Revue de littérature sur les principales théories du commerce international
Selon les précurseurs de la théorie du commerce international, les échanges internationaux offrent à un pays l’opportunité de dégager un excédent de sa balance commerciale. Les principales théories du commerce international peuvent être distinguées en deux groupes. L’école classique avec Adam Smith (fin XVIIIe siècle) et David Ricardo (fin XIXe s), à laquelle s’ajoute la théorie suédoise du commerce international (début XXe siècle) constitue ce qu’on appelle communément les théories traditionnelles du commerce international. Par contre, Paul Krugman (1958) fut le principal initiateur de la nouvelle théorie du commercial international. Ce chapitre présentera un rappel des principales théories du commerce international, mais aussi un survol des stratégies de développement basées sur le commerce international.
Les théories du commerce international
Les théories traditionnelles du commerce international soutiennent l’idée que l’ouverture à l’échange est préférable à l’autarcie. Les pays ne peuvent perdre à l’échange international malgré une répartition inégale des gains. Le commerce international est donc défini comme un jeu à somme positive. Cette section se subdivisera en deux sous-sections : la première portera sur les théories traditionnelles du commerce international, alors que la seconde traitera du thème des nouvelles théories.
Les théories traditionnelles du commerce international
La théorie des avantages absolus d’Adam Smith (fin XVIIIe siècle), la théorie des avantages comparatifs de David Ricardo (fin XIXe siècle) ainsi que les prolongements modernes qui en résultent (la théorie des dotations en facteur de HOS, début XXe siècle ; le courant technologique et l’analyse néo factorielle), constituent ce qu’on appelle communément « théories traditionnelles » du commerce international .
Survol des principales théories du commerce international
La théorie des avantages absolus d’Adam Smith (fin XVIIIe siècle)
L’échange international est mutuellement avantageux si chaque pays se spécialise dans la production du bien où il possède un avantage absolu en matière de coût. L’avantage absolu désigne la possibilité pour un pays de produire un bien avec moins de facteur de production par rapport au reste du monde. Un pays se lance ainsi dans le commerce international en se spécialisant dans la production de biens dont il a l’avantage absolu. Il les échangera ensuite contre d’autres produits. Le commerce international est bénéfique pour tout le monde. Au niveau mondial, une meilleure utilisation des ressources productives est rendue possible grâce à la spécialisation et à la division du travail. L’ouverture des marchés permet en outre d’élever le niveau général de la productivité des pays, engendrant un gain au niveau mondial. Le pays peut ainsi allouer plus efficacement ses ressources. Les consommateurs, de leur côté, gagnent aussi à l’échange grâce à l’élargissement de l’éventail de biens disponibles pour la consommation.
La théorie des avantages comparatifs de David Ricardo (fin XIXe siècle)
La loi des avantages absolus d’Adam Smith (fin XVIIIe s) rencontre quand même des limites. Il se pourrait qu’a priori, un pays ne soit nanti d’aucun avantage absolu. Dans ce cas, devrait-il s’insérer ou non dans le commerce international ? David Ricardo (fin XIXe s) y répond positivement à l’aide de sa théorie de l’avantage comparatif. Selon lui, un pays a toujours intérêt à pénétrer le marché mondial, même s’il semble que celui-ci n’a aucun avantage absolu. Un pays possède certainement un avantage comparatif par rapport à un (ou des) autre (s) pays. La loi des avantages comparatifs indique que le commerce international est toujours un jeu à somme positive. Les deux pays obtiennent un gain à l’ouverture par référence à une situation initiale de fermeture. Ricardo justifie ainsi la nécessité d’instaurer le libre-échange qui serait la meilleure des politiques commerciales. L’échange international résulte des différences relatives de productivité. D’après D. Ricardo (Principes de l’économie politique et de l’impôt, 1817), Ce n’est pas le niveau des coûts mais leur structure qui gouverne la spécialisation internationale. Même en l’absence d’avantage absolu, la spécialisation peut se révéler avantageuse dès lors qu’un pays qui se spécialise dans la production du bien pour lequel il dispose de la productivité relative la plus forte. Ce sont donc les différences de productivité du travail (quantité produite par heure de travail) qui gouvernent la spécialisation.
D’autres développements théoriques sur le commerce international émergeront de ces deux théories de base. Ces prolongements modernes concernent surtout la théorie de la dotation factorielle de HOS, l’analyse néo factorielle ainsi que le courant technologique.
