Réutilisation du théâtre en classe entière

Réutilisation du théâtre en classe entière

Objectifs de la recherche

Implantée depuis maintenant six ans dans le cursus scolaire neuchâtelois, la FGE n’a eu que peu de temps pour prendre suffisamment racine en tant que branche disciplinaire à part entière. Cependant, ayant subi de nombreuses modifications ainsi qu’une importante évolution de statut, il me paraît judicieux d’observer les tenants et aboutissants de ce nouveau dispositif en prenant en considération le point de vue de chacun de ses acteurs (les concepteurs, les formateurs et les bénéficiaires 8 ). Afin de répondre à de nombreux questionnements, ma recherche a pour but de réaliser une étude de cas analysant la mise en place de la FGE au sein d’une classe de 7ème année HarmoS. Cette recherche s’attèle à observer les stratégies d’une enseignante dans sa mise en oeuvre du dispositif de formation.
Mon investigation au sein de la classe me positionne comme aide éventuelle à l’enseignante en vue de l’élaboration et l’animation de ses leçons. Parallèlement à ce rôle, je souhaite aussi accompagner l’enseignante vers une démarche autocritique en rapport à ses cours et à son enseignement.
D’autres réflexions sont menées lors de mes analyses. Selon moi, ces dernières permettent, en premier lieu, une comparaison des observations du terrain avec la littérature existante autour des questions traitant, par exemples : de l’importance (ou la non-importance) des thématiques étiquetées comme non académiques ; ou de l’adaptation de l’enseignement face à l’évolution de la société (Actuellement, j’observe ce que j’appelle une « wikipédiatisation du savoir ». En d’autres termes, tout le monde peut partager et accéder à n’importe quelle type de connaissance grâce à Internet. Cependant, il faut relativiser ce savoir du fait que les idées, les théories et les définitions de Monsieur et Madame tout le monde ne correspondent pas à une science exacte, d’où le parallèle ironique avec Wikipédia). Par ailleurs, une partie du cadrage théorique s’attardera à l’étude de dispositifs pédagogiques similaires établis à ceux de la FGE en suisses et à l’étranger. À noter que j’accorde une plus grande importance aux projets en vigueur dans les cantons latins ainsi
qu’aux recherches plus contemporaines (permettant ainsi des parallèles avec le cadre HarmoS).
Dans un second temps, cette étude vise à examiner la mise en application de la FGE dans une classe du Cycle 2. Quelles sont les stratégies développées par les enseignants ; comment enseigner des thématiques non académiques dans un cadre scolaire ; est-ce que les objectifs prévus par la groupe de pilotage ont pu être atteints ; ce dispositif d’enseignement est-il perçu de la même manière par les initiateurs du projet que par les élèves ou les enseignants ? De nombreuses questions parmi d’autres auxquelles cette recherche tente de répondre grâce à l’analyse des observations de terrain – étayée par l’expérimentation – construite à l’aide d’outils théoriques inspirés de la littérature scientifique existante.
Enfin, toujours en se basant sur les observations réalisées en classe, un dernier objectif intronisé par cette recherche est de dégager les points forts portés par l’heure de FGE à la grille horaire. Il ne s’agira pas ici d’une promotion aveugle de la FGE, mais d’une véritable réflexion autour des compétences que cette dernière souhaite offrir tant aux formateurs (en leur proposant de nouvelles stratégies et possibilités dans leur mission de « transmetteurs » de savoirs) qu’aux bénéficiaires (en leur offrant de nouveaux contenus et domaines d’apprentissage).

Approche personnelle

Ma recherche s’inscrit dans le champ de la psychologie socioculturelle et s’intéresse à l’analyse d’un dispositif de formation. Comme dans tout dispositif, il y a certainement des éléments à remettre en question, et il est possible que mes propos – étayés par mon investissement sur le terrain – reflètent parfois un parti pris, tant de manière implicite qu’explicite. Néanmoins, cette recherche reflète ma vision personnelle et tente d’articuler mes préavis, mon regard affiné grâce à mes « lunettes » de psychologue, mes interprétations relatives à mes données de recherche et mon objectivité scientifique. Dans l’intérêt de cerner la complexité du dispositif pédagogique incarnée par la FGE, mon analyse tente de percevoir l’entièreté de ce dernier en articulant différents angles de vue. Ma démarche est donc double : descriptive et exploratoire. Descriptive d’une part, car je présente une description de la FGE en me basant sur les données de recherche ainsi que les points de vues des concepteurs, des transmetteurs et des bénéficiaires. Les questions de type « qu’est-ce que c’est ? Qu’est-ce qu’il se passe ici ? » forment le coeur de ma problématique, d’où le choix d’une démarche descriptive. Exploratoire d’autre part, parce que j’utilise une perspective analytique concernant un dispositif complexe n’ayant pas encore fait l’objet d’une étude approfondie. « La recherche exploratoire {permet} de baliser une réalité à étudier {tout en choisissant} les méthodes de collecte des données les plus appropriées pour documenter les aspects de cette réalité ou encore de sélectionner des informateurs ou des sources de données capables d’informer sur ces aspects » (Trudel & al., 2007, p. 39). De plus, l’approche exploratoire peut parfois être associée à une démarche participative, ce qui concorde avec mon intervention dans la classe de 7ème année HarmoS.
Ma recherche se définit comme une étude de cas au sens de Marková (2017) et Zittoun (2017). J’observe les pratiques d’enseignement d’une seule enseignante au sein de sa classe.
Intuitivement, ce statut augure l’impossibilité d’une « généralisation » de mes observations et de mes interprétations. Or, les propos de Tania Zittoun relativisent cette vision quelque ? = Δ(??; ?;?) peu défaitiste. Dans son approche, la psychologue tente, en quelque sorte, de réhabiliter la spécificité des études de cas.
{W}e can approach these dynamics either by focusing {…} on a specific social or cultural situation, and see how people develop their trajectories within. In such reading, individual case studies on the one hand, institutional case studies on the other, simply become two complementary ways to closely look at people’s experience in society. {…} I have also tried to highlight a general principle for generalization from single case studies, which can be summarized as such: delineate a human/sociocultural experience; closely observe the experience, on the background of previous experiences which allow for surprise, and that can include: other observed cases of people or institutions, studied by oneself or others (Cn); different sources of information (I); other researchers’ perspective, present and past; other disciplines’ perspective, present and past (N) (Zittoun, 2017, p. 20).
Les notification entre parenthèses correspondent chacune à une variable donnée. Au fil de l’article, l’auteure expose sa conception personnelle de la généralisation au travers d’une équation mathématique. Je ne souhaite pas discuter de la complexité de cette équation ici. C’est pourquoi je choisis sa formulation finale énoncée comme suit :
Le symbôle « Δ » désigne le phénomène d’abduction. En se basant sur de nombreux auteurs, Zittoun (2017, p. 5) définit l’abduction comme le processus par lequel une idée pourrait expliquer : une nouvelle idée ; de nouveaux phénomènes ; plusieurs éléments ou événements dépourvu de liens apparents. En d’autres termes, l’abduction correspond à une forme de raisonnement intuitif qui consiste à écarter les solutions improbables. L’abduction me sert d’angle d’approche pour voir ce qui se passe dans le dispositif de FGE. La variable « C » est suivie de la lettre n, qui équivaut au nombre d’études de cas mobilisées et analysées (> 1). Enfin, la variable « I » correspond aux différentes sources d’information utiles à la recherche et la variable « N » fait référence aux perspectives d’autres chercheurs ou champs disciplinaires.
J’apprécie particulièrement cette conception mathématique de la généralisation, cette dernière se définissant par l’harmonisation de différentes variables. Toutefois, le chercheur doit prêter attention à une généralisation « aveugle » de ses résultats. Même dans des études à grande échelle, les résultats généralisés sont à prendre avec des « pincettes » car ils ne sont pas toujours représentatifs de la réalité, ce qui rend encore plus difficile la généralisation des études de cas.

Cadrage théorique

L’acquisition de compétences transversales par le biais d’un enseignement de matières « non académiques » Tricot (2006, p. 79) constate que les connaissances scolaires ont une valeur plus grande aujourd’hui qu’hier. Il est donc plus difficile de s’insérer professionnellement sans diplôme aujourd’hui qu’il y a quarante ans. Cet irréfutable constat s’appuie sur de nombreuses études sociologiques contemporaines. Cependant, douze ans après cette affirmation, il est nécessaire de nuancer ces propos. Notre société actuelle exige l’acquisition de plus en plus de compétences dites « non académiques », ou transversales, pour décrocher telle place d’apprentissage ou pour être engagé par telle entreprise.
On distingue ainsi les compétences relationnelles (capacité à communiquer, mais également des qualités personnelles des employés comme l’enthousiasme, la convivialité), les compétences de gestion de l’interaction (aptitude à se mettre à la place de l’autre, capacité à pacifier les relations avec les clients), les compétences d’organisation (mobiliser d’autres compétences que les siennes propres pour aboutir à une solution), les capacités à gérer ses émotions et à faire preuve d’empathie, les attitudes (responsabilité, ouverture d’esprit, adaptabilité, tolérance, confiance en soi, envie d’apprendre), voire les compétences esthétiques (transmettre une image satisfaisante, en cohérence avec l’image souhaitée par l’organisation)… A cela s’ajoute la diversité des registres auxquels peuvent être rattachées les compétences non académiques : capital social, attitudes, prédispositions ou traits de personnalité (Bailly & Léné, 2015, p. 71).
Qui n’a jamais entendu parler de personnes surdiplômées qui ne trouvent pas d’emploi ? Décrocher un diplôme, c’est bien, mais une sur-acquisition de ceux-ci peut conduire au chômage. Cette prise de conscience du revers de la médaille correspond, malheureusement parfois, à la réalité. L’explication est relativement simple : de trop nombreuses reconnaissances académiques riment malheureusement avec une expérience professionnelle amoindrie aux yeux des entrepreneurs. Aujourd’hui, un employeur privilégie l’individu ayant déjà un certain vécu dans le monde du travail. C’est pourquoi, la maîtrise de ces compétences difficilement accessibles au cours de la scolarité mais plutôt assimilables par la « pratique » est essentielle pour bien des patrons de firmes, chefs de service et autres directeurs d’entreprises. Cependant, Duru-Bellat (2015, p. 14) reconsidère cette vision morose du monde professionnel en précisant que de telles aptitudes « se développent d’une part, au travers de l’ensemble des activités de formation (initiale et continue) – en incluant les enseignements disciplinaires mais sans s’y limiter – et d’autre part, les expériences diverses de la vie, professionnelle et personnelle ». Les propos de la sociologue se veulent rassurant ici, expliquant que ces habilités peuvent toutefois se développer en associant activités de formation et expériences individuelles. Ce point de vue est conforté par Sarfati qui révèle « comment les compétences exigées pour intégrer le monde du travail à la suite d’une formation professionnalisante relèvent à la fois du registre académique et non académique » (Bailly & Léné, 2015, p. 72). Dans ce sens, Balcar (2014) affirme qu’« il existerait une corrélation positive entre les exigences des entreprises en compétences académiques et non académiques » (ibid., p. 72).
L’école endosse une responsabilité essentielle par rapport au développement de compétences chez les enfants d’aujourd’hui qui seront amenés à devenir les adultes de demain. Par ailleurs, les mêmes auteurs affirment que l’apprentissage de telles qualités « peut être reportée sur d’autres acteurs comme l’école ou la famille (Bailly & Léné, 2009 ; 2013) » (p. 75). En découle l’interrogation suivante : de quelle manière l’école pourrait-elle s’investir dans cette mission quelque peu avant-gardiste ? C’est ici qu’intervient la FGE qui symbolise, à mon sens, une solution possible à ce questionnement. Les buts énumérés par le PER viennent conforter ma pensée (cf. point 1.2. La Formation Générale).

La notion de dispositif

De nombreux auteurs ont théorisé la notion de dispositif. Pour Lebrun (2005), un dispositif pédagogique correspond à un ensemble cohérent constitué de ressources, de stratégies, de méthodes et d’acteurs interagissant dans un contexte donné afin d’atteindre un but. En d’autres termes, il s’agit simplement de permettre à un individu d’apprendre quelque chose. Astier (2007), quant à lui, définit le dispositif comme un ensemble de représentations (agencements, prédispositions, prescriptions) articulées avec une intention définie. D’autres auteurs parlent d’« environnement aménagé » ou d’« environnement d’apprentissage » (Peeters & Charlier, 1999 ; Blandin, 2008). Dispositif et environnement ne sont certes pas équivalents, mais j’observe tout de même un lien entre les deux concepts. C’est dans un environnement adéquat (comme le cadre scolaire) que le dispositif de FGE peut prendre forme et s’épanouir comme tel.
Dès lors, on s’aperçoit que la notion de dispositif est fortement liée avec la notion « d’apprentissage situé » (Suchman, 1987 ; Muller Mirza, 2018)9. D’après Tardif & al. (1998), les apprentissages situés s’inscrivent dans des environnements pédagogiques qui prennent en considération les préoccupations des élèves, ainsi que de la logique de leurs interrogations. Les connaissances construites et développées dans un tel contexte sont significatives, car les apprentissages sont réalisés « dans » et « par » l’action, perdant ainsi leur caractère abstrait. Le terme d’action peut être interprété ici de deux manières : on peut concevoir l’action comme physique (réaliser un travail manuel ou exécuter un geste sportif), mais on peut aussi parler d’action psychique (débattre en groupe ou effectuer une recherche scientifique).

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Table des matières

Introduction 
1.1. Le Plan d’Etudes Romand
1.2. La Formation Générale
1.2.1. Application dans le canton de Neuchâtel
1.2.2. Situation actuelle
1.3. Objectifs de la recherche
1.4. Approche personnelle
Cadrage théorique
2.1. L’acquisition de compétences transversales par le biais d’un enseignement de matières
« non académiques »
2.2. La notion de dispositif
2.2.1. Différents acteurs
2.2.2. Exemples de dispositifs et leurs implications
2.3. Le processus de « secondarisation »
2.3.2. La secondarisation à l’école
2.4. Problématique et questions de recherche
Méthodologie
3.1. Modalité de la recherche
3.1.1. Cadre du terrain
3.1.2. Positionnement du chercheur et déroulement des entretiens
3.1.3. Récolte et classification des données
3.1.4. Mandat et autorisations
3.2. Les thématiques de FGE abordées en classe
3.2.1. La signalisation routière (données non prises en compte pour l’analyse)
3.2.2. L’identification et la gestion des émotions
3.2.3. Les droits de l’enfant
3.3. Tri et sélection des données
3.4. Outils d’analyse
3.4.1. Deux grilles d’analyse
Observations
4.1. Appropriation du dispositif par l’enseignante
4.1.1. Agencement des ressources
4.1.2. Réorganisation du programme scolaire et régulation disciplinaire de la classe
4.1.3. Approfondissement en groupe restreint
4.1.4. Réutilisation du théâtre en classe entière
4.2. Les aspects non-prévus par les concepteurs
4.2.1. La FGE comme lieu permettant une gestion des difficultés
4.2.2. Les freins nuisibles au dispositif de FGE
4.3. Les effets du dispositif
4.3.1. Les traces de secondarisation dans le discours des élèves
4.3.2. Les traces de secondarisation dans le discours de l’enseignante
4.3.3. Les traces de secondarisation dans les supports de cours
4.3.4. Une ouverture au monde
Discussion
5.1. Le point de vue du chercheur
5.1.1. Retour sur le dispositif de FGE
5.1.2. Retour sur l’analyse du processus de secondarisation
5.1.3. Réflexion sur ma posture et ma participation en classe
5.2. La responsabilité de l’école
5.2.1. La modernité de l’école
5.2.2. Un cadre institutionnel parfois limitant
Conclusion
6.1. Critiques, limites et possibilités futures$
6.2. Le mot de la fin
Littérature
7.1. Articles et ouvrages scientifiques
7.2. Documents mis à disposition par le service de l’enseignement obligatoire neuchâtelois
7.3. Sources Web

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