ainsi modifiée se lie aux récepteurs éboueurs ou « scavenger » exprimés à la surface des macrophages, des CML et des cellules endothéliales. Cette oxydation des LDL a deux grandes conséquences : l’initiation d’une réaction inflammatoire qui va s’amplifier et la formation de cellules spumeuses [17, 18, 20].
En effet, l’endothélium d’une artère saine est doué de propriétés anti-inflammatoires, anti-oxydantes et anti-thrombotiques. La présence de LDL oxydées dans l’espace sous-endothélial altère ces fonctions par une stimulation des cellules endothéliales qui expriment alors à leur surface, des protéines d’adhésion (sélectines E et P, immunoglobulines VCAM1, ICAM1). Ce phénomène a pour conséquences l’attraction, l’adhérence puis la pénétration des cellules inflammatoires comme les monocytes et les lymphocytes T dans la paroi artérielle. Ces cellules entretiennent un processus inflammatoire chronique par production de nombreuses cytokines pro-inflammatoires (le TNFα (tumor necrosis factor α), l’IFNγ (interféron γ), les IL (interleukines) 1, 6, 8, 12 ou encore l’IL-18), entretenant la dysfonction endothéliale et induisant la sécrétion de métalloprotéases délétères [18, 19, 20].

La progression des lésions athéroscléreuses

Elle marque le développement de l’épaississement intimal. Plusieurs étapes sont distinguées :
 La formation du centre nécrotique avec :
o le recrutement des cellules inflammatoires (monocytes)
o le développement de la réaction inflammatoire et immunologique réactionnelle intrapariétale (sécrétion de facteurs de croissance et de différenciation des monocytes en macrophages)
o la formation des cellules spumeuses (macrophages remplis de LDL dont la mobilité est réduite empêchant leur retour dans la circulation sanguine)
o la formation des dépôts lipidiques extracellulaires o la progression du centre nécrotique
 La formation de la chape fibreuse réactionnelle avec le recrutement intimal des cellules musculaires lisses dédifférenciées et redifférenciées
 La formation de la chape fibreuse réactionnelle avec la synthèse matricielle [19].
Le tableau I montre la classification histopathologique proposée par Stary en 1995, résumant les différents stades évolutifs de l’athérosclérose, les principaux mécanismes de croissance, la date de début des lésions et la corrélation clinique.

Evolution de la lésion d’athérosclérose

L’évolution d’une plaque est progressive sur de nombreuses années. Elle peut se compliquer d’un accident aigu avec ou sans traduction clinique. La persistance d’un facteur initial et l’entretien d’une réaction auto-inflammatoire locale participent au développement des lésions. La correction des facteurs de risque pourrait donc faciliter le contrôle ou mieux, entraîner la régression des lésions.

Evolution chronique

 Progression : qui, comme sus-décrit, est un phénomène lent dû à l’augmentation de la composante lipidique et la matrice extracellulaire. Les plaques très évoluées peuvent aussi résulter de l’incorporation de matériel thrombotique secondaire aux complications aiguës.
 Remodelage : il s’agit d’une augmentation compensatrice du diamètre du vaisseau en réponse à l’augmentation de l’épaisseur pariétale, ce qui limite le retentissement sur le calibre dans un premier temps. Plus tard, la progression de la lésion finit par constituer une sténose avec retentissement hémodynamique.
 Régression : constatée au niveau des lésions précoces.

Complications aigues

 La rupture de la chape fibreuse qui permet l’activation plaquettaire avec formation d’un thrombus. Celui-ci peut s’intégrer dans la lésion ou se détacher en emboles.
 Les hémorragies intra-plaques qui occasionnent une augmentation brutale du volume des lésions, un clivage de la paroi voire une rupture.
 Les ruptures artérielles qui s’effectuent au niveau des zones d’amincissement de la paroi.
La « vulnérabilité » de la plaque correspond au risque de transformation d’une plaque stable en plaque instable (et donc compliquée). Cette transformation est sous la dépendance de nombreux facteurs que sont :
 Composition de la plaque en lipides et tissu fibreux : les plaques riches en lipides et pauvres en tissu fibreux sont plus susceptibles de rupture
 Solidité de la chape fibreuse : une chape fibreuse fine est à risque de rupture ; la présence de macrophages, la dégradation de la matrice extra cellulaire (rôle des métallo-protéases) sont des éléments favorisant la rupture. Inversement la présence de cellules musculaires lisses, la production de matrice (sous la dépendance de facteur TNF-α) sont des éléments stabilisateurs.
 L’inflammation : rôle majeur dans la transformation en plaque instable: stimulation de l’activité des métallo-protéases, des macrophages et de la thrombose. La Protéine C-Réactive (CRP) est un marqueur de l’inflammation utilisable pour évaluer l’inflammation vasculaire (CRP Ultra-sensible).
 Autres facteurs : apoptose des cellules de la plaque, hémorragie intra plaque, infections (CMV, Chlamydia pneumoniae)

