Rémanence de la doramectine contre les strongles des bovins
Spectre d’activité de la doramectine chez les bovins
Le nom depose de la doramectine est DECTOMAXR . Les presentations commerciales sont sous deux formes, selon la voie d’administration :
– la doramectine injectable (doramectine : 1g, excipient huileux QSP : 100 ml). Chez les bovins, elle s’administre par la voie sous-cutanee ou la voie intra-musculaire, au niveau de l’encolure, a la posologie de 200μg/kg (1mL/50kg).
– la doramectine pour-on (doramectine : 5g, octanoate de cetearyle : 160mg, triethanolamine : 0,5mg, isopropanol QSP : 1mL). Elle s’administre par voie locale externe, a la posologie de 500μg/kg (1mL/10kg). On l’applique le long de la ligne dorso-lombaire du bovin, entre le garrot et la base de la queue, la ou la peau n’est pas souillee par de la boue ou du fumier. Skogerboe et al. (1999) (45) ont teste l’efficacite de la doramectine pour-on, a 500μg/kg, avant et apres la pluie.
Ils ont montre que l’efficacite therapeutique dans le traitement des affections a parasites internes et externes, n’est pas affectee par de fortes pluies, 20 minutes avant le traitement ou 20 minutes (voire 40) apres le traitement. Chez les bovins, le spectre d’activite de la doramectine est dirige contre des parasites internes (nematodes, larves d’insectes) et des parasites externes (acariens responsables des gales, poux et mouches). La doramectine possede donc une action anthelminthique et une action insecticide-acaricide, d’ou le nom d’endectocide. Elle n’a pas d’action cestodicide ou douvicide. 1.
Mode d’action
La doramectine interagit de maniere stereospecifique avec des canaux chlore controles par le glutamate (specifiques des Invertebres), qui sont differents de ceux controles par le GABA, au niveau des cellules nerveuses chez les nematodes et au niveau des cellules nerveuses et musculaires chez les arthropodes. Il se produit une augmentation du flux d’ions chlorures entrant dans les cellules, ce qui entraine une hyperpolarisation des membranes. L’activite electrique au niveau des cibles des cellules nerveuses ou musculaires est inhibee. L’effet est une paralysie non spastique, conduisant eventuellement a la mort du parasite, par interference au niveau de la transmission des signaux nerveux. Chez les Mammiferes, les recepteurs au niveau des cellules nerveuses avec lesquels la doramectine peut interagir (GABA recepteurs), sont situes dans le systeme central. Une concentration negligeable de doramectine atteint le systeme nerveux central.
Effet de la formulation
Les etudes initiales axees sur le profil pharmacologique de la doramectine chez les bovins, ont porte sur une formulation experimentale aqueuse a base de micelles, de maniere a proceder a une evaluation de l’activite biologique intrinseque de la substance, sans qu’interviennent des effets lies a la formulation. Wicks et al. (1993) (65) ont alors cherche a identifier une presentation commerciale qui soit bien toleree, et en meme temps, qui permette a la doramectine d’assurer une efficacite therapeutique de longue duree a la dose prevue de 200μg/kg (forme injectable). La doramectine est une molecule lipophile, avec une solubilite aqueuse limitee. Il fallait donc selectionner pour la doramectine, un vehicule ayant de bonnes proprietes de solvant.
Or, les substances lipophiles sont solubles dans les surfactants aqueux et les solvants miscibles a l’eau, mais elles se dissolvent aussi dans l’huile. Diverses solutions huileuses ont alors ete evaluees, suite a une administration parenterale. Wicks et al. ont constate dans l’essai, qu’apres administration de doramectine a des bovins, par la voie sous-cutanee, a 200μg/kg, des taux plasmatiques cliniquement significatifs peuvent etre maintenus de facon prolongee par l’utilisation de formulations a base de vehicules huileux, notamment par une formulation combinant l’huile de sesame et l’oleate d’ethyle. La formulation a donc bien un effet sur le profil pharmacocinetique, probablement a travers le controle de la vitesse de resorption du principe actif, a partir de l’espace sous-cutane. Bien que les huiles, en general, constituent de bons solvants pour la doramectine, la vitesse de liberation de la molecule depend de l’huile selectionnee comme vehicule de la formulation, ce qui peut avoir une influence significative sur la biodisponibilite de la doramectine.
Dans une strategie visant a optimiser la formulation, l’element premier est donc le choix du vehicule 12 huileux. L’addition d’oleate d’ethyle, afin de reduire la viscosite de la solution, a l’huile de sesame, peut produire de petits changements sur le profil pharmacocinetique ; l’effet est en general benefique quant a la duree d’efficacite, lorsque le rapport huile de sesame/oleate d’ethyle est de 90/10, volume/volume. Les observations effectuees au moment de l’administration et quotidiennement par la suite, de meme que l’examen macroscopique post-mortem des points d’injection, indiquaient que ce type de formulation etait bien tolere. Par consequent, les formulations parenterales a base d’huile de sesame et d’oleate d’ethyle permettent a la doramectine de combiner une efficacite forte et prolongee, avec une bonne tolerance au site d’injection.
Effet de la voie d’administration
Nowakowski et al. (1995) (42) ont compare les concentrations plasmatiques de la doramectine, chez les bovins, suite a une injection sous-cutanee ou intra-musculaire, a 200μg/kg. Les parametres pharmacocinetiques sont proches. Suite a une injection intra-musculaire, la concentration plasmatique maximale (Cmax) et l’aire sous la courbe des concentrations plasmatiques en fonction du temps (AUC), qui represente le niveau d’exposition de l’organisme au medicament, sont legerement plus elevees, par rapport a une injection sous-cutanee. Toutefois, d’un point de vue statistique, les deux voies d’administration sont bioequivalentes. Deux formulations pharmaceutiques sont dites equivalentes, lorsqu’on demontre statistiquement leurs similitudes pharmacocinetiques.
De plus, deux formulations bioequivalentes sur le plan pharmacocinetique, sont considerees comme equivalentes sur le plan therapeutique. La circulation sanguine est plus developpee dans le muscle que dans le tissu sous-cutane. L’absorption est plus rapide et facilitee lors d’une injection dans le muscle. On pourrait s’attendre a une concentration plasmatique plus elevee, pour la voie intra-musculaire. Mais lors d’une injection sous-cutanee, le produit se repand dans tout l’espace sous-cutane, qui est generalement plus grand que l’espace engendre par une injection intra-musculaire. Si l’aire de depot sous-cutane est augmentee, l’aire d’absorption l’est aussi, ce qui compense le fait que la circulation sanguine est moindre dans le tissu sous-cutane.
Par consequent, la voie sous-cutanee et la voie intra-musculaire sont bioequivalentes : la doramectine est absorbee avec une biodisponibilite identique. La voie sous-cutanee, chez les bovins, est la voie recommandee. Pourtant, la solution a 1% de doramectine, dans un excipient a base d’huile de sesame et d’oleate d’ethyle, est aussi bien toleree par la voie sous-cutanee que par la voie intra-musculaire, et les deux voies sont bioequivalentes. L’etablissement de la bioequivalence entre les deux voies permet de ne pas compromettre l’utilisation de la doramectine en cas d’injection intra-musculaire ≪ accidentelle ≫.
Profil pharmacocinétique de la doramectine en solution huileuse
Toutain et al. (1997) (54) ont compare les profils pharmacocinetiques de la doramectine et de l’ivermectine, sur 40 veaux de 7 mois, pesant entre 201 et 289 kg, apres une injection souscutanee de doramectine ou d’ivermectine (formulation commerciale), a 200μg/kg. Gayrard et al. (1999) (16) ont aussi compare les profils pharmacocinetiques de la doramectine et de l’ivermectine, sur 24 veaux de 7 mois, pesant en moyenne 282 kg, mais apres une application pour-on de doramectine ou d’ivermectine (formulation commerciale), a 500μg/kg. La doramectine atteint la meme concentration plasmatique maximale que l’ivermectine, que ce soit suite a une administration sous-cutanee (environ 32ng.mL), ou pour-on (environ 12ng/kg), mais plus lentement (voie sous-cutanee : 5,4j pour la doramectine, contre 4j pour l’ivermectine ; application pour-on : 4,3j pour la doramectine, contre 3,4j pour l’ivermectine).
Cela suppose que l’absorption est plus lente pour la doramectine. Apres avoir atteint la meme concentration plasmatique maximale, la doramectine a cependant des concentrations plasmatiques plus elevees que l’ivermectine, apres une administration sous-cutanee ou pour-on. L’aire sous la courbe, AUC, est la surface sous tendue par la courbe des concentrations plasmatiques en fonction du temps, qui exprime le niveau d’exposition de l’organisme au medicament. Il est maintenant generalement admis que l’effet anti-parasitaire d’une molecule est plus etroitement lie au niveau d’exposition mesure chez l’animal (AUC), qu’a la dose administree. En effet, la dose est une variable imposee : elle est transformee par l’organisme en un profil de concentrations, via les proprietes physiologiques et metaboliques (biodisponibilite, distribution, clairance) de l’animal. Des lors, le profil des concentrations plasmatiques est une variable explicative beaucoup plus pertinente que la dose.
D’apres les essais, le niveau d’exposition mesure par l’aire sous la courbe : – est superieur de 40% pour la doramectine par rapport a l’ivermectine, lorsque les molecules sont administrees par voie sous-cutanee (54). – est superieur de 45% pour la doramectine par rapport a l’ivermectine, lorsque les molecules sont appliquees en pour-on (16). Ces differences de niveau d’exposition entre la doramectine et l’ivermectine peuvent etre attribuees a 3 facteurs : une clairance et un volume de distribution de la doramectine plus bas, et une meilleure biodisponibilite de la doramectine par rapport a l’ivermectine. La biodisponibilite est la fraction ou le pourcentage du medicament qui, apres resorption, atteint la circulation generale (la voie intra-veineuse genere une biodisponibilite de 100%). La biodisponibilte relative mesure les quantites relatives du medicament, lorsque celui-ci est administre au meme sujet, par des voies d’administration differentes ou sous 2 ou plusieurs formes pharmaceutiques, dans un essai comparatif.
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Table des matières
INTRODUCTION
I.La doramectine : une avermectine endectocide
1. Origine
2. Structure chimique
3. Propriétés physico-chimiques
4. Propriétés pharmacodynamiques
4. 1. Spectre d’activite de la doramectine
4. 2. Mode d’action
5. Propriétés pharmacocinétiques
5. 1. Profil pharmacocinetique intrinseque de la doramectine en solution aqueuse micellaire
5. 2. Facteurs influencant le profil pharmacocinetique de la doramectine
5. 2. 1. Effet de la formulation
5. 2. 2. Effet de la voie d’administratio5. 3. Profil pharmacocinetique de la doramectine en solution huileuse
6. Métabolisme
6. 1. Absorptio
6. 2. Distribution
6. 3. Stockage
6. 4. Elimination
7. Résidus de doramectine
7. 1. Localisation des residus
7. 2. Toxicite des residus
8. Toxicité
9. Pollution de l’environnement
II.Efficacité et rémanence de la doramectine contre les parasites des bovins
1. Efficacité de la doramectine
1. 1. Efficacite contre les nematodes
1. 1. 1. Variations de l’efficacite en fonction de la voie d’administration
1. 1. 1. 1. Voie sous-cutanee
1. 1. 1. 2. Pour-on
1. 1. 2. Resistance de Cooperia spp ?
1. 2. Efficacite contre les acariens responsables des gales
1. 2. 1. La gale psoroptique
1. 2. 2. La gale chorioptique
1. 2. 3. La gale sarcoptique
1. 3. Efficacite contre les insectes
1. 3. 1. Les larves d’hypodermes
1. 3. 2. Dermatobia hominis
1. 3. 3. Cochliomyia hominivorax
1. 3. 4. Haematobia irritans
1. 3. 5. Les poux
1. 4. Efficacite contre les tiques
1. 4. 1. Boophilus microplus
1. 4. 2. Ixodes ricinus
2. Rémanence de la doramectine contre les strongles des bovins
2. 1. Facteurs de variation de la remanence
2. 1. 1. Facteurs lies au protocole
2. 1. 1. 1. La remanence ou duree d’activit
2. 1. 1. 2. La duree d’efficacite prophylactique
2. 1. 2. Facteurs lies a l’hote
2. 1. 3. Facteurs lies au parasite
2. 2. Les differentes durees de remanence de la doramectine contre les strongles des bovins
3. Comparaison de l’efficacité et de la rémanence de la doramectine avec les autres lactones macrocycliques
3. 1. Comparaison simultanees de la doramectine avec plusieurs autres molecules
3. 2. Comparaison de la doramectine injectable avec l’ivermectine injectable
3. 3. Comparaison de la doramectine pour-on avec l’eprinomectine pour-on
3. 4. Comparaison de la doramectine pour-on avec la moxidectine pour-on
III.Utilisation de la doramectine contre les strongles chez les bovins
1. Rappels sur les principales strongyloses bovines
1. 1. L’ostertagiose
3 .1. 1. 1. Cycle evolutif
1. 1. 2. Etude clinique
1. 1. 3. Etude lesionnelle
1. 1. 4. Pathogenie
1. 2. Les cooperioses
1. 3. Les nematodiroses
1. 4. La dictyocaulose
1. 4. 1. Cycle evolutif
1. 4. 2. Etude clinique
1. 4. 3. Etude lesionnelle
1. 4. 4. La dictyocaulose des bovins adultes
2. La contamination des pâturages et l’infestation des bovins par les strongles
2. 1. Strongles gastro-intestinaux
2. 1. 1. Troupeaux laitiers
2. 1. 1. 1. Jeunes bovins de premiere saison de paturage
2. 1. 1. 1. 1. Sans rotation de paturage
2. 1. 1. 1. 2. Avec rotation de paturage
2. 1. 1. 2. Bovins de deuxieme saison de paturage
2. 1. 1. 3. Vaches laitieres
2. 1. 2. Troupeaux allaitants
2. 1. 2. 1. Veaux sous la mere
2. 1. 2. 1. 1. Veaux nes automne-debut d’hiver
2. 1. 2. 1. 2. Veaux nes en fin d’hiver-debut de printemps
2. 1. 2. 2. Bovins de deuxieme saison de paturage
2. 1. 2. 3. Vaches seules
2. 1. 2. 4. Troupeaux en estive
2. 2. Strongles pulmonaires
3. Interaction de la doramectine avec le développement de l’immunité contre les strongles, chez les bovins
3. 1. Rappels sur le developpement de l’immunite contre les strongles, chez les bovins
3. 1. 1. Etablissement de l’immunite 54
3. 1. 2. Vitesse d’etablissement de l’immunite 54
3. 1. 3. Estimation du niveau d’immunite 55
3. 1. 4. Importance de l’exposition aux infestations parasitaires durant la premiere saison de paturage 55
3. 2. Interaction de la doramectine avec le developpement de l’immunite contre Dictyocaulus viviparus
3. 3. Interaction de la doramectine avec le developpement de l’immunite contre Ostertagia spp et Cooperia spp
4. Utilisation de la doramectine contre les strongles, chez les bovins
4. 1. Chez les jeunes bovins en premiere saison de paturage
4. 1. 1. Jeunes bovins laitiers
4. 1. 1. 1. Mise a l’herbe au printemps
4. 1. 1. 2. Mise a l’herbe l’ete
4. 1. 1. 3. Melange de jeunes bovins nes en automne-debut d’hiver et de jeunes bovins nes en fin d’hiver-debut de printemps
4. 1. 1. 4. Melange de bovins de premiere et deuxieme saison de paturage
4. 1. 2. Veaux sous la mere
4. 1. 2. 1. Veaux nes en automne-debut d’hiver
4. 1. 2. 2. Veaux nes en fin d’hiver-debut de printemps
4. 1. 2. 2. 1. Traitement de milieu de saison
4. 1. 2. 2. 2. Traitement de rentree a l’etable
4. 2. Chez les bovins en deuxieme saison de paturage
4. 3. Chez les bovins adultes
4. 4. Chez les bovins en estive
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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