La théorie des dotations en facteur de HOS (début XXe siècle)
Cette théorie se situe toujours dans le cadre de la spécialisation internationale. Le facteur déterminant du choix de la spécialisation est cette fois -ci la dotation en facteurs de production. Une économie se spécialise dans la production de biens dont les facteurs intervenant dans sa fabrication sont les plus abondants chez elle. Ce modèle fonde l’échange international sur les différences de dotations relatives des facteurs. Ce point de vue ne s’éloigne pas de celui de David Ricardo (fin XIXe s). L’unique différence réside dans le fait que ce dernier explique les différences de coûts de production entre pays par les différences de productivité (donc de technologies de production). Chez Heckscher et Ohlin (début XXe s), ces disparités trouvent plutôt leurs origines dans les différences de ressources productives entre (par des différences de dotations en facteurs de production d’un pays à l’autre, les technologies de productions pouvant être facilement transférées).
L’analyse néo factorielle
La thèse de l’analyse néo factorielle n’est pas nouvelle. En fait, ce n’est qu’un prolongement de la théorie des dotations en facteur d’Heckscher- Ohlin (début XXes). Seule la perception des facteurs de production change. Le fameux paradoxe de Leontief (1950) donne une parfaite illustration à cette théorie. Ce dernier souligne le caractère paradoxal de la structure des exportations des Etats-Unis. En effet, les Etats- Unis, un pays économiquement développé et donc abandon en facteur à forte intensité capitalistique, exportent surtout des produits à forte teneur en travail mais moins intensifs en capital. Ce résultat semble contredire le principe de spécialisation sur la base de l’abondance des facteurs de production. Ce n’est pourtant pas le cas lorsqu’on tient compte de l’hétérogénéité des facteurs de production mise en avant par les défenseurs de l’analyse néo factorielle. Le facteur travail doit être décomposé en plusieurs niveaux de qualification. Le capital ne doit pas être considéré comme un stock homogène, il faut tenir compte du degré de technologie. Le paradoxe de Leontief s’explique alors par la différence de productivité des travailleurs. Un travailleur américain, plus productif et plus qualifié, vaut trois travailleurs étrangers.
Le courant technologique
Posner (1961) et Vernon (1966) en sont les principaux fondateurs. Ils partent des travaux de Schumpeter (1911) sur les effets de l’innovation. Ils procèdent par l’extension de cette théorie au niveau international pour expliquer la constitution d’avantages comparatifs par le progrès technique. Un pays innovateur, c’est-à-dire disposant d’une avance technique, bénéficie d’un monopole dans la production et dans l’exportation du produit, pendant une période plus ou moins longue. L’avance technologique confère un avantage comparatif au pays considéré en offrant cette situation de monopole. Pourtant le rattrapage par d’autre pays de cet avantage technologique remet en question cette situation de monopole, et par extension, l’avantage comparatif du pays. L’avantage comparatif par l’écart technologique est donc temporaire, mais aussi dynamique. Il faut en outre tenir compte des stratégies de la firme ou du pays, plus que des caractéristiques nationales comme les dotations factorielles. Cette analyse s’applique aussi bien aux échanges entre pays différents qu’aux échanges entre pays à niveau de développement à peu près similaire. Dans le premier cas, les pays les plus avancés technologiquement disposent d’un avantage à l’exportation de produit à haute intensité technologique. Ils importent alors des biens dont la production requiert des technologies moins sophistiquées. Dans le second cas, chaque pays pourra avoir une avance dans des branches différentes. Ils procèdent ainsi à des échanges croisés dus aux innovations.
Selon Vernon (1966), le processus d’innovation s’effectue suivant trois phases correspondant au cycle de vie du produit :
➤ La première phase correspond à l’innovation et à l’introduction du produit par la firme innovatrice. Ici, le coût du produit est encore élevé à cause de la faiblesse de l’échelle de production, et de l’amortissement des coûts de recherchedéveloppement. Le marché intérieur sert d’observatoire et permet d’étudier les réactions de la demande. Elle-même est encore limitée en raison de la cherté du produit.
➤ Une seconde phase : celle de la production et de la consommation de masse. De nombreuses firmes entrent sur le marché afin de profiter des nouvelles conditions de croissance. La firme innovatrice perd le monopole sur son marché. Elle cherche alors à acquérir un autre monopole sur les marchés extérieurs afin d’y exporter son produit.