Marqueurs prédictifs précoces de l’athérosclérose

Détecter une athérosclérose précoce est l’un des soucis majeurs de la médecine actuelle, en particulier pour mettre en place des mesures de prévention secondaire, médicamenteuses ou non. Les méthodes de détection sont nécessairement non invasives (on exclura donc les études angiographiques, directes ou corollaires à l’angioplastie) ; on peut les classer en méthodes de détection préclinique et en biomarqueurs prédictifs précoces.

Méthodes de détection préclinique

Elles permettent de suivre la progression ou la régression de la maladie artérielle et regroupent :
 L’étude de l’épaississement des parois artérielles : mesure de l’épaisseur intima-media et des plaques carotidiennes par échodoppler vasculaire. La mesure de l’EIM est effectuée au niveau du mur distal de la carotide commune, deux centimètres en amont de la bifurcation, sur une longueur de 10 à 20 mm. Son évaluation nécessite une sonde linéaire haute définition large bande de haute fréquence et requiert un logiciel informatique de mesures automatiques prenant en compte plusieurs points (150 à 200 points) qui sont ensuite moyennés. Le logiciel donne un index de qualité qui doit être supérieur à 50% pour considérer la mesure comme exploitable [63]. La figure 2 illustre une mesure de l’EIM.
D’après huit études prospectives ayant inclus chacune plus de 1000 sujets, il est admis que l’EIM était significativement associé au risque de survenue d’IDM, d’AVC, de mortalité coronaire. La mesure de l’EIM et la détection des plaques carotidiennes est aujourd’hui l’examen le plus pertinent pour affiner l’évaluation du RCV chez les sujets classés à faible risque ou à risque intermédiaire.
Il est important de comparer le résultat des valeurs individuelles de l’EIM d’un sujet donné à une base de données normatives publiée en fonction de l’âge, du genre, de l’ethnie. Ces bases varient aussi en fonction des pays. En France, les valeurs normales ont été définies à partir des études AXA et PARC.
 L’étude de la rigidité artérielle : de façon directe par la vitesse d’onde de pouls aortique par enregistrement mécanographique des pouls carotidien et fémoral (VOPcf); ou de façon indirecte par des méthodes d’echotracking qui mesurent la distension systolo-diastolique des artères ; on peut en tirer un index de rigidité, ce qui nécessite des mesures de pression artérielle locale ;
 L’étude des calcifications : au niveau des coronaires, elles ne sont expliquées que par l’athérosclérose. C’est la détermination du score calcique évaluant le nombre de calcifications coronariennes par scanner ultrarapide (coroscanner couplé ou non à une tomographie par émission de positrons).
 L’étude de la vasomotricité endothéliale : la dilatation médiée par le flux de l’artère humérale (DMF), rend compte d’une dysfonction endothéliale non spécifique de l’athérosclérose.
 L’étude du retentissement hémodynamique infraclinique des lésions : index de pression systolique cheville/bras par mesure Doppler de la pression tibiale et humérale [23,24,25].
Tous ces marqueurs précliniques d’athérosclérose sont associés à la plupart des FR traditionnels et même souvent plus nouveaux, ce qui leur donne une grande valeur pronostique. Ainsi, dans une étude récente [23], la présence d’une ou plusieurs plaques carotides était associée à une multiplication par 4 du risque de l’incidence d’infarctus du myocarde (IDM), dans les 3 ans, dans une population d’hommes d’âge moyen (40-60 ans). L’épaississement de l’intima-média s’associe au risque d’IDM et d’accident vasculaire cérébral (AVC) selon le degré d’épaississement (d’un facteur 1,5 à 5 selon les études). Lorsque le score calcique est supérieur à 100 le risque de complication coronaire (syndrome coronarien aigu ou SCA) est multiplié par plus de 20. Ces marqueurs quantitatifs d’athérosclérose préclinique permettent de suivre la progression, ou la régression, de la maladie artérielle [23].

