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Le Var comme cadre de vie
La forte attractivité du territoire peut être expliquée par le cadre de vie et surtout la géographie de la zone et les conditions climatiques. Cette beauté des paysages, le soleil, la mer et les sports aquatiques influencent positivement sur la qualité de vie : « M15 : On vit en vacances oui c’est ça. – M16 : On a cette chance. – M13 : La douceur de vie. Le weekend c’est les vacances, les demi-journées où je ne travaille pas. On apprécie d’autant plus quand on vient de loin, je trouve. Je pense. »
« M7 : J’ai besoin de la mer je l’ai déjà dit. Quasiment au quotidien, je vais nager tout le temps. J’adore la colline, je vais marcher. C’était impensable de m’éloigner de la mer. Et la qualité de vie, ça faisait partie des critères. Pourquoi chercher mieux ailleurs quand on sait qu’on a le paradis ? »
Cette notion de qualité de vie est similaire pour les quatre zones et est importante.
Concernant la démographie de la zone, on retrouve le refus d’exercer dans une grande ville pour les médecins de la Zone 1 et 4, notamment pour le trafic routier : « M2 : Bah oui, moi je ne me serais pas vue exercer dans une grande ville, mais avant tout pour la grande ville, pas pour les patients. Je m’en serais accommodée, c’est surtout que je déteste la grande ville. Faire des bouchons, je pète un câble. » « M14 : Moi c’est pareil. Le côté pratique, là où je travaille je voulais un côté semi rural, je voulais un peu de la ville, un peu de la campagne. Je ne voulais pas que de la ville parce que là c’est pour la circulation, qu’il n’y ait pas trop de trafic. » Les temps de trajets ne semblent pas être un problème pour les médecins de la zone 4, s’ils ne sont pas longs et limités à une vingtaine de minutes.
Pour les médecins de la zone 3, bien qu’en ville, Toulon reste une « ville à taille humaine ». « M11 : Le soleil, une ville de taille raisonnable, agréable. Un peu de tout. Mais ça aurait pu être Bordeaux, je ne sais pas, Aix en Provence. Ça aurait pu être Lyon »
La scolarité des enfants, l’école semblent être des facteurs très importants. « M13 : Moi quand je suis arrivé, la condition sine qua non c’était de trouver une bonne école. J’ai quatre enfants. C’était de trouver vraiment un point de chute pour mes enfants, pour l’école et leurs loisirs. C’était absolument primordial. Avant même le travail de mon épouse. Et même mon installation pour moi c’est-à-dire aller travailler même à 25 minutes de là où j’habite ce n’était pas un souci. » Ce facteur est associée à la simplicité du quotidien pour les médecins des zones côtières : « M5 : le jour où j’aurai des enfants, ce sera plus pratique : la sortie, la nounou, l’école. » « M12 : Je me suis installée à cet endroit-là car c’était plus simple au niveau de la distance pour pouvoir les déposer. Et au niveau organisationnel, avoir tout sur place c’est plus simple. »
Influence du vécu personnel
Vie familiale
Le vécu personnel a une place prépondérante dans le choix de l’installation. La famille, que ce soit la famille du médecin installé ou celle de son conjoint, a été un catalyseur pour la mobilité régionale après l’acquisition du diplôme.
« M4 : Et puis la proximité familiale. Moi je serais allé dans le sud-ouest, je serais clairement allé dans le sud-ouest. J’aime les vagues et y en a pas ici, mais mon épouse voulait qu’on reste à moins d’une heure ou au moins une heure de sa famille. »
Pour les médecins originaires de la région, la famille est un argument supplémentaire pour rester à proximité : «M10 : Mais je dirais que le facteur principal, c’est de rester à proximité de ma famille. Je n’avais pas envie de m’éloigner. Je voulais rester à proximité de ma famille. En pensant un peu à l’avenir, pour mes enfants au moins, on sera à proximité. »
Le travail du conjoint est une notion évoquée, sans être cependant prépondérante dans les discussions. « M2 : Parce que mon conjoint travaille à Aix. Sinon je pense que je ne serais pas venue dans le Var. »
A cet ancrage familial, s’ajoute un attachement au territoire. « M3 : Je suis là pour l’attache à la région, puisque mon grand-père était le maçon du village. »
Connaissance du lieu d’installation
Il faut souligner l’importance du réseau des maîtres de stages universitaires, qui a fait découvrir et aimer la pratique de la médecine générale et a pu créer de nombreuses opportunités d’installation : « M3 : L’autre chose, c’est l’opportunité. Puisque j’ai été interne dans ce cabinet avec le Dr V*** maître de stage et ensuite j’ai fait mon SASPAS. Et donc, c’était au décours, quand j’étais juste interne en maîtrise de stage, il m’avait dit qu’il cherchait déjà des gens en plus car il avait des locaux à louer. Je lui ai dit c’est parfait. » « M9 : Parce qu’en fait, si tu veux, à la base je devais être à l’hôpital. Et puis le stage avec Dr D** ça m’a fait changer d’avis. Je ne veux pas du tout être à l’hôpital, je veux être en médecine gé, en cabinet. Je l’ai remplacé énormément, après c’est moi qui suis allée le voir car je savais qu’il cherchait quelqu’un. » « M6 : Je me suis installée rapidement car je me suis installée avec mon maître de stage. J’ai donc fait ma maîtrise de stage à Hyères avec elle et elle était associée à un médecin qui partait à la retraite pile juste au moment où je finissais ma thèse. » « M14 : Mon stage chez le praticien, je l’ai fait chez le Dr A ***. Il n’allait pas tarder à partir à la retraite et il m’a proposé la collaboration et j’ai dit oui. Du coup, ça s’est fait comme ça. Vu que ça c’était bien passé, j’ai dit « bon allez » *enthousiasme* »
On note donc que les médecins s’installant rapidement, moins d’un an après leur thèse, sont les médecins qui ont saisi cette opportunité d’installation dans le cabinet de leur maîtrise de stage universitaire. Cette notion est retrouvée dans l’ensemble des quatre zones géographiques.
Dans la continuité, on note que les remplacements, dans le cabinet d’installation ou à proximité, ont été un accélérateur d’installation. « M7 : Et puis finalement, j’ai rencontré Dr D**, parce que je l’ai remplacée pendant son congé maternité, je me suis beaucoup plu dans son cabinet. »
On retrouve aussi la notion « d’opportunité » chez les médecins venant d’une autre région, par le biais d’une annonce ou du bouche à oreille. « M8 : Pour l’installation, moi je n’ai pas vraiment choisi, c’est l’opportunité qui est venue à moi. »
Souhait d’exercice
La majorité des médecins souligne la volonté d’exercer en groupe et place cette notion comme une condition nécessaire, voire même comme facteur clé pour l’installation. Elle se retrouve dans l’ensemble des quatre zones géographiques. « M11 : Le plus important je pense, c’est quand même le fait d’être dans un cabinet de groupe. Je trouvais ça hyper important de ne pas être toute seule, c’était presque le truc numéro 1. »
L’exercice de groupe est recherché pour plusieurs raisons. La volonté de ne pas se sentir seul, face à un patient vindicatif ou une situation médicale complexe, permettant des échanges sur les dossiers. L’installation seul est associé à une plus grande lourdeur administrative. S’ajoute la notion de facilité du travail en groupe avec des conseils sur l’aspect administratif et comptable et l’entraide face aux contraintes personnelles et familiales. « M2 : Et toute seule, je pense que ça l’aurait fait mais ça aurait été plus laborieux et difficile. Et c’était la facilité. Et en tant que maman, je me disais si le petit est malade, si on n’est pas là comment on fait, ça tombe toujours mal. Être seule, ça me paraissait compliqué. Et d’être associée, ça peut soulager une embrouille ou une galère. »
L’entente avec les associés est nécessaire au fonctionnement du cabinet de groupe. Tout en respectant la liberté de chacun. « M14 : C’est aussi la relation humaine avec mes collaborateurs, mes futurs associés, qui est importante. Ne pas rester seul, pouvoir demander de l’aide. Vraiment le côté agréable du cabinet, la confiance qu’il y a avec les autres. Surtout c’est ça qui m’a. C’est ça le facteur clé. » « M15 : Moi aussi c’est un peu ça, c’est le côté groupe et pas isolé qui m’avait vraiment séduit. Et le côté malgré tout dans le groupe, chacun respecte les libertés et les envies de l’autre car on est tous des libéraux en fait. C’était ça qui m’a vraiment plu. De ne pas être seul et en même temps de pouvoir gérer ton planning un peu comme tu l’entends. Oui c’est ça. »
La notion de liberté d’exercice est fortement associée à la pratique libérale. Nous allons donc voir l’influence du vécu professionnel.
Influence du vécu professionnel
Dans les catégories précédentes, les réponses des médecins interrogés étaient similaires entre zone rurale et zone côtière. C’est donc au niveau du vécu professionnel et surtout de la pratique attendue que nous retrouvons les différences.
Demande de soins
Au niveau de la patientèle, on retrouve une différence de mentalité entre zone urbaine et rurale. En zone rurale, le médecin est intégré au village, le relationnel est différent. « M4 : J’ai des patients vraiment adorables. Je suis très loin des patients SOS Médecin **** où j’ai remplacé. Le contact est sympa. Ça, pour rien au monde, je ne me vois pas être généraliste dans une ville. Ce que j’ai oublié de dire et qui est très important, c’est qu’on a la confiance des patients. On a un statut au sein du village pour la mairie, pour les patients. A l’hôpital, on n’est rien du tout. Ici, on est une personne. Il y a une valorisation faite par les patients en milieu rural. » « M16 : Oui, le fait que je sois bien intégrée, que les gens m’acceptent bien, qu’ils soient gentils. Que ça soit un peu rural, car parfois les gens m’apportent des oeufs, je suis partie avec un potiron. En ville, ça n’arrive pas. Ça doit être plus impersonnel en ville. J’ai trouvé ça sympa. Ça marche. »
« M5 : Et c’était important pour moi d’avoir une patientèle pas complètement citadine avec laquelle je ne me retrouvais pas trop. »
Le concept de médecin de famille apparait aussi, associé à une valorisation de la personne. «M15 : On est des prestataires d’ordonnances à Paris. Alors qu’ici, on est un médecin de famille, un médecin traitant. Moi, j’ai découvert ça ici. »
Ces idées n’apparaissent pas dans la zone de Toulon (Zone 3).
Les visites semblent avoir peu d’impact sur le déclenchement de l’installation, mais sont considérées comme chronophages et contraignantes par les médecins.
Réseau de soins – Offre de soins
Le réseau de soins est composé : des professionnels paramédicaux, des autres professionnels médicaux (spécialistes, confrères), les hôpitaux et la permanence des soins.
Comme nous l’avons évoqué dans l’influence du vécu personnel, l’exercice de groupe est très important, un médecin n’envisage cet exercice que via un exercice dans une MSP. « M1 : Déjà de base, je voulais être avec des associés dans une maison de santé. C’était mes deux critères. La maison de santé pour le côté suivi et c’est vraiment trop bien d’avoir les kinés et les infirmiers dans les mêmes locaux. »
Pour les autres médecins, on note la présence appréciée de kinésithérapeutes, infirmières et laboratoires à proximité. « M2 : Oui, c’est pratique quand même qu’il y ait une bonne équipe infirmière. Des kinés, une pharmacie, je pense que c’est le minimum pour s’installer. A St Martin de Vésubie où j’ai remplacé, y a rien de rien et c’est très compliqué. » « M11 : Oui quand même, labo et pharmacie, c’est quand même la base. Moi, j’ai vraiment regardé ça quand même, mais que labo pharmacie. Le reste moins. » « M6 : Pour les infirmières, les kinés, moi je n’ai connu que cette pratique-là. Et on ne se rend pas compte du confort car j’ai toujours connu ça et travailler dans ces conditions-là. Mais oui, ça fait partie d’une qualité de travail qui me paraît indispensable. »
La présence des professions paramédicales est donc appréciée mais semble « normale » pour les médecins, qui n’envisagent pas une localité sans infirmière diplômées d’Etat (IDE) ou kinésithérapeutes. Mais la majorité ne s’est pas renseignée à l’avance sur le réseau paramédical en place.
Concernant les spécialistes à proximité, nous pouvons opposer les réponses des médecins de la zone 1 et de la zone 3. Pour les médecins de la zone rurale, l’éloignement géographique des spécialistes permet de pratiquer une médecine plus intéressante. « M2 : Et après ce que j’aime bien, c’est le fait d’avoir finalement la possibilité de gérer chez des patients des choses que l’on ne ferait pas en ville car les spécialistes sont loin. On a une capacité dans la prise en charge, on est plus libre, c’est plus agréable, je trouve ça plus intéressant. »
Alors que pour les médecins de la zone côtière, la présence des spécialistes a un côté rassurant, du fait d’une installation rapide.
Cela est similaire pour la proximité (ou non) hospitalière.
« M6 : Et la proximité de l’hôpital, ça a été un choix pour moi. Dans le sens hôpital égal spécialistes. Je ne me sentais pas du tout de m’installer dans une zone rurale où je n’aurais pas de recours facile à un écho-doppler, par exemple, si j’ai un doute sur une phlébite. Et en tant que jeune car je me suis installée très vite après l’internat, j’avais vraiment besoin d’être entourée de spécialistes et d’imagerie. Maintenant, je me sentirai plus sereine, mais en s’installant rapidement, c’était très important pour moi d’avoir un accès à l’hôpital et aux spécialistes facile. »
« M10 : Je n’ai jamais été médecin de campagne mais on m’a toujours raconté qu’il fallait être beaucoup plus polyvalent, savoir faire beaucoup de choses différentes. Là c’est vrai qu’on a quand même le confort de pouvoir déléguer, en tout cas d’adresser plus facilement qu’à la campagne. »
Validité externe – Généralisation des résultats
Nous allons nous pencher sur les caractéristiques des médecins interrogés, en les comparant aux autres études, pour envisager une potentielle généralisation des résultats.
68 % des médecins interrogées sont des femmes. Nos résultats concordent avec les résultats de la littérature témoignant d’une féminisation importante de la profession, avec tout de même une part plus élevée dans notre étude (54 % de femme en moyenne) (16). La proportion de femmes exerçant la médecine générale est de 43 % selon la DREES (17). La proportion plus élevée de femme dans notre étude peut s’expliquer par un biais de recrutement ou par une féminisation encore plus importante de la profession ces dernières années.
L’exercice de groupe est une caractéristique retrouvée chez 93 % de la population interrogée, seul un médecin est installé seul. Cette proportion est supérieure à celle décrite par IRDES en 2009 où seulement 54 % des médecins généralistes exercent en groupe. Mais cette proportion augmente à 77 % pour les médecins généralistes de moins de 40 ans (16).
On note dans cette étude une forte proportion d’installation rapide, moins de deux ans, après l’obtention du diplôme (50%). Cette proportion est cohérente avec d’autres études qui remarquent 53% d’installation en moins de deux ans après la thèse, peu influencée par le caractère urbain ou rural (16). Il s’agit d’une primo installation dans la majorité des cas. Nos résultats montrent que seulement six médecins ont réalisés leur 3ème cycle dans la région d’installation (Faculté de Marseille) et cinq médecins y ont effectué leur cursus complet. La majorité des médecins a donc eu une mobilité inter-régionale post internat. Cela contraste avec la tendance habituelle. Dans une étude (18), on notait que 74 % des médecins s’installent dans la région dans laquelle ils ont fait leurs études de médecine et soutenu leur thèse. Cette étude démontre aussi que le sud et l’ouest de la France et plus généralement l’ensemble des régions littorales, sont des régions qui retiennent fortement leurs étudiants. La plus faible probabilité relative de départ étant obtenue pour la région PACA. Le Var et la région sud dans sa globalité bénéficient donc d’une forte attractivité, probablement due à l’ensoleillement et à la qualité de vie perçue.
Le réseau des Maîtres de Stage Universitaire
Le stage ambulatoire de médecine générale de six mois est institué et rendu obligatoire en 1997 pendant le 3ème cycle des études de Médecine Générale. Les praticiens accueillant des internes sont appelés Maîtres de Stage Universitaire (MSU). Ce stage chez un MSU permet de découvrir l’exercice libéral : suivi du patient, exercice de la médecine de ville et contraintes administratives. Depuis 1997, il existe aussi un stage obligatoire, pendant le deuxième cycle des études médicales, de découverte de la médecine générale : condition d’exercice, mission de prévention, relation médecin patient. Ce stage, d’une durée de six semaines à temps complet ou trois mois à temps partiel, est obligatoire. Cependant beaucoup de faculté n’arrivent pas à parvenir à ce que 100 % de leurs étudiants le réalisent.
En 2003, le Stage Ambulatoire en Soins Primaires en Autonomie Supervisée (SASPAS), qui consiste en un deuxième stage de six mois en médecine générale, est institué de manière tout d’abord facultative. Depuis la réforme du 3ème cycle des études médicales de novembre 2016, ce deuxième stage est désormais obligatoire dans la maquette de l’interne. Il existe donc désormais deux stages en libéral : Le stage appelé maintenant de « niveau 1 » pendant la première année d’internat et le SASPAS lors de la dernière année d’internat.
Pour devenir MSU, le médecin généraliste doit exercer en libéral et être installé depuis trois ans au moins ou un an pour l’accueil des étudiants en second cycle ou en collaboration. Il ne doit pas pratiquer exclusivement une Médecine à Exercice Particulier (MEP) (homéopathie, ostéopathie, mésothérapie, acupuncture…). Il effectue une demande d’agrément pour deve-nir enseignant clinicien ambulatoire MSU auprès du département de médecine générale et au Doyen de médecine dont dépend le lieu d’exercice. Cette demande d’agrément est soumise au conseil de l’ordre départemental qui confirme l’absence d’obstacle à l’exercice de la mé-decine générale. L’agrément est ensuite délivré pour cinq ans par l’ARS PACA (21).
La répartition des MSU sur le territoire sur le territoire varois est scindée entre les facultés de Marseille et de Nice, donc entre le Var ouest et Var est, avec cependant quelques exceptions au niveau du centre Var (Brignoles notamment, avec des MSU niçois et marseillais). La carte suivante, réalisée grâce à la liste des MSU et des SASPAS fournies par les facultés de Nice et de Marseille, montre l’implantation des différents MSU.
Notre étude montre la place importante de la réalisation de stage vis-à-vis de l’installation des jeunes médecins. En effet, cinq médecins interrogés ont découvert le cabinet où ils se sont finalement installés grâce à la maîtrise de stage universitaire. Cela se retrouve dans la totalité des quatre zones étudiées, qu’elle soit rurale ou urbaine. Un seul médecin interrogé a réalisé le SASPAS dans le cabinet où il est installé. Cela s’explique par le fait que le SASPAS n’était pas encore obligatoire lors de ses études.
Ce stage chez le MSU est associé, dans notre étude, à une rapidité d’installation après le diplôme, allant de pair avec une opportunité, départ à la retraite d’un associé du médecin, notamment. Cela peut suggérer que pour les médecins étant proches du départ à la retraite et désireux de trouver un successeur, la formation à la maîtrise de stage universitaire et l’encadrement des internes soit une bonne solution.
De précédentes études ont déjà souligné l’importance des stages ambulatoires de niveau 1 et 2 sur les projets d’installation. Une étude du département universitaire de médecine générale de Brest (22) montre l’importance du SASPAS, qui a une influence positive sur le désir d’installation rapide. Il favoriserait une activité libérale en groupe avec rachat de patientèle ou association ou collaboration, plutôt en milieu semi-rural. Ce constat est similaire à nos résultats, à ceci près que nous le voyons avec le stage de niveau 1.
Une étude quantitative montre que 96 % des internes interrogés ont modifié ne serait-ce qu’une des caractéristiques et parfois la totalité de leur projet professionnel après ce stage. 80 % des étudiants sont satisfaits quant à ce stage et soulignent le rôle positif de leurs maîtres de stage (23).
La création ou le renforcement du réseau des maîtres de stages universitaires, notamment en zone rurale, semble donc être un levier d’installation fiable et une réponse potentielle à la désertification médicale des campagnes.
La qualité de vie et la séparation vie professionnelle et de famille
L’exercice de campagne est aussi assimilé à un exercice chronophage, avec peu de séparation entre vie professionnelle et familiale, du fait de la perte d’anonymat dans le village. Notre étude souligne l’importance de la qualité de vie, imbriquée dans les trois dimensions des facteurs déterminant l’installation :
Environnemental (comme nous l’avons évoqué ci-dessus) : le soleil, la mer, l’impression de vacances .
Personnel : les temps de trajet courts, l’école et le travail du conjoint à proximité ;
Professionnel : la bonne entente entre les confrères au sein du cabinet, la patientèle agréable mais aussi et surtout la séparation de la vie professionnelle et familiale.
Cette qualité de vie passe par une maîtrise du temps de travail, nous avons peu exploré cette dimension dans notre étude, mais selon l’URML IDF (18) : les jeunes médecins désirent préserver leur vie privée et envisagent à cet effet de maîtriser leur temps de travail. Bien qu’en pratique encore 24,8 % des jeunes installés travaillent plus de 50 heures par semaine.
Cette diminution du temps de travail hebdomadaire est corrélée à la forte féminisation de la profession. Et comme nous l’avons vu dans notre étude, être une femme médecin est lié à beaucoup de contraintes organisationnelles concernant le trajet et l’emploi du temps. «M5 : Mais concrètement il faut être réaliste. La médecine la plupart du temps c’est des femmes, elles ont leur boulot, leur mari, leurs gosses et leur maison. Et elles n’ont pas que ça à faire de rester jusqu’à 20 h au cabinet. Ce n’est pas possible. »
Les jeunes femmes médecins installées, interrogées dans cette étude (24), favorisent leur vie de famille et organisent leur temps de travail en fonction de cela. « Elles ont pour souci de maîtriser leur temps de travail et son organisation afin de prétendre à une bonne qualité de vie qui se traduit par le fait d’avoir du temps libre. Elles précisent que cela n’entache en rien leur implication dans leur métier. »
Cette enquête sociologique (25) confirme l’existence de stratégies mises en oeuvre par les médecins pour limiter leur disponibilité au travail, qui se manifestent notamment par une concentration/intensification du temps de travail et par des efforts convergents des hommes et des femmes pour articuler temps de travail et temps familial et domestique. Les mutations des modes d’organisation du travail combinent à la fois des effets de « genre » marqués (les femmes médecins généralistes semblent aller le plus loin dans ce processus) et de génération, dans le sens où les jeunes hommes médecins rencontrés aspirent à construire leur identité professionnelle contre le modèle du sacerdoce médical.
Cette séparation vie familiale et professionnelle passe donc par l’organisation de la permanence des soins dans le secteur d’installation, que cela soit par SOS médecin, pour les zones 2 et 3 de notre étude ou par la proximité d’un hôpital ou d’une maison médicale de garde, pour les zones 1 et 4 plus rurale de notre étude.
Cette séparation a été aussi évoquée par nos jeunes installés par une distance géographique entre la ville d’installation et la ville de résidence. Cette caractéristique semble être une volonté des jeunes médecins (20) : « Afin de privilégier une certaine qualité de vie, les jeunes généralistes sont plus enclins à exercer dans un cabinet plus éloigné de leur lieu d’habitation que leurs aînés, comme le met en évidence l’enquête auprès du panel de médecins généralistes de Pays de la Loire. Ainsi, alors que 70 % des généralistes de plus de 55 ans habitent à moins de cinq minutes de leur cabinet, c’est le cas pour seulement 35 % des moins de 45 ans. »
Notre étude renforce les conclusions sur le changement des modes d’exercice de la profession de médecin généraliste, avec une place plus importante accordée à la vie de famille, et donc, une installation permettant de séparer la vie privée et la vie professionnelle.
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Table des matières
Matériels et méthode
Résultats
1) Caractéristiques des médecins interrogés
2) Le Var comme cadre de vie
3) Influence du vécu personnel
4) Influence du vécu professionnel
5) Place des aides à l’installation
6) Ressenti sur les politiques de démographie médicale
Discussion
1) Biais rencontrés, limites de l’étude, validité interne
2) Validité externe – Généralisation des résultats
3) L’exercice de groupe
4) Le réseau des Maîtres de Stage Universitaire
5) La qualité de vie et la séparation vie professionnelle et de famille
6) Les aides à l’installation
Conclusion
Bibliographie
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