Retard de croissance fœtale
Croissance pondérale normale du fœtus
La vitesse de la croissance fœtale est très variable tout au long de la grossesse. Le gain pondéral absolu est faible durant le 1er trimestre de grossesse (environ 10g/semaine). A partir du milieu du 2ème trimestre, la vitesse de la croissance fœtale et le gain pondéral augmentent progressivement. La majorité du gain pondéral survient pendant le 3ème trimestre avec une légère régression du poids fœtal les deux dernières semaines de la grossesse. Le gain pondéral moyen est d’environ 85g/semaine de la 16ème à la 27èmesemaine d’aménorrhée (SA), puis la vitesse de croissance augmente pour atteindre son pic entre 28 et 38 SA avec un gain pondéral moyen de 200g/semaine. Elle décroît ensuite progressivement pour passer à environ 70g/semaine jusqu’à la fin de la grossesse. Très peu d’études ont évalué la vitesse de croissance fœtale en ASS. Le poids de naissance a été pendant longtemps un outil couramment utilisé pour l’évaluation et la surveillance de la santé périnatale. Cependant, depuis l’apparition de l’échographie et du monitorage fœtal anténatal, le simple poids à la naissance commence à laisser place à l’évaluation de la croissance fœtale.
Définition du retard de la croissance fœtale
Le retard de la croissance fœtale est une pathologie fréquente aussi bien dans les pays à ressources limitées que les pays développés mais son diagnostic est difficile à établir. En effet, différencier un authentique retard pathologique de croissance fœtale d’une situation de petit poids constitutionnel représente le principal enjeu du diagnostic. Par ailleurs, dans les pays en développement, l’estimation précise de l’âge gestationnel (AG) et des courbes de référence rendent également difficile l’identification des enfants avec un retard de croissance.
Retard de croissance intra-utérin (RCIU)
Le RCIU équivaut, en anglais, au terme intra-uterine growth restriction (IUGR). Il s’agit d’une entité nosologique correspondant à une croissance fœtale insuffisante par rapport à une croissance normale génétiquement programmée. Ce terme est souvent utilisé de façon abusive en période anténatale, le caractère pathologique de la croissance fœtale ne pouvant être que rarement confirmé et le potentiel génétique de croissance du fœtus déterminé. Le diagnostic de RCIU ne peut être fait qu’en mettant en évidence une déviation significative (mais dont la définition est elle aussi sujette à discussion) de la vitesse de croissance observée par rapport à celle attendue. Pour cela, il est nécessaire de disposer d’au moins deux mesures échographiques. Le RCIU est également utilisé lorsqu’il existe un petit poids pour l’âge gestationnel pathologique, c’est-à-dire associé à un ralentissement de la vitesse de croissance. En pratique clinique, ce sont des fœtus pour lesquels il y a eu une souffrance chronique qui peut se manifester par des anomalies de la quantité du liquide amniotique ou de la vascularisation. Le RCIU peut survenir à n’importe quel trimestre de la grossesse avec un risque maximal au 3ème trimestre lorsque la croissance pondérale est maximale. Différentes méthodes de diagnostic de RCIU ont été proposées, mais la méthode optimale reste à définir, surtout dans les pays d’ASS. Les mesures biométriques en série pourraient améliorer la prédiction du RCIU et sont recommandées pour évaluer la croissance fœtale dans les grossesses à haut risque.
Certains auteurs ont suggéré l’utilisation de la vitesse de croissance de la circonférence abdominale et du poids fœtal estimé in-utero pour prédire le RCIU. La croissance fœtale est également évaluée par le changement des z-scores du poids fœtal au cours de la grossesse. En supposant une croissance continue, sans tenir compte des habituelles variations de la vitesse de croissance autour de la moyenne, un fœtus devrait suivre la même trajectoire de croissance pendant la grossesse avec un z-score croissant (écart par rapport à la moyenne calculé selon la formule suivante: (poids observé – poids moyen) / écart-type). Ainsi, un différentiel de z-score négatif indiquerait une croissance perturbée ou diminuée.
Hypotrophie ou petit poids pour l’âge gestationnel (PPAG)
Elle est la conséquence du RCIU et il s’agit le plus souvent d’une croissance fœtale insuffisante. Le PPAG a une définition statistique et correspond à un poids ou une anthropométrie du nouveau-né inférieur(e) à une norme définie pour un âge gestationnel. Le PPAG peut être la manifestation de deux situations: une situation pathologique qui correspond à un fœtus réellement hypotrophe avec un RCIU, ou une situation physiologique qui correspond à un fœtus constitutionnellement petit sans RCIU. L’hypotrophie équivaut en anglais au terme small for gestational age (SGA).
L’étude de la morbidité et de la mortalité périnatales associées au PPAG est, dans la littérature, le plus souvent réalisée en définissant un poids de naissance inférieur au 10ème percentile pour l’âge gestationnel par rapport à une courbe de référence. Le 3ème, 5ème et 10ème percentiles sont le plus souvent utilisés comme seuils. Le PPAG ou SGA est couramment utilisé comme un indicateur indirect de RCIU et les deux termes PPAG et RCIU sont souvent utilisés de façon interchangeable. Le tableau 1 présente l’ensemble des courbes de croissance établies en ASS pour définir le PPAG. La plupart de ces courbes développées sont souvent des courbes de poids à la naissance avec une estimation imprécise de l’AG et portant sur de petits effectifs. Nous avons discuté plus amplement de la fiabilité et des limites de ces courbes de croissance établies en ASS dans la section discussion de notre thèse (cf. page 158). En pratique en Afrique, les médecins utilisent peu les biométries fœtales pour évaluer la croissance in utero. Le diagnostic de RCIU est posé à la naissance pour des enfants pesant moins de 2500g et à plus de 37 SA.
Petit poids de naissance ou faible poids de naissance
La définition du faible poids de naissance (FPN) est un poids à la naissance inférieur à 2500 g. Il correspond à 3 situations distinctes: (i) un enfant hypotrophe, conséquence d’un retard de croissance; (ii) un enfant eutrophe né prématuré; (iii) un enfant constitutionnellement petit. Le terme anglais consacré pour désigner le FPN est low birthweight. Le FPN est souvent utilisé pour discriminer les nouveau-nés malades et sains, en particulier dans les pays d’ASS où l’estimation précise de l’AG n’est pas souvent possible.
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Table des matières
I. INTRODUCTION
II. GENERALITES
2.1. Retard de croissance fœtale
2.1.1. Croissance pondérale normale du fœtus
2.1.2. Définition du retard de la croissance fœtale
2.1.2.1. Retard de croissance intra-utérin
2.1.2.2. Hypotrophie ou petit poids pour l’âge gestationnel
2.1.2.3. Petit poids de naissance ou faible poids de naissance
2.1.3. Causes et conséquences d’une croissance fœtale altérée
2.1.4. Facteurs de risque du retard de croissance intra-utérin en Afrique
2.1.4.1. Problématique de l’article 1
2.1.4.2. Résumé des résultats de l’article 1
2.1.4.3. Article 1. Accrombessi et al. Paediatric and perinatal epidemiology
2.2. Généralités sur le paludisme
2.2.1. Cycle du paludisme
2.2.2. Manifestation clinique et physiopathologie du paludisme
2.2.3. Zone d’endémie et transmission du paludisme
2.2.4. Outils diagnostiques
2.3. Paludisme associé à la grossesse ou paludisme gestationnel (PG)
2.3.1. Mortalité et morbidité associées à la grossesse dans les pays en développement
2.3.2. Epidémiologie du paludisme gestationnel
2.3.2.1. Zone de paludisme stable
2.3.2.2. Zone de paludisme instable
2.3.3. Pathogénicité du paludisme gestationnel
2.3.4. Conséquences du paludisme gestationnel sur la croissance fœtale
2.3.5. Conséquences du paludisme gestationnel sur la durée de la grossesse et la viabilité du fœtus et du nouveau-né
2.3.6. Spécificités du paludisme au 1er trimestre de grossesse
2.3.7. Stratégie de lutte contre le paludisme gestationnel en zone d’endémie stable
2.3.7.1. Traitement adéquat des cas de paludisme
2.3.7.2. Moyens de prévention
2.3.7.3. Autres moyens de lutte
III. PROBLEMATIQUE
3.1. Situation du problème
3.2. Objectifs de la thèse
IV. METHODOLOGIE
4.1. Généralités sur le Bénin
4.1.1. Indicateurs de santé au Bénin
4.1.2. Mesures de lutte contre le paludisme au Bénin
4.2. La cohorte RECIPAL
4.2.1. Contexte et mise en place de la cohorte
4.2.2. Zone d’étude
4.2.3. Design et population d’étude
4.2.4. Procédures de suivi et de collecte des données
4.2.4.1. Phase pré-conceptionnelle
4.2.4.2. Phase gestationnelle
4.2.4.3. Composantes spécifiques de l’étude
4.2.5. Techniques de laboratoire
4.2.5.1. Diagnostic microscopique du paludisme
4.2.5.2. Dépistage de l’infection à VIH
4.2.5.3. Dépistage de l’hémoglobine
4.2.5.4. Dépistage de la schistosomiase urinaire
4.2.5.5. Dépistage de l’infection à chlamydia et à gonocoque
4.2.6. Gestion des évènements morbides
4.2.7. Organisation du travail
4.2.7.1. Phase pré-conceptionnelle
4.2.7.2. Phase gestationnelle
4.2.8. Difficultés rencontrées pendant le suivi
4.2.9. Attrition de la cohorte
4.2.10. Gestion de données
4.2.11. Aspects éthiques
4.2.12. Mon implication sur le projet
4.2.13. Article 2 Accrombessi et al., BMJ Open 2018
4.2.13.1. Problématique de l’article 2
4.2.13.2. Résumé des résultats de l’article 2
4.2.13.3. Article 2: Accrombessi et al. BMJ Open 2018
V. RESULTATS
5.1. Prévalence et facteurs de risque des infections palustres microscopiques au 1er trimestre de la grossesse
5.1.1. Problématique de l’article 3
5.1.2. Résumé des résultats de l’article 3
5.1.3. Article 3. Accrombessi et al., Journal of Infectious Disease 2018
5.2. Effets délétères des infections palustres microscopiques du 1er trimestre de grossesse sur la santé de la mère et de l’enfant pendant la grossesse
5.2.1. Problématique de l’article 4
5.2.2. Résumé des résultats de l’article 4
5.2.3. Article 4. Accrombessi et al. Soumis dans The Clinical Infectious Disease
VI. DISCUSSION
6.1. Discussion proprement dite des principaux résultats
6.1.1. Prévalence et dynamique des infections palustres aux différents trimestres de la grossesse
6.1.2. Conséquences des infections palustres aux différents trimestres de la grossesse sur l’anémie maternelle et les issues défavorables de grossesse
6.1.3. Fréquence et déterminants des fausses couches spontanées
6.2. Forces de l’étude
6.3. Limites de l’étude
6.3.1. Limites spécifiques à l’étude
6.3.2. Limites non spécifiques à l’étude
6.3.2.1. Estimation de l’âge gestationnel et du poids fœtal
6.3.2.2. Courbes de croissance fœtale utilisée
6.4. Recommandations pour l’amélioration de la prévention du paludisme associé à la grossesse et du retard de croissance intra-utérin
VII. CONCLUSION ET PERSPECTIVES
VIII. REFERENCES
IX. ANNEXES