Biomarqueurs prédictifs précoces

Ces biomarqueurs potentiels proviennent de découvertes physiopathologiques récentes, mais peu encore sont entrés dans une phase d’utilisation médicale régulière. Certains ont déjà montré leur intérêt clinique :
 le dosage du cholestérol total et de sa répartition différentielle dans les lipoprotéines
 le rapport apoB/apoA-1
 l’étude complète du lipoprotéinogramme,
 la mise en évidence de la Lp(a) et de l’athérogénicité particulière des « LDL petites et denses»
 le dosage de la CRP ultrasensible
D’autres types de biomarqueurs sont en cours d’évaluation. Ils sont liés aux différentes hypothèses de la physiopathologie de l’athérosclérose (lipidique, oxydative, inflammatoire, infectieuse, endothéliale etc…) [23].

Définition

La PR est une maladie auto-immune systémique à prédominance synoviale évoluant par poussées et rémissions [26]. Elle est caractérisée par un risque de survenue, en l’absence de prise en charge précoce et adaptée, de dégâts ostéocartilagineux sources de handicap fonctionnel majeur.

Epidémiologie

La PR est le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires chroniques dans le monde et dans tous les groupes ethniques. Sa prévalence varie cependant d’une région à l’autre allant de 0.3 à 1,2% [2, 27]. Aux Etats Unis, sa prévalence est de 1% de la population adulte avec une incidence annuelle de 1 cas pour 10000 habitants [28]. En France, cette prévalence serait de 0,31% [29]. Des exceptions existent : c’est le cas des indiens Pima (5,3%) et Chippewa (6,8%) où le fort taux de consanguinité expliquerait cette forte fréquence [30].
En Afrique subsaharienne, la PR a été longtemps considérée comme rare. Les premiers cas semblent avoir été rapportés en 1956 [3]. Plus tard de nombreux travaux révèlent la présence de cette maladie partout dans le continent avec cependant une prévalence nettement plus élevée en milieu urbain qu’en milieu rural [3]. Ceci pourrait être expliqué par des facteurs environnementaux et génétiques. Au Sénégal, la PR s’est aussi révélée être le plus fréquent des rhumatismes inflammatoires chroniques en milieu hospitalier [31] avec une prédominance féminine, comme partout ailleurs.

Etiopathogénie

La cause exacte de la PR est à l’heure actuelle inconnue. Cependant, les travaux concernant son étiopathogénie ont beaucoup évolué ces dernières années.
Il est démontré aujourd’hui, que la PR est caractérisée par l’existence de facteurs génétiques ou environnementaux qui activent une réponse inflammatoire incontrôlable aboutissant à des lésions au niveau articulaire et extra-articulaire.

Facteurs génétiques et environnementaux

Les facteurs environnementaux peuvent être infectieux, bactériens (Porphyromonas gingivalis, Mycobactérium tuberculosis, Mycoplasma, Protéus mirabilis, Clostridium) ou viraux (EBV, HSV 1 et 2, CMV, HHV6) ; mais aussi toxiques (le tabac, la poussière de silice, le charbon de bois, des médicaments) ou hormonaux (la prolactine) [32,33].
La PR est aussi liée à l’existence de gènes particuliers : gènes de la classe II du complexe majeur d’histocompatibilité (HLA DR, HLA DP et HLA DQ), gène PTPN 22 en 1q13, gène PAD14 en 1p36) codant pour les enzymes responsables de la citrullinisation des résidus arginine, gène TCLA4 en 2q33 retrouvé dans d’autres maladies auto-immunes [32].

Initiation du conflit dysimmunitaire

En réponse à ce stimulus quelconque (d’origine endogène ou exogène), il y a une activation des cellules de l’immunité innée (monocytes/macrophages) qui produisent des cytokines pro-inflammatoires comme l’interleukine 1 (IL-1), le Tumor Necrosis Factor (TNF) α et l’IL-6.

