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Répartition géographique du groupe sanguin ABO(H)
Au niveau mondial, le groupe sanguin O(H) est le plus fréquent (45%). Les groupes A, B et AB sont répartis selon les fréquences suivantes : 40%, 11% et 4% respectivement. La répartition géographique des 4 groupes sanguins diffère toutefois largement selon la situation géographique et l’ethnie des populations. Le groupe O(H) est le plus fréquent en Amérique du Sud, dans certaines régions d’Afrique et en Australie12. Le phénotype A, qui est plus fréquent dans les populations caucasiennes (43-45%), l’est beaucoup moins dans les populations d’origine asiatique ou africaine (20-25%)12-13.
Synthèse des antigènes ABO(H)
Les antigènes A et B correspondent à l’oligosaccharide final d’une structure polysaccharidique qui est amené et fixé par l’enzyme correspondante (enzyme A pour l’antigène A, et enzyme B pour l’antigène B) à la substance H. Ces enzymes appartiennent à la famille des GT, catalysant le transfert d’un monosaccharide à partir d’un oligosaccharide activé (donneur) vers un accepteur. C’est la nature de cet antigène final qui définit le groupe sanguin. Pour le groupe O(H), la cascade de glycosylation s’arrête à l’antigène H. Dans ce cas, l’antigène du groupe O(H) est l’antigène H terminal. Il faut rappeler que pour le groupe A, deux sous-groupes d’enzymes sont différenciées (A1 et A2).
Structure et expression des glycosyltransférases
Structure
Les GT, protéines transmembranaires de type II de 42 kDa sont constituées de 354 acides aminés pour les enzymes B et A1 (21 acides aminés supplémentaires pour A2), et de 117 acides aminés pour la forme tronquée du groupe O(H). Les GT sont organisées en deux domaines reliés par le site actif. La partie N-terminale intracytosolique, renferme, le site de liaison au donneur d’oligosaccharide activé. La partie C-terminale, intra-luminale, comprend le site de liaison au disaccharide accepteur21 (Figure 5).
Expression
Les GT sont exprimées, à l’échelle cellulaire, aux niveaux du réticulum endoplasmique et de l’appareil de Golgi où ont lieu les étapes de glycosylation et de modifications post-traductionnelles des protéines (Figure 6). L’étape initiale de la synthèse des antigènes des groupes ABO(H) consiste à ajouter un monosaccharide sur le précurseur protéique ou lipidique. Pour les glycoprotéines par exemple, il s’agit soit d’une N-glycosylation (ajout d’un N-acétyl-glucosamine à une asparagine), soit d’une O-glycosylation (ajout d’un N-acétyl-galactosamine à une thréonine ou une sérine). La N-glycosylation débute dans le réticulum endoplasmique et s’achève dans l’appareil de Golgi, alors que la O-glycosylation prend place dans le Golgi. Une étape d’élongation est ensuite entreprise par l’ajout séquentiel de motifs disaccharidiques. Une étape subterminale de glycosylation est indispensable pour aboutir à l’expression des antigènes A, B et O(H). Elle fait intervenir une(1,2) fucosyltransférase (codée par le gène FUT1) qui catalyse la fixation d’un fucose sur le précurseur oligosaccharidique amenant ainsi à l’expression de l’antigène H22. Ce dernier forme, dans une étape ultime, un précurseur commun aux GT responsables de la synthèse des antigènes A et
B. L’(1,3) N-acétylgalactosamine transférase, codée par l’allèle A, catalyse l’ajout d’une N-acétylgalactosamine à l’antigène H formant ainsi l’antigène A. La(1,3) galactosyltransférase, codée par l’allèle B, transfère un galactose sur l’antigène H créant ainsi l’antigène B. En revanche, chez les personnes portant un allèle O(H), la GT est non fonctionnelle, les érythrocytes exposent donc uniquement l’antigène H.
Les précurseurs oligosaccharidiques
La nature des précurseurs oligosaccharidiques diffère en fonction de leur origine. On distingue 5 types de précurseurs oligosaccharidiques servant de substrats pour l’action de la (1,2) fucosyltransférase. Cette action aboutit à la synthèse de l’antigène H qui est dit dumême type que le disaccharide de base. La majorité des précurseurs oligosaccharidiques érythrocytaires sont de type 2-23, provenant soit du mésoderme comme les globules rouges soit de l’ectoderme comme l’épiderme. L’activité de la(1,2) fucosyltransférase est conditionnée par le type de précurseur rencontré. Par exemple, chez les porteurs d’un allèle A1, l’(1,3)N-acétylgalactosamine transférase est capable de transformer la substance H de type 324-25 en antigène A1, ce qui est impossible pour l’enzyme codée par l’allèle A2. Ce facteur de modulation de l’activité GT serait à l’origine, entre autres, de la différence de la densité antigénique A entre les hématies A1 et A2.
