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Caractéristiques de la combustion sans flamme
La combustion MILD permet d’atteindre des niveaux d’émissions d’oxydes d’azote très faibles, même en présence d’un fort préchauffage de l’air, lorsque les réactifs sont dilués par des produits de combustion dans un environnement à haute température. De nombreux articles, portant aussi bien sur des études expérimentales que numériques, traitent de systèmes de combustion opérant sous ce principe bien qu’il y soit fait référence sous des noms différents. De manière générale, la combustion sans flamme présente une ou plusieurs de ces caractéristiques majeures :
• pas de flamme visible ;
• haute efficacité de combustion ;
• gradients de température faibles ;
• peu de bruit de combustion ;
• pas ou peu d’émissions d’oxydes d’azote et de monoxyde de carbone ;
Un point sur les termes employés dans la littérature pour qualifier la combustion sans flamme
Différentes dénominations du régime de combustion sans flamme ont été évoquées dans la littérature. Le tableau 1.1 résume les principales appellations utilisées, ainsi que les caractéristiques fondamentales ayant servi à définir le régime de combustion.
Bien qu’une définition générale de la combustion sans flamme ne soit pas établie, il existe des liens fondamentaux entre chacune des définitions. En par-ticulier, en combustion sans flamme, la recirculation massive de produits de combustion vient diluer les réactifs avant combustion, ce qui a pour effet d’ho-mogénéiser le champ de température et de diminuer les émissions de polluants. Dans un soucis de lisibilité, on adoptera au long de ce manuscrit les termes de combustion sans flamme ou de combustion MILD pour qualifier ce processus.
Recirculation des produits de combustion – Dilution des réactifs
Un des aspects fondamentaux de la combustion sans flamme est que cette combustion présente des gradients de température faibles devant ceux que l’on retrouve dans des régimes de combustion classique. Ceci est obtenu en diluant les réactifs avec des produits de combustion. La dilution peut être effectuée a posteriori via une pré-combustion (le diluant est créé par une combustion annexe avant de pénétrer dans la configuration) ou bien directement dans la chambre de combustion (le diluant est créé dans la chambre de combustion). De toute évidence, une dilution interne suffisante pour obtenir un régime de combustion sans flamme sera dépendante de l’aérodynamique de la chambre de combustion, de sa géométrie et des conditions sur les quantités de mouvements aux injections de combustible et de comburant, destinées à assurer de larges zones de recirculation.
La dilution par les produits de combustion permet d’homogénéiser la tem-pérature au sein du four et d’éviter les points chauds dans la chambre de com-bustion. Cela a pour conséquence directe de diminuer la formation des oxydes d’azote. D’un point de vue technique, la dilution des réactifs se fait en mélan-geant localement combustible et comburant avec des produits de combustion avant la zone de réaction. L’effet principal obtenu est que les gradients de tem-pérature sont moins importants que dans le cas d’une combustion convention-nelle. Du fait de l’injection d’air généralement préchauffé et de la température de flamme moins importante, le gradient de température au sein du domaine est, lui aussi, fortement diminué. Cette technique nécessite cependant des précau-tions : la dilution doit avoir lieu avant que les réactifs purs ne brûlent. Lorsque la dilution dépasse un certain seuil, on atteint le régime de combustion sans flamme (Wunning and Wunning (1997)). Au contraire, si la dilution n’est pas favorisée ou si elle est trop tardive, la combustion peut être conventionnelle ou instable. Cela peut s’illustrer en traçant les localisations des zones de combus-tion en fonction de la température de fonctionnement d’un four et d’un facteur d’entraînement des produits de combustion Kv = m˙e/(m˙a + m˙f ), où m˙e,m˙a et m˙f correspondent respectivement aux débits massiques de gaz brûlés, d’air et de fuel (Fig.1.2). Notons que dans ce diagramme, le domaine de combustion sans flamme doit aussi être borné par une droite lorsque la température de fonc-tionnement devient trop importante ; le cas échéant, la production de polluants explose et le risque de sortir du mode de combustion sans flamme est accru. La figure 1.2 montre clairement l’importance primordiale de la dilution, et donc des recirculations, sur l’établissement d’un régime de combustion MILD.
