Rhéologie des polymères à hauts taux de cisaillement

Pièces réalisées en microinjection

Sous le vocable microinjection, nous distinguons en général deux types de produits, d’une part des pièces de taille standard, mais avec des micro-détails et des micro-pièces de dimension maximale inférieure au millimètre, avec un poids en dessous du milligramme et/ou avec une épaisseur pouvant descendre jusqu’à quelques dizaines de micromètres. La recherche dans ce domaine est orientée vers des applications commerciales dans un large éventail de secteurs comprenant les systèmes micro-électro-mécaniques (MEMS) où la demande est croissante pour la miniaturisation de produits. Parmi les industriels spécialisés dans la sous-traitance de la conception et la fabrication de pièces microtechniques, citons CG-TEC, ISA France et Microsystems. Ils répondent aux besoins des marchés les plus actifs en microinjection qui sont les suivants :
L’automobile, avec les micro-interrupteurs, les connecteurs et les capteurs d’airbag. L’informatique, avec les connecteurs et les têtes d’encre d’imprimante. La télécommunication avec les connecteurs de fibre optique.
L’électronique et l’optoélectronique avec les micro-interrupteurs et les microcircuits optiques, les connecteurs de précision, les micromoteurs.
Le médical avec les implants, les dispositifs d’aide à l’audition, l’appareillage dentaire, les dispositifs d’analyse et pour blocs opératoires. L’horlogerie avec les microengrenages, les rotors, les verrous.
Ceci mène à des développements passionnants dans les matériaux et la technologie de transformation.

Matériaux pour la microinjection

La majorité des produits microinjectés ont des propriétés mécaniques ou optiques de pointe (Coates et al., 2007). Par conséquent, les résines typiques adoptées sont des thermoplastiques techniques, tels que les cristaux liquides polymères (LCP), les polyoxyméthylènes (POM), les polymères cyclo oléfines (COP) et les polyétheréthercétones (PEEK). Le retrait de ces polymères est très faible ce qui assure le respect de la forme des petits détails et la stabilité dimensionnelle des produits microinjectés.
Les matières chargées conventionnelles avec des fibres de verre sont difficiles à utiliser en microinjection. C’est pour cela que des nanocomposites, avec nanotubes de carbone de 10 nm de diamètre, sont utilisés. Ils apportent une haute résistance mécanique et au choc au produit final. Pour les implants chirurgicaux bio-absorbables qui seront détruits dans le corps après une période déterminée, les matériaux utilisés sont les acides polyglycoliques (PGA) et les acides polylactiques (PLA). Ces matériaux sont très sensibles à la dégradation thermique, c’est pourquoi une injection rapide et avec des petits volumes à transférer est favorable à leur mise en œuvre.

Simulation de la microinjection des polymères

Des confrontations ont été réalisées entre des essais de microinjection et des simulations numériques. Yu et al. (2002) injectent par le centre un disque de diamètre 11,94 cm et d’épaisseur 1,12 mm contenant trois inserts circulaires de diamètre 5.08 cm.
L’insert du bas comprend trois microcavités, sous forme d’éprouvettes, de profondeur/largeur respectives 340/170, 220/120 et 92/57 µm. Ils utilisent un logiciel de simulation 2,5D suivant le modèle Hele-Shaw (C-Mold) et trouvent des divergences avec la réalité en terme de forme des fronts de matière pour différentes vitesses d’injection. Ils expliquent ceci par le fait que la variation des épaisseurs dans les microformes n’est pas prise en compte dans le modèle Hele-Shaw.  Chu et al. (2007). utilisent une presse de microinjection (Battenfeld Microsystem 50) et un logiciel de simulation (Moldflow 6.0) en deux versions de solveur (3D et 2,5D). Des mesures expérimentales du retrait de la pièce dans une direction donnée ont été réalisées et comparées à des calculs numériques du retrait. La courbe expérimentale est définie par le retrait moyen (en mm) en fonction des positions données sur la pièce. La courbe des résultats de simulation est définie par le retrait volumique (en %) en fonction de la longueur de la pièce (en mm). La même évolution du retrait que dans l’expérience est retrouvée dans le calcul mais, d’un point de vue quantitatif, le calcul surestime la valeur du retrait.Lin et Yang (2009) utilisent une presse de microinjection (TR05EH, Sodick) avec une unité de plastification et une unité d’injection séparées. La géométrie étudiée, de dimension 10x10x1,3 mm3, comprend des micro-détails de dimension 4x4x6 µm3 . Le matériau utilisé est le PMMA. Les auteurs regardent la capacité à remplir l’empreinte en faisant varier les paramètres de mise en œuvre, à savoir la température du polymère, la température du moule et
la pression de compactage. Ils comparent alors les résultats expérimentaux avec une simulation par éléments finis (Moldflow 3D).
Ils montrent que, plus la température est élevée pour le polymère comme pour le moule, plus importante est la capacité de remplissage. Les résultats de simulation ne coïncident pas toujours avec les points expérimentaux. En particulier, elle ne prédit pas correctement le remplissage des microstructures.