Expression des antigènes ABO(H)
Au niveau érythrocytaire, 80% des épitopes ABO(H) sont exposés par les glycoprotéines transmembranaires band 326, la band 4.5 et la glycoprotéine RhAG. Ces antigènes n’ont pas été retrouvés au niveau de la glycophorine A.
L’expression de ces antigènes n’est pas exclusive aux érythrocytes. En effet, ils ont également été identifiés à la surface des plaquettes27, des lymphocytes et aussi au niveau d’autres glyco-et lipoprotéines, plasmatiques et tissulaires. Les travaux d’O’Donnell et al. en 2001 ont montré qu’au niveau plasmatique, l’antigène H est exprimé à la surface du VWF et subit les mêmes actions de glycosylation amenant à l’expression des antigènes du groupe ABO(H)28. Les types de glycosylation de cet antigène H et le nombre d’épitopes H portés par le VWF sont capables de moduler les taux plasmatiques de VWF circulant. D’autres glycoprotéines plasmatiques comme l’2-macroglobuline29-27 et la L-sélectine soluble30, l’élastase1 pancréatique sécrétée dans le tube digestif31, l’antigène carcinoembryonique32, l’épiderme humain, les tissus du système nerveux et de multiples tissus et organes expriment également les antigènes du groupe ABO(H).
Génotype/Phénotype sécréteur
Depuis plusieurs décennies (1932), nous savons que les antigènes ABO(H), portés par les globules rouges, peuvent être sécrétés sous forme soluble dans les muqueuses digestives, respiratoires, génito-urinaires, les larmes et le lait maternel. Ce phénotype dit « Sécréteur ou Se» est retrouvé chez 80% de la population. Les autres individus sont dits « non-sécréteurs ou se ». Le phénotype Se est conditionné par l’action d’un autre isotype de l’enzyme(1,2) fucosyltransférase, codé par le gène Se (ou FUT2) localisé sur le chromosome 19 en position 19q13.3)33. Les produits des deux gènes : FUT1 (gène H) et FUT2 (gène Sécréteur) exprimés dans des tissus différents possèdent des précurseurs oligosaccharidiques distincts. L’(1,2) fucosyltransférase codée par le gène FUT1 prend comme substrats les précurseurs de type 2 et 4 alors que l’enzyme codée par FUT2 rajoute le plus souvent, un oligosaccharide à un précurseur de type 1 et 334.
Détermination du groupe sanguin ABO(H)
En routine, la détermination du groupe sanguin ABO(H) est réalisée suivant deux étapes présentées en Figure 7. La première repose sur l’identification ou non des antigènes A et B à la surface des hématies au cours d’une épreuve globulaire (Beth-Vincent) en mettant les hématies en présence d’anti-A, d’anti-B et d’anti-AB. Une épreuve sérique (Simonin) fait suite à l’épreuve globulaire. Elle consiste à faire interagir le sérum du sujet avec des hématies portant des antigènes ABO(H) connus, permettant de mettre en évidence la présence ou l’absence « régulière » d’agglutinines « naturelles » anti-A et/ou anti-B dans le sérum35. Ces agglutinines sont des anticorps dirigés contre les antigènes absents des globules rouges. Les sujets de groupe O(H) dont les hématies n’exposent ni l’antigène A ni l’antigène B présentent, au niveau sérique, les deux agglutinines régulières anti-A et anti-B. Par exemple, les hématies de groupe AB vont agglutiner en présence d’anti-A, d’anti-B et d’anti-AB et aucune agglutination ne sera observée en mettant le sérum en présence d’hématies A, B ou AB.
