RELIGION ET POLITIQUE AUX PREMIERS SIECLES DE L’EMPIRE BYZANTIN

La foi chrétienne et le baptême

*La foi chrétienne : Un fidèle chrétien a le devoir d’être fidèle à un Dieu et est tenu de respecter tous les engagements pris lors de son baptême. C’est juste dire qu’il doit se conformer aux exigences ou clauses du contrat avec Dieu tout en se mettant en situation de dépendance. Il apparait clairement que tout fidèle chrétien baptisé entretient une relation de dépendance et de servitude avec Dieu. Cela sous-entend que le baptême et la foi ont des liens très étroits car cette pratique sacrée est en fait l’établissement d’une relation contractuelle entre le baptisé et Dieu, au travers de son Eglise. En effet le chrétien doit respecter l’ensemble des exigences permettant d’exprimer sa relation de dépendance et de soumission spirituelle de l’homme et envers le Tout Puissant, Dieu. « Et puisqu’aussi bien nous voyons les serviteurs honnêtes et de bonne disposition se conformer dans leur façon de vivre au caractère de leur maître( puisque l’art d’acquérir des mérites c’est la déférence ,et que la discipline de la déférence c’est une soumission docile) ,a combien plus forte raison devons-nous montrer que nous réglons docilement notre vie sur le seigneur , nous les serviteurs du dieu vivant, dont le jugement sur les met en jeu non des entraves ou un bonnet, mais un châtiment ou un salut également éternel » Il ne s’agit pas là d’étudier la notion de dépendance dans une dimension purement sociale ou économique mais plutôt cette réflexion s’intéresse simplement à la dimension spirituelle pour ne pas dire religieuse. Il conviendrait dès lors de mettre en évidence la perspective sotériologique et théologique étant donné que le salut du chrétien reste étroitement lié à la soumission et à la dépendance envers Dieu. La fides constitue un mot de lourd calibre et très important à Rome. Il est utilisé pour parler de quelque chose ayant rapport au christianisme. C’est un mot qui a un rapport très proche de la notion de fidelis. En effet l’étude de ces différentes terminologies, nous permettra de mieux pénétrer le sens de leur utilisation dans le vocabulaire du christianisme. Le terme fidelis est, tout d’abord, utilisé pour désigner un ou plusieurs chrétiens. Il est aussi utilisé comme un adjectif : le fait d’être fidèle. Autrement dit, il est utilisé pour désigner un membre ou un groupe d’individus appartenant à une Eglise ou une communauté bien déterminée. Un chrétien est dit fidèle lorsqu’il est baptisé et milite dans un groupe ou communauté de croyants. C’est ce qui prouve qu’on est un disciple du Christ. Quant au terme fides il est utilisé pour désigner la foi chrétienne À l’origine de la foi/fides une déesse éponyme est retrouvée sur la pièce de monnaie les représentations qui s’y trouvent, la montre debout, amplement drapée, couverte d’une voile à la tête. Elle tient dans ses mains, des épis, une corbeille de fruits, des pavots, un nuage de la victoire, un globe surmonté d’un phénix. Par elle est substituée par le symbole des mains joints, car « l’engagement place sous la protection de la déesse fides se traduira habituellement par la remise de la main droite dans la main droite de celui à qui on la confie. Fides est un terme ayant plusieurs significations. Il est surtout caractérisé par sa singularité et son caractère polysémique. Il est singulier parce que chacun a une conception de Fides et polysémique pour les sens différents et nombreux qui lui sont donnés. Ainsi il peut être traduire par « confiance », « crédit », « bonne foi », « promesse » et « protection ». Dans un autre sens, il peut avoir la signification de la « loyauté ». La Fides pourrait alors designer soit un comportement loyal, soit une disposition à se comporter loyalement. Il apparait ici clairement que la notion de Fides ou foi est synonyme de vertu, une virtus. En parcourant toute cette littérature liée à la foi, on se rend compte que ce terme n’avait pas à l’origine un contenu purement religieux. C’est qu’avec l’avènement du christianisme que ce concept, Fides, a été instauré dans le jargon chrétien. Ainsi les chrétiens ont spécialisé ce mot en lui donnant une connotation purement religieuse pour ne pas dire spirituelle. C’est ce qui a permis de comprendre que les fidèles ou fidelis désignent chez les chrétiens tous ceux qui croient à Dieu et au Christ. La foi constitue le fondement de toute religion. Elle constitue « l’adhésion à certaines propositions tenues pour vraies, en vertu ni de l’évidence, ni d’une démonstration rationnelle, mais de la confiance mise dans le témoignage d’une personne, dans une tradition ou dans un sentiment intime. En face d’une révélation divine, considérée comme une avance de Dieu à l’homme, c’est la réponse de l’homme ». C’est la foi qui nous permet d’apporter une connaissance ne serait-ce qu’indirecte de Dieu. En effet la Bible nous ordonne de croire à certaines vérités afin d’être sauvés. Ainsi, il est dit que nous devons avoir la foi : « Sans la foi, il est impossible de lui être agréable ; car il faut que celui qui s’approche de Dieu croie que Dieu existe, et qu’il est le rémunérateur de ceux qui le cherchent. » Or croire en l’existence d’une divinité suprême (Dieu) est une chose mais la connaître en est une autre et c’est mieux encore. D’ailleurs on nous enseigne dans les écritures saintes que : « nous devons connaître qui est le vrai Dieu et qui est Jésus-Christ pour obtenir la vie éternelle ». Puisque Jésus Lui- même est le vrai Dieu incarné, la divinité de Christ est un article essentiel de la foi. Le seigneur Lui-même confirme cela lorsqu’il affirme que tous doivent honorer Jésus Christ comme ils honorent le Père. Comme nous venons de le montrer, la fides au départ n’était pas religieuse. Mais ce sont les chrétiens qui ont donné à ce mot un sens religieux. C’est à partir du premier siècle avant J. C., que Paul, en écrivant en grec, fait usage du mot pistis pour évoquer sa foi en Dieu. Mais cette foi est attribuée à l’homme, elle se dit de « Dieu », d’où une réciprocité des relations. Dès lors la foi est considérée comme la fidélité à Dieu, à sa Vérité. Mais c’est surtout cette foi qui permet de distinguer la religion chrétienne du judaïsme. En effet, Paul qualifie les chrétiens comme le peuple des croyants. Quant aux Juifs ils forment le peuple élu, c’est-à-dire choisi par Dieu. Cela sous-entend donc que la foi est un don gratuit du Père, grâce au Christ par sa Résurrection. Pour autant, le fait de croire ne va pas de soi car cela nécessite un acte volontaire et personnel d’adhésion. On retrouve là aussi la mise en avant d’une identité chrétienne : être chrétien, c’est croire, c’est écouter la « Bonne Nouvelle » ; mais c’est surtout affirmer son appartenance à la communauté des Eglises. Mais la foi décrite par Paul est aussi vue comme une sorte de soumission de l’homme à quelque chose qu’il ne peut pas comprendre. Dans son Épître aux Éphésiens (II, 8), Paul affirme avec subtilité et courage que : « la foi ne vient pas de nous. Mais qu’au contraire, elle est un « don de Dieu ». Il s’inspirait peut-être de la philosophie hellénistique et stoïcienne, selon laquelle la morale et par extension le rapport au divin, relevait de la conviction personnelle. Une autre conception de la foi chrétienne s’est progressivement développée autour du concept Pistis chez les Pères grecs, à la suite de Paul. On pourrait citer beaucoup d’autres exemples comme celui de Polycarpe de Smyrne qui décrit la foi comme « notre mère à Dieu »51.Celui-ci va jusqu’à montrer une dimension sotériologique de la foi en ce sens qu’elle permet le salut et la résurrection des morts. Il est possible que la foi conserve aux yeux même de tous les chrétiens sa charge sémantique « traditionnelle », et que finalement son sens chrétien reste méconnu parmi les membres des communautés. Pour lever cette incertitude, il nous faudrait pouvoir consulter, par exemple un sermon, afin de voir quel mot il utilise en interne pour nommer sa foi. C’est peut-être pour cette raison qu’il prend soin d’y ajouter quelquefois l’adjectif christianus ; tout en sachant qu’il veut montrer que ce terme est bien devenu chrétien, mais désormais dans le sens de foi chrétienne. La foi est utilisée dans un contexte de mariage avec un païen ou suite au baptême qui est la marque distinctive d’un chrétien. Il est cependant intéressant de noter que Tertullien établit très souvent une relation entre les Écritures et la foi chrétienne : « Là où il apparaîtra que la vérité de la doctrine et de la foi chrétienne, là seront aussi les vraies Écritures, les vraies interprétations et toutes les vraies traditions chrétiennes. » Dans ce bref passage, Tertullien met en relation la vérité, la doctrine et la foi. Ce sont donc les Écritures qui en sont la source, l’origine. Il ne faudrait pas oublier ici que les Écritures sont considérées par les chrétiens comme une Révélation puisqu’elles sont la parole de Dieu. C’est donc dans la Bible que le chrétien doit trouver les règles, les principes qui régissent sa vie, ses relations sociales et bien sûr sa foi. Selon Dimitri Michaelides, la doctrine est indissociable des Écritures. Cela permet donc de déterminer ceux qui sont de « souche » chrétienne, et parallèlement leur reconnaitre la possession légitime des Écritures. Or, tout chrétien est tenu de respecter son contenu, c’est-àdire la parole donnée. Par conséquent le chrétien a beaucoup d’obligations à remplir ses engagements, à travers les vœux que chaque « fidèle » a formulés lors de son baptême. Il y a donc une véritable fidélité à Dieu, qui oblige le chrétien à respecter sa parole, à réaliser ses promesses. Le fidèle devient alors celui qui « fait ce qu’il a dit ». Compte tenu de tout ce qui a été dit un peu plus haut, la foi chrétienne est donc un engagement personnel. Elle se présente comme un contrat entre Dieu et ses fidèles. Chaque communauté ou individu est tenu d’honorer et de respecter ce contrat. On est donc bien ici dans le domaine du droit romain puisque la foi établit une relation contractuelle entre Dieu et les hommes ; d’où l’emploi de fides pour dire la foi chrétienne. Le droit se porte à la défense de la foi, en se modelant sur elle. Nous pensons donc que la démonstration juridique de Tertullien a donc une signification doctrinale. Cette relation contractuelle entre Dieu et les hommes semble être au cœur de ce qui fait la spécificité chrétienne puisqu’il y a une dimension de fidélité et d’engagement personnel à adhérer à une vérité révélée. Ce contrat devient en quelque sorte une nouvelle « alliance », où Dieu, en échange de la fidélité des croyants, avait donné son fils, le Christ ; le fidèle devant manifester son souvenir et son attachement par exemple lors du sacrement de l’Eucharistie. Pour entrer dans l’Église, ce passage est obligatoire. On pourrait rappeler un texte resté très célèbre résumant bien cette idée d’engagement personnel et volontaire symbolisé par le mystère du baptême : « Il fut un temps où nous riions, comme vous, de ces vérités. Car nous sortons de vos rangs. On ne naît pas chrétien, on le devient. » Cela laisse entendre que le baptême constitue une étape importante pour l’individu qui veut adhérer la religion chrétienne. Le chrétien ne peut prétendre au salut s’il n’appartient pas à l’Église. On pourrait reprendre par exemple un passage de Cyprien de Carthage (200-258) : « Hors de l’Église, point de salut. » Cela veut donc dire qu’un chrétien ne peut être sauvé que s’il appartient à une Église jouissant des pleins droits. Il faut à ce titre reconnaître que Jésus est le Christ selon les Écritures ne suffit plus pour devenir membre de la communauté. En plus de cela, s’ajoute l’adhésion à une doctrine, à des rites et à des pratiques, qui se sont par la suite institutionnalisés. Ainsi, un catéchumène, lors de sa formation pré-baptismale, doit réciter le symbole de la foi. Mais, ce qu’il déclame n’est pas l’expression de sa foi personnelle, mais celle décrétée par la hiérarchie ecclésiale. Ainsi l’importance du baptême qui est considéré comme le fondement de l’adhésion, nous oblige d’insister cette pratique.
* Le baptême : Il constitue alors la porte incontournable de l’entrée à la foi chrétienne. Ainsi, il nous faut un peu revenir sur ce qu’est le baptême en milieu chrétien. Selon J. Gaudemet, « Le baptême porte une fois le nom de « sacramentum », c’est-à-dire un serment fait par le chrétien avec Dieu. Ce serment est vu ensuite comme une source d’obligation liée à la fides. Le terme est d’origine militaire puisqu’il s’oppose à ius iusrandum (le serment civil ou privé) ». Ainsi l’entrée effective dans la communauté de foi supposait l’observance de certains sacrements. Le baptême était la première étape parmi tant d’autres. Tous les chrétiens n’étaient pas baptisés. « Couronnement d’une démarche d’une démarche de foi, ce sacrement, se méritait et supposait l’adoption d’un mode de vie recherchant la sainteté. Il n’était donc donné aux petits enfants que lorsque ceux-ci paraissaient en danger de mort ; les épitaphes romaines montrent que, dans un contexte de forte mortalité infantile, c’était assez fréquent. Le cas de figure le plus répandu était celui du baptême des adultes, notamment sur leur lit de morts, in extremis. Les candidats à cet acte de foi capital qu’était le baptême suivaient une période de préparation d’un peu moins de trois ans. Ils étaient l’objet d’enquêtes, suivaient une formation doctrinale vérifiée par des examens probatoires, et étaient exorcisés. Ils subissaient trois scrutins pendant le Carême. Ces candidats portaient le nom de catéchumènes et pouvaient assister à la première partie des offices, celle de la liturgie de la parole. » Généralement à Rome, la majeure partie des baptêmes avaient lieu, pendant la nuit de Pâques, principalement au Latran. Ils se tenaient dans de très grandes salles éclairées de plus de cent lampes, lampions et candélabres d’or et d’argent. « Les catéchumènes devaient accomplir une veillée de prière, réciter publiquement une profession de foi, renoncer au diable. À la suite de quoi ils recevaient le sacrement par infusion dans la piscine des baptistères. Après l’onction des prêtres, ils recevaient l’onction d’huile de la main de l’évêque, qui traçait le signe de la croix sur leur front. Ils étaient alors admis à la messe, où on leur présentait un calice de vin, de lait et de miel. Les nouveaux baptisés, que l’on appelait néophytes aux IVe et Ve siècles, étaient habillés de blanc pendant l’octave de Pâques. » Les baptisés poursuivaient ensuite leur formation et devaient suivre un mode de vie rigoureux, strictement conforme à l’Evangile. Ceux qui s’éloignaient de cette ligne étaient condamnés à expier leurs fautes pendant plusieurs années, voire leur vie entière, après avoir publiquement fait pénitence. Cette expiation, faire le jeûne, faire la prière et l’aumône, pouvait prendre fin par le sacrement de pénitence, qui ne pouvait être donné qu’une seule fois. Les pénitents étaient alors admis à la réconciliation, qui se faisait à Rome le jeudi précédant Pâques. Suite au sacrement du baptême, le parrain (sponsor) veille à ce que la personne qui devient un nouveau fidèle de la communauté, s’engage à respecter au cours de son existence ses vœux de fidélité à Dieu. Il y a donc ici une forme de « parrainage » des nouveaux membres de la communauté par ceux qui sont déjà fidèles Selon Maurice Sachot, « les dénominations de cette proclamation baptismale sont claires : il s’agit bien d’une traditio symboli ou d’une redditio symboli, à savoir, comme dans un contrat en bonne et due forme […] Le symbole de foi n’est pas donné comme une formulation, encore moins une interprétation parmi d’autres possibles : c’est la « règle de foi » (regula fidei). On passe donc d’une vérité révélée à une vérité décrétée. » Ainsi ne faut-il pas s’interroger sur le contenu du symbole de foi ? Étymologiquement, le symbole (du grec symbolon) signifiait la moitié d’un objet brisé (par exemple un sceau) que l’on présentait comme signe de reconnaissance. Les parties brisées étaient mises ensemble pour vérifier l’identité du porteur. Puis symbolon signifia un recueil, une collection. Chez les premiers chrétiens de la Diaspora hellénistique, ce mot grec prit le sens de signe de reconnaissance et de communion entre les croyants ; mais aussi d’un « recueil » des principales vérités de la foi. Ainsi par « symbole de foi », nous entendons des textes qui explicitent le contenu de la foi catholique. Ils ne font pas partie du canon des Écritures, mais on leur a donné une valeur apostolique. Un symbole de foi correspond à la synthèse de la foi du croyant et son engagement personnel dans son alliance avec Dieu. C’est aussi la marque d’unité et de reconnaissance de la communauté qui revendique la même foi pour tous les fidèles. Dans l’ensemble des écrits « catholiques », il cite le symbole de foi dans « Praescriptione haereticorum », au chapitre XIII, 1-6 : « Je crois en Dieu, le créateur du monde, au Verbe, son fils Jésus- Christ qui par l’Esprit et la puissance de Dieu prit chair dans le sein de Marie, et naquit d’elle ; fut attaché à une croix. Il se releva le troisième jour, fut emporté aux Cieux ; prit place à la droite du Père, déléguant la puissance de son Saint Esprit, pour gouverner les croyants ; reviendra dans la gloire pour emmener le bon à la vie éternelle et condamner le mauvais au feu perpétuel, en la restauration de la chair. » Force est de constater qu’il existe d’étroite relation entre la foi chrétienne et le baptême. Ils constituent deux éléments importants permettant de mesurer le degré de croyance d’un chrétien.
*Rapport entre le baptême et la foi chrétienne : Le baptême et la foi sont donc très étroitement liés puisque ce sacrement est en fait l’établissement d’une relation contractuelle entre le baptisé (qui était catéchumène) et Dieu, au travers de son Église. En effet,Tertullien nous en fait un bref rappel dans ses écrits à travers ce passage très important des Actes (VIII, 36-37). Ainsi il s’agit d’un dialogue entre Philippe et l’eunuque éthiopien au sujet du contenu de la foi. Notre auteur y fait allusion dans De baptismo : « Si Philippe baptisa si rapidement l’eunuque, rappelons-nous que le seigneur avait témoigné de sa faveur envers lui d’une façon manifeste et explicite : c’est l’Esprit qui avait donné à Philippe de prendre cette route. De son côté, l’eunuque ne se trouvait pas inactif : ce n’est pas un désir subit qui le poussa à demander le baptême, mais il était allé au temple pour prier et il s’appliquait à lire la Sainte Écriture. C’est ainsi que devait le trouver l’apôtre envoyé par Dieu spontanément. Puis une nouvelle fois, l’Esprit ordonna à Philippe de rejoindre l’eunuque près de son char. A ce moment, un texte se présente, relatif à la foi elle-même ; l’exhortation est reçue, le seigneur annoncé, la foi suit sans délai, l’eau aussitôt est trouvée, puis sa mission terminée, l’apôtre est enlevé. » A partir de ce moment la foi devient un substantif chrétien, mais il garde une partie de son contenu sémantique. Quant à la fidélité, elle est un principe très fort puisqu’elle a dorénavant une dimension contractuelle et aussi sotériologique puisqu’elle est inhérente au salut. On voit donc bien qu’il s’approprie ce qui fait la romanité : la religion, la loyauté, l’engagement personnel.

Le régime politique en Byzance : passage de la tétrarchie à la monarchie

   Au IIIe siècle l’empire romain a connu des troubles dans plusieurs domaines notamment celui économique, religieux, politique… Cette crise mit l’empire en danger et ouvrit des portes à toutes attaques émanant des multitudes de forces divergentes provenant de l’extérieur après l’installation d’une anarchie sur le plan militaire. Ces attaques mirent ce vaste territoire dans une situation d’insécurité totale à laquelle l’Etat, incarné par l’empereur, devait faire face pour maitriser son adversaire. Toute cette crise est née des invasions sur les Rhin et le Danube, des soulèvements dans des zones comme la Gaule par des Bagaudes ainsi que celui orchestré par un usurpateur en Angleterre (la Bretagne), des émeutes et des razzias. Ces crises ont fait énormément de victimes et mit l’empire dans une situation inconfortable. Celle-ci devint à partir de 364 de plus en plus difficile. En effet : « À cette époque, on eut dit qu’à travers tout le monde romain sonnaient les trompettes de la guerre. Les peuples les plus sauvages, pris de fureur, débordaient au-delà des frontières dont ils étaient voisins. Les Alamans pillaient les Gaules et les Rhéties (Bavières) : les Sarmates et les Quades, la Pannonie ; les Pictes, les Saxons, les Scotti et les Attacotti ne cessaient de torturer les Bretons ; les Austuriens et les autres tribus maures razziaient plus durement que de coutume ; des troupes de Goths pillards ravageaient la Thrace. Le roi de Perse met la main sur l’Arménie ». C’est dire de façon prompte que l’empire romain d’Orient à cette période baignait dans un climat de crises très graves liées à des attaques et /ou menaces venant de toutes les régions voisines. A cet effet, les populations ainsi que leurs dirigeants étaient habitées par l’angoisse. Celle-ci est liée aux éventuelles violations qui risquaient de s’exercer sur eux et leur causer des dégâts matériels et des pertes en vie humaine. Ainsi réfléchir sur des voies et moyens permettant de décourager leurs adversaires devient chose impérieuse pour les élites. Car les romains risquaient d’être les seuls à subir les atrocités de ces affrontements qui s’annonçaient entre eux. C’est dans cette perspective que, l’empereur Dioclétien avait établi ce qu’on appelle la tétrarchie. Ce système consistait à faire régner quatre empereurs officiellement et simultanément, afin de mieux défendre les frontières, attaquées de tout bord. Ils cooptaient leurs successeurs, choisis non en raison de leur parenté mais pour leurs qualités. Quelques années plus tard arriva à la magistrature un jeune empereur de nom de Constantin. Celui-ci naquit à Nish (Balkans), où se parlait le latin, et il reçut une éducation militaire en suivant son père, Constance Chlore, qui était l’un des tétrarques en charge d’une partie de l’Occident. En juillet 306, à York, suite à la mort de Constance Chlore, il fut proclamé auguste par les troupes de ce premier contrairement au principe de la tétrarchie. Son initiative déclencha une nouvelle série de guerres civiles. En octobre 312, il se rendit maitre de l’occident tout entier en s’emparant de Rome aux dépens de son rival Maxence, un autre usurpateur. La fameuse bataille, dite du Pont Milvius, qui lui livra la ville, est restée célébré en raison de la vision qu’aurait eue Constantin. Selon Eusèbe de Césarée, il avait vu une croix lumineuse, accompagnée d’une inscription signifiante : Par ce signe tu vaincras. La nuit suivante, un songe confirma la vision Eusèbe évoque aussi que l’étendard portant le chrisme fut aussi reproduit sur les monnaies. La victoire de Constantin sur les troupes plus nombreuses de Maxence l’aurait convaincu de l’efficacité de la protection du Dieu des chrétiens. Par la suite durant une dizaine d’années, Constantin gouverna l’Occident pendant que Licinius commandait en Orient. Finalement, en 324, par sa victoire à Chrysopolis (près du Bosphore), Constantin réunifia l’Empire avec l’intention de le transmettre à ses enfants. C’est la crise du IIIe siècle qui a transformé le pouvoir impérial qui est devenu absolu. Le Sénat n’a plus aucune influence. On est passé du principat au dominat. Les empereurs de l’Antiquité tardive bénéficient aussi d’une construction idéologique qui a peu à peu assimilé les empereurs à des divinités vivantes et justifie ainsi leur pouvoir absolu. Pour Constantin comme pour Dioclétien, l’autorité impériale est de nature divine. Dioclétien