Résister au déferlement de données cellulaires au moyen de communications opportunistes

Classification des solutions 

La diffusion de contenus sur réseaux mobiles à forte charge a été largement étudiée dans la littérature. De nombreuses stratégies pour limiter la surcharge en débit ont été ainsi proposées, et plusieurs classifications sont possibles en fonction du critère retenu. Nous avons choisi de présenter l’état de l’art avec comme premier critère de classification les entités impliquées dans la transmission de contenus lors du processus de dissémination : l’infrastructure cellulaire ou les terminaux mobiles eux mêmes . Par ailleurs, nous avons considéré, dans le contexte de cette thèse, des contenus tolérants au délai, c’est-à-dire pouvant accepter un délai supplémentaire avant d’être délivrés à leurs destinataires finaux. Ainsi, pour une raison d’homogénéité avec les chapitres suivants, nous avons retenu comme second critère une dimension temporelle, sachant que les applications peuvent avoir des contraintes temporelles de façon à garantir la satisfaction de leurs utilisateurs. Nous mettrons ainsi en exergue, lorsque c’est le cas, la notion de tolérance au délai pour chacun des travaux présentés.

Solutions avec infrastructure cellulaire 

En parcourant la littérature, nous avons pu constater que les systèmes de communication actuels ont été conçus pour servir les utilisateurs “n’importe quand et n’importe où”. Cependant, les exigences de plus en plus fortes sur un tel service en augmentent nécessairement le coût, alors que le réseau cellulaire se doit d’assurer un service de qualité à ses utilisateurs mobiles. À ce niveau, plusieurs méthodes ont été envisagées pour accroître la connectivité du réseau, mais qui induisent un coût supplémentaire et une consommation d’énergie très élevée. Ces propositions ne peuvent donc pas constituer des solutions à long terme, tant d’un point de vue économique que d’un point de vue opérationnel. De ce fait et toujours dans l’optique de permettre aux opérateurs d’améliorer l’expérience des utilisateurs, des alternatives ont été proposées pour une distribution des contenus efficace, en d’autres termes, tenant compte de la rareté du spectre cellulaire. Nous nous focalisons dans ce paragraphe sur ce type de solutions et qui exploitent essentiellement l’infrastructure de communication. Toutes ces solutions ont pour point commun de répondre à la question suivante : Comment un opérateur cellulaire peut-il satisfaire efficacement les demandes de diffusion de contenus de ses utilisateurs, alors que son infrastructure est le seul moyen de desservir ces derniers?

Déploiement d’infostations 

Au tout début des années 2000, des chercheurs du laboratoire WINLAB (Rutgers University) ont proposé un nouveau type de réseau sans fil [44, 45] comme solution architecturale. Cette solution prend en compte les problèmes de coût et de limitation énergétique des terminaux, ces derniers étant considérés comme des facteurs de ralentissement à la mise en place de nouveaux services sans fil. Son originalité réside dans le fait que la zone de couverture n’est pas globale; a contrario, leur architecture se compose de zones géographiques discontinues, appelées infostations. À l’intérieur des infostations, des bornes sans fil agissent comme des passerelles entre l’infrastructure et les utilisateurs finaux. Cibler des contenus tolérant des délais supplémentaires avant leur remise aux utilisateurs permet alors d’offrir un service de communication en environnement mobile à haut débit et à faible coût. Par ailleurs, pour servir au mieux les utilisateurs, les infostations peuvent être placées dans des endroits stratégiques, tels que les aéroports, les entrées de bâtiments d’entreprises, les routes très empruntées, etc. Ce concept d’infostations a été ensuite largement repris et étudié sous de multiples facettes. Le problème du placement optimal des infostations dans une zone géographique donnée a été ainsi traité dans [93]. Xiong et al. y étudient la diffusion d’un contenu avec contrainte temporelle en cherchant à minimiser le coût d’urbanisation en infostations. Pour cela, les auteurs construisent un graphe de mobilité modélisant les déplacements des différents utilisateurs, et calculent la couverture minimum par sommets [36]. Les résultats obtenus par heuristique et par simulation avec des traces de mobilité réelles montrent que la méthode proposée atteint son objectif avec seulement un nombre réduit d’infostations. Dans le même contexte, Wang et al. proposent dans [88] le concept d’Integrated Infostation – – Cellular Network (IICN), qui est un modèle de système dans lequel plusieurs infostations sont déployées dans une zone cellulaire à faible bande passante. L’idée de base est que les infostations transmettent de façon continue vers les clients et que l’utilisation du réseau cellulaire n’a lieu que sur demande explicite du client, de façon à éviter le gaspillage des ressources du réseau. Un plan de gestion des caches est nécessaire pour gérer les données reçues à la fois via les deux canaux. Les résultats de simulation montrent une amélioration significative en termes d’épargne de ressources cellulaires, obtenue grâce aux caches, en diminuant le nombre detransmissions cellulaires réalisées en réponse aux demandes explicites des clients. Iacono et al. étudient le problème de la livraison d’un fichier de type arbitraire via un système d’infostations [52]. Les auteurs supposent que différentes infostations sont réparties le long du trajet d’un utilisateur mobile et que le fichier désiré est segmenté et réparti sur ces infostations. De plus, la population devant être servie par le système est constituée de ce seul et unique utilisateur se déplaçant à vitesse constante, le modèle de mobilité considéré étant de type random walk. Les auteurs développent un modèle analytique pour calculer les bornes du délai de livraison du fichier. Les résultats montrent de façon formelle que le délai de livraison est réduit lorsque la vitesse de l’utilisateur augmente. Intuitivement, on comprend aisément que l’utilisateur est servi d’autant plus vite qu’il traverse rapidement les infostations détenant les segments du fichier. Dans le but de proposer une architecture complémentaire au réseau cellulaire, Eriksson et al. proposent un réseau véhiculaire pour la distribution de contenus,Cabernet[41], où les véhicules en mouvement reçoivent les contenus via des points d’accès (Access Point, AP) Wi-Fi approchés lors de leurs trajets. Dans leur étude, la connectivité éphémère (de l’ordre de quelques secondes seulement) et la couverture discontinue fournie par les points d’accès sont prises en compte. Afin de traiter ces deux problèmes et dans le but d’améliorer l’expérience des utilisateurs, Cabernet intègre deux composants essentiels : le premier est le QuickWiFi qui permet d’établir rapidement une connexion entre les AP opportunistes et un véhicule; le second est le protocole CTP (Cabernet Transport Protocol) qui permet de gérer la congestion sur les liaisons sans fil. La solution proposée a été intégralement implémentée et déployée, notamment à Boston. L’évaluation, menée avec 10 taxis en mouvement dans la ville, montre des résultats très encourageants. Néanmoins, le problème du passage à l’échelle reste posé et demande à être étudié en profondeur. Pour un mêmetype de contexte, le systèmeTACO-DTN a été proposé pour la dissémination de contenus dans des réseauxtolérants aux délais [86]. Ce système repose sur l’existence d’infostations dans le réseau. TACO-DTN est implémenté comme un système publish/subscribe[42] permettant de diffuser des informations possédant une durée de validité à des utilisateurs mobiles ayant préalablement exprimé des intérêts pour des types de contenus. Le système s’attaque à plusieurs défis, et en particulier à celui de la gestion des tampons, pour lequel il faut sélectionner les données à stocker en cas de capacité limitée des tampons. Les auteurs proposent également une méthode pour sélectionner les infostations chargées de publier les contenus et de servir les utilisateurs intéressés.