État de l’art en modélisation de la combustion diluée
Maintenant que les problématiques de modélisation sont exposées, nous nous attardons ici sur un état de l’art de la modélisation de la combustion sans flamme. Cela permettra de dégager la nécessité de développer un nouveau mo-dèle de combustion turbulente adapté.
Configurations non-confinées
Pour s’affranchir de la complexité de modélisation inhérente à la combustion sans flamme, certaines études se sont focalisées sur des configurations simpli-fiées permettant de négliger certains phénomènes physiques comme une dilution variable des réactifs, ou encore les pertes thermiques.
La flamme de Cabra (Cabra et al. (2002); Cabra et al. (2005); Gordon et al. (2007)) permet d’étudier, à dilution fixée (la dilution est imposée en entrée : le combustible et le comburant sont effectivement viciés au préalable), les effets d’auto-allumage sur la stabilisation de la flamme et de diffusion en aval de la flamme, en négligeant les effets de pertes thermiques. Bien que cette flamme ne soit pas représentative du régime de combustion sans flamme, elle constitue un premier pas dans l’étude des caractéristiques de la zone de réaction pour des mélanges dilués par des produits de combustion.
De nombreux articles sont dédiés à la simulation de cette flamme. Par exemple, Vicquelin (2010) a développé un modèle de combustion turbulente adapté à cette configuration qui permet de reproduire correctement la hauteur de lift-off de la flamme dans le cas hydrogène-air à l’aide d’une tabulation des grandeurs thermo-chimiques. Pour cette configuration, la prise en compte fine de l’auto-allumage d’un mélange est essentielle pour prédire correctement les champs d’espèces et de température.
Une autre configuration utilisée pour étudier la combustion MILD est le JHC (Jet in Hot Coflow) (Dally et al. (2002); Medwell et al. (2007); Medwell et al. (2008)). Cette expérience présente une injection d’air et de combustible (méthane-hydrogène) séparées par un coflow d’air chaud vicié par des gaz brû-lés. Pour cette configuration, une série de mesures détaillées de la température et des concentrations d’espèces ont été faites pour différentes concentrations en oxygène en entrée de système, différents nombres de Reynolds pour l’injection de combustible et de comburant et pour des compositions de fuel différentes. Encore une fois, cette expérience permet de s’affranchir des effets de pertes thermiques et de la recirculation des produits de combustion en imposant en entrée du coflow divers niveaux de dilution. Elle correspond toutefois aux conditions de forte dilution de l’air que l’on retrouve en combustion sans flamme.
Comme pour la configuration de Cabra et al. (2002), les articles traitants de la modélisation et de la simulation du JHC sont nombreux (Kim et al. (2005), De et al. (2011)). Pour ne prendre que les modèles de flammelettes en exemple, on peut citer l’étude de Christo and Dally (2005), qui ont conduit des simulations RANS du brûleur et ont évalué la précision de différents modèles de turbulence, de schémas cinétiques et de modèles de combustion comme le modèle de flammelettes stationnaires de Peters (1984), l’EDC (Magnussen and Hjertager (1977)) ou un modèle à transport de fonctions de densité de pro-babilités. Ils font état de l’incapacité du modèle de flammelettes stationnaires à capturer la structure de flamme dans cette configuration. Très récemment cependant, Ihme et al. (2012) ont mis en place une méthode de tabulation de flammelettes stationnaires permettant de prendre en compte les variations de composition des réactifs dues au coflow d’air vicié. Cette approche a été validée par des simulations aux grandes échelles de la turbulence (LES), et a permis de montrer la viabilité d’une approche type flammelette pour une configuration fortement diluée.
Configurations confinées
Dans des configurations complexes (système confiné, géométrie complexe, injections multiples, …), la mise en place de systèmes de mesures est délicate, notamment pour les mesures optiques en raison du fort rayonnement des parois. Beaucoup d’études numériques sur le régime de combustion MILD en configu-ration complexe souffrent de cette limitation et ne proposent pas de compa-raison avec des données expérimentales. Toutefois, trois aspects fondamentaux couplés peuvent être dégagés pour une simulation d’un régime de combustion sans flamme dans des conditions semi-industrielles ou industrielles : l’aérody-namique de l’écoulement et la modélisation du mélange, les pertes thermiques aux parois et par rayonnement, et enfin la cinétique chimique et les interactions chimie-turbulence.
Dynamique des fluides et mélange
La description du mélange, et a fortiori de l’aérodynamique d’une chambre de combustion, est primordiale à l’obtention de résultats cohérents. Il est effec-tivement impensable de valider un modèle de combustion ou de tirer quelque conclusion que se soit si la composition à un point de calcul n’est pas la même que dans la réalité. Aussi évident que cela puisse paraître, il s’agit cependant d’un problème très important dans la mesure ou un grand nombre d’expé-riences ne présentent aucune donnée sur les champs de vitesses et ses fluctua-tions. De plus, en combustion MILD, la prédiction des zones de recirculation et des impacts de la dilution des réactifs par les gaz brûlés est tributaire de la modélisation de la turbulence.
Néanmoins, une description de la turbulence fine via des approches LES ou DNS est prohibitive dans un cadre industriel. C’est la raison pour laquelle la très large majorité des travaux de simulation numérique en combustion sans flamme est effectuée avec une approche RANS : on ne résout aucune échelle de la turbulence, on modélise l’évolution des champs moyens de façon stationnaire. Le modèle le plus utilisé est le modèle k − ǫ standard pour lequel on décrit la viscosité turbulente µt introduite dans l’équation de conservation de la quantité de mouvement moyennée au sens de Favre via l’énergie cinétique turbulente k et sa dissipation ǫ Jones and Launder (1972) :
– Coelho and Peters (2001)
– Mancini et al. (2002)
– Yang and Blasiak (2005)
– Kumar et al. (2007)
– Kim et al. (2007)
– Mancini et al. (2007)
– Parente et al. (2008)
– Schütz et al. (2008)
– Schaffel et al. (2009)
– Khazaei et al. (2009)
Un des problèmes majeurs du modèle k − ǫ est son incapacité à reproduire correctement les jets ronds. Pour pallier cette déficience, le modèle k − ǫ Rea-lisable (encore appelé RNG ou k − ǫ modifié) a été développé. Il est en fait possible de modifier les constantes de modélisation du modèle standard pour retrouver des comportements corrects pour les jets ronds. La liste des travaux utilisant le modèle k − ǫ Realisable est donnée ici :
– Mancini et al. 2007
– Dally et al. 2004
– Galletti et al. 2007
– Galletti et al. 2009
Aucun modèle n’utilisant une description de la turbulence via des modèles plus élaborés (type Reynolds Stress Models) ou de simulation aux grandes échelles n’a été effectué jusqu’à ce jour pour des fours opérant en régime de combustion MILD. Il est cependant intéressant de noter qu’un calcul LES de combustion sans flamme a été effectué sur une turbine à gaz (Duwig et al. 2007,2008). En effet, l’intérêt de ces configurations-là est que les vitesses d’in-jection sont extrêmement élevées et que les dimensions géométriques y sont très petites. Cela induit des temps convectifs faibles, mais aussi des maillages bien moins volumineux à générer et à traiter. L’inconvénient majeur de cette expérience numérique est son manque de comparaison avec des données expé-rimentales autres qu’en sortie de chambre.
Pertes thermiques par rayonnement
Le but d’un brûleur industriel est de transmettre un maximum de la cha-leur des gaz brûlés. La combustion n’est donc pas adiabatique et les gaz brûlés perdent de l’enthalpie aux parois et par rayonnement. La bonne prédiction du champ de température est en partie tributaire d’une modélisation correcte du rayonnement. L’approche la moins coûteuse est de modéliser le rayonne-ment sous l’hypothèse de limite optiquement mince avec une approximation de propriété de gaz gris pour n’avoir à ajouter dans l’équation de conservation de l’énergie qu’un terme de la forme σ(T 4 − Tref4 ). C’est l’approche utilisée par Coelho and Peters (2001). Une approche plus rigoureuse et précise est de résoudre l’équation de transfert radiatif pour calculer le flux radiatif. Les mo-dèles DOM, pour Discrete Ordinates Model (Fiveland (1984)), et DTM, pour Discrete Transfer Method (Lockwood and Shah (1981)) sont généralement uti-lisés puisqu’ils présentent un bon compromis entre le modèle le plus simple et les modèles les plus élaborés, mais très coûteux, basés sur des algorithmes de Monte-Carlo. En combustion sans flamme, les simulations réalisées ont le plus souvent été effectuées avec un modèle DOM ou DTM :
– Coelho and Peters 2001
– Yang and Blasiak 2005
– Kim et al. 2005
– Galletti et al. 2007
– Parente et al. 2008
– Schaffel et al. 2009
– Galletti et al. 2009
Modèles de combustion turbulente
Pour la simulation de configurations réalistes, les modèles déjà implantés dans les codes commerciaux sont très utilisés. En effet, leur utilisation est facile à mettre en œuvre, les temps de calculs s’avèrent courts devant des modèles académiques plus fondamentaux et l’expérience développée sur ces modèles est déjà conséquente. Ainsi, les modèles EBU (Eddy Break-Up) pour la combus-tion prémélangée et EDM (Eddy Dissipation Model) (Magnussen and Hjertager (1977)) pour la combustion non-prémélangée sont largement utilisés dans un cadre industriel. Le modèle EDC (Eddy Dissipation Concept) permet d’inclure une cinétique détaillée, mais pour un coût CPU nettement plus important que celui du modèle EDM. Une alternative utilisée par Coelho and Peters (2001) est d’utiliser un modèle de flammelette pour lequel l’interaction chimie-turbulence est intégrée via des fonctions de densité de probabilité présumée. Dally et al. (2004), ont mis en avant la nécessité de prendre en compte une chimie hors équilibre pour le calcul de flammelettes. Á partir de 2005 cependant, aucune simulation numérique de combustion MILD ne s’est faite avec un modèle de flammelette, et ce jusqu’en 2012, avec les travaux de Ihme et al. (2012). Une large majorité des simulations a été faite avec des modèles de combustion EDM ou EDC. Les autres modèles de combustion ayant été utilisés dans des confi-gurations industrielles restent cependant fondamentalement proches de l’EDC. Mancini et al. (2007) proposent un modèle de réseau de réacteurs parfaitement mélangés pour décrire la combustion au sein de la chambre. Schütz et al. (2008) développent un modèle de combustion turbulente pour lequel un réacteur par-tiellement mélangé est calculé pour chaque cellule de calcul et pour chaque pas de temps (la simulation est instationnaire). Pour ce faire, ils utilisent un maillage dynamique se raffinant aux zones de dégagement de chaleur pour évi-ter des coûts de calculs prohibitifs. L’interaction chimie-turbulence est traitée de manière semblable au modèle EDC, le temps de réaction τmix en entrée étant cependant recalculé comme une moyenne géométrique des temps carac-téristiques des échelles de Taylor et de Kolmogorov. Clairement, les modèles de flammelette n’ont été que très peu utilisés pour simuler des configurations réalistes de combustion sans flamme.
L’engouement pour les modèles EDM ou EDC pour simuler la combustion MILD est lié au fait que ces modèles ne font pas l’hypothèse que la chimie est rapide devant les temps caractéristiques de mélange. En combustion MILD, la combustion est a priori contrôlée par la cinétique chimique. Autrement dit, le nombre de Damköhler (Da = τturbulent ) est faible devant l’unité dans la zone τchimie de réaction primaire. Cette caractérisation reste cependant hypothétique, car aucune étude n’a réussi à déterminer la structure de flamme dans la zone de réaction localisée en combustion sans flamme. Les calculs RANS ne sont pas suffisants pour étudier le Damköhler local, puisqu’on y calcule que les champs moyens stationnaires. Galletti et al. (2007) montrent cependant que le champ moyen de température et la zone de réaction primaire sont directement reliés à des Damköhler moyens inférieurs à l’unité. L’hypothèse de combustion limitée par une cinétique chimique lente est a priori plus réaliste que l’hypothèse d’une chimie rapide devant les temps turbulents (régime de flammelette). Une étude approfondie du Damköhler local est cependant nécessaire à la connaissance du régime de combustion dans la zone de réaction primaire. Si les Damköhler sont localement faibles, le régime de combustion se rapproche des conditions d’un réacteur partiellement mélangé. C’est en se basant sur une étude du Damköh-ler local moyen que Schütz et al. (2008) proposent un modèle de combustion turbulente pour lequel on calcule de manière instationnaire un PaSR à chaque cellule de calcul.
En combustion MILD, malgré un manque fréquent de validation par des données expérimentales ou par des simulations LES ou de DNS, l’intérêt de modèles « bas-Damköhler » est de pouvoir fournir une référence de calcul in-cluant tous les processus en jeu lors de la combustion sans flamme : chimie hors équilibre (EDC avec chimie détaillée), effet des recirculations et dilution des réactifs ainsi que pertes thermiques.
Conclusions sur les limitations des solutions actuelles
Depuis sa découverte dans les années 80, beaucoup de progrès ont été faits sur la modélisation du processus de combustion MILD. Cependant, il n’existe pas encore de consensus sur l’approche de modélisation à choisir pour fournir des prédictions quantitatives de la combustion sans flamme dans tout le domaine de combustion. Face à cela, nous proposerons dans ce manuscrit une nouvelle approche de modélisation prenant en compte différents points :
• les effets d’une cinétique chimique détaillée ;
• la dilution des réactifs ;
• les pertes thermiques.
Pour valider avec confiance l’approche développée et tenter d’en mesurer les ca-pacités prédictives, nous attacherons une importance particulière à décrire son comportement dans des flammes laminaires soumises à différents niveaux de di-lution et/ou de pertes thermiques. Nous emploierons aussi des simulations LES pour valider le modèle de combustion turbulent en tirant parti d’analyses ex-périmentales récentes fournissant des données sur la température et les espèces dans l’enceinte des systèmes étudiés.
Structures de flamme en combustion MILD
Le modèle de combustion doit fournir les termes sources chimiques interve-nant dans les équations de conservation des espèces. Pour ce faire, il est tout d’abord essentiel de déterminer quelles hypothèses de modélisation peuvent être effectuées au niveau de la structure locale de flamme en combustion MILD. C’est l’objet de cette section.
Comme le font remarquer Poinsot and Veynante (2005), la classification des régimes de combustion non-prémélangés en fonction d’échelles caractéristiques n’est pas triviale et fait l’objet de controverses. En combustion sans flamme, diverses hypothèses ont été formulées sur la structure de flamme. Nous pas-serons ici en revue les différentes approches, avant de formuler les hypothèses fondatrices du modèle de combustion développé dans cette thèse.
État de l’art – Applicabilité du régime de flammelette en combustion MILD
La plupart des systèmes de combustion industriels présentent différentes structures de flamme locales et différents nombres de Damköhler locaux. Cela peut mener à des phénomènes localisés d’extinction et d’allumage de mélanges. Aucune étude expérimentale ou numérique n’est parvenue à décrire avec préci-sion la dynamique moléculaire d’un régime de combustion sans flamme. Pour ce faire, il faudrait des expériences dédiées, mais la mise en œuvre d’expériences précises dans un four à combustion sans flamme reste une tâche très difficile. Une autre alternative serait de réaliser une simulation directe (DNS) représen-tative d’une combustion sans flamme. Des études commencent à s’y intéresser (van Oijen (2011)), mais elles ne fournissent pas encore suffisamment d’infor-mations quant aux structures de flammes rencontrées dans des configurations complexes de combustion MILD.
Malgré tout, la combustion sans flamme a souvent été comparée à un réac-teur parfaitement mélangé (de Joannon et al. (2005),de Joannon et al. (2007),Sa-bia et al. (2007)). Sous cette hypothèse, la combustion est alors supposée contrô-lée par auto-allumage local du mélange et le champ de température est homo-gène comparé à une combustion classique. Néanmoins, la structure de flamme locale n’est pas prise en compte : les phénomènes diffusifs ne sont pas intégrés et il ne peut y avoir de propagation d’un front de flamme. Bien que l’aug-mentation de température dans la zone de réaction soit faible en combustion MILD, cette hypothèse est difficilement valide dans toute une configuration, et notamment dans les régions proches des systèmes d’injection, où des vitesses d’injection très élevées, et donc de très faibles temps de résidence et de forts taux de dissipation scalaire peuvent exister (Dally et al. (2004)).
Ce constat est aussi fait par Yokomori et al. (2007). Bien que l’on estime souvent que la zone de réaction en combustion MILD soit proche d’un réacteur mélangé (zone de réaction épaisse), ces auteurs ont mis en avant expérimen-talement de forts pics de réaction impliquant l’existence de zones de réaction fines. Ils ont aussi montré que ces zones de réaction changeaient rapidement dans le temps et dans l’espace. Ces résultats sont aussi avancés dans une étude expérimentale très récente de Duwig et al. (2012).
En utilisant des simulations numériques RANS, Awosope and Lockwood (2005) ont classifiés trois applications de systèmes opérants en régime combus-tion MILD dans un diagramme de Borghi : un four de laboratoire, un prototype de turbine à gaz de post-combustion et un four HiTAC semi-industriel. Ce dia-gramme positionne les régimes de combustion en fonction d’échelles caractéris-tiques 3. Awosope and Lockwood ont montré que pour les trois configurations, la combustion s’initiait dans le régime de flamme épaissie mais suivait des che-mins différents par la suite (Fig. 1.8). Pour le four de laboratoire et la turbine, la combustion a principalement lieu dans le régime de Perturbed Flamelet Re-gime (régime de flammelette perturbée), alors que le four semi-industriel opère en régime de flammelette. En terme d’interactions entre la turbulence et la ci-nétique chimique, cela implique que dans les deux premiers cas, la turbulence perturbe la structure de flamme locale, mais qu’elle influence moins la cinétique chimique dans le cas du four HiTAC.
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Table des matières
Introduction
1 Processus inhérents à la combustion sans flamme
1.1 Introduction
1.2 Caractéristiques de la combustion sans flamme
1.2.1 Un point sur les termes employés dans la littérature pour qualifier la combustion sans flamme
1.2.2 Émission lumineuse
1.2.3 Préchauffage des réactifs
1.2.4 Recirculation des produits de combustion – Dilution des réactifs
1.2.5 Émissions polluantes dans le contexte de la combustion MILD
1.3 Stabilité du régime de combustion sans flamme
1.4 Problématiques de modélisation
1.4.1 Importance d’une cinétique chimique détaillée
1.4.2 De l’influence de la dilution sur les trajectoires chimiques
1.5 État de l’art en modélisation de la combustion diluée
1.5.1 Configurations non-confinées
1.5.2 Configurations confinées
1.6 Structures de flamme en combustion MILD
1.6.1 État de l’art – Applicabilité du régime de flammelette en combustion MILD
1.6.2 Hypothèse de modélisation adoptée – Description générale de l’approche
1.7 Conclusions
2 Reproduction d’une cinétique chimique détaillée : l’approche FPV
2.1 Introduction
2.1.1 Problématique du coût lié à une cinétique chimique détaillée
2.1.2 Réduction de la chimie détaillée
2.2 État de l’art de la tabulation de la cinétique chimique
2.2.1 Principe général de tabulation de la cinétique chimique
2.2.2 Combustion prémélangée
2.2.3 Auto-allumage dans un mélange homogène
2.2.4 Réacteur partiellement ou parfaitement mélangé
2.2.5 Combustion non-prémélangée
2.2.6 Discussion sur les différences de trajectoires chimiques dans l’espace des phases
2.3 Tabulation de flammelettes à contre-courant non-prémélangées
2.3.1 Structure de flamme dans l’espace de fraction de mélange
2.3.2 Modèle de flammelette stationnaire
2.4 Approche FPV (Flamelet-Progress Variable approach)
2.4.1 Formalisme FPV
2.4.2 Analyse de l’approche FPV
2.5 Prise en compte des pertes thermiques avec une approche FPV
2.6 Stockage de la base de données
2.7 Conclusions
3 Tabulation de la cinétique chimique pour la combustion diluée soumise à des pertes thermiques
3.1 Introduction
3.2 Hypothèses de modélisation
3.2.1 Composition du diluant
3.2.2 Présence des réactifs dans les gaz frais
3.2.3 Échanges thermiques
3.2.4 Résumé des hypothèses : degrés de liberté autorisés
3.3 Génération de flammelettes stationnaires diluées
3.3.1 Définitions – Formulation des conditions limites de flammelettes stationnaires
3.3.2 Réactivité des conditions limites
3.3.3 Problématique de caractérisation – Influence de la dilution 67
3.4 Extension de l’approche FPV – Paramètres de contrôle
3.4.1 Caractérisation du mélange
3.4.2 Caractérisation des effets hors équilibre
3.5 Structure de flamme en régime dilué
3.5.1 Diluant à température adiabatique de combustion (T D = T D|β=0)
3.5.2 Diluant avec pertes thermiques (T D < T D|β=0)
3.5.3 Trajectoires potentielles – Compétition entre les phénomènes de dilution et de pertes thermiques
3.6 Impacts des pertes thermiques
3.7 Éléments de comparaison a priori des modèles DFPV et NADFPV 90Table des matières xi
3.8 Conclusion
4 Couplage de la tabulation avec les équations de conservation
4.1 Introduction
4.2 Relations de passage
4.2.1 Caractérisation de la dilution
4.2.2 Caractérisation des pertes thermiques – cas général
4.2.3 Caractérisation des pertes thermiques – cas simplifié DFPV
4.3 Équations de transport des variables de couplage
4.4 Couplage avec un formalisme LES
4.4.1 Équations de transport filtrées
4.4.2 Fermeture du terme source de la variable de dilution
4.4.3 Fermeture des termes source chimiques : fonctions de densité de probabilité
4.4.4 Relations de passage filtrées
4.5 Récapitulatif
5 Application à une configuration adiabatique
5.1 Introduction
5.2 Configuration expérimentale
5.3 Configuration numérique
5.3.1 Maillage
5.3.2 Conditions limites
5.3.3 Temps physiques simulés et moyennes
5.3.4 Tables thermochimiques de couplage
5.4 Topologie de l’écoulement
5.4.1 Champs de vitesse axiale
5.4.2 Structures dynamiques
5.5 Comparaison de champs instantanés
5.6 Comparaison avec les données expérimentales
5.6.1 Comparaisons suivant l’axe longitudinal
5.6.2 Comparaisons suivant différentes coupes radiales
5.7 Analyse des simulations LES
5.7.1 Représentation en nuages de points
5.7.2 Trajectoires chimiques dans l’espace des phases
5.7.3 Structure de flamme
5.8 Conclusion
6 Application à une configuration à parois refroidies
6.1 Introduction
6.2 Configuration expérimentale
6.3 Configuration numérique
6.3.1 Maillage
6.3.2 Conditions limites
6.3.3 Temps physiques simulés et moyennes
6.3.4 Tables thermochimiques de couplage
6.4 Topologie de l’écoulement
6.5 Répartitions instantanées de grandeurs thermochimiques
6.6 Comparaison avec les données expérimentales
6.6.1 Run 4 : φG = 0, 58
6.6.2 Run 2 : φG = 0, 77
6.6.3 Influence de la modélisation de l’injection d’air
6.6.4 Un point sur les résultats
6.6.5 Modélisation des pertes thermiques
6.7 Analyse des simulations LES
6.7.1 Représentation en nuages de points
6.7.2 Structure de flamme résolue
6.8 Conclusion
Conclusion
A Équations de l’aérothermochimie
A.1 Description d’un mélange
A.2 Grandeurs thermochimiques
A.3 Equations de transport
A.3.1 Continuité
A.3.2 Quantité de mouvement
A.3.3 Espèces
A.3.4 Conservation de l’énergie
A.4 Hypothèses simplificatrices et équations associées
Références
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