Mesure par Micro-tomographie
Pour notre étude, nous avons utilisé un micro-tomographe à rayons X XR-μCT disponible au laboratoire Navier (Ultratom de RX-Solution). La tension ainsi que le courant du tube ont été fixés respectivement à 150 kV et 179 μA. Le temps de scan était d’environ 30 minutes. Des images 3D ont été ainsi reconstruites avec une taille de voxel (un pixel 3D) de 54 x 54 x 54 μm à l’aide du logiciel X-Act fourni par le fabricant du dispositif CT Computed tomography (Valton 2007). Pour notre analyse, les projections ont été décalées dans la direction verticale avant la reconstruction pour prendre en compte la progression de la consolidation de l’échantillon. La taille globale du volume de l’échantillon radiographié est de 1529 x 1529 x 1253 voxels
Méthode d’acquisition d’images avec appareil photo
Les méthodes présentes dans les littératures et résumées dans la thèse de Josserand [1] (Cf. ANNEXE A) ne sont pas jugées suffisamment précises et pratiques pour notre étude qui vise un suivi précis et continu de la cinétique du ressuage. Nous soulignons que, dans notre cas, la précision se traduit par un suivi du phénomène dès la première minute. Par ailleurs, un prélèvement manuel de l’eau ressuée s’est avéré difficile durant l’étude de faisabilité. Par conséquent, le développement d’une technique automatisée a été nécessaire. La méthode de mesure que nous proposons dans cette thèse consiste à suivre la progression de l’épaisseur de la couche d’eau ressuée à l’aide d’une technique de prise de photos et de traitement d’images. Une fois l’éprouvette mise en place, nous commençons l’essai en prenant une série d’images. La période entre deux acquisitions est d’une seconde au cours des dix premières minutes, puis une minute pour le reste de l’essai. La durée totale de l’essai est de 4 heures. Il est intéressant de rappeler qu’à la fin de l’essai, pour le matériau testé ici, il reste encore deux heures avant le début de la prise. Nous transformons tout d’abord cette série d’images en une séquence vidéo. Un trait sur la partie ressuée de l’échantillon est ensuite tracé. Grâce à un logiciel de traitement d’mage, Image J, accompagné d’un programme Matlab (Cf. ANNEXE A), nous obtenons le niveau de gris de chaque point ou pixel traversé par le trait. Pour notre cas, nous avons uniquement deux niveaux de gris. Le premier correspond à l’eau transparente et a une valeur très élevée (proche de la valeur de gris correspondante au blanc). Et le deuxième correspond à la pâte de ciment et a une valeur très faible (presque la valeur correspondant au noir). Le changement de la valeur de gris correspond alors à la position de la couche d’eau ressuée. Afin de capturer ce changement de valeur de gris, nous avons développé un programme sur Excel. Nous entrons dans ce programme les résultats obtenus par image J et ce dernier nous renvoie les valeurs correspondantes à ce changement de valeur de gris. Par ailleurs, bien que cette méthode de mesure soit rapide et très pratique, elle présente toutefois certaines limites. En effet, afin d’obtenir un résultat fiable, il faut avoir absolument une couche transparente d’eau ressuée. Ceci ne pourrait pas être le cas par exemple en présence d’adjuvant (Cf. Figure 1-16, chapitre 1)
Moment d’introduction de l’eau
Afin d’étudier ce paramètre, nous testons deux pâtes de ciment. La première est préparée avec une introduction instantanée de la totalité de la quantité de l’eau (i.e protocole de référence). La deuxième est préparée avec une introduction différée de l’eau. 2/3 de la quantité totale de l’eau est mélangé avec le ciment dès le début. Ensuite, après 2 min de malaxage, le reste de la quantité de l’eau est rajouté au mélange et remalaxé pendant une minute. Les résultats sont présentés dans la Figure 2-7, et montrent qu’un ajout différé de l’eau augmente le ressuage final. Cette augmentation pourrait être liée à la réaction d’hydratation du ciment. En effet, comme développé au début de ce chapitre, dès les premières secondes suivant le gâchage, les composants des grains de ciment réagissent immédiatement avec l’eau. Ce premier contact a lieu dans des conditions de ratio liquide/solide différentes et semble modifier la façon dont le système ressue.
Effet des additions minérales
Le ciment Portland pur, tel que notre ciment de référence, est un ciment anhydre sans additions minérales. Il est composé essentiellement de clinker et de gypse. Nous rappelons que le gypse est ajouté pour réguler la prise du ciment en contact avec l’eau. En parallèle du gypse, des additions secondaires peuvent être ajoutées au clinker pour former ainsi un ciment composé [6]. Les additions minérales d’un ciment composé peuvent être de différents types. Elles peuvent être de type hydraulique tels que les laitiers de haut fourneau, de type inerte tels que les fillers calcaires et/ou de type pouzzolanique tels que les cendres volantes et les fumées de silice [7]. Afin d’étudier l’effet de ces additions sur le phénomène de ressuage, une substitution volumique partielle (30 %) du ciment de la pâte de référence par différentes additions minérales a été réalisée. Nous avons testé, tout d’abord, deux différents types de laitier, ensuite, une cendre volante et finalement un filler calcaire. Les compositions ainsi que les granulométries des différentes additions utilisées sont fournies en ANNEXE B. Nous présentons sur la Figure 3-3 la progression de l’épaisseur de la couche d’eau ressuée en fonction du temps. Avant de commencer l’analyse des résultats, il est important de garder à l’esprit que toutes nos comparaisons sont faites par rapport au ressuage de notre pâte de référence sans addition. Ainsi, nous notons, une diminution du ressuage final suite à une substitution volumique en laitier. Cette diminution est beaucoup plus marquée pour le laitier anglais. Nous observons également une diminution du ressuage final suite à une substitution en filler calcaire. En revanche, en présence de la cendre volante, nous mesurons un ressuage final identique. De plus, nous constatons que la cinétique du ressuage sur des temps courts et intermédiaires ne semble pas être affectée par la présence des additions minérales. Figure 3-3 : Epaisseur de la couche d’eau ressuée de l’eau ressuée en fonction du temps : effet d’une substitution partielle (30%) du ciment par différentes additions minérales Relativement peu de publications sont disponibles sur cet angle d’étude. La plupart traite surtout l’influence du laitier sur le phénomène du ressuage. Cependant et contrairement à nos résultats, ces travaux montrent qu’une substitution en laitier contribue à une augmentation de la vitesse et de l’épaisseur finale de la couche d’eau ressuée du ressuage [8,9]. Cette augmentation est souvent expliquée par l’incorporation d’un matériau peu réactif chimiquement qui retarde le phénomène d’hydratation et par conséquent la formation des hydrates. Le degré d’hydratation dépend fortement de la nature du laitier [10] .Dans ce cadre, des essais supplémentaires ont été réalisés pour vérifier cette diminution surprenante observée dans notre étude. Nous avons, tout d’abord vérifié la répétabilité de l’essai pour 30% de substitution. Ensuite, nous avons augmenté le pourcentage de substitution à 60 puis à 100%. Nous précisons que cette vérification est réalisée sur le laitier Ecocem. Ainsi, comme montré sur la Figure 3-4, nous notons toujours une diminution du ressuage en présence du laitier. En outre, nous avons étudié cet effet sur un autre type de ciment CEM I (Cf. Figure 3-4). De même, nous notons toujours une diminution du ressuage. Malheureusement, nous n’arrivons pas, à ce stade, à identifier l’origine de cette différence de comportement. Par conséquent, des mesures supplémentaires mériteraient d’être réalisées pour clarifier ce comportement. Par ailleurs, la diminution du ressuage suite à la présence du filler calcaire est cohérente avec les travaux cités dans la littérature [11]. Ceci est expliqué par le fait que les fillers agissent comme des sites de nucléation des hydrates du ciment. Ils favorisent ainsi la nucléation des CSH et accélèrent par conséquent l’hydratation. [12, 13,14]. Finalement, la fumée de silice n’a pas fait l’objet de notre étude mais il semblerait d’après la littérature [15] qu’elle diminue considérablement le ressuage. En parallèle de l’accélération de l’hydratation, cette diminution est expliquée également par sa taille qui est 100 à 150 fois plus fine qu’une particule de ciment.
Protocole de préparation de la pâte de ciment
Pour cette étude, trois pâtes de ciment à dosages différents de polymère (0,25% ; 0,5% ; 1% en pourcentage de ciment) ont été préparées. L’étude est réalisée sur deux rapports E/C différents (0,6 et 0,5). Nous rappelons que nos pâtes de ciment sont préparées selon un protocole d’ajout différé développé dans les travaux de [22]. Ce protocole consiste à limiter les conséquences de toute interaction chimique des polymères avec les premiers produits d’hydratation. Ainsi, le ciment est mélangé manuellement avec 80% de l’eau totale pendant quelques secondes puis malaxé durant 1 minute à l’aide d’un Turbo-Test Rayneri VMI mixer à une vitesse de 840 tpm. L’ensemble est laissé au repos pendant 15min. Le polymère ajouté au 20% du volume d’eau restant est ajouté ensuite au mélange et malaxé durant 1 minute. Après 15 minutes de repos, la pâte de ciment est finalement malaxée pendant 1 minute.
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Table des matières
Introduction générale
1 Chapitre 1: Constatations expérimentales sur une pâte de ciment
1.1 Constatations expérimentales et positionnement dans la littérature
1.1.1 Cinétique du ressuage
1.1.1.1 Première constatation: La présence de trois régimes
1.1.1.2 Les trois régimes dans la littérature
1.1.1.2.1 Approche théorique
1.1.1.2.2 Résultats de la littérature
1.1.1.3 Deuxième constatation: Paradoxe sur la perméabilité
1.1.2 Observation macroscopique et microscopique de l’échantillon
1.1.2.1 Troisième constatation : Hétérogénéité à la surface
1.1.2.2 Quatrième constatation : Hétérogénéité à l’intérieur de l’échantillon
1.1.2.2.1 Mesure par Micro-tomographie
1.1.2.2.2 Résultats expérimentaux
1.1.2.3 Cinquième constatation : Diversité de configurations des canaux
1.1.2.3.1 Effet de la mise en place de l’échantillon
1.1.2.3.2 Essais réalisés dans des conditions identiques
1.1.2.3.3 Effet du rapport E/C
1.1.2.4 Hétérogénéité dans la littérature
1.2 Approche retenue dans ce travail
1.2.1 Origine des défauts du système
1.2.2 Origine de la formation des canaux
1.2.3 Origine de la diversité de configurations des canaux à la surface
1.2.4 Origine du paradoxe de la perméabilité
1.3 Conclusions
1.4 Références
2 Chapitre 2: Ressuage de la pâte de ciment: Effet de paroi et de la mise en place de l’échantillon
2.1 Protocole de référence et répétabilité
2.1.1 Protocole de référence
2.1.1.1 Matériels utilisés
2.1.1.2 Protocole de préparation de la pâte de ciment
2.1.1.3 Protocole de mise en place
2.1.1.4 Procédure de mesure :Méthode d’acquisition d’image avec appareil photo
2.1.2 Pâte de référence
2.1.3 Répétabilité
2.2 Effet des paramètres non intrinsèques au matériau
2.2.1 Evolution d’une pâte de ciment
2.2.1.1 Hydratation du ciment
2.2.1.2 Conséquences physiques de la réaction d’hydratation sur l’évolution des matériaux cimentaires
2.2.1.3 L’eau dans une pâte de ciment : Rappel de la typologie de l’eau présente dans une pâte de ciment hydraté
2.2.2 Influence des paramètres de préparation
2.2.2.1 Conditions du stockage du ciment
2.2.2.2 Moment d’introduction de l’eau
2.2.2.3 Malaxage
2.2.3 Influence des paramètres de mise en place
2.2.3.1 Vibration
2.2.3.2 Instant de démarrage de l’essai
2.2.3.3 Température
2.2.4 Influence de la géométrie: effet de paroi
2.2.4.1 Fluide à seuil
2.2.4.2 Effet du diamètre
2.2.4.2.1 Approche théorique
2.2.4.2.2 Présence de trois régimes
2.2.4.2.3 Conséquences
2.2.4.2.4 Résultats expérimentaux
2.2.4.3 Effet de la hauteur
2.2.4.3.1 Constatations expérimentales
2.2.4.3.2 Interprétations et discussions
2.3 Conclusion
2.4 Références
3 Chapitre 3: Ressuage de la pâte de ciment: Effet de la formulation de la matrice cimentaire
3.1 Effet de E/C
3.2 Effet du type de ciment
3.3 Effet des additions minérales
3.4 Effet de la distribution de taille de particules
3.4.1 Granulométre laser
3.4.2 Résultats et interprétations
3.5 Effet de l’air occlus
3.5.1 Description des entraineurs d’air utilisés
3.5.2 Protocole de préparation de la pâte de ciment
3.5.3 Résultats et interprétations
3.5.3.1 Observation macroscopique de la surface de l’échantillon
3.5.3.2 Résultats expérimentaux
3.5.3.3 Analyses et interprétations
3.6 Effet de fibre
3.7 Conclusions
3.8 Références
4 Chapitre 4 : Analyse de la mesure de ressuage à l’aide des essais normalisés
4.1 Essai gravitaire ASTM
4.1.1 Protocole de mesure
4.1.1.1 Matériels nécessaires
4.1.1.2 Procédure de l’essai
4.1.1.3 Norme modifiée : AFNOR- XP P18-468
4.1.2 Résultats expérimentaux et interprétations
4.1.3 Limites de l’essai
4.2 Essai de ressuage forcé
4.2.1 Essais existants dans la littérature
4.2.2 Essai in situ: Filtre-presse BAUER
4.2.2.1 Protocole standard [8]
4.2.2.1.1 Principe de l’essai
4.2.2.1.2 Protocole de l’essai
4.2.2.2 Mise au point d’un protocole modifié
4.2.2.2.1 Résultats expérimentaux
4.2.2.2.2 Analyses et discussions
4.2.2.2.3 Protocole modifié
4.2.2.3 Extrapolation d’une valeur finale de ressuage
4.2.2.3.1 Proposition d’une méthode d’extrapolation
4.2.2.3.2 Vérification de la méthode
4.2.2.3.3 Correction de la méthode
4.3 Etude de la corrélation entre les essais ASTM et Bauer
4.4 Conclusions
4.5 Références
5 Chapitre 5 : Changement d’échelle pâte-mortier-béton
5.1 Matériaux étudiés et essais réalisés
5.1.1 Mortier
5.1.1.1 Formulation
5.1.1.2 Protocole de fabrication
5.1.1.3 Essais réalisés
5.1.2 Bétons
5.1.2.1 Etude laboratoire
5.1.2.1.1 Formulation
5.1.2.1.2 Protocole de fabrication
5.1.2.1.3 Essais réalisés
5.1.2.1.4 Notion de pâte constitutive
5.1.2.2 Etude in situ
5.1.2.2.1 Formulation
5.1.2.2.2 Essais réalisés
5.1.2.2.3 Pâte constitutive
5.2 Changement d’échelle: pâte -mortier-béton
5.2.1 Durée de la période d’induction: constatations expérimentales
5.2.1.1 Changement d’échelle: pâte –mortier
5.2.1.2 Changement d’échelle: pâte –béton
5.2.1.3 Béton chantier: Effet de la hauteur
5.2.2 Vitesse d’extraction de l’eau ressuée: constatations expérimentales
5.2.2.1 Changement d’échelle: pâte –mortier
5.2.2.2 Changement d’échelle: pâte –béton
5.2.2.3 Béton chantier : Effet de la hauteur
5.2.3 Analyses et discussions
5.2.3.1 Conditions d’érosion des canaux
5.2.3.2 Stabilisation du diamètre du canal pendant le régime d’érosion
5.2.3.3 Nombre de canaux et débit global
5.2.3.4 Limite supérieure critique de la vitesse d’extraction d’eau
5.2.4 Consolidation finale
5.2.4.1 Changement d’échelle: pâte –mortier
5.2.4.2 Changement d’échelle: pâte –béton
5.2.4.3 Béton: Effet de la pression
5.2.5 Analyses et discussions
5.3 Conclusions
5.4 Références
Conclusion générale
ANNEXES
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