➤ La dernière phase équivaut à celle de la maturité des produits. Le marché intérieur du pays innovateur est maintenant saturé. Les firmes nationales produisent désormais le produit sur les marchés étrangers, les coûts de main d’œuvre y étant plus abordables. La firme innovatrice a en outre, intérêt à se désengager peu à peu de la production de ce produit. Elle doit engager des recherches en vue de découvrir de nouvelles innovations. La production de l’ancien produit est alors délocalisée. Souvent le pays innovateur se trouve dans l’obligation d’importer l’ancien produit car il s’est désormais spécialisé dans la production d’un nouveau produit. Malgré les nombreux avantages que recèlent les théories traditionnelles du commerce international, certains arguments qui les soutiennent peuvent susciter des débats.
Limites des théories traditionnelles
La notion d’avantage comparatif, la division internationale du travail relèvent du mérite des théories traditionnelles du commerce international. Néanmoins, ces concepts n’expliquent qu’une partie du commerce international. La théorie traditionnelle connaît de nombreuses limites. Primo, ces théories, notamment celle de la dotation factorielle de HOS (début XXe s), ne permettent pas d’expliquer l’existence des échanges entre pays de niveau de développement comparable, ayant les mêmes dotations factorielles. Des échanges intra branche sont possibles. La différenciation des produits (qualité, variété, etc.) peut être une cause d’échange entre pays. De plus, ces théories ne tiennent pas compte du commerce entre filiales des firmes multinationales, alors qu’il représente plus du tiers du commerce mondial.
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Table des matières
INTRODUCTION
PARTIE I : CONCEPTS THEORIQUES ET ANALYSES EMPIRIQUES SUR LA RELATION ENTRE COMMERCE EXTERIEUR ET CROISSANCE ECONOMIQUE
Chap. I : Revue de littérature sur les principales théories du commerce international
Section 1: Les théories du commerce international
I- Les théories traditionnelles du commerce international
I-1 Survol des principales théories du commerce international
I-2 Limites des théories traditionnelles
II- Les nouvelles théories du commerce international
Section 2: Des stratégies de développement mieux adaptées aux besoins des PED
I- Les stratégies d’industrialisation basées sur le commerce international
I-1 La théorie de l’Industrialisation par substitution aux importations (ISI)
I-2 La théorie de la substitution aux exportations ISE
I-3 Choix entre une orientation interne et une orientation externe
II- Enjeux de l’insertion internationale pour un PED
II-1 Nécessités et principes de l’insertion internationale
II-2 : Les faces cachées des échanges mondiaux et les craintes quant à l’insertion des PED
Chap. II : Le commerce international: un facteur de croissance ou une source de distorsions
Section 1 : Commerce international et protectionnisme
I- Les mobiles de la protection
II- Les critiques contre les thèses protectionnistes
Section 2 : Analyses empiriques sur les liens entre commerce extérieur et croissance économique
I- Les opportunités offertes par l’ouverture économique
II- Des conditions ciné qua none pour la réussite des stratégies de développement basées sur le commerce international
PARTIE II : LE CAS MALGACHE : UNE STRATEGIE DE CROISSANCE TIREE PAR LES EXPORTATIONS
Chap. I : Le cas de Madagascar, la filière exportations : un potentiel enseveli mais aussi des défis à surmonter
Section 1 : Le cadre général de la politique des exportations à Madagascar
I- Brève historique de la politique commerciale malagasy
II- Caractéristiques des exportations malgaches
Section 2 : Les défis à surmonter pour une politique d’exportation à Madagascar
Manque de connectivité au niveau des marchés internationaux et au niveau du pays
Le manque d’information et d’économie d’échelle à travers les réseaux
Absence de normes de qualité des produits
L’instabilité et le niveau du taux de change
Chap. II Analyse de la relation entre exportation et croissance économique
Section 1 : Une faible contribution des exportations dans la formation du PIB
I- Analyse des contributions respectives des déterminants du PIB à sa formation
II- Impacts de l’évolution du commerce extérieur sur celui du PIB
Section2 Le bilan de l’extraversion sur la performance de l’économie malgache
1- Madagascar à l’heure de l’ouverture économique: des résultats positifs mais encore insuffisants
2- Le commerce extérieur: un créneau prometteur pour booster le décollage économique de Madagascar
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES