Résultat de l’adaptation transculturelle du QRIT (prétest)
Certains items du QRIT ont été adaptés pour être mieux compris par un public français. L’expression « condition de santé » a été remplacé par « état de santé », « soins de santé » par « prise en charge médicale », « attitude mentale » par « état d’esprit », « blessure » par « problème de santé », « sensation physique » par « sensibilité », et « gain de poids » par « prise de poids ». La validation de la version QRIT-f a été effectuée auprès de quinze travailleurs. Les résultats du prétest confirment que les tous les items sont bien compris par la population cible
Validation du QRIT-f
Caractéristiques de la population étudiée
Cinquante salariés ont donc été inclus au cours de la période 2017-2018 et ont répondu à la totalité des questionnaires. Les documents étaient relus après chaque recueil afin de vérifier qu’aucune réponse ne manquait. En cas d’oubli, le salarié était recontacté par téléphone afin de pouvoir compléter les réponses manquantes.
Les cinquante salariés ayant répondu aux différents questionnaires étaient âgés en moyenne de 43 ans plus ou moins 9.1 ans, et se composaient de 21 femmes et 29 hommes. La durée de l’arrêt de travail était en moyenne de 293,6 plus ou moins 173,0 jours. La plupart d’entre eux étaient sur des poste non sédentaires (64 %) c’est-à-dire des postes comprenant des gestes répétitifs, des postures contraignantes, du piétinement, et/ou de la manutention (exemple : un maçon), contre seulement 2 % de sédentaires (une employé de bureau et un professeur des collège) ; 32 % étaient sur des postes mixtes, c’est-à-dire des postes alternant des temps considérés comme non sédentaires et des temps considérés comme sédentaires (exemple : un veilleur de nuit qui alterne des phases de surveillance sur écran, et plusieurs rondes avec du piétinement, des escaliers à monter etc…). La majorité (80 %) était en contrat à durée indéterminé, 26 % étaient à leur poste depuis moins de 5 ans, 24 % depuis plus de 10 ans.
Concernant leur lombalgie : l’ancienneté de celle-ci était pour un tiers d’entre eux supérieur à 10 ans, un tiers entre 2 et 10 ans d’ancienneté, et plus récente (6mois à 2 ans d’ancienneté) pour le tiers restant. Douze patients étaient reconnus en accident du travail pour leur lombalgie et 6 en maladie professionnelle. Il existait un antécédent de chirurgie du rachis pour 11 d’entre eux, et un antécédent de dépression pour 22 d’entre eux.
Le but de l’étude était d’adapter le QRIT québécois à une population française, puis de valider cette version française afin qu’il puisse être utilisée comme outil d’aide à la prise en charge des salariés souffrant de lombalgies chroniques avec incapacité de travail prolongée. Les résultats du pré-test montrent une bonne compréhension du QRIT-f par la population cible. Les résultats de la validation du QRIT-f montrent une bonne cohérence interne et une bonne validité convergente avec les questionnaires de référence. Ces résultats sont superposables à l’étude princeps de validation du QRIT dans une population québécoise similaire [6, 7 ,8]. On peut noter comme faiblesse de notre étude la quantité importante de questionnaires (88 items pour le QRIT-f et les 7 autres questionnaires de référence) devant être complétés par les salariés lors de leur consultation. Cette quantité aurait pu entrainer une lassitude sur le remplissage avec de fausses réponses ou beaucoup de données manquantes. Néanmoins cette difficulté n’a pas empêché un très bon taux de réponses aux questionnaires grâce entre autre, à la vérification sur place des questionnaires, associée éventuellement à une explication complémentaire au salarié en cas de difficulté pour répondre à certaines questions. En cas de données manquantes malgré cette vérification, le salarié était rappelé à son domicile afin de compléter les réponses. Nous avons eu une bonne acceptabilité du QRIT-f et il n’y a pas eu de difficultés évidentes au remplissage du questionnaire. Par ailleurs on peut noter une bonne puissance de l’étude correspondant au nombre prévu à priori (n=50). Le QRIT-f pourrait donc être utilisé en pratique clinique par les médecins généralistes et spécialistes (médecin du travail, médecin rééducateur, rhumatologue…etc.) pour le dépistage des représentations chez les salariés ayant une lombalgie chronique avec incapacité de travail prolongée.
Il est reconnu que plus les arrêts de travail sont longs, plus l’appréhension à la reprise du travail est grande et peut être retardée par la « peur » [22]. Chez les travailleurs lombalgiques chroniques, ce phénomène peut être aggravé par les représentations qu’ils ont de leur lombalgie, et peut amener les salariés à des comportements de « peur-évitement et de fausses croyance » pouvant concerner le travail. [23]. D’autre part, lorsque la lombalgie commune est due à un accident de travail ou une maladie professionnelle, on constate que les arrêts sont plus longs que lorsqu’il n’y a pas de reconnaissance du caractère professionnelle. [25] Ce phénomène peut être en partie due aux bénéfices secondaires liés aux besoins de reconnaissance d’un travail pénible, mais aussi et souvent en pratique, du fait de la peur de la récidive sur le poste de travail.
Le QRIT-f permet ainsi de mieux identifier les représentations des salariés et de mieux les orienter dans une prise en charge pluridisciplinaire vers les sphères les plus appropriées (en fonction des scores aux dimensions). Les résultats pourront ainsi aider les praticiens à déconstruire les fausses croyances de manière cohérente et harmonieuse. Cette prise en charge permettra un retour à l’emploi plus rapide et dans de meilleures conditions qu’une simple prise en charge de rééducation à l’effort [24, 25, 26, 27]. En plus de participer à cette cohésion, le rôle du médecin du travail est important pour le retour à l’emploi de ces salariés lombalgiques notamment concernant le lien qu’il a avec l’employeur et son rôle de médiateur et d’accompagnement au retour au travail. En effet le médecin du travail va pouvoir participer à la réassurance du salarié, notamment en cas de composante anxieuse forte (représentation émotionnelle), par l’entretien individuelle mais aussi par la mise en place d’aide au retour à l’emploi (temps partiel thérapeutique, aménagement du poste, médiation…etc) et le suivi du salarié qui aura repris son poste.
Ainsi l’utilisation généralisée de l’outil pourrait aider à l’harmonisation du discours médical par les différents médecins consultés et donc favoriser une prise en charge plurifactorielle cohérente pour le salarié [20]. Cette prise en charge plus harmonieuse permettrait une meilleure observation des conseils, des traitements, et des orientations éventuelles (psychologue, centre anti douleur, rééducation physique…etc). Au final, cela permettrait pour les lombalgiques chroniques de sortir de la chronicité et un retour au travail plus rapide et dans de bonnes conditions. Cette généralisation de l’utilisation du QRIT-f pourrait être facilitée en pratique clinique par la création d’une version plus courte du questionnaire comme le souligne également V.Albert [6].
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Table des matières
INTRODUCTION
MÉTHODES
RÉSULTATS
1. Partie 1 : résultat de l’adaptation transculturelle du QRIT (prétest)
2. Partie 2 : validation du QRIT-f
2.1. Caractéristiques de la population étudiée
2.2. Comparaison QRIT-f aux autres tests validés (tests de référence)
2.3. Cohérence interne du QRIT-f (n=50)
2.4. Validité convergente du QRIT-f (n=50)
DISCUSSION
CONCLUSION
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