Techniques de mesures rhéologiques

Rhéométrie capillaire à hauts taux de cisaillement

Takahashi et al. (1985) utilisent un rhéomètre capillaire avec une unité d’injection hydraulique spécialement conçue pour l’application de hauts taux de cisaillement à des polymères fondus. Les capillaires utilisés ont des diamètres compris entre 0,4 et 1 mm et les taux de cisaillement atteints vont jusqu’à 108 s-1. Pour les bas taux de cisaillement, inférieurs à 104 s-1 un rhéomètre conventionnel a été utilisé. L’analyse est isotherme, incompressible et la viscosité du polymère est non-piezodépendante.
Les résultats sont présentés en termes de viscosité apparente en fonction du taux de cisaillement apparent.
Sept polymères ont été étudiés, à savoir un polyéthylène haute densité classique (PEHD), un polyéthylène haute densité de haute masse moléculaire (UHMWPE), un polypropylène (PP), un polystyrène (PS), un polystyrène acrylonitrile (SAN), un polycarbonate (PC) et un polyamide (PA-66).
Les résultats obtenus pour un PEHD montrent une région pseudoplastique pour les taux de cisaillement en dessous de 3.106 s-1 , suivie d’un palier Newtonien, suivi d’une nouvelle décroissance. La viscosité dans la 1ère région non newtonienne , dépend de la densité des enchevêtrements. Dans la 2ème région newtonienne, la viscosité est constante du fait que tous les enchevêtrements disparaissent et que la viscosité ne dépend plus que du frottement des molécules orientées. Dans la 2ème région non newtonienne, la viscosité décroît en raison de la scission des chaînes, c’est-à-dire, de la dégradation du polymère. L’UHMWPE a le même comportement que le PEHD avec la présence d’un second plateau et d’une seconde région non newtonienne. La courbe d’écoulement du PP présente un second plateau newtonien mais pas de 2ème région non newtonienne.

Rhéologie des écoulements dans des micro-canaux

Sha et al. (2007) ainsi que d’autres auteurs suggèrent que le comportement rhéologique des polymères fondus injectés dans un moule comportant des micro-détails, ou dans une cavité très fine, est spécifique. Mriziq et al.(2007) ont déterminé la viscosité, la contrainte de cisaillement et la biréfringence à hauts taux de cisaillement d’un film lubrifiant en perfluoropolyéther (PFPE) à l’aide d’un rhéomètre optique rotationnel « transparent ». Des mesures ont été réalisées à différentes vitesses de rotation des disques du rhéomètre et l’épaisseur du film a été relevée pour chaque essai. La dépendance de la biréfringence Δn.cosχ, selon l’angle d’orientation χ, ainsi que celle de la viscosité avec le taux de cisaillement ont été mesurées simultanément . Les différentes courbes correspondent aux différentes épaisseurs de film allant de 200 nm à 800 nm.

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Table des matières

1 Introduction Générale
1.1 Microinjection des polymères
1.2 Rhéologie des polymères à hauts taux de cisaillement
1.3 Objectifs de l’étude
1.4 Cadre de l’étude
2 Chapitre Bibliographique
2.1 Microinjection
2.1.1 Technologie
2.1.1.1 Pièces réalisées en microinjection
2.1.1.2 Matériaux pour la microinjection
2.1.1.3 Presses de microinjection
2.1.2 Conditions extrêmes
2.1.2.1 Hautes vitesses
2.1.2.2 Hauts taux de cisaillement et fortes pressions
2.1.2.3 Hautes températures du moule et du polymère
2.1.2.4 Etat de surface du moule
2.1.3 Simulation de la microinjection des polymères
2.2 Rhéologie à haut taux de cisaillement
2.2.1 Instabilités de l’écoulement et glissement à la paroi
2.2.1.1 Défauts d’extrusion
2.2.1.2 Glissement à la paroi
2.2.2 Mesures de rhéologie spécifiques à la microinjection
2.2.2.1 Techniques de mesures rhéologiques
2.2.2.2 Viscosité dans les conditions extrêmes
2.2.3 Modélisation de la rhéologie à haut taux de cisaillement
2.2.3.1 Thermo et piezo dépendance de la viscosité
2.2.3.2 Glissement à la paroi
2.3 Synthèse
3 Chapitre Caractérisation rhéologique
3.1 Matériaux étudiés
3.1.1 Polyéthylène haute densité
3.1.2 Polyméthacrylate de méthyle
3.2 Rhéométrie oscillatoire dynamique
3.2.1 Conditions des essais
3.2.2 Domaine linéaire
3.2.3 Stabilité
3.2.4 Résultats
3.2.4.1 PEHD
3.2.4.2 PMMA
3.3 Rhéométrie capillaire
3.3.1 Description du matériel de mesure
3.3.2 Conditions de mesure
3.3.3 Courbes d’écoulement, défauts et thermique
3.3.3.1 Paliers de pression
3.3.3.2 Défauts d’extrusion
3.3.3.3 Courbes d’écoulement
3.3.3.4 Mesures de température dans le capillaire
3.3.4 Résultats PEHD
3.3.4.1 Courbes de Bagley
3.3.4.2 Analyse du glissement
3.3.4.3 Viscosité
3.3.5 Résultats PMMA
3.3.5.1 Courbes de Bagley
3.3.5.2 Viscosité
3.4 Données rhéologiques
3.4.1 Superposition Rhéoplast – ARES
3.4.2 Lissage de Carreau-Yasuda
3.5 Synthèse
4 Chapitre Modèle rhéologique
4.1 Cadre du modèle
4.1.1 Modèle mécanique
4.1.2 Modèle thermique
4.1.3 Lois de comportement
4.1.3.1 Comportement rhéologique
4.1.3.2 Masse volumique
4.1.4 Conditions aux limites et initiales
4.2 Equations
4.2.1 Détermination des champs de vitesse et pression sans glissement
4.2.1.1 Equation d’équilibre
4.2.1.2 Analyse incompressible
4.2.1.3 Analyse compressible
4.2.2 Prise en compte du glissement à la paroi
4.2.2.1 Analyse incompressible
4.2.2.2 Analyse compressible
4.3 Description du modèle numérique
4.3.1 Organigramme
4.3.2 Test de la discrétisation
4.3.2.1 Données du calcul
4.3.2.2 Discrétisation
4.3.2.3 Choix des conditions aux limites thermiques
4.3.2.4 Sensibilité du calcul aux constantes de la loi de glissement
4.4 Influence des phénomènes physiques
4.4.1 Données utilisées
4.4.2 Calcul avec une viscosité thermodépendante
4.4.3 Calcul compressible, piezo- et thermo- dépendant
4.4.4 Incidence du glissement à la paroi
4.4.5 Récapitulatif des incidences des hypothèse
4.5 Analyse des essais rhéologiques
4.6 Synthèse
5 Chapitre Microinjection
5.1 Etude expérimentale
5.1.1 Presse de microinjection
5.1.1.1 Conception de la presse
5.1.1.2 Mode de fonctionnement de la presse
5.1.1.3 Description de la presse
5.1.1.4 Moule de microinjection et instrumentation
5.1.1.5 Acquisition des données
5.1.1.6 Conditions de mise en œuvre
5.1.2 Description des micro-pièces injectées
5.1.2.1 Volume de l’empreinte du moule
5.1.2.2 Epaisseurs de la paroi mince
5.1.2.3 Sous remplissages des pièces injectées
5.1.3 Analyse des enregistrements
5.1.4 Exploitation des résultats de microinjection
5.1.4.1 Profils de pression
5.1.4.2 Profils de température / Effet de la dissipation de chaleur
5.1.4.3 Détermination des débits d’injection
5.2 Simulation de la microinjection
5.2.1 Présentation de Rem3D
5.2.2 Maillage
5.2.3 Visualisation des résultats Rem3D
5.2.3.1 Données du calcul
5.2.3.2 Remplissage
5.2.3.3 Pression
5.2.3.4 Température
5.2.3.5 Profils de vitesses
5.3 Confrontation avec les essais de microinjection
5.3.1 Paramètres d’entrée
5.3.2 Confrontation sur la forme du front de matière
5.3.3 Effet de la compressibilité sur le calcul
5.3.4 Confrontations sur les pressions – PEHD
5.3.4.1 Détermination des débits pour le calcul du PEHD
5.3.4.2 Confrontation calcul – mesures
5.3.5 Confrontation pour le PMMA
5.3.5.1 Recherche des débits optimaux
5.4 Synthèse
6 Conclusion Générale 

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