Groupe sanguin ABO(H) en pathologie
Les études phylogénétiques montrent que les groupes sanguins sont très anciens et qu’ils ont évolué pendant des millions d’années. Tout au long de leur évolution, les groupes sanguins ont été le siège de multiples variations génétiques tout en restant très conservés à travers les générations36. Cela suggère que les antigènes des groupes sanguins auraient un rôle important dans la survie de l’espèce. L’intérêt en médecine transfusionnelle, dans le domaine des greffes d’organes ou de moelle et leur rôle dans la maladie hémolytique du nouveau-né sont bien établis. Les connaissances sur les groupes sanguins en pathologie se sont multipliées. En pathologie cancéreuse, une modification de l’expression antigénique ABO(H) est rapportée. Par exemple dans le cas des cancers du pancréas et du colon, à l’état précancéreux, la surexpression et la synthèse de néoantigènes37-38 parfois incompatibles avec le groupe sanguin du patient favoriseraient la progression vers le cancer. Une diminution voire une disparition des antigènes ABO(H)39 est observée également dans les hémopathies malignes et les tumeurs solides facilitant la migration tumorale en diminuant l’apoptose. Des études d’association ont également montré que les sujets de groupe O(H) sont moins à risque de développer une pathologie cancéreuse, suggérant une possible valeur pronostique des antigènes du groupe sanguin dans le cancer40.
D’autres études ont également établi l’existence d’une association entre les groupes sanguins ABO(H) et la susceptibilité ou la résistance à de nombreux agents infectieux. Une étude observationnelle récente de 2017 a trouvé une association entre le groupe sanguin A et l’infection par le VIH ou le virus de l’hépatite B41. En revanche, le groupe sanguin O(H) semble être un facteur protecteur contre ces infections. Les groupes sanguins non-O(H) ont été associés à la progression de l’infection par le virus de l’hépatite C vers la fibrose hépatique avec un odds ratio (OR) de 1,8 avec un Intervalle de confiance (IC) à 95% à 1-2,9 ; p=0,4)42.
Les anticorps naturels anti-A et anti-B seraient capables de neutraliser des agents infectieux exposant les antigènes du groupe sanguin. Par exemple, les groupes B et O(H) seraient plus résistants face à une infection par la variole que les individus des groupes A ou AB43. Par ailleurs, les antigènes ABO(H) faciliteraient l’adhésion et l’invasion de certains agents pathogènes en leur servant de récepteurs comme dans le cas de l’infection à Hélicobacter pylori44, agent responsable de la formation et la pérennisation des ulcères gastro-duodénaux.
De façon intéressante, les groupes O(H) sont plus à risque de développer un ulcère gastro-duodénal. Un des mécanismes expliquant cette observation serait que l’antigène H, fucosylé, exprimé à la surface des cellules épithéliales gastriques serait à l’origine de l’adhésion d’Hélicobacter pylori à la muqueuse gastrique et favoriserait ainsi la formation de l’ulcère45.
Cette faculté des antigènes ABO(H) à être des facteurs protecteurs ou délétères contre certaines infections pourrait expliquer, en partie, leur conservation à travers l’évolution.
Le groupe sanguin ABO(H) est aussi décrit comme un facteur de risque de pathologies complexes comme le diabète de type I qui est plus fréquent chez les sujets de groupes A ou AB46 et dans certaines maladies auto-immunes comme la spondylarthrite ankylosante47 plus fréquente dans la population des non-sécréteurs et la MTEV.
Relation maladie thrombo-embolique veineuse et groupe sanguin ABO(H)
L’implication du groupe sanguin ABO(H) dans la MTEV remonte à plus de cinquante ans. C’est en 1969 que l’équipe de Jick décrivait , pour la première fois, une augmentation du risque thrombotique dans un groupe de patients non-O(H) présentant une TVP en cours de traitement anticoagulant en comparaison avec des donneurs de sang indemnes de MTEV48. Les résultats de cette étude pilote ont été par la suite confirmés par de nombreuses études et élargis à d’autres catégories de patients. En 1995, Koster et al., ont pu observer dans une étude cas-témoins, un risque de TVP deux fois plus élevé chez les patients de groupes non-O(H) par rapport au groupe O(H)49. Ce risque était multiplié par un facteur quatre quand une mutation du facteur V Leiden se surajoutait50-51. Cette potentialisation du risque de TVP souligne le caractère complexe de la MTEV. En effet, la MTEV est une maladie multifactorielle, c’est-à-dire que, son apparition et son évolution dépendent de facteurs génétiques, de facteurs environnementaux et de leurs interactions3.
