Résines composites à base de matrice OrMoCer® dans les techniques directes

Phase organique

   La phase organique est également appelée phase active car la réaction de polymérisation se fait en son sein. Elle est composée :
• d’une résine matricielle,
• de diluants ou contrôleurs de viscosité,
• d’un système de polymérisation,
• d’inhibiteurs de prise,
• de pigments.
La résine matricielle est le composé permettant à la RC d’être utilisée sous une phase visqueuse, malléable. En effet, cette propriété est fondamentale dans l’utilisation du matériau car elle permet la mise en place du matériau dans la cavité dentaire. Une fois mise en forme, la résine matricielle se solidifiera grâce à la réaction de polymérisation. Il existe différentes résines matricielles, dont les composants varient : Le monomère de base d’une résine matricielle, permettant la réticulation lors de la polymérisation ainsi que la compatibilité entre résines matricielles et adhésifs est la molécule de di-méthacrylate (Figure 2). Dans le cas du BIS-GMA, la molécule de di-méthacrylate se transforme en un monomère avec une masse moléculaire plus importante grâce, dans un premier temps, à une réaction d’estérification par l’association d’alcools glycériques, et dans un second temps par addition avec du bisphénol A (Figure 3). On peut également retrouver la molécule de méthacrylate dans d’autres monomères notamment l’UDMA (Figure 4). La présence de doubles liaisons aux extrémités des monomères (bis-GMA, UDMA) leur permet de réagir entre eux, et donc d’obtenir une réticulation (réaction de polymérisation). Il a été développé d’autres composants de la résine matricielle pour remplacer le bis-GMA ou l’UDMA dans le but de diminuer la toxicité, la rétraction lors de la prise, ou bien la viscosité. En effet, la présence de bisphénol A dû à la décomposition de la molécule de bis-GMA, peut s’avérer toxique. Effectivement, son faible poids moléculaire rend le risque de diffusion dans le système sanguin non négligeable. Il existe notamment une famille de RC fabriqués par 3M (Silorane®, 3M ESPE, St-Paul, USA) à base de siloxanes, n’utilisant pas les monomères R-diméthacrylates. Les diluants, ou contrôleurs de viscosité, sont utilisés comme leur nom l’indique pour fluidifier la résine matricielle. En effet, l’un des problèmes inhérents aux RC est leur haute viscosité, causée par la présence dans la résine matricielle de molécules de haut poids moléculaire. Il existe plusieurs types de diluants, le plus connu étant le TEGDMA (TriEthylèneGlycolDiMéthAcrylate). Ce sont donc préférentiellement des monomères de faible viscosité qui sont inclus dans la résine matricielle. La quantité de diluant est fonction de la viscosité recherchée : plus on veut fluidifier la résine plus on ajoute de diluant. Or, la quantité de diluants doit être déterminée avec parcimonie. En effet, lorsque la quantité de diluant augmente, on note :
• Une diminution des propriétés mécaniques,
• Une augmentation de la rétraction de prise.
Le système de polymérisation permet de faire passer la résine de l’état visqueux (malléable) à l’état solide (dur). L’initiation de la polymérisation se fait par l’activation d’un amorceur. Elle peut être d’origine photonique, chimique ou bien via l’association des deux processus, on parle alors de RC duale. L’amorceur est décomposé en radicaux libres, qui vont se lier à un monomère et ainsi permettre son activation. Une fois le monomère activé, il va pouvoir lui-même réagir avec un autre monomère et donc créer une réticulation en chaîne pour créer des polymères(Figure 5). Il existe différents agents permettant l’initiation de la réaction. Pour l’activation photonique, c’est la présence d’amorceurs sensibles aux photons qui en est responsable (N,Ndiméthylamino éthyl méthacrylate). Lorsque l’initiation est chimique, ce sont des agents tels que le peroxyde de benzoyle, amorceur activé par des amines tertiaires, qui jouent ce rôle. Suite à cette initiation, nous assistons à une phase de propagation, puis de terminaison. La réaction n’est jamais totale. On retrouve la présence de radicaux libres et de doubles liaisons non consommées sur les extrémités des monomères. Les inhibiteurs de prise, aussi appelés conservateurs, sont utilisés dans le but de conserver le matériau à l’état pâteux. En effet, sans conservateurs, il pourrait y avoir une réaction spontanée de polymérisation des monomères à cause de la chaleur ou de l’exposition à la lumière ambiante. Pour éviter ce type de problèmes, des dérivés phénol sont inclus dans la résine tel que le BHT (2, 4, 6-tritertiary-butyl phénol). C’est en raison de cet effet inhibiteur qu’il faut éviter de mettre en contact une RC avec des ciments à base d’oxyde de zinc eugénol (ex : ciment provisoire IRM®) qui sont des dérivés phénol. Afin de permettre la polymérisation de la couche superficielle du matériau, il est recommandé d’isoler la RC du contact de l’oxygène de l’air ambiant, au moyen de vaseline par exemple, pour éviter cette inhibition de la polymérisationEnfin, les pigments vont permettre d’influer sur la teinte de la RC, afin de répondre aux besoins esthétiques lors de leur utilisation.

Charges

   Les charges font partie intégrante de la RC, elles constituent la “phase inerte”, ainsi nommée car il n’y a pas de polymérisation en son sein. Elles sont liées à la matrice organique par l’intermédiaire du silane. Il existe différents types de charges qui varient en fonction de leur composition, de leur taille ainsi que de leur pourcentage dans la RC. Dans la majorité des RC, on retrouve des charges minérales, notamment la silice sous forme cristalline (quartz) ou non cristalline (verre boro-silicaté), mais aussi des verres de métaux lourds tels que le silicate de verre de baryum ou de strontium permettant de rendre le matériau radio-opaque. Il existe également des charges organo-minérales, composées d’un noyau minéral sur lequel viennent se greffer des groupements multifonctionnels de méthacrylates pré-polymérisés noyés dans la résine. En outre, on trouve des polymères pré-polymérisés, comportant des charges minérales incluses dans une résine non polymérisée. La taille des charges varie de 0.02 jusqu’à 50 µm : on parle de RC nano-chargés pour les charges les plus petites, de micro-chargés pour les charges de taille moyenne et de macro-chargées pour les grosses particules de verre ou de quartz. Certaines RC comportent des charges de tailles différentes ; on parle dans ce cas de RC hybride. Le pourcentage de charges est également capital car il va déterminer les propriétés mécaniques et physiques du matériau. Plus le taux de charge est élevé, plus la viscosité du matériau augmente. Ainsi plusieurs formulations permettent de créer des RC aux propriétés mécaniques, physiques et esthétiques acceptables en jouant sur la taille, la composition, la forme et le pourcentage des charges.

Cytotoxicité

   La cytotoxicité des RC est due au relargage de monomères non consommés lors de la polymérisation. En effet, le taux de conversion des monomères de méthacrylate en polymères lors de l’application au fauteuil est d’environ 50%. Par conséquent, il est possible que des molécules cytotoxiques soient libérées dans la pulpe. Les fabricants cherchent donc à répondre à ces problématiques. Pour cela d’autres gammes de RC ont été créées, telles que celle des RC utilisant la technologie OrMoCer®.

Avantages liés à la technologie OrMoCer®

   La technologie OrMoCer® cherche donc à répondre aux problématiques rencontrées avec les RC conventionnelles. Nous allons nous pencher sur certains paramètres déterminants, tels que la rétraction de prise ainsi que la cytotoxicité du composite.
Rétraction de prise Des études in vitro montrent que les RC avec monomères modifiés présentent un retrait de polymérisation volumétrique moins important que les résines à base de méthacrylates conventionnels. Afin d’expliciter ces caractéristiques, nous prendrons comme exemple la RC commercialisée par Voco (Admira fusion®). Le retrait volumétrique au cours de la polymérisation a été déterminé selon la méthode du disque collé décrite par Prof. Watts (Université de Manchester) (Figure 14). Le résultat obtenu par cette méthode est un retrait de volume moyen de 1,25% de la RC. On peut observer sur le diagramme le niveau de rétraction volumétrique de la RC Admira Fusion®, comparé à d’autres RC présentes sur le marché. On retrouve toujours une perte volumétrique de la RC ; cependant elle est inférieure à celle observée avec les RC conventionnelles. L’explication réside dans la présence de chaines polymériques de hauts poids moléculaire à l’état initial de la RC (Figure 14). La diminution volumétrique observée s’explique par la présence de monomères de méthacrylates dans la matrice OrMoCer® (Figure 15). Mais c’est aussi parce que la phase organique est en quantité inférieure, suppléée par une matrice inorganique (O-Si-O).
Cytotoxicité La cytotoxicité est également un facteur significatif dans la conception d’une RC. En effet la réaction de polymérisation du matériau n’est jamais totale, ainsi il existe certains monomères de faible poids moléculaire libérés dans la circulation sanguine (ex. bisphénol A). La technologie OrMoCer® vise à diminuer le pourcentage de monomères libérés suite à la polymérisation. En effet, lors de la prise du matériau, seule la partie organique participe à la réaction de polymérisation ainsi le réseau créé, associant matrice organique et inorganique, augmenterait la biocompatibilité.

Essais cliniques contrôlés randomisés à 5 ans

   Le but de cet essai clinique prospectif randomisé a été d’évaluer les performances de deux systèmes de restauration OrMoCer®:
– AD, Admira® / Admira Bond®, VOCO
– DE, Definite® / Etch & Prime 3.0®, Dentsply et d’une RC hybride à base de bis-GMA
– TC, Tetric-Ceram® / Syntac®, Ivoclar-Vivadent dans des cavités de classe II.
Parmi les 128 restaurations occlusales-proximales (44AD, 43DE et 41TC) placées chez 32 patients adultes, il en est resté 77 (22 AD, 29 DE et 26 TC) disponibles pour l’évaluation au bout de 5 ans. Le principal problème rencontré dans cette étude était l’abandon des patients. Ceci est le souci majeur des essais cliniques (perdus de vue). Comparés aux valeurs initiales, la plupart des systèmes de restauration ont montré une dégradation statistiquement significative de l’intégrité marginale, de la rugosité de la surface et du point de contact. Dans tous les matériaux, des défaillances sont survenues. L’analyse log-rank des différentes courbes de survie (Tableau 6) n’a montré aucune différence significative (p = 0,10) entre les trois systèmes de restauration composites après 5 ans.

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Table des matières

RESINES COMPOSITES A BASE DE MATRICE ORMOCER® DANS LES TECHNIQUES DIRECTES
I- INTRODUCTION
A- Composition des RC
Phase organique
Charges
Silane
B- Problématiques liées aux RC
Rétraction de prise
Cytotoxicité
C- Particularités des matrices OrMoCer®
Composition de la matrice OrMoCer®
Aspect macroscopique
Aspect microscopique
II. TECHNOLOGIE
A- Place des OrMoCer®s dans les RC actuelles
A- Système de polymérisation des RC à matrice OrMoCer®
B- Avantages liés à la technologie OrMoCer®
Rétraction de prise
Cytotoxicité
III. EVALUATION CLINIQUE
A- Essai clinique contrôlé randomisé a 1an
B- Essais cliniques contrôlés randomisés à 2 ans
– Clinical Evaluation of Restorations with Ormocer or Methacrylate Based Materials
– Two-year Clinical Evaluation of Ormocer, Nanohybrid and Nanofill Composite Restorative Systems in Posterior Teeth
C- Essais cliniques contrôlés randomisés à 3 ans
– Clinical Performance of Ormocer, Nanofilled, and Nanoceramic Resin Composites in Class I and Class II Restorations: A Three-Year Evaluation
– A Prospective Randomised Clinical Trial of One Bis-GMA-Based and Two Ormocer-Based Composite Restorative Systems in Class II Cavities: Three-Year Results
D- Essais cliniques contrôlés randomisés à 5 ans 
E- Synthèse des résultats des études
F- Revues systématiques de la littérature
– Survival of Directly Placed Ormocer-Based Restorative Materials: A Systematic Review and Meta-Analysis of Clinical Trials
– Meta-Analysis of the Clinical Behavior of Posterior Direct Resin Restorations: Low Polymerization Shrinkage Resin in Comparison to Methacrylate Composite Resin
IV. CONCLUSION
V. ANNEXES

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