Galluccio et al. vont encore plus loin en introduisant une fonctionnalité supplémentaire au niveau des services des infostations [46]. En effet, les auteurs proposent un cadre détaillant deux processus essentiels de téléchargement et de collecte de contenus par les nœuds mobiles. En d’autres termes, afin d’offrir une connectivité supplémentaire aux utilisateurs en dehors de la couverture des infostations, des nœuds mobiles agissent comme des mules en transportant les données de ces utilisateurs isolés. Les données, ensuite, sont téléchargées lorsque les utilisateurs mobiles se trouvent à proximité d’une infostation. Cela veut dire que les données téléchargées sont recueillies entre deux passages consécutifs sur les infostations. Les auteurs présentent une étude analytique pour évaluer la stabilité du système à infostations. La condition pour obtenir la stabilité est de trouver quand la moyenne du processus de collecte est inférieure à la moyenne du processus de téléchargement, ce qui est prouvé par les résultats obtenus. En revanche, tout comme pour l’étude précédente, le problème du passage à l’échelle n’est pas pris en compte, sachant qu’il peut avoir un impact significatif sur les résultats de simulation. Il serait donc nécessaire de poursuivre l’étude avec un réseau plus complexe, comprenant davantage de nœuds.

Ganchev et al. proposent une architecture de type infostations quelque peu différente, destinée à des services eLearning [47, 48]. Leur architecture permet à un ensemble d’utilisateurs mobiles d’accéder à des services électroniques (eServices) via plusieurs infostations déployées sur un campus universitaire. La figure 2.2 illustre l’architecture de réseau proposée, qui comporte trois niveaux. Le premier niveau est celui qui correspond à l’utilisateur mobile, supposé être équipé d’une technologie sans fil (telle que 4G, Wi-Fi ou Bluetooth). Le deuxième niveau correspond aux infostations proprement dites : elles fournissent un accès intermittent aux différents eServices et sont utilisées comme caches pour les contenus déjà servis. Le troisième et dernier niveau est le centre d’infostations : sa fonction principale est de gérer les mises à jour des informations, ainsi que les profils des utilisateurs. L’évaluation de l’architecture a été réalisée au moyen d’une implémentation et du déploiement d’un système réel. Les services eLearning et eTeaching ont été développés de façon conjointe, afin d’offrir un moyen d’échanger des contenus sans pour autant stresser le réseau cellulaire réel [71, 72]. Les auteurs notenttoutefois les lacunes de leur architecture restant à combler avant de parvenir à un système parfaitement opérationnel, telles que le coût et la facturation des utilisateurs, ou encore le nombre de ces derniers.

Délestage des données en espace libre (via Wi-Fi) 

Le délestage des données (mobile data offloading) est considéré actuellement comme étant l’une des approches les plus prometteuses pour diminuer la charge des réseaux à infrastructure. Il suscite de ce fait un intérêt croissant dans la communauté scientifique. L’idée de base consiste à exploiter le spectre non employé par les autres technologies (tel que celui du Wi-Fi) pour y basculer une partie du trafic initialement destiné à être convoyé par le réseau cellulaire (voir figure 2.3). Cela permet naturellement d’alléger la charge du réseau cellulaire et de diminuer le coût de transmission. Le délestage de trafic a été largement étudié dans la littérature et des états de l’art détaillés sont présentés dans [8, 80]. Dans un souci de concision, nous nous limiterons ici aux propositions qui nous semblent les plus proches de ce travail de thèse. D’après Lee et al., il existe deux types principaux de délestage de données [62]. Le type le plus courant est appelé on-the-spot offloading : il consiste à rediriger tout le trafic mobile vers les AP, dès lors qu’un réseau Wi-Fi est disponible; dans le cas contraire, le trafic continue à transiter par le réseau cellulaire. Le second type, le delayed offloading, ne traite que les informations pouvant tolérer un délai supplémentaire avant d’être délivrées à leurs utilisateurs intéressés : à chaque contenu est associée une durée de validité (deadline) qui a un sens tant du point de vue de l’utilisateur que de celui de l’application finale; les transmissions ont lieu lorsqu’un utilisateur destinataire entre en contact avec un point d’accès Wi-Fi, mais à l’approche imminente de l’échéance, le transfert de bout-en-bout est achevé au moyen de transmissions cellulaires. Les deux types de délestage peuvent ainsi réduire la charge sur l’infrastructure cellulaire et en épargner les ressources. Le positionnement des points d’accèsWi-Fi a été largement étudié dans la littérature [17, 35, 82]. Dimatteo et al. proposent un algorithme pour le positionnement des AP dans un réseau cellulaire [35]. Les données considérées correspondent à de grosses quantités d’information (données issues d’expériences scientifiques) et des fichiers vidéo (c.-à-d. fichier AVI), qui vont occuper 82% du trafic mondial d’ici 2020 [29]. Ces données ont comme caractéristique commune d’être tolérantes au délai. L’algorithme a été évalué avec une trace de mobilité réelle, et les auteurs reportent des résultats très encourageants : près de 50% du trafic est délesté via le Wi-Fi, même avec un nombre relativement faible d’AP. Un point négatif est cependant à signaler : nous notons que l’algorithme proposé repose sur un déploiement séquentiel; de ce fait, il ne peut en aucun cas garantir de fournir le plan de déploiement qui optimiserait le processus de délestage. Ristanovic et al. proposent l’algorithme HotZones qui permet aux AP de couvrir l’ensemble de la zone géographique occupée par le réseau cellulaire [82]. HotZones positionne les AP en fonction de la densité de population des macro-cellules, avec l’idée que plus la cellule est dense, mieux cela devrait être. Cependant, une sous-région d’une macro-cellule dense peut très bien ne pas générer autant de données qu’une sous-région d’une autre macro-cellule moins dense, d’autant que les régions denses ne sont pas nécessairement celles qui génèrent les quantités les plus importantes de données. Avec la même problématique que les deux articles susmentionnés, Bulut et Szymanski développent un algorithme de positionnement qui cherche à maximiser la capacité de délestage en fonction de la densité des requêtes des utilisateurs [17]. Pour ce faire, les auteurs réalisent une modélisation par un programme linéaire, qui s’avère être NPcomplet. L’heuristique utilisée pour la résolution montre que le trafic cellulaire pourrait être réduit de l’ordre de 20% à 65%.

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Table des matières

1 Introduction
1.1 Contexte et motivations
1.2 Défis et positionnement
1.3 Contributions de la thèse
1.4 Les applications ciblées
2 Économiser les ressources cellulaires : Un état de l’art
2.1 Classification des solutions
2.2 Solutions avec infrastructure cellulaire
2.3 Solutions sans infrastructure cellulaire
2.4 Positionnement de la thèse vis-à-vis de l’état de l’art
3 SCoD: Livraison de contenu planifiée en environnement purement cellulaire
3.1 Introduction
3.2 Modèle de système, hypothèses et illustration du problème
3.3 Jusqu’où la tolérance au délai peut-elle aider à économiser les ressources radio?
3.4 SCoD : Livraison de contenu planifiée
3.5 Trace de mobilité et les paramètres d’évaluation
3.6 Résultats d’évaluation
3.7 Conclusion
4 Résister au déferlement de données cellulaires au moyen de communications opportunistes
4.1 Introduction
4.2 Modèle de système et hypothèses
4.3 Les stratégies de diffusion
4.4 La compagne d’évaluation
4.5 Les résultats numériques
4.6 Conclusion
5 Conclusion et Perspectives
5.1 Conclusion
5.2 Perspectives
Références

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