En 2011,330 000 enfants de moins de 15 ans [280 000-390 000] étaient nouvellement infectés par le virus de l’immunodéficience humaine (VIH) et environ 90% d’entre eux vivent dans la région de l’Afrique Sub-saharienne où l’infection à VIH constitue une des causes majeures de mortalité chez les enfants de moins de 5 ans [1]. La mise en place des traitements antirétroviraux a contribué à diminuer significativement, dans les pays à ressources limitées, la mortalité et la morbidité chez les personnes vivant avec le VIH (PVVIH), incluant les enfants. Cependant cette thérapie est complexe avec de nombreuses contraintes d’ordre social, médical et biologique. Chez les enfants infectés, l’observance dutraitement antirétroviral(TAR) est très difficile à obtenir, encore plus particulièrement dans le contexte africain [2]. Il est largement décrit que ce défaut d’observance a pour conséquence néfaste l’émergence de virus résistants aux différentes molécules antirétrovirales reçues, conduisant à l’échec thérapeutique. Cet échec, qui est d’abord virologique, est diagnostiqué très tardivement dans notre contexte avec pour effet délétère une longue période de réplication virale sous TAR entrainant l’accumulation de mutations de résistance. Cette résistance constitue aujourd’hui un réel problème de santé publique car elle compromet l’efficacité du TAR. Au Sénégal le traitement antirétroviral pédiatrique a débuté en 2000 avec la mise en place des premiers projets pilotes de la prévention de la transmission mère-enfant (PTME). Au centre hospitalier national d’enfants Albert Royer (CHNEAR) qui constitue un des sites de référence de cette prise en charge, plus de 294 enfants avaient été mis sous TAR au 31Décembre 2010. Malgré des résultats encourageants sur le plan clinique, peu d’enfants avaient une charge virale indétectable à 6mois de traitement.
L’INFECTION A VIH-1
HISTORIQUE
C’est entre 1983-1985que les premiers cas pédiatriques sont observés en Afrique orientale en milieu hospitalier[7]. En 1987, la première thérapie contre le SIDA, la zidovudine (AZT), est approuvée pour être commercialisée et utilisée. La même année l’OMS a lancé le programme mondial de lutte contre le SIDA [8]. En 1994, le groupe américain d’essai clinique sur le SIDA pédiatrique a mis au point le premier schéma thérapeutique pour réduire la transmission mère-enfant du VIH [8]. En 1996, le traitement antirétroviral hautement actif (HAART) est mis en place [8].
Au Sénégal
En 1986, les premiers cas de Sida sont dépistés.
En 1998, l’initiative sénégalaise d’accès aux antirétroviraux (ISAARV) est lancée [9].
En 2000, les premiers sites pilotes de la PTME et de la prise en charge pédiatrique sont implantés à Dakar [9].
En 2004: débute le processus de décentralisation du programme au niveau national.
En 2010, le pays comptait 101 sites de prise en charge adultes, 74 sites de prise en charge des enfants vivant avec le VIH, 104 sites PTME et 12 249 PVVIH
dont 794 enfants bénéficiaient d’une trithérapie [10].
ÉPIDEMIOLOGIE
Globalement 34 millions de personnes [31,4millions -35,9millions] vivaient avec le VIH en fin 2011 et 2,5millions étaient nouvellement infectés [2,2millions -2,8 millions]. Le nombre de personnes nouvellement infectés a diminué de 20% par rapport en 2001.Cette baisse est surtout observée aux Caraïbes (42%) et en Afrique subsaharienne (25%). Le nombre de personnes décédés à cause du SIDA a chuté à1,7millions en 2011 contrairement à un pic de 2,3 millions en 2005.Ce qui représente une diminution de 24% de la mortalité liée au SIDA. Les trois quart de ces décès ont été enregistrés en Afrique subsaharienne. Cette réduction résulte de la baisse des nouvelles infections et de l’accès au TAR.
CLASSIFICATION DU VIRUS
Le VIH est un lentivirus à ARN appartenant à la famille des Retroviridae et au genre Lentivirinae, nécessitant une enzyme pour transcrire son ARN en ADN.[13]. Le comité international de taxonomie des virus a regroupé les genres de la familleRetroviridae en rétrovirus dits simples (alpharétrovirus, bétarétrovirus et gammarétrovirus) et en rétrovirus complexes (deltarétrovirus, epsilonrétrovirus, lentivrus et spumavirus) .
Le VIH est constitué de deux types le VIH-1et le VIH-2 et chaque type est divisé en quatre groupes distincts :
➤ le groupe M (majoritaire) avec les sous-types A B C D F G H J K ;
➤ le groupe O (Outlier) ;
➤ le groupe N ;
➤ le groupe P.
STRUCTURE VIRALE
Le VIH-1 est un virus sphérique de 90 à 120 nanomètres (nm) de diamètre, qui comporte: une enveloppe protectrice ou coque virale d’origine cellulaire, un core viral ou nucléocapside et des informations génétiques ou génome.
➤ La coque virale est constituée de deux couches lipidiques et de deux types de glycoprotéines : gp20 et gp41.La molécule gp41 traverse la bicouche lipidique ; la molécule gp120 occupe une position plus périphérique et interagit avec le récepteur CD4 des cellules hôtes.
➤ Le core viral ou nucléocapside est constitué de diverses protéines p7, p9, p17,p24. Il contient le génome et les trois enzymes : la transcriptase inverse, l’intégrase et la protéase, nécessaires à la réplication virale.
➤ Le génome est constitué de deux copies identiques d’ARN et, comporte trois régions appelées gag(groupe spécifique d’antigène), pol (polymérase) et env (enveloppe). Ces gènes codent respectivement pour les antigènes de la nucléocapside, les enzymes nécessaires à la réplication virale et les protéines de surface du virion. D’autres gènes accessoires de régulation caractéristiques des lentivirus sont également retrouvés :tat (trans-activor of transcription), rev (regulator of viral gene expression), vif(virion infectivity factor), vpr (viral protein R), vpu (viral proteinU), nef (negative factor)[14].A chaque extrémité du génome est présente une séquence répétitive appelée Long Terminal Repeat (LTR) qui permet l’intégration du pro-virus dans le génome de la cellule hôte.
MODES DE TRANSMISSION DU VIH-1 CHEZ L’ENFANT
Le VIH-1 a été identifié dans la plupart des liquides biologiques, comme le sang, le LCR, le sperme, les sécrétions vaginales, la salive, le liquide amniotique, le lait maternel etc… Il existe divers modes de transmissions du VIH-1 chez les enfants dont la transmission mère-enfant (TME), la transmission sexuelle chez les adolescents et la transfusion de produits sanguins infectés [7].
Transmission mère-enfant
Le taux de transmission d’une mère infectée à son bébé varie entre 15et 25% dans les pays industrialisés et entre 25 et 45% dans les pays en développement [16].
Les nourrissons acquièrent l’infection de leurs mères soit au cours du travail, de l’accouchement ou après la naissance par l’allaitement. Le risque absolu de transmission est de 5 à 10% au cours de la grossesse, 10 à 20% au cours du travail et de l’accouchement et 10 à 20% au cours de l’allaitement [7] Les facteurs de risque liés à la TME sont les facteurs maternels et infantiles suivants [7].
➤ Facteurs maternels :
• une charge virale élevée chez la mère ;
• une grave immunosuppression (numération des lymphocytes CD4 inférieure à 200);
• les carences maternelles en micro-nutriments ;
• la rupture prolongée des membranes, la chorio-amniotite et les IST ;
• les crevasses et les abcès du sein au cours de l’allaitement.
➤ Facteurs infantiles [7] :
• La prématurité ;
• L’allaitement ;
• Le muguet et les ulcérations buccales.
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Table des matières
INTRODUCTION
I. L’INFECTION A VIH-1
I.1. HISTORIQUE
I.2. ÉPIDEMIOLOGIE
I.3. CLASSIFICATION DU VIRUS
I.4. STRUCTURE VIRALE
I.5. MODES DE TRANSMISSION DU VIH-1 CHEZ L’ENFANT
I.5.1. Transmission mère-enfant
I.5.2. Transmission sexuelle
I.5.3. Transfusion de produits sanguins
I.6. PHYSIOPATHOLOGIE DE L’INFECTION A VIH-1
I.6.1. Cellules cibles
I.6.2. Cycle de vie du virus
I.6.2.1. Processus d’entrée du virus
I.6.2.2. Multiplication du virus
I.6.2.2.1. Rétro-transcription
I.6.2.2.2. Intégration
I.6.2.2.3. Bourgeonnement
I.6.2.2.4. Maturation
I.6.3. Histoire naturelle de l’infection à VIH-1
1.7. DIAGNOSTIC
I.7.1. Circonstances de découverte
I.7.2. Diagnostic clinique
I.7.3. Diagnostic biologique
I.8. CLASSIFICATIONS DE L’INFECTION A VIH-1
II. LE TRAITEMENT ANTIRÉTROVIRAL
II.1 OBJECTIFS DU TRAITEMENT ANTIRÉTROVIRAL
II.2. MÉDICAMENTS ARV DISPONIBLES DANS LE MONDE
II.2.1. Différentes classes d’ARV
II.2.1.1. Les inhibiteurs nucléos(t)idiques de la transcriptase inverse (INTI)
II.2.1.2. Les inhibiteurs non nucléos(t)idiques de la transcriptase inverse (INNTI)
II.2.1.3. Les inhibiteurs de protéase (IP)
II.2.1.4. Les inhibiteurs d’entrée du VIH-1
II.2.1.5. Les inhibiteurs de l’intégrase
II.2.2. ARV utilisés en pédiatrie au Sénégal
II.2.3. Différents schémas thérapeutiques chez l’enfant
II.2.3.1. Schéma de première ligne
II.2.3.2. Schéma de deuxième ligne
II.3.MODALITÉS DE PRESCRIPTION DES ARV CHEZ LES ENFANTS
II.3.1.Les préalables
II.3.2. La surveillance du TAR
III. L’ÉCHEC THÉRAPEUTIQUE
IV. LA RÉSISTANCE AU TRAITEMENT ANTIRÉTROVIRAL
IV.1. DÉFINITIONS
IV.2.MÉCANISME GÉNÉRAL DES RÉSISTANCES
IV.3.TYPES DE RÉSISTANCE EN FONCTION DES CLASSES D’ARV
IV.3.1. Résistance liée aux INTI
IV.3.2. Résistance liée aux INNTI
IV.3.3. Résistance liée aux IP
IV.3.4. Résistance aux Inhibiteurs d’intégration
IV.3.5. Résistance aux Inhibiteurs d’entrée
IV.3.6. Résistance aux Inhibiteurs de CCR5
IV.4. TESTS DE RÉSISTANCE
IV.4.1. Tests génotypiques
IV.4.1.1. Interprétation des tests génotypiques
IV.4.1.2. Limites des tests génotypiques
IV.4.2. Tests phénotypiques
IV.4.2.1. Avantage des tests phénotypiques
IV 4.2.2. Limites des tests phénotypiques
CONCLUSION