Ces dix dernières années, les approches « pangénomiques », dites GWAS pour Genome Wide Association Study, sont devenues un outil incontournable dans l’identification de nouveaux facteurs de risque génétiques de la MTEV. A ce jour, plus d’une dizaine de polymorphismes ont été rapportés comme associés à une augmentation du risque de MTEV. L’effet de ces variants sur le risque de MTEV est très modéré. Parmi eux, le facteur génétique le plus à risque de MTEV est un SNP du gène du facteur XI : l’allèle mineur est associé à une augmentation de 35% du risque de MTEV (OR=1,35 ; IC95%=1,22-1,34)47. Cette approche a permis de confirmer le rôle du groupe sanguin ABO(H) dans la MTEV. En effet, une méta-analyse de 12 GWAS a mis en évidence une augmentation du risque de MTEV de 55% pour les groupes non-O(H) par rapport au groupe O (OR=1,55 IC95% (1,48-1,63))52. De plus, le risque attribuable au groupe sanguin non-O(H) dans la MTEV est évalué à 30%, soit presque le double du risque attribuable au facteur V Leiden (17%)53. Malgré ces avancées considérables, l’implication du groupe sanguin ABO(H) dans le développement de la MTEV est loin d’être totalement résolue. L’hypothèse la plus probable est que le groupe sanguin, en modifiant l’expression et donc les niveaux d’action des GTA et B, modifierait le degré de glycosylation du VWF et modulerait ainsi sa clairance et/ou son clivage par la métalloprotéase ADAMTS1354-55. Plus le VWF serait glycosylé, plus il serait protégé de l’action de l’ADAMTS13 et, par conséquent, sa demi-vie dans la circulation serait allongée.
Des analyses de liaison ont montré que le groupe sanguin agirait directement sur les taux de VWF56. Le groupe sanguin se présenterait donc comme le déterminant génétique des taux du VWF. D’autre part, le VWF transporte et protège le facteur VIII (FVIII) de la protéolyse, et maintient ainsi stables les taux plasmatiques de ce facteur. Le VWF constitue donc le déterminant principal des taux plasmatiques du FVIII56 dont des taux élevés (>150 %) sont connus pour être un facteur de risque de MTEV. En effet, il a été montré qu’une augmentation des taux plasmatiques de FVIII multipliait par 5 le risque de survenue de MTEV49-57. Chez les groupes non-O(H) et non- A2, les concentrations de FVIII sont plus élevées par rapport aux groupes O(H) et A2. Les taux les plus élevés ont été observés dans le groupe AB. Les personnes de groupe O(H) ont des taux de VWF et de FVIII 25 à 30% moins élevés que les groupes non-O(H)28 ; et les groupes A2 ont des taux comparables aux groupes O(H). Dans une étude conduite chez des individus indemnes de MTEV, Shima et al. ont démontré que les porteurs d’une seule copie de l’allèle O(H) (génotypes BO et AO), avaient des taux de VWF significativement moins élevés que les porteurs des génotypes AA, AB et BB58. Par ailleurs, des études de jumeaux ont démontré que 66% de la variation des taux de VWF serait d’origine génétique, et que 30% de cette variation serait expliquée par le locus ABO(H)59.
Des données contradictoires suggérant un rôle du statut sécréteur/non-sécréteur dans la MTEV sont décrites dans la littérature.
L’étude prospective menée par Ohira et al. montre que l’association entre le groupe sanguin ABO(H) et la MTEV persiste après ajustement sur les taux de facteurs VIII ou de VWF60. Cependant, l’hypothèse la plus communément admise dans la littérature est que l’effet du groupe sanguin ABO(H) sur la MTEV se fait via les variations des taux de VWF (qui déterminent à leur tour les taux plasmatiques du FVIII). Selon O’Donnell et al., le taux d’antigènes H disponibles à la surface du VWF serait le déterminant principal du taux de VWF plasmatique61. Cette étude rapporte aussi l’existence d’une large variabilité du niveau d’expression des antigènes H sur le VWF au sein d’un même groupe sanguin. Cette variabilité des taux d’antigènes H serait due à une variabilité des activités des différentes GT intervenant dans les étapes initiales aboutissant à la synthèse de cet antigène. Au sein du groupe A1, la différence d’activité GT pourrait être multipliée d’un facteur 3 et induirait une modification du niveau d’expression de l’antigène A sur le VWF. Ces données suggèrent que l’activité GT, et donc le niveau de glycosylation du VWF, seraient soumis à des facteurs de variation extérieurs aux polymorphismes du groupe sanguin ABO(H) 61. Soutenant cette hypothèse, les porteurs du groupe sanguin génotypique A1A1 présenteraient le même risque de MTEV que les porteurs du génotype A1O malgré des taux plus élevés de VWF et de FVIII61. L’ensemble de ces données suggèrent que des facteurs différents du VWF, pourraient expliquer l’association retrouvée entre le groupe sanguin ABO(H) et la MTEV. L’activité GT pourrait moduler d’autres acteurs clés de l’hémostase comme la GpIb plaquettaire et la L-sélectine soluble ou encore l’2macroglobuline exprimant l’antigène H. L’activité GT pourrait donc être un facteur de risque de MTEV plus pertinent que le groupe ABO(H).