et Galère, son fils adoptif, se prétendent descendants de Jupiter. Ils prennent le surnom de Jovien, son collègue Maximien ainsi que son Co-césar Constance celui d’Herculéen. Cette sacralisation du pouvoir impérial a aussi pour but d’enlever toute légitimité aux usurpateurs éventuels puisque seul l’empereur est élu des dieux, et que seul son successeur est légitime. Cette idéologie n’empêche pas Constantin puis Maxence, fils des Augustes mais écarté de pouvoir, de contester la nouvelle tétrarchie après la mort de Constance en 306. Constantin, quoique affilié à la lignée herculéenne des tétrarques, s’en écarte dès qu’il se débarrasse de Maximien en 310, au profit de la théologie solaire d’Apollon et de Sol Invictus. Celle-ci implique un pouvoir unique et suprême et a la faveur des armées occidentales, ce qui aide ses ambitions. Les monnaies de Constantin témoignent de cette idéologie solaire pendant quelques années (voir l’image du solidus). En 312, Constantin intègre le christianisme à son idéologie, et les deux principes monothéistes solaire et chrétien vont cohabiter jusqu’en 324, lorsque Constantin devient le maître unique de l’Empire. Selon Paul Petit, la persistance des symboles solaires sur les monnaies de Constantin, et le vocabulaire neutre mais monothéiste des panégyriques païens de 313 et 321, indépendamment d’une attitude impériale très favorable aux chrétiens, répondaient au souci de ménager toutes les factions tant que la victoire sur Licinius n’était pas acquise. Après sa victoire de 324, Constantin échange dans sa titulature l’Invictus à connotation solaire par Victor, tandis qu’une monnaie de cette date le représente avec l’emblème du Christ transperçant un serpent. Du fait de son adhésion à la religion chrétienne, Constantin le Grand ne cherche point à affirmer une filiation divine. Mais plutôt il cherche à prouver qu’il été investi par le Dieu des chrétiens pour gérer les affaires de la cité (l’Empire). Des documents numismatiques, datant de 330, font apparaitre une main sortant du ciel et tendant à Constantin une couronne. La conversion de Constantin pose aussi le problème du césaropapisme. C’est-à-dire que l’empereur agit comme un clerc dans l’exercice de ses fonctions impériales. À Constantinople, l’empereur construit un palais impérial qui ressemble à une église. Cet acte posé, est une façon de montrer qu’il a reçu une vision du Christ au même titre qu’un apôtre. Ainsi il porte comme les empereurs à sa suite le titre d’isopostole, égal aux apôtres. Il se présente comme « l’évêque de ceux du dehors », autrement dit de ceux qui ne sont pas clercs, lors du Concile de Nicée mais il n’a pas cette qualité d’évêque. C’est ainsi que Constantin se proclame comme le représentant de Dieu sur la terre. Parce qu’il sent la manifestation de l’intelligence du Dieu suprême en lui-même. Il se fait entourer d’un faste incroyable pour exalter la grandeur de la fonction impériale. Désormais la romanité et la religion chrétienne sont liées. Pour Constantin, l’unification politique de l’Empire a permis celle religieuse. L’empereur est dans ce cadre, le serviteur de Dieu et comme l’image de fils de Dieu, maître de l’univers. L’empereur reçoit aussi la mission de guide vers le salut et la foi chrétienne. Son intervention de plus en plus grandissante dans les questions d’ordre religieux se trouve ainsi légitimée de même que le césaropapisme.

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : CLARIFICATION DES CONCEPTS
CHAPITRE I: LA NOTION DE RELIGION
I-1 : Définition
I-2 : La foi chrétienne et le baptême
I-3 : Le début de la crise doctrinale : la question d’Arius et la réponse du Concile de Nicée
CHAPITRE II : LA NOTION DE POLITIQUE
II-1 : Définition
II-2 : Le régime politique en Byzance : passage de la tétrarchie à la monarchie
II-3 : les reformes administratives et militaires en Byzance
DEUXIEME PARTIE :LE CHRISTIANISME : D’UNE RELIGION PERSECUTEE A UNE RELIGION D’ETAT
CHAPITRE III- LES PERSECUTIONS GENERALES
III-1 : La persécution de Dèce
III-2 : La persécution de Valérien
III-3 :L’exaction de Dioclétien
CHAPITRE IV : LA CONVERSION DE CONSTANTIN ET LA CHRISTIANISATION DE L’EMPIRE
IV-1: La conversion de Constantin le grand et la christianisation de l’empire
IV-2: Le déclin de la religion traditionnelle: le paganisme
IV-3:Les conséquences de la christianisation de l’empire
CONCLUSION GENERALE : LES CRISES ET INVASIONS PERSES ET ARABES
BIBLIOGRAPHIE

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