Emballement de la réponse inflammatoire

L’immunité innée provoque une réaction inflammatoire aigue. Le passage à la phase chronique nécessite l’intervention de l’immunité acquise ou adaptative. Dans cette réponse spécifique, il convient de distinguer :
 Les acteurs cellulaires
 Les cellules présentatrices d’antigènes (les macrophages, les lymphocytes B et surtout les cellules dendritiques) qui, par des facteurs anti-apoptotiques, présentent les antigènes de façon anormalement prolongée aux lymphocytes T.
 Les lymphocytes B qui, en plus de présenter des antigènes au lymphocyte T, produisent des cytokines et des anticorps tels que les facteurs rhumatoïdes et les anticorps anti-peptides cycliques citrullinés (anti-CCP).
 Les lymphocytes T qui vont sécréter des cytokines, activer les lymphocytes B, stimuler les synoviocytes et les fibroblastes.
 Les autres cellules : les synoviocytes qui vont produire en grand nombre des médiateurs de l’inflammation et de la destruction ostéocartilagineuse ; les chondrocytes qui vont entraîner la chondrolyse et les ostéoclastes qui sont responsables de l’érosion osseuse [33,34,35].
 Les acteurs intercellulaires
 Les voies de signalisation qui permettent la transmission du signal intracellulaire induit par la liaison du ligand à son récepteur. Leur inhibition empêcherait à la fois l’activation cellulaire par un stimulus comme une cytokine mais aussi la production de nouvelles cytokines pro-inflammatoires.  Les cytokines : il existe un déséquilibre entre les cytokines anti-inflammatoires et les cytokines pro-inflammatoires (TNFβ, IL-1 et IL-6) dans l’articulation rhumatoïde. Ces dernières sont en excès et amplifient la réponse inflammatoire en favorisant la production d’autres cytokines, l’angiogenèse et la prolifération cellulaire. Leur neutralisation permet d’une part, d’inhiber la réaction inflammatoire, et d’autre part de contrôler la destruction ostéo-articulaire, constituant ainsi des cibles thérapeutiques importantes.

Destruction et réparation articulaire

Le tissu synovial inflammatoire et prolifératif, ou “pannus synovial”, à l’image d’une tumeur, tend à envahir le cartilage articulaire et serait le siège de la production d’enzymes, responsables de la destruction du cartilage et de l’os. La réparation est contemporaine de la destruction. Elle fait participer des facteurs de croissance et le TGFβ et provoque la fibrose articulaire.

Signes

Il est important de distinguer deux phases évolutives de cette maladie de pronostics différents : la phase de début et la phase d’état.

Type de description :

Forme polyarticulaire non compliquée de la femme adulte en dehors de la grossesse

Phase de début

A ce stade, le diagnostic peut être difficile mais très opportun car les traitements ont le plus de chance d’être efficaces : c’est la « fenêtre d’opportunité thérapeutique ». Elle est d’autant plus importante qu’à ce stade de la maladie, il n’existe aucun dégât ostéocartilagineux ni aucune atteinte systémique.
 Clinique
Elle se caractérise par une polyarthralgie chronique d’allure inflammatoire, périphérique, bilatérale, symétrique, prédominant au niveau des petites articulations des mains et respectant les inter phalangiennes distales. Ces douleurs sont fixes et additives.
Il faut savoir confirmer le diagnostic d’une synovite qui est un gonflement articulaire lié à un épaississement synovial ou à un épanchement articulaire donnant un aspect en fuseau caractéristique. Il n’existe ni déformations ni atteinte extra articulaire en dehors des discrets signes généraux comme la fièvre.
Devant ce tableau, le diagnostic de PR doit être évoqué et étayé par les examens complémentaires.
 Paraclinique
Au plan biologique, il existe un syndrome inflammatoire biologique non spécifique.
 Le facteur rhumatoïde
Le facteur rhumatoïde (FR) est un anticorps anti-gammaglobulinique qui appartient le plus souvent à la classe des IgM.
Il était jadis détecté par les tests classiques au latex et Waller Rose. Cependant les techniques de néphélométrie laser ou ELISA sont aujourd’hui plus répandues et plus sensibles [35].
Dans la PR débutante, la recherche du FR est souvent négative. Elle se positiverait ultérieurement et sa présence à des taux élevés (supérieurs à trois fois la valeur seuil) a une grande valeur diagnostique pour la PR. Sa spécificité est de 75 à 85 % et sa sensibilité de 70 à 80 %. Sa présence n’est ni suffisante, ni indispensable pour affirmer le diagnostic de PR.
Le FR est impliqué dans certaines complications extra-articulaires, en particulier dans la vascularite où il se dépose dans la paroi des vaisseaux et forme des complexes immuns de taille intermédiaire activant le complément et induisant l’inflammation vasculaire [35].
 Les anticorps anti peptides cycliques citrullinés (anti-CCP)
Ces anticorps anti-CCP (ou selon la dénomination internationale, ACPA) sont par contre très précoces et très spécifiques au cours de la PR (de l’ordre de 95%) tout en gardant une sensibilité autour de 60 à 70%. Les anticorps antiCCP ont également une valeur pronostique, leur présence est prédictive d’une maladie persistante et érosive [35,36].
 L’imagerie
A ce stade, l’imagerie a pour objectif de rechercher une érosion précoce.
La radiographie standard est souvent normale tout au plus, elle retrouve un épaississement des parties molles en rapport avec l’œdème inflammatoire et une déminéralisation épiphysaire en bande. Une atteinte érosive précoce est recherchée au niveau de la tête du 5ème métatarsien.
Les autres techniques d’imagerie comme l’échographie doppler articulaire et l’imagerie par résonnance magnétique (IRM) dédiée permettent une détection plus précoce des lésions ostéo-articulaires (pincement, érosions, synovites, ténosynovites [35,37].

Phase d’état

Cette phase s’installe après plusieurs mois d’évolution avec des périodes de rémissions incomplètes et de poussées avec atteinte de nouvelles articulations. A ce stade, le diagnostic est évident du fait des déformations typiques observées [35] :
– Gonflement dorsal du carpe en dos de chameau ;
– Espaces interosseux creusés par l’atrophie musculaire ;
– déformation en coup de vent cubital ;
– autres déformations des doigts : en col de cygne, en maillet, en boutonnière, pouce en Z ;
– déformations des grosses articulations en flessum ou en valgus.

Les facteurs de risque cardiovasculaire traditionnels

Le facteur de risque cardio-vasculaire est défini comme un état physiologique, pathologique ou une habitude de vie associé(e) à une incidence accrue de l’apparition de la maladie cardio-vasculaire. Un marqueur de risque n’a pas de responsabilité causale démontrée dans la survenue des complications. Cependant, son taux augmente à mesure qu’évolue la maladie. C’est donc un témoin du risque.
Il convient de distinguer les facteurs de risque :
 non modifiables que sont l’âge, le genre, les antécédents familiaux d’accident cardio-vasculaire précoce et
 modifiables que sont l’hypertension artérielle, les dyslipidémies, le diabète, le tabagisme, la maladie rénale chronique, l’obésité, le syndrome métabolique, la sédentarité, le stress, les facteurs alimentaires (l’excès de consommation d’alcool, d’hydrates de carbone, de sel, le régime hypercalorique, la consommation insuffisante de fruits et légumes).
Les marqueurs du risque cardio-vasculaire sont constitués par [23]:
 l’élévation de la CRP ultrasensible
 l’hyperhomocystéinémie
 les facteurs pro-thrombotiques (fibrinogène, inhibiteur de l’activateur du plasminogène)
 l’épaisseur de l’intima-media carotidienne
 l’indice de pression systolique
 l’hyperlipoprotéinémie A
 l’hypertrophie ventriculaire gauche

Evaluation et limites du risque cardiovasculaire global

Les recommandations internationales préconisent d’estimer le risque cardio‐vasculaire global en utilisant un modèle de risque, plutôt que la seule sommation des facteurs de risque. Peuvent être cités l’équation de Framingham, le modèle de l’ESH et le modèle SCORE [38].
L’équation de Framingham détermine le risque coronarien (évènements mortels ou non) à 10 ans. Le modèle SCORE détermine le risque à 10 ans de mortalité cardio-vasculaire. Pour obtenir le risque d’événements cardio-vasculaires à 10 ans (équivalent de Framingham), il faut multiplier le SCORE x 3 pour les hommes et x 4 pour les femmes.
Cependant, ces modèles nécessitent un ajustement car la prévalence des maladies cardio‐vasculaires est variable selon les pays. Le recours à des équations de risque établies dans d’autres pays est donc à l’origine d’une sous-évaluation ou d’une surévaluation du risque cardio-vasculaire. Il n’existe pas de consensus concernant le choix de la méthode d’estimation de ce risque, encore moins de modèle validé pour les populations africaines.
Certains paramètres, parmi lesquels figurent l’indice de masse corporelle, le fibrinogène, la lipoprotéine (a), l’homocystéine et l’épaisseur intima media ne sont pas pris en compte dans les modèles de prédiction. Leur influence sur la morbi‐mortalité cardio‐vasculaire est pourtant reconnue.
De plus, les patients avec des niveaux très élevés d’un seul facteur de risque, comme les formes génétiques des dyslipidémies, ou les patients avec des maladies inflammatoires chroniques peuvent être mal classés en se basant seulement sur les scores classiques [39,40,41]. Ceux-ci ne tiennent pas compte non plus des antécédents familiaux de maladie cardiovasculaire précoce, ni du temps d’exposition au tabagisme ou au diabète qui est pourtant en relation continue avec le risque CV [42].
La détection précoce de l’athérosclérose, en plus de la recherche des FDRCV classiques, affine et optimise la stratification du risque cardio-vasculaire global. Ceci permet de mieux cibler la prévention et d’évaluer de façon plus précise l’action des traitements.

Risque cardiovasculaire au cours de la polyarthrite rhumatoïde

Le risque cardio-vasculaire au cours de la PR et des connectivites en général est un sujet d’actualité. En effet, au cours de ces dernières années, de nombreux travaux ont permis de démontrer que les accidents cardio-vasculaires (en particulier la maladie coronaire) constituent la première cause de décès au cours de la PR [55,56,57]. De nouveaux mécanismes physiopathologiques ont aussi été découverts, débouchant sur des thérapeutiques innovantes. Cependant, il demeure quelques énigmes qui ne sont pas totalement résolues [42]:
– Les mécanismes exacts de l’athérosclérose accélérée au cours de la PR
– Le profil précis des patients au risque le plus élevé.
– Les méthodes pour évaluer ce risque, autres que les modèles conventionnels qui peuvent le sous-estimer dans cette population.
– Les interventions thérapeutiques spécifiques potentielles pouvant réduire ce risque.

Bases épidémiologiques

 Mortalité cardio-vasculaire
La péricardite, la myocardite et les troubles de la conduction spécifiques de la PR ont longtemps été considérées comme la principale cause de décès cardio-vasculaires. Mais elles ont progressivement laissé leur place aux atteintes athéro-thrombotiques ischémiques [42].
Dans une cohorte suédoise ayant suivi 606 patients atteints de PR pendant 15 ans, la positivité du facteur rhumatoïde était associée à une surmortalité cardio-vasculaire de 50% par rapport à la population générale [42]. Dans le registre britannique, le risque relatif de mortalité par IDM chez les sujets PR était situé entre 1,4 et 3,5 [42] ; ce risque a persisté après ajustement des FDR classiques [42].
Les causes sont dominées par la maladie coronaire suivie par les accidents vasculaires cérébraux ischémiques et l’insuffisance cardiaque. Une forte association a été retrouvée entre la présence de signes extra-articulaires et le RCV accru.
 Athérosclérose infraclinique
Il a été noté une fréquence de l’athérosclérose chez les patients PR aussi élevée que chez les patients diabétiques du même âge [6,7,44,45]. Ceci démontre que la PR est un FDR au moins aussi puissant que le diabète. .

Bases étiopathogéniques et physiopathologiques

 Facteurs physiopathologiques spécifiques
 Anomalies de l’immunité innée et adaptative
La dysfonction endothéliale, élément clé et précoce du processus d’athérosclérose, est en grande partie liée à l’augmentation des médiateurs inflammatoires sécrétées par les cellules de l’immunité innée et adaptative. Or ces mêmes médiateurs (TNF, IL1, CD40) accompagnent l’inflammation chronique systémique au cours de la PR [42]. Ils jouent également d’autres rôles dans l’athérogenèse : sécrétion endothéliale du Monocyte Chemotactic Protein 1 (MCP1) et de l’IL6, captation du LDL par les macrophages, production de facteurs de croissance et de différenciation des monocytes en macrophages et en cellules spumeuses.
 Profil lipidique athérogène
La PR elle-même entraine des modifications du métabolisme lipidique responsables d’anomalies qualitatives et quantitatives des HDL et des LDL. L’étude de Rizzo et al [44] ont montré une relation inverse entre la taille des LDL et le niveau d’inflammation systémique mesuré par la CRP chez des patients atteints d’une PR récente et non traitée. Concernant le HDL, des études récentes ont mis en évidence que les situations d’inflammation chronique entrainaient leur dysfonction par modification de leur structure chimique avec diminution de leur effet anti-athérogène ; ceci conduit à une altération du transport inverse du cholestérol et une réduction de l’efflux de cholestérol [45,46]. Cette dysfonction des HDL était corrélée au degré d’activité de la PR.
 Prévalence accrue des FDR classiques
Une prévalence plus élevée du tabagisme, de l’hypertension artérielle et d’un profil lipidique pro-athérogène a été rapportée [42,45,49]. Le score de Framingham a été corrélé de façon significative à la présence de calcifications coronaires dans la PR [42]. Notons également un handicap fonctionnel et une sédentarité parfois extrêmes dans cette maladie, augmentant le risque coronarien et créant ainsi un cercle vicieux d’inactivité physique [42].

