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Caractères culturaux
Pseudomonas aeruginosa pousse à température optimale à 35°C, en aérobiose facilement sur les milieux d’usage courant en bactériologie : gélose nutritive, gélose trypticase-soja, gélose de Mueller- Hinton et sur les milieux utilisés pour les entérobactéries (Dringalski, Mac Conkey, Hektoen…). [10]
Les cultures ont des caractéristiques particulières :
– Elles une dégagent une odeur très caractéristique de seringa due à la production d’ortho-amino-acétophénone
– la production d’une voile fragile et peu épais à la surface des milieux liquides.
– Il est aussi observé une dissociation spontanée en trois types de colonies sur milieux gélosés :
o les colonies la (larges) : grandes, muqueuses avec un centre plus bombé (colonies œufs sur le plat) et un bord irrégulier. Très souvent, ces colonies présentent de petites plages d’autolyse donnant un reflet irisé ou métallique caractéristique. Ce phénomène est lié à l’action d’enzymes protéolytiques bactériennes et est observé chez les souches issues des prélèvements cliniques.
o Les colonies sm (Small) : rondes, petites, convexes et lisses. Ceci est observé chez les souches issues des prélèvements d’environnement.
o Les colonies muqueuses (M) : bombées, opaques, visqueuses, filantes, ou parfois coulantes comme pour Klebsiella. Ceci est observé chez les souches possédant une pseudo capsule constituée d’alginate, isolées des prélèvements de l’appareil respiratoire des patients atteints de mucoviscidose ou du tractus urinaire [10].
– Enfin la production de pigments qui est l’une des caractéristiques principale de cette espèce ; ils servent à son identification et sont fluorescents ou non fluorescents.
La pyoverdine
Pigment jaune vert fluorescent, soluble dans l’eau, insoluble dans le chloroforme, mis en évidence dans le milieu de King B, sa production est inhibée par les ions sodium et favorisée dans les milieux carencés en fer.
La pyocyanine
Pigment bleu soluble dans l’eau et le chloroforme, caractéristique de Pseudomonas aeruginosa qui est la seule espèce à le produire. Elle est mise en évidence dans le milieu de King A.
Autres pigments
On peut trouver des souches mélanogènes dues à un pigment brun noir diffusant, appelé pyomélanine rencontré chez des souches ne produisant pas de pyocyanine ni de pyoverdine. Elles sont isolées des lésions purulentes.
On rencontre parfois des variétés érythrogènes dues à un pigment rouge brun, appelé pyorubine. [7]
Il existe cependant des souches apigmentées (moins de 5% des souches sauvages ne produisent aucun de ces pigments). Elles sont fréquemment isolées chez des malades traités par des antibiotiques.
Caractères biochimiques
Pseudomonas est un bacille à gram négatif non fermentaire, c’est-à-dire ne consommant pas les sucres, oxydase positive, ne produisant pas de gaz entre autres caractères biochimiques. Ces caractères sont résumés dans le tableau ci-dessous. [11]
Caractères antigéniques
Il existe des antigènes O et H, qui permettent de distinguer différents types.
Antigènes O
Les antigènes O sont glucido-lipido-protéiques. On connaît 16 types antigéniquement différents. La classification antigénique initiée par Habs comprend actuellement 20 sérogroupes O (correspondant aux Ag O lipopolysaccharidiques, thermostables) ; 17 antisérums sont disponibles permettant d’identifier 90 à 95% des souches par une technique d’agglutination sur lame (immunosérums diagnostic Pasteur). Les sérogroupes O les plus fréquents sont O1, O5, O6 et O11 (ce dernier ayant une activité ONPG hydrolase). [13].
Antigènes H
Il existe plusieurs types d’antigènes flagellaires, de nature protéique présents chez P. aeruginosa [14].
Les substances élaborées
Les toxines
Exotoxine A
Principal facteur de virulence, elle bloque la synthèse protéique. C’est le composé protéique le plus toxique produit par Pseudomonas aeruginosa avec une DL50 de 0.2mg chez la souris. Elle est sécrétée sous la forme de protoxine inactive de 71kda. Comme la toxine diphtérique, elle est composée de deux domaines : le domaine A qui possède l’activité monoADP-ribosyltransférase. Le domaine B qui interagit spécifiquement avec le récepteur présent à la surface de la cellule hôte, entraine un arrêt de la synthèse protéique et provoque la mort de la cellule par nécrose. [15]
Entérotoxine
Mal connue, elle provoque une accumulation hydrique dans l’anse ligaturée du lapin et pourrait être à l’origine d’entérocolite à bacille pyocyanique. [1]
Hémolysines
Deux hémolysines sont produites : un glycolipide et une phospholipase C.
– Le glycolipide hémolytique est une substance de bas poids moléculaire non enzymatique et non antigénique thermostable et relativement peu toxique qui inhibe la motilité des cils vibratiles trachéaux, perturbe le transport des ions et augmente la libération de mucine.
– La Phospholipase c’est une hémolysine thermolabile dont la synthèse est induite par une carence en phosphate. Elle produit une réaction inflammatoire limitée, œdémateuse, érythémateuse ou hémorragique chez l’animal ressemblant à ce qui s’observe chez l’homme dans certaines formes cutanées d’infection à P. aeruginosa. [1].
Les toxines secrétées via le système de sécrétion de type III
Plusieurs toxines sont maintenant connues pour être sécrétées par P. aeruginosa via ce système: l’Exoenzyme S, l’Exoenzyme T, l’Exoenzyme U et l’Exoenzyme Y.
L’exoenzyme S
C’est la toxine la mieux caractérisée actuellement. Son rôle pathogène est principalement attribuable à l’activité de l’ADP-ribosyltransférase qui entraîne une perturbation de l’organisation normale du cytosquelette. Elle peut aussi moduler la réponse immunitaire et inflammatoire de l’hôte.
L’exoenzyme T
Elle possède une activité GAP spécifique de la GTPase RhoA. Cependant, contrairement à l’exoenzyme S, l’activité catalytique d’ADP-ribosylation FAS-dépendante de l’exoenzyme T n’est pas spécifique in vitro de Ras mais des protéines Crk I et II. Elle empêche l’exocytose, la progression du cycle cellulaire et la phagocytose.
L’exoenzyme U
C’est une protéine de 74 kDa la plus grande des quatre cytotoxines sécrétées par le SSTT de P. aeruginosa. Elle montre une cytotoxicité 100 fois plus grande que celle d’Exoenzyme S. Elle induit in vitro une cytotoxicité sur les cellules épithéliales. In vivo, son expression accroît la virulence de P. aeruginosa dans un modèle de pneumopathie aiguë chez la souris.
L’exoenzyme Y
L’exoenzyme Y est une adénylate cyclase de 48 kDa. Elle provoque une augmentation du niveau intracellulaire d’AMPc, induisant un changement de la morphologie de ces cellules qui deviennent arrondies, ce qui engendre la formation de trous intercellulaires et aboutit à la détérioration des cellules endothéliales pulmonaire. Les modèles in vitro et in vivo étudiant cette cytotoxicité ont montré uniquement un effet mineur de l’Exoenzyme Y [15,16].
Protéase alcaline
Elle est sécrétée par le système de sécrétion de type I et elle dégrade la fibrine. Elle a un rôle pathogène documenté dans les infections cornéennes comme toutes les protéases produites chez P. aeruginosa. Elle participe aussi dans la physiopathologie des pneumopathies aiguës.
Protéase IV
Cette protéase a un rôle pathogène connu dans les kératites à P. aeruginosa. Mais ce n’est que récemment qu’on a mis en évidence son rôle pathogène dans les infections respiratoires par la dégradation des protéines de surfactant A, B et D.
L’élastase
L’activité élastase de P. aeruginosa est médiée par l’action combinée de deux enzymes protéolytiques, LasA et LasB.
L’élastase LasA (également nommée protéase staphylolytique ou staphylolysine) est une protéase à sérine qui agit en synergie avec LasB augmentant ainsi le pouvoir de dégradation. LasA coupe l’élastine, et la rend ainsi plus accessible à l’action d’autres protéases comme LasB.
L’élastase B (également nommée protéase LasB ou pseudolysine) est une métalloprotéase à zinc qui a une activité protéolytique très importante. Cette protéase dégrade l’élastine mais elle est également capable d’inactiver de nombreuses protéines comme les IgA et les IgG, des composants du complément, des constituants majeurs de la matrice de l’épithélium pulmonaire comme l’élastine, le collagène et la fibrine. LasB s’attaque aussi aux cytokines comme l’interféron gamma et au facteur nécrosant des tumeurs (TNF) [15].
Pathologie chez l’homme
Les infections à P. aeruginosa sont remarquablement polymorphes dans leurs expressions cliniques et leurs localisations. Ces infections surviennent plus fréquemment chez les malades fragilisés en milieu hospitalier (malade portant une défaillance locale ou systémique du système immunitaire) [3,4].
Le traitement curatif ou préventif des malades à hauts risques, par des antibiotiques à large spectre, contribue largement à l’augmentation de la fréquence des infections à bactéries multirésistantes, parmi lesquelles P. aeruginosa joue un rôle prépondérant [6].
Les infections pulmonaires
Elles sont exclusivement observées chez les sujets immunodéprimés ou atteints d’affections sous-jacentes. Il peut s’agir de bronchopneumonies aiguës à la suite d’une inhalation d’aérosols contaminés, de sécrétions pharyngées riches en bacilles pyocyaniques ou de contamination directe par des manœuvres instrumentales. Dans la mucoviscidose (fibrose kystique du pancréas), il apparait une surinfection de l’arbre trachéo-bronchique par Pseudomonas qui apparait habituellement dans les premières années de vie. L’évolution se fait vers la bronchectasie, atélectasie et fibrose pulmonaire diffuse [1,4].
Infections oculaires
Les infections oculaires à bacille pyocyanique sont d’une particulière gravité. Elles peuvent débuter par une blépharo-conjonctive pouvant s’étendre à la cornée, puis à l’ensemble du globe oculaire provoquant une fonte purulente de l’œil appelée panophtalmie. L’atteinte oculaire peut être également une localisation métastasique d’une septicémie (endophtalmie). [1, 10].
Otites externes
Elles peuvent survenir chez les nageurs, mais également chez les diabétiques et les personnes âgées, chez qui elles peuvent évoluer de façon grave. L’infection se propage par contiguïté et peut aboutir à une ostéomyélite de la base du crâne, une paralysie des nerfs crâniens et une extension aux sinus. La mortalité reste élevée malgré un traitement rapide [4].
Septicémies
Elles font suite à une infection cutanéo muqueuse et se voient presque exclusivement chez les immunodéprimés en particuliers les patients neutropéniques chez qui Pseudomonas aeruginosa est la troisième cause de septicémie après Escherichia coli et Klebsiella. Elles entrainent une forte mortalité, d’autant que de multiples localisations métastasiques peuvent être observées, incluant la peau, l’œil, le poumon, les os et articulations, le système nerveux et l’endocarde [4].
Endocardites
Les endocardites sont secondaires une à bactériémie ou à une inoculation directe de bacilles pyocyaniques par voie intra veineuse chez les usagers de drogues par voie intraveineuses (UDIV). L’endocardite peut atteindre les valves saines ou lésées généralement tricuspides, ou les prothèses. De nombreuses complications sont possibles : embolies septiques (poumons, rate, cerveau), anévrysmes mycotiques [4].
Plaie traumatique ou post opératoire
Ces patients se contaminent habituellement pendant leur hospitalisation, soit à la suite de manœuvre instrumentale, soit par contamination croisée à partir de malades voisins infectés [10].
Surinfection des lésions cutanées
Chez le sujet sain, on peut observer un onyxis, avec périonyxis réalisant l’ongle vert, des infections interdigitales, des surinfections d’ulcères de jambe.
Chez les brulés, la colonisation des lésions par le bacille pyocyanique est rapide ; à la trentième heure, 20% des lésions sont infectées, 48 % à la quarante-huitième heure et plus de 60% au cinquième jour. Le risque majeur est la septicémie brutale dont le taux de mortalité est élevé. L’eau utilisée par le décollement des pansements et le nettoyage des brûlures peut favoriser la contamination [1,10].
Infections ostéo articulaires
Le bacille pyocyanique est à l’origine de 10% environ des ostéites et de 20% des arthrites septiques. Les ostéites secondaires, les plus fréquentes, succèdent à une fracture ouverte ou à une intervention avec mise place d’un matériel étranger (ostéosynthèse), ou encore à une surinfection d’ulcération chez un diabétique. Les ostéites primitives d’origine hématogène se voient essentiellement chez les UDIV et touchent électivement les vertèbres. L’arthrite purulente sternale est une pathologie propre aux UDIV, de même que l’ostéoarthrite de la symphyse pubienne [1].
Les infections urinaires
Très fréquentes, elles ne sont jamais primitives mais toujours nosocomiales ou iatrogènes secondaires à une exploration des voies urinaires : simple cystoscopie ou sondage vésicale, sonde urétrale à demeure, intervention rénale ou prostatique.
Toutes les circonstances entrainant une stase urinaire sont favorisant (obstacle, vessie neurologique), ainsi qu’une antibiothérapie préalable mal conduite. Les infections sont parfois hématogènes mais le plus souvent ascendantes. Chez la femme, une infection communautaire peut survenir à partir d’un vagin colonisé [1].
Les infections digestives : entérite à bacille pyocyanique
Leur mécanisme physiologique est proche des celui des autres entérites. Elles sont rares. On décrit des épidémies de diarrhées dans des pouponnières, allant de la diarrhée passagère régressant spontanément à la diarrhée grave, voire sévère, pouvant aboutir au décès.
– L’isolement dans des selles de Pseudomonas aeruginosa ne doit pas conduire à une antibiothérapie systématique. Elle n’est indiquée que dans les formes graves [7].
Méningites
Elles sont le plus souvent consécutives à une intervention chirurgicale réparatrice (matériel étranger) en traumatologie, à un drainage (dérivation interne ou drainage externe) ou à une intervention chirurgicale contaminée (intervention sur cholestéatome). Le tableau clinique est souvent fruste. À la PL, le LCR est trouble ; il existe une pléïocytose avec des BGN à l’examen direct [17].
Immunité
La sensibilité extrême à l’infection par le bacille pyocyanique des malades neutropéniques montre à l’évidence le rôle crucial des polynucléaires dans la résistance de cette bactérie opportuniste. Pseudomonas aeruginosa est en effet sensible à la phagocytose par les polynucléaires favorisée par la présence de complément. Toute entrave à cette phagocytose (prolifération bactérienne massive dans le tissu abrasé, leucopénie …) est l’un des mécanismes majeurs d’initiation de ces infections.
La résistance acquise contre Pseudomonas aeruginosa repose sur la production d’anticorps opsonisants dirigés contre les structures pariétales (endotoxines, fimbriae…), contre les enzymes extracellulaires et l’exotoxine A. Ces anticorps peuvent transmettre la protection chez l’animal et leur apparition est corrélée à une amélioration clinique. L’immunité cellulaire jouerait aussi un rôle complémentaire encore incomplètement compris [4].
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Table des matières
NTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS BIBLIOGRAPHIQUES
1. GENERALITES
1.1. Historique
1.2. Taxonomie
1.3. Epidémiologie
2. CARACTERES BACTERIOLOGIQUES
2.1. Caractères morphologiques
2.2. Caractères culturaux
2.3. Caractères biochimiques
2.4. Caractères antigéniques
2.5. Les substances élaborées
3. POUVOIR PATHOGENE NATUREL
3.1. Physiopathologie
3.2. Pathologie chez l’homme
3.3. Immunité
4. DIAGNOSTIC AU LABORATOIRE
4.1. Prélèvements
4.2. Etude au laboratoire
5. SENSIBILITE AUX ANTIBIOTIQUES
5.1. Résistance naturelle
5.2. Résistance acquise
DEUXIEME PARTIE
1. MATERIELS ET METHODES
1.1. Cadre d’étude
1.2. Type d’étude
1.3. Critères d’inclusion
1.5. Technique
2. RESULTATS
2.1. Données épidémiologiques
2.2. Profil de sensibilité aux antibiotiques
3. DISCUSSION
3.1. Limite de la méthodologie
3.2. Epidémiologie
3.3. Répartition des souches de Pseudomonas aeruginosa selon le sexe, l’âge et la nature du prélèvement
3.4. Répartition des souches selon le statut du patient (hospitalisé/externe) .
3.5. Répartition selon le service
3.6. Répartition des souches selon l’année d’étude
3.7. Etude de la résistance globale aux antibiotiques des souches étudiées…
3.8. Etude de la résistance des souches selon le produit pathologique
3.9. Evolution de la résistance de Pseudomonas Aeruginosa selon les années d’étude
CONCLUSION
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