Le cancer du col de l’utérus est un problème de santé publique dans le monde, plus particulièrement dans les pays en développement. En effet, il représente le deuxième cancer le plus fréquent chez les femmes. Son incidence est estimée à 10% de l’ensemble des cancers féminins. Cette incidence est plus élevée dans les pays en développement, où il figure au premier rang des cancers chez la femme [20]. En 2018, l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) estimait à environ 569 000 les nouveaux cas de cancer du col de l’utérus survenant dans le monde, dont plus de 80% apparaissent dans les pays en développement; ce cancer serait également responsable de 311 000 décès par an. GLOBOCAN 2018 [8]. D’après les prévisions de l’OMS, si rien n’est fait dans le domaine de la prévention, les décès par cancers gynécologiques et mammaires devraient augmenter de 25% au cours des dix prochaines années dans les pays en développement [20]. Au Sénégal, le cancer du col de l’utérus demeure le deuxième cancer féminin ; on estime que 3,2 millions de femmes de plus de 15 ans sont à risque avec 1197 nouveaux cas par an dont 795 décès [32]. Selon les données hospitalières, le dépistage des lésions précancéreuses occupe une place importante et la colposcopie occupe une place angulaire dans le diagnostic et le traitement des lésions précancéreuses du col utérin [28]. Au Sénégal, il n’existe pas de politique de dépistage organisé, il s’agit uniquement d’un dépistage individuel laissé à l’appréciation du prestataire. Pour cette raison la pratique de la colposcopie reste marginale.
REVUE DE LA LITTERATURE SUR LA COLPOSCOPIE
La colposcopie est l’examen du col utérin à travers le vagin. Elle a été mise au point par Hinselmann en 1925 ; c’est l’examen clé dans le diagnostic des dysplasies du col utérin [15, 26]. Elle est l’outil indispensable pour établir une cartographie précise des lésions habituellement non visibles à l’œil nu sur l’ensemble de la muqueuse malpighienne génitale. Le frottis fait le diagnostic, la colposcopie localise et l’histologie confirme. En effet, elle permet d’étudier les limites entre les épithéliums malpighien et cylindrique, d’évaluer le degré d’activité nucléaire de l’épithélium malpighien par le test à l’acide acétique et son degré de maturation par le test de Schiller.
Objectifs
La colposcopie a trois objectifs :
– préciser la topographie des lésions et définir les limites et la situation de la zone de transformation du col de l’utérus,
– diriger les biopsies,
– guider le choix des indications thérapeutiques et la surveillance postthérapeutique des lésions du col de l’utérus.
Principes
Le principe de la colposcopie consiste à jouer avec la transparence des épithéliums grâce à des réactifs que sont l’acide acétique et le lugol. Chaque réactif modifie l’aspect de l’épithélium et crée des images qui, regroupées, permettent la constitution de tableaux ou complexes colposcopiques.
Indications
Les indications de la colposcopie sont multiples [23,28]. Il peut s’agir :
– ASC-US : atypies des cellules malpighiennes de signification indéterminée ;
– ASC-H : cellules malphigiennes atypiques ne permettant pas d’exclure une lésion intra-épithéliale de haut grade ;
– LIEBG : lésion intra-épithéliale de bas grade ;
– LIEHG : lésion intra- épithéliale de haut grade
– d’un suivi post- thérapeutique.
Technique
Matériel
Colposcope
Un colposcope est un microscope binoculaire stéréoscopique de faible grossissement, doté d’une puissante source lumineuse d’intensité variable qui éclaire la région à examiner, c’est à dire le col et le vagin. La tête du colposcope comporte :
– les lentilles de l’objectif à l’extrémité de la tête au niveau de la partie positionnée la plus proche de la patiente ;
– deux oculaires utilisés par le colposcopiste pour voir le col ;
– une source de lumière, des filtres verts et/ou bleus intercalés entre la source de lumière et les lentilles de l’objectif ;
– un bouton pour introduire le filtre ;
– un bouton pour modifier le grossissement si le colposcope dispose de plusieurs échelles de grossissement et
– une molette pour régler manuellement la mise au point.
On se sert du filtre vert/bleu pour éliminer la lumière rouge et faciliter ainsi la visualisation des vaisseaux sanguins qui apparaissent en noir. Le colposcope peut être équipé d’une caméra reliée à un système vidéo pour suivre l’examen sur un moniteur. Ce système permet à un tiers de participer à la colposcopie sans déranger l’observateur, d’imprimer une photo sur une vidéo printer ou de filmer l’examen en reliant le moniteur à un magnétoscope.
Examen colposcopique
Il se fait suivant plusieurs étapes :
• Examen sans préparation : le col utérin est uniformément rose ;
• Examen après application d’acide acétique à 3 ou 5 % : n’a aucune action sur l’épithélium malpighien normal, qui reste lisse et rosé ; pas de zone blanche ; à la limite de l’épithélium malpighien exo-cervical et de l’épithélium glandulaire se dessine la ligne de jonction, plus riche en cellules, caractérisée par un liséré blanc fugace ;
• Examen après application de lugol ou test de Schiller : cette application provoque une coloration du glycogène en brun acajou ;
• Prélèvement biopsique du col : il est essentiel de faire une ou plusieurs biopsies dans les régions colposcopiquement anormales et/ou suspectes ;
• Curetage endocervical : il est indiqué après un examen colposcopique de l’exocol normal alors que la cytologie est anormale, une anomalie glandulaire à la cytologie et une colposcopie non satisfaisante, qu’une lésion du col ait été décelée ou non ;
• Examen des parois vaginales, de la vulve, du périnée et de la région périanale : lors du retrait du spéculum, on examine soigneusement les parois vaginales, ainsi que l’épithélium vulvaire, périnéal et péri anal.
Classifications
Il existe plusieurs classifications dont la classification de la Fédération Internationale de Pathologie Cervico-Vaginale et de Colposcopie (IFCPC) [28] ; qui prend essentiellement en compte les images unitaires à savoir les aspects colposcopiques normaux, anormaux, suspicion de carcinome, et autres aspects ; la terminologie de la Société Française de Colposcopie et de Pathologie Cervico-Vaginale (SFCPCV) qui préconise une classification basée plus sur les complexes que les images unitaires .
CADRE D’ÉTUDE
La Clinique Gynécologique et Obstétricale (CGO) du Centre Hospitalier Universitaire (CHU) Aristide Le Dantec a servi de cadre à notre étude. C’est un centre de référence-recours national en Santé de la Reproduction.
Infrastructures
On distingue plusieurs unités.
Au rez-de-chaussée, nous notons :
➤ une unité de consultations externes : depuis avril 1999, elle est transférée au centre-pilote des soins intégrés construit grâce au financement du Fonds des Nations Unies pour la Population (UNFPA) où se font les consultations pré et post-natales, les consultations pour nourrissons, les consultations gynécologiques et la planification familiale. Ce centre comporte :
• 6 salles de consultation recevant en moyenne 30 patientes par jour, du lundi au vendredi,
• 2 salles d’échographie,
• 1 salle de colposcopie,
• 1 salle d’insertion et de retrait d’implants sous-cutanés progestatifs à visée contraceptive,
• 1 salle pour la planification naturelle,
• 1 salle de consultations pour les nouveau-nés et les nourrissons pour la surveillance de la croissance et du développement psychomoteur, des conseils d’élevage des prématurés (méthode Kangourou), des vaccinations et une prise en charge des nouveau-nés de mères infectées par le VIH-SIDA,
• 1 salle de soins en ambulatoire pour les femmes opérées,
• 1 salle d’archives,
• 2 bureaux de consultation pour les assistantes sociales ;
• 1 pavillon de Gynécologie comportant 8 lits ;
• 1 unité de Néonatologie et de prématurés de 10 berceaux et 3 couveuses;
• 1 unité d’accueil des cas urgents ou référés qui comportent 2 tables d’examen
• 1 salle de travail avec 6 lits
• 1 salle de restauration.
Au rez de jardin, on trouve :
• 1 salle d’accouchement avec 4 tables d’accouchements ;
• 1 bloc chirurgical d’urgence et un espace de réanimation néonatale ;
• 2 salles de grossesses pathologiques avec un total de 15 lits ;
• 1 bloc chirurgical comprenant : trois salles où se font les césariennes et la chirurgie gynécologique
• 1 salle de suivi post-opératoire (6 lits).
Au premier étage, on trouve :
• 1 unité de suites de couches de 50 lits,
• 1 salle de suivi post-môlaire avec 7 lits,
• 1 unité annexe de première catégorie composée de 10 cabines individuelles,
• 1 salle de réunion,
• 1 amphithéâtre.
Activités
La Clinique Gynécologique et Obstétricale a une triple vocation de soins, de formation et de recherche.
➤ Les soins :
La Clinique Gynécologique et Obstétricale offre des services de consultations gynécologiques, de planification familiale, des services obstétricaux (prénataux, accouchements, post partum), des services d’exploration (échographie gynécologique et obstétricale, colposcopie, endoscopie). Elle est un centre de référence en matière de soins.
➤ La formation : elle est théorique et pratique.
La formation théorique porte sur les enseignements universitaires et postuniversitaires. Cette formation est orientée vers la promotion de la santé maternelle et infantile et porte sur la Gynécologie, l’Obstétrique et la Néonatologie. Depuis 1996, la Clinique Gynécologique et Obstétricale abrite le Centre de Formation et de Recherche en Santé de la Reproduction (CEFOREP) qui est une institution à vocation régionale créé en 1996 grâce au soutien de l’Agence Américaine pour le Développement International (USAID). Ses activités d’enseignement et de recherche sont essentiellement axées sur la santé de la reproduction.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE SUR LA COLPOSCOPIE
1. Objectifs
2. Principes
3. Indications
4. Technique
4.1. Matériel
4.1.1. Colposcope
4.1.2. Table d’examen
4.1.3. Instruments
4.2. Examen colposcopique
5. Classifications
6. Compte rendu des résultats
7. Différents aspects colposcopiques du col utérin
7.1. Col utérin normal
7.1.1. Examen sans préparation
7.1.2. Après l’application d’acide acétique à 5%
7.1.3. Après l’application de lugol
7.2. Lésions élémentaires en colposcopie
7.3. Aspects colposcopiques des lésions inflammatoires des lésions du col de l’utérus
7.3.1. Colpite à Trichomonas Vaginalis
7.3.2. Cervicite chronique
7.3.3. Lésions de bas grade
7.3.4. Lésions de haut grade
7.4. Aspect colposcopique du cancer du col de l’utérus
7.4.1. Examen sans préparation
7.4.2. Examen à l’acide acétique
7.4.3. Test de Schiller
8. Interprétation des résultats
9. Colposcopie et traitement des lésions précancéreuses
9.1. Place de la colposcopie dans les traitements destructeurs
9.2. Place de la colposcopie dans les traitements d’exérèse
9.3. Colposcopie et suivi thérapeutique
9.3.1. Quand faire la colposcopie ?
9.3.2. Difficultés et valeur de la colposcopie après traitement
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
1. Cadre d’étude
1.1.Infrastructures
1.2.Activités
2. Méthodologie
2.1.Type d’étude
2.2.Critères d’inclusion
2.3.Collecte de données
2.4.Analyse des données
3. Résultats
3.1.Fréquence
3.2.Caractéristiques des patientes
3.2.1. Age
3.2.2. Situation matrimoniale
3.2.3. Parité
3.2.4. Age au premier rapport sexuel
3.2.5. Statut hormonal
3.2.6. Pathologies associées
3.3.Indications
3.4.Résultats de l’examen colposcopique
3.4.1. Vulvoscopie
3.4.2. Examen sans préparation
3.4.3. Examen après l’application d’acide acétique à 5%
3.4.4. Examen après l’application de Lugol
3.4.5. Conclusion de l’examen colposcopique
3.5.Attitude thérapeutique
3.6.Suivi
4. Discussion
4.1.Données épidémiologiques
4.2.Profil épidémiologique
4.3.Indications
4.4.Résultats
4.5.Traitement
4.6.Suivi
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES