Revisiter les relevés phytosociologiques anciens pour analyser la dynamique des pelouses sèches méditerranéennes

Dans la plaine de Crau (Bouches-du-Rhône, Sud-est de la France), les pelouses sèches méditerranéennes sub-steppiques (appelées localement : le coussoul ) représentent un habitat unique, traditionnellement pâturé par des troupeaux d’ovins depuis le Néolithique et d’un très grand intérêt patrimonial (Tatin et al., 2013). Soumises à des régimes d’incendies et de pâturage récurrents ainsi qu’à de fortes contraintes pédoclimatiques, notamment hydriques, ces pelouses sub-steppiques ont été considérées comme stables sur le long terme au niveau non seulement de leur physionomie mais aussi de leur composition et diversité floristiques. Elles seraient en effet aujourd’hui bloquées dans leur dynamique successionnelle progressive vers le boisement par la pratique récurrente du pâturage ovin et les sécheresses estivales (Devaux et al., 1983).

Face aux dégradations issues de l’industrialisation (carrières, plates-formes logistiques), des activités militaires (aéroport, stockage de munitions) et agricoles intensives (vergers, cultures maraîchères intensives), d’importantes opérations de restauration écologique de ces pelouses ont été menées, en utilisant comme habitat de référence à atteindre, cette communauté végétale sub-steppique « non perturbée» en dehors des pratiques pastorales multimillénaires (Dutoit et al., 2011 & 2013).

Le constat des impacts des changements globaux en cours (climat, pollutions atmosphériques, usages, fragmentation) invite cependant à envisager une ou des réponses différentielles de la communauté végétale aux changements et à réévaluer sa supposée « stabilité ». Savoir si la communauté prise comme référence connait elle-même une dynamique successionnelle tout en conservant sa physionomie herbacée sur des pas de temps longs apparaît alors effectivement comme cruciale pour orienter les stratégies futures de gestion ou de restauration des coussouls en relation avec la prise en considération de cette communauté comme une référence pour les opérations de conservation et de restauration.

LA PLAINE DE LA CRAU

LOCALISATION

La plaine de la Crau se situe dans le sud-est de la France, dans le département des Bouches du Rhône. Elle est délimitée par le Grand Rhône à l’ouest, les Alpilles au nord et l’étang de Berre à l’est .

HISTOIRE GÉOLOGIQUE ET CONDITIONS PÉDOCLIMATIQUES

Le climat

Sous influence méditerranéenne, la Crau reçoit moins de 600 mm/an de précipitations, dont la moitié tombe en automne. La température moyenne annuelle s’établit autour de 15,3°C avec une température moyenne mensuelle allant de 7,0°C en janvier à 24,7°C en juillet (données du Grand Carton, Figure 2).

La Plaine de la Crau est soumise à des vents fréquents et forts : la Tramontane, le vent marin et surtout le Mistral. Ce dernier, froid et sec, souffle le tiers de l’année et peut atteindre 120 km/h. En moyenne, le vent souffle 70 jours à plus de 20 km/h et les épisodes très venteux (>30 km/h) se répartissent entre novembre et avril (Source: INRA Avignon, unité EMMAH). L’ensoleillement élevé et les vents sont à l’origine d’une forte évapotranspiration. Le climat de la Crau se caractérise donc par une certaine aridité (sol et atmosphère) sans pour autant se ranger dans la classe des milieux semi-arides dont la pluviosité annuelle est inférieure à 250 mm/an. Sur le long terme, les données climatiques locales du XXème siècle montrent que les températures ont augmenté de 1°C en moyenne. Cette élévation est plus marquée au printemps et en automne. La répartition des pluies change également : les précipitations sont plus importantes en automne et le sont moins au printemps et en été, ce qui augmente la fréquence des sécheresses. (TEC, 2014) .

Teneurs atmosphériques en dioxyde d’azote

En plaine de Crau, il n’y a pas de stations de mesure des retombées azotées. La station d’Istres est la plus proche. Elle se trouve à l’est de la Crau, entre Miramas et Fos, près de la base aérienne. Cette station a mesuré des teneurs annuelles en dioxyde d’azote (NO2) atmosphériques inférieures à 18 µg/m³ depuis 2010 (source Air PACA). En dessous de 20 µg/m³, les teneurs sont considérées comme faibles. Les teneurs sont plus élevées à Arles (agglomération), Fos (zone portuaire et industries pétrochimiques) et Martigues (industries pétrochimiques) avec des écarts qui peuvent dépasser 10 µg/m³ certaines années. A titre de comparaison, la teneur annuelle de dioxyde d’azote à Marseille est proche de 50 µg/m³. La ville de Manosque se situe dans les Alpes de Haute Provence, à une altitude de 500 m, et présente les plus faibles teneurs en dioxyde d’azote parmi les stations du réseau Air PACA. Sur la période 2013-2015, les teneurs annuelles enregistrées à Istres et Manosque sont respectivement de 14,6 µg/m³ et 12,1 µg/m³.

Géologie

Au début de l’ère Quaternaire, il y a environ 2 MA, la Durance était un fleuve qui se jetait directement dans le Golfe de Fos en formant un delta. Son lit s’est progressivement déplacé sous l’effet de processus d’érosion et d’effondrements. C’est ainsi que depuis 70 000 ans, la Durance rejoint le Rhône au niveau du sud d’Avignon à Barbentane (Molliex et al., 2013).

La Plaine de la Crau correspond donc au paléo-delta de la Durance. On distingue 3 terrasses anciennes qui forment un gradient géologique du nord au sud, constituées d’alluvions quaternaires qui se sont déposées au cours du Pliocène, plus précisément au Villafranchien (-2 MA à -800 000 ans) pour la Crau d’Arles ou « Vieille Crau ». La Crau de Luquier correspond quant à elle aux dépôts effectués lors de la glaciation du Riss (-240 000 à -180 000 ans) et la Crau de Miramas à ceux du Würm (-80 000 à -70 000 ans). Dans ce travail, nous nous sommes par la suite essentiellement concentrés sur l’étude des relevés anciens et de la dynamique de la végétation sub-steppique des coussouls de la Crau de Miramas car elle correspond à la plus grande surface relictuelle de végétation non fragmentée (6 500 ha) et non dégradée. Elle correspond aussi à la zone où la majorité des opérations de restauration a eu lieu et celle où le plus de relevés anciens avaient été effectués depuis le milieu du XXème siècle (Fig. 3 et 4).

Le sol 

Les sols de la Crau sont des fersialsols leptiques tronqués correspondant aux sols anciens rouges méditerranéens (riches en fer, silice et aluminium). Leurs caractéristiques physico-chimiques varient en fonction du sous-sol. Ce sont des sols à coloration rougeâtre, décalcifiés en surface (pH moyen de 6,5 environ). Il s’agit de sols tronqués car les horizons supérieurs, normalement riches en limons ont subi une forte érosion éolienne au Tardiglaciaire (Duclos, 1994). Ce paléo-delta se caractérise par l’abondance des galets charriés par la Durance. Leur nature (grès, granite, etc.) est aussi diverse que les terrains traversés par le fleuve. Dans la Crau, à 50 cm de profondeur se trouve un poudingue, c’est une couche de galets cimentés dans une matrice carbonatée provenant pour partie de la dissolution des galets calcaires (calcrète) et/ou de dépôts lors des remontées capillaires de la nappe phréatique. Ce conglomérat induré est plus ou moins épais selon les secteurs et peut varier de 1 à 5 m d’épaisseur (Duclos, 1994). Un masque de galets (recouvrement de galets en surface) s’est constitué sous l’influence de processus d’érosion (éolisation des limons de surface) et recouvre 40 % à 60 % de la surface du sol. Ce masque est moins dense et les galets plus petits dans la Crau de Miramas par rapport à la Crau de Luquier. La Crau présente donc un triple gradient nord-sud : géologique, pédologique et climatique. Le poudingue, de par sa dureté et compacité, est imperméable aux racines. Ainsi, les plantes n’ont pas accès à la nappe phréatique sous-jacente, à moins que celui-ci ne soit fissuré. Les sols très peu profonds (30-70 cm environ au-dessus du poudingue selon l’âge de la terrasse) contribuent au caractère xérique de la végétation. De plus, les analyses physico chimiques de sol montrent que le niveau de fertilité est faible (déficit en phosphore et potassium) mais que c’est le manque d’eau qui reste le principal facteur limitant pour leur mise en culture.

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Table des matières

CHAPITRE 1. Introduction générale
1 Introduction
2 Hypothèses testées et démarche adoptée
CHAPITRE 2. Matériels et méthodes
1 La plaine de la Crau
1.1 Localisation
1.2 Histoire géologique et conditions pédoclimatiques
1.3 La végétation
1.4 Le pastoralisme
1.5 Le patrimoine naturel
2 Relevés anciens et nouveaux relevés
2.1 Récupération et mise en forme des relevés anciens
2.2 Réalisation des nouveaux relevés
3 Analyse
3.1 Préparation et exploration du jeu de données
3.2 Analyse factorielle
CHAPITRE 3. Résultats
1 Description et préparation des données
1.1 Centrage des relevés sur la communauté
1.2 Regroupement des relevés par site et par date
2 Exploration du jeu de données
2.1 Structure du jeu de données
2.2 Comparaison des relevés anciens et récents
2.3 AFC
2.4 Recherche de taxons indicateurs de l’évolution du coussoul
2.5 Analyse des traits fonctionnels
CHAPITRE 4. Discussion
1 Discussion relative à l’utilisation de relevés phytosociologiques
2 Discussion relative à la comparaison des relevés anciens et récents
3 Discussion relative aux résultats de l’étude des traits fonctionnels
3.1 Influence du pâturage sur la végétation
3.2 « Rudéralisation » du coussoul : enrichissement en azote ou intensification du pâturage ?
CHAPITRE 5. Conclusions et perspectives
1 Conclusions
2 Perspectives
Bibliographie
Annexes

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