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Table des matières

PREMIERE PARTIE : REVUE BIBLIOGRAPHIQUE
CHAPITRE I : ATHEROSCLEROSE
1. Définition
2. Histophysiologie de la paroi vasculaire
1.1. L’intima
1.2. La média
1.3. L’adventice
1.4. Particularités selon le calibre
3. Formation des plaques d’athérome
3.1. L’initiation
3.2. La progression des lésions athéroscléreuses
4. Evolution de la lésion d’athérosclérose
4.1. Evolution chronique
4.2. Complications aigues
5. Marqueurs prédictifs précoces de l’athérosclérose
5.1. Méthodes de détection préclinique
5.2. Biomarqueurs prédictifs précoces
CHAPITRE II : POLYARTHRITE RHUMATOIDE
1. Définition
2. Epidémiologie
3. Etiopathogénie
3.1. Facteurs génétiques et environnementaux
3.2. Initiation du conflit dysimmunitaire
3.3. Emballement de la réponse inflammatoire
3.4. Destruction et réparation articulaire
4. Signes
4.1. Type de description : Forme polyarticulaire non compliquée de la femme adulte en dehors de la grossesse
4.1.1. Phase de début
4.1.2. Phase d’état
4.1.3. Evolution
4.2. Formes cliniques
4.2.1. Formes symptomatiques
4.2.2. Formes selon le terrain
4.2.3. Formes extra-articulaires
4.2.4. Formes associées
4.2.5. Formes compliquées
5. Diagnostic
5.1. Diagnostic positif
5.2. Diagnostic différentiel
6. Traitement
6.1. But
6.2. Moyens
6.2.1. Traitement médicamenteux
6.2.2. Traitement non médicamenteux
CHAPITRE III : RISQUE CARDIOVASCULAIRE
1. Définition et intérêt
2. Les facteurs de risque cardiovasculaire traditionnels
3. Evaluation et limites du risque cardiovasculaire global
4. Risque cardiovasculaire au cours de la polyarthrite rhumatoïde
4.1. Bases épidémiologiques
6.2.1. Bases étiopathogéniques et physiopathologiques
6.2.2. Prise en charge du RCV au cours de la PR
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
CHAPITRE I : METHODOLOGIE
1. Cadre d’étude
2. Matériel et méthode d’étude
2.1. Type d’étude
2.2. Population d’étude
2.3. Echantillonnage
2.4. Modalités pratiques
2.5. Paramètres étudiés
2.6. Définitions opérationnelles et normes retenues
2.7. Moyens d’étude
2.8. Analyse statistique
CHAPITRE II : RESULTATS
1. Description de la population
1.1. Données socio-démographiques
1.1. Répartition selon l’âge
1.2. Répartition selon le genre
1.3. Répartition selon le niveau de scolarisation
1.2. Prévalence des FDRCV classiques
1.3. Niveau de risque cardio-vasculaire global
2. Caractéristiques de la polyarthrite rhumatoïde
2.1. Ancienneté et délai diagnostique
2.2. Sévérité et activité
2.3. Manifestations extra-articulaires
2.4. Signes biologiques
2.5. Traitement
2.6. Athérosclérose infra-clinique
CHAPITRE III : DISCUSSION ET COMMENTAIRES
1. Données sociodémographiques
2. Athérosclérose infraclinique
3. Prévalence des FDRCV classiques
4. Niveau de risque cardio-vasculaire global
5. Caractéristiques de la polyarthrite rhumatoïde
5.1. Ancienneté et délai diagnostique
5.2. Sévérité et activité
5.3. Manifestations extra-articulaires
5.4. Traitement
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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