Réticulation dynamique de polymères par des nanobriques inorganiques

Les matériaux hybrides sont par définition des systèmes organominéraux dans lesquels au moins l’une des composantes, organique ou inorganique se situe dans un domaine de taille compris entre le dixième et la dizaine de nanomètres. Ces composantes peuvent être de différentes natures : molécules, agrégats, polymères, particules. L’échelle nanométrique du mélange permet d’avoir une grande surface d’interaction entre les différents domaines, ce qui engendre une grande synergie entre les composantes inorganique et organique, permettant d’atteindre des propriétés accrues par rapport aux composantes prises isolément. Par exemple, l’une des stratégies permettant d’augmenter les propriétés mécaniques d’un polymère a été découverte à la fin des années 1980 par des chercheurs de Toyota et consiste en l’incorporation de charges de taille nanométrique au sein du polymère.Les charges minérales de taille nanométrique, à condition qu’elles soient parfaitement bien dispersées au sein de la matrice polymère, conduisent à des propriétés mécaniques similaires pour des faibles taux de charges (5-10%) à celles obtenues à partir de renforts de taille micronique des matériaux composites (30 40%). Les polymères nanocomposites ont dès lors fait l’objet d’une recherche intensive à la fois académique et industrielle, et font aujourd’hui partie intégrante de notre quotidien . Bien que l’augmentation des propriétés mécaniques fût l’objectif initial de ce domaine de recherche, l’introduction d’une composante inorganique au sein du polymère peut lui conférer des propriétés nouvelles, qui peuvent être inhérentes à la composante inorganique (propriétés optiques, magnétiques par exemple) mais qui peuvent aussi résulter de la nature spécifique de l’interface entre la phase organique et inorganique. La notion d’interface, en terme de quantité d’interface et de la nature des liaisons entre la composante organique et la composante inorganique (matériaux hybrides dits de classe 1 ou de classe 2 en fonction des forces de liaisons chimiques ) est un paramètre essentiel à prendre en compte dans la conception des matériaux hybrides. C’est en effet cette interface hybride qui va dicter la nanostructuration des matériaux élaborés et par conséquences avoir un impact sur les propriétés obtenues .

Trois principales voies de synthèse des matériaux hybrides ont été proposées ; la voie de synthèse choisie est le paramètre qui définit la structure finale de l’hybride.

La voie A est basée sur les procédés venant de la chimie sol-gel et des synthèses hydro- ou solvothermales. Les précurseurs sont moléculaires : des alcoxydes, des sels métalliques ou des composés organofonctionnels. Cette voie d’élaboration de matériaux hybrides est simple à mettre en place, économe et versatile et conduit à un grand nombre de systèmes largement décrits dans la littérature voire à des produits commercialisés.

La voie B est basée sur l’utilisation de nano-objets préformés et monodisperses en taille qui sont ensuite assemblés. Ce sont en général des clusters ou des nanoparticules. Ces derniers sont stables dans les conditions d’assemblage et sont la plupart du temps hybridés par des composantes organiques. Ainsi, ce sont d’excellents candidats pour la conception de matériaux sur mesure. L’utilisation de ces nanobriques permet en effet un meilleur contrôle de la structure des matériaux qu’avec les précurseurs moléculaires conventionnels (voie A).

La voie C repose sur le caractère amphiphile de certaines molécules et certains polymères organiques. Leurs propriétés d’auto-assemblage permettent de contrôler la nanostructure et la morphologie de phases en croissances. Ils sont utilisés soit de façon préorganisée et servent donc d’empreintes, soit de manière synergique, leur auto-assemblage prend alors place en présence de précurseurs moléculaires. Ainsi, des phases hybrides mésostructurées permettant d’accéder à des solides mésoporeux minéraux ou hybrides présentent de nombreuses applications, en particulier en catalyse .

L’intérêt porté à ces matériaux hybrides multifonctionnels est non seulement associé à leurs propriétés physiques et chimiques, mais également aux possibilités de couplage qu’offre l’état colloïdal. Ce couplage entre la chimie douce et les nombreux procédés de mise en forme de la matière molle (trempage, pulvérisation, spin-coating, extrusion, microémulsions, etc…) permet d’élaborer aisément des matériaux sous la forme de films minces ou de revêtements (5 nm <épaisseurs< 50 µm), de fibres, mais aussi de générer des poudres, des mousses ou des pièces monolithiques .

Dans le domaine de l’élaboration de matériaux adaptatifs ou « intelligents », les matériaux polymères permettent de répondre à un grand nombre de problématiques environnementales en particulier en mettant à profit la réversibilité de liaisons covalentes ou supramoléculaires afin d’atteindre par exemple des propriétés d’auto-réparation.  Un matériau auto-réparant aura la capacité de réduire voire de supprimer le vieillissement et l’endommagement qu’il subit afin d’allonger sa durée de vie. Alors que de nombreuses stratégies ont été développées et largement décrites ces quinze dernières années dans la littérature, néanmoins aucune d’entre elles n’est basée sur la versatilité qu’offre les matériaux hybrides en particulier grâce au caractère labile ou réversible qui peut être inhérent à l’interface organique-inorganique. Aussi, l’objectif principal de ce sujet de thèse était de valider les matériaux hybrides, comme matériaux avec des propriétés d’auto-réparation. La voie qui a été suivie dans le cadre de cette étude est la voie B (figure 1) basée sur l’utilisation de nanobriques incorporées dans une matrice polymère et plus particulièrement sur des oxo-clusters. Les oxo-clusters se définissent comme des objets calibrés de taille nanométrique, de structure et de composition bien définies et dont la fonctionnalité apportée par des ligands organiques qui entourent le cœur oxo-métallique peut être parfaitement ajustée. L’incorporation de ces nanobriques dans des matrices polymères a largement été étudiée . Les matériaux hybrides résultants de l’assemblage ou du co-assemblage des clusters avec des molécules organiques (polymères ou monomères) peuvent adopter différents types d’architectures qui dépendent de la fonctionnalité des clusters (définie ici comme le nombre de liaisons possibles entre le nano-objet et la composante polymère). Un cluster nonfonctionnel pourra être simplement dispersé dans une matrice polymère sans interaction forte entre la matrice et ce dernier (Figure 2a). Contrairement aux nanoparticules, pour lesquelles un nombre moyen de fonctions seront greffées en surface, la fonctionnalité d’un oxo cluster peut être parfaitement ajustée. Les clusters sont fonctionnalisés afin d’obtenir plus facilement une dispersion homogène dans les matrices organiques mais conduisent également à l’obtention de diverses architectures macromoléculaires. Le cluster s’il est monofonctionnel peut être incorporé dans la chaine en tant que groupe pendant (Figure 2b). Un cluster difonctionnel peut être intégré en tant que bloc au sein d’une chaîne linéaire (Figure 2c). Quant aux clusters multifonctionnels, ils peuvent servir de point de réticulation afin de former des réseaux hybrides 3D (Figure 2d). Les clusters peuvent également servir d’amorceur de polymérisation afin de former des architectures en étoiles (Figure 2e). Enfin, les clusters en présence d’espaceurs rigides polyfonctionnels peuvent se structurer en un réseau 3D cristallin et micro- ou mésoporeux pour former des MOFs (Metal Organic Frameworks) (Figure 2f).

Indépendamment, de la fonctionnalité et donc de l’architecture des édifices hybrides envisageables, la nature même des groupements organiques fonctionnels permet d’accéder à une grande variété de modes de polymérisation et donc de matrices organiques pour la formation de polymères nanocomposites.

Matériaux polymères réparables 

Une stratégie alternative pour élaborer des matériaux « immortels » consiste à concevoir des matériaux réparables ou auto-réparables . c’est à dire des systèmes ayant la capacité de réduire voire de supprimer le vieillissement et l’endommagement qu’ils subissent. Leur durée de vie est alors considérablement allongée car le matériau est moins susceptible d’atteindre le seuil au-delà duquel il risque un endommagement irréversible.

Au cours des quinze dernières années, de nombreuses stratégies ont été développées pour concevoir de tels matériaux. On dénombre plus de 1150 publications sur la base de données «web of science » (WOS) , le nombre de publications annuelles sur le sujet ne cesse de croître.

Plusieurs articles de revues font état des stratégies dominantes suivies pour élaborer des matériaux réparables . De nombreux polymères sont ainsi conçus pour être réparables. La littérature distingue notamment deux grandes familles de matériaux réparables : la première regroupe des matériaux dont le mécanisme de réparation est irréversible. Un nouveau terme est récemment apparu pour désigner ces systèmes, celui des matériaux à réparation dite extrinsèque ; la seconde famille est constituée des matériaux dont le mécanisme de réparation est réversible. Ces derniers sont alors qualifiés de matériaux à réparation intrinsèque. Plusieurs exemples significatifs de ces deux catégories de matériaux réparables sont par la suite présentés.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1: Matériaux polymères réparables
Introduction
I Réparation irréversible ou extrinsèque
I.1 Concept
I.2 Applications
I.3 Architectures plus complexes
I.4 Un cas à part : un polyuréthane à base chitosane substitué par des oxétanes
II Réparation réversible ou intrinsèque
II.1 Liaisons covalentes
II.1.1 Matrice élastomère
II.1.1.1 Réparation par génération de radicaux
II.1.1.2 Réaction de métathèse
II.1.1.3 Point de réticulation réversible via la formation/dissociation de liaisons
II.1.2 Systèmes modulables
II.1.2.1 Réactions de Diels Alder
II.1.2.2 Réactions click
II.1.2.3 Réorganisation du réseau par transestérification
II.2 Liaisons Supramoléculaires
II.2.1 Stacking
II.2.2 Liaison Hydrogène
II.2.2.1 Matrice polymère simple
II.2.2.2 Cas de copolymères
II.2.3 Liaison Métal/Ligand
II.2.3.1 Complexation métal/ligand
II.2.3.2 Thiol-Nanoparticules
II.2.4 Liaison Ionique
Conclusion
Chapitre 2: Elastomère réticulé par la nanobrique inorganique [(BuSn)12O14(OH)6]AMPS2
Introduction
I Synthèse et caractérisation de la nanobrique inorganique : l’oxo-cluster d’étain (BuSn)12O14(OH)6](AMPS)2
I.1 Structure des clusters [(BuSn)12O14(OH)6]X2
I.2 Synthèses des clusters [(BuSn)12O14(OH)6]X2
I.3 Matériaux basés sur les clusters [(BuSn)12O14(OH)6]X2
I.4 Labilité des Sulfonate des clusters [(BuSn)12O14(OH)6]X2
I.5 L’oxo-cluster [(BuSn)12O14(OH)6]AMPS2
II Synthèse et caractérisation du matériau hybride poly(acrylate de n-butyle)/cluster d’étain
II.1 Synthèse et caractérisation structurale du matériau
II.1.1 Compatibilité du cluster avec la décomposition thermique de l’AIBN
II.1.2 Compatibilité du cluster avec le mode de polymérisation
II.1.3 Mise en évidence de la polymérisation
II.2 Propriétés du matériau hybride
II.2.1 Propriétés de gonflement
II.2.2 Propriétés thermiques du matériau
II.2.3 Comportement thermo-mécanique
II.2.4 Comportement en traction
III Propriétés dynamiques du matériau
III.1 Propriétés d’autoréparation
III.1.1 Mise en évidence qualitative par MEB du phénomène d’autoréparation
III.1.2 Réparation qualitative d’une pièce massive
III.1.3 Tests de traction, influence temps/température sur la réparation
III.1.4 Influence du taux de cluster
III.1.5 Impact de la réparation sur le module de conservation du matériau
III.2 Mise en évidence de la re-distribution des liaisons au sein du matériau
III.2.1 Mise en évidence du caractère dynamique par la relaxation des contraintes
III.2.1.1 Observation qualitative du phénomène de relaxation des contraintes (thermoformage)
III.2.1.2 Quantification du phénomène de relaxation
III.2.1.3 Modèle de Maxwell
III.2.1.4 Estimation de l’énergie d’activation
III.2.2 Mise en évidence du caractère dynamique à l’echelle moléculaire via la RMN DOSY
III.2.2.1 La RMN DOSY
III.2.2.2 Mesure des coefficients de diffusion
III.3 Expérience de recyclage
IV De l’oxo-cluster d’étain aux nanoparticules
IV.1 Synthèse
IV.1.1 Fonctionnalisation des nanoparticules de Ludox
IV.1.2 Synthèse du matériau hybride
IV.2 Propriétés du matériau
IV.2. 1. Propriétés mécaniques
IV.2. 2. Propriété de réparation
IV.2. 3. Propriété de relaxation des contraintes
IV.2. 4. Recyclage
IV.5. Conclusion
Conclusion
Chapitre 3 : Matériaux multiphasés réparables et thermoformables
Introduction
I Copolymères triblocs PABu-PS-PABu
I.1 la séparation de phases entre les deux blocs non miscibles
I.2 Effet de la longueur des blocs sur les propriétés mécaniques
I.3 Inclusion de particules inorganiques dans un copolymère
II Synthèse du copolymère PS-PABu-PS
II.1 Polymérisation RAFT
II.2 Synthèse des blocs rigides PS
II.3 Ajout du bloc souple
II.4 Propriétés mécaniques des copolymères obtenus
II.4.1 Mn(PS)>20000 g/mol
II.4.2 Mn(PS)<20000 g/mol
III Matériaux hybrides PS-PABu-PS-BuSn12
III.1 Intégrité du cluster dans les conditions de polymérisation
III.2 Réticulation des copolymères
III.3 Caractérisation des copolymères hybrides
III.3.1 Test de gonflement
III.3.2 Propriétés mécaniques des copolymères
III.3.2.1 Petites déformations
III.3.2.2 Grandes déformations
III.3.2.2.1 Comparaison des trois copolymères
III.3.2.2.2 Comparaison avec un copolymère non réticulé
III.3.2.2.3 Comparaison avec différentes longueurs de bloc PS hybridés
III.3.3 Morphologie des copolymères
IV Propriétés dynamiques des copolymères hybrides
IV.1 Relaxation des contraintes
IV.1.1 Observation qualitative
IV.1.2 Quantification du phénomène de relaxation
IV.2 Déformation Cyclique
V.3 Propriétés de réparation
IV.3.1 Observation qualitative
IV.3.2 Quantification de la réparation en traction
IV.4 Propriétés de recyclage
IV.4.1 Observation qualitative
IV.4.2 Effet du recyclage sur le module élastique G’
IV.4.3 Effet du recyclage aux grandes déformations
V Vers des matériaux à matrice dure
V.I Synthèse des chaînes PABu-PS-PABu
V.2 Propriétés du copolymère PABu-PS-PABu hybride
V.2.1 Réticulation du copolymère hybride
V.2.2 Propriétés dynamiques du copolymère PABu-PS-PABu
V.2.2.1 Relaxation
V.2.2.2 Déformation cyclique
V.3 Recyclage
Conclusion
Conclusion Générale

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