Sélection des cas
Les patients inclus dans notre étude sont issus de la population MARTHA (MARseille THrombosis Association study). La population MARTHA est composée de patients caucasiens, non apparentés (hommes et femmes) ayant présenté un antécédent documenté de MTEV (TVP et/ou EP) en l’absence de facteur de risque majeur de MTEV (déficits en inhibiteurs, homozygotie pour le facteur V Leiden ou pour la mutation du facteur II G20210A, SAPL) et ayant consulté au Centre d’Exploration des pathologies Hémorragiques et Thrombotiques (CEHT) de l’Hôpital de La Timone à Marseille entre janvier 1994 et août 2008.
Un épisode thrombotique était considéré comme documenté s’il remplissait au moins un des deux critères suivants : i) diagnostic par imagerie, c’est-à-dire par un écho-doppler veineux et/ou phlébographie (TVP) et/ou tomodensitométrie thoracique et/ou scintigraphie pulmonaire (EP) ii) traitement anticoagulant bien conduit, pour une durée d’au moins 3 mois.
Les patients sans prélèvement sanguin disponible n’ont pas été inclus dans cette étude.
Sélection des témoins
Les témoins ont été sélectionnés parmi les donneurs de sang qui se sont présentés à l’EFS-AM entre février 2015 et décembre 2015. Au cours de l’entretien de «pré-don», un médecin consultant évalue et apprécie avec le donneur les contre-indications potentielles au don du sang (Annexe 1). Les donneurs sélectionnés (hommes et femmes), sans antécédent personnel de maladies cardiovasculaires ni de MTEV étaient éligibles pour participer à notre étude. Seuls les donneurs ayant un prélèvement sanguin exploitable (quantité suffisante de sang, conservation correcte…) ont été retenus.
Recueil des données cliniques
Pour les témoins, le recueil de données a eu lieu au cours de l’entretien préalable au don du sang au sein de l’EFS-AM. Le recueil des données cliniques des cas a été effectué au cours d’une consultation spécialisée par un médecin du CEHT à l’aide d’un questionnaire standardisé. Une base de données informatique a été constituée et mise à jour à partir de l’ensemble des données recueillies lors des consultations pour chaque patient, par un des médecins du CEHT. L’extraction de ces données a permis la sélection des patients inclus dans ce travail, ainsi que la collecte de variables cliniques et biologiques.
Variables cliniques
Variables anthropométriques
L’âge au moment du prélèvement ayant servi au dosage de l’activité GT ainsi que la taille et le poids ont été recueillis pour les cas et les témoins. L’IMC a été calculé selon la formule de Quetelet. La présence d’un traitement anticoagulant au moment du dosage de l’activité GT a été renseignée chez les cas.
Variables caractérisant la MTEV
Localisation et circonstances de la MTEV
Les épisodes de MTEV ont été classés selon les localisations de l’épisode thrombotique : TVP isolée des membres inférieur ou supérieur, EP (isolée ou compliquant une TVP), ou TVP d’autre localisation. Ces dernières regroupaient les thrombophlébites cérébrales, les thromboses des veines rénales, de la veine cave, des veines jugulaires, des veines mésentériques, rétropéritonéales ou pelviennes. Les épisodes ont par ailleurs été classés en ambulatoires ou provoqués. Un épisode était dit provoqué si une situation à risque de MTEV était retrouvée : chirurgie dans les 3 mois précédant la MTEV, immobilisation de plus de 7 jours, grossesse/post partum et autres situations regroupant les traumatismes, les voyages de longue durée (trajet en voiture > 10 heures, trajet en avion > 5 heures).
Autres variables
L’âge au moment de la MTEV, le tabagisme actif et le traitement hormonal chez les femmes au moment de la MTEV (aucun, œstro-progestatif, progestatif seul, traitement substitutif de la ménopause) ont également été recueillis chez les patients.
Variables biologiques
Pour chaque participant, un prélèvement de sang a été effectué à la fin de chaque consultation (au CEHT pour les cas et à l’EFS-AM pour les témoins). Des tubes citrates (plasmas) et EDTA (ADN) ont été prélevés. Après une étape de centrifugation des tubes citrates à la vitesse de 2500g / minute pendant 10 minutes, le plasma a été aliquoté, congelé et stocké à – 80°C. L’acide désoxyribonucléique (ADN) génomique a été extrait à partir des échantillons en tubes EDTA.
Mesure des taux plasmatiques de VWF, du FVIII
Les taux plasmatiques de VWF et de FVIII ont été mesurés à partir de plasmas citratés congelés, respectivement par une méthode immuno-turbidimétrique (STA® LIATEST® VWF, DiagnosticaStago) et une technique chronométrique (STA® IMMUNODEF VIII, DiagnosticaStago). Ces mesures ont été effectuées au sein du Service d’Hématologie Biologique à l’Hôpital de la Timone selon le même protocole pour l’ensemble de la population d’étude.
Mesure de l’activité glycosyltransférase
Le dosage plasmatique de l’activité des GTA et B a été effectué par le laboratoire de biologie des groupes sanguins (EFS-AM) selon les recommandations d’O’Donnell et al28. Brièvement, 30L de plasma sont incubés dans un volume final de 100L contenant de l’ATP (5mM), du MnCl2 (14mM pour GTA et 21mM pour GTB), de l’acide 2-(N-morpholino) ethanesulfonique (MES) 50mM pH 6,5 pour GTA et pH 7 pour GTB, d’un accepteur le 2’-fucosyllactose (105M), et d’un oligosaccharide spécifique tritié (25M) sous forme d’UDP-[3H]-N-acétylGalactosamine pour l’activité GTA et d’UDP-[3H]-Galactose pour l’activité GTB. Le mélange réactionnel est incubé à 37°C pendant 2 heures puis la réaction est arrêtée par ajout de 400µL d’eau. Le produit de synthèse radiomarqué est purifié par sélection négative sur une résine échangeuse d’anion (AG®1-X8). La radioactivité produite (témoin du transfert de l’oligosaccharide spécifique) est mesurée en désintégration par minute par un compteur de scintillation. La radioactivité mesurée est proportionnelle à l’activité GT. Les mesures d’activité ont été réalisées en duplicat. Les analyses statistiques portent sur la moyenne de ces deux mesures. A chaque manipulation de dosage des GT, des participants de groupes O(H) ont été utilisés comme contrôles négatifs. Les mesures de radioactivité observées chez ces individus de groupe O(H) génèrent du bruit de fond qui correspond essentiellement à « une activité de dégradation ». Dans la suite de l’étude, nous parlerons plutôt d’activité de dégradation que de bruit de fond pour désigner les mesures obtenues chez les porteurs de groupe O(H). Dans la suite du manuscrit, les dosages d’activités GT sont reportés en dpm pour 30µl.
Génotypage du groupe sanguin ABO(H)
La détermination des groupes sanguins des patients a été obtenue par génotypage des polymorphismes rs8176719, rs1053878 et rs8176743 du locus ABO. Le génotypage a été réalisé par la technologie de courbes de fusion et de sondes d’hybridation sur Lightcycler, (Roche Diagnostics, Indianapolis). La combinaison de ces 3 polymorphismes a permis de déterminer les groupes sanguins selon le Tableau 1. Ces polymorphismes permettent de définir 4 haplotypes, nommés allèles dans la littérature (afin d’être en harmonie, nous les appellerons allèles bien que ceux-ci soient des haplotypes).
Comparaison des activités glycosyltransférases A et B entre les cas et les témoins
Nous avons ensuite comparé les activités GT entre cas et témoins.
Nous avons alors mis en évidence des activités GTA (14%, p<10-4) et GTB (13%, p=0,0004) plus faible chez les cas que chez les témoins (Tableau 8). Ces différences restaient significatives après ajustement sur l’âge au moment du prélèvement et le sexe (p1<10-4 et p1=0,0004 ; respectivement). Par ailleurs, ces associations restaient significatives après ajustements additionnels sur les taux de FVIII (p2<10-4), de VWF (p3<10-4) et sur le groupe sanguin (p4<10-4 pour l’activité GTA et p4=0,0006 pour l’activité GTB). Lorsque nous avons exclu les patients qui ne prenaient pas de traitement antiagrégant ni anticoagulant, les résultats étaient comparables (p4<10-4 pour l’activité GTA et p4= 0,007 pour l’activité GTB). Pour ne pas alourdir les résultats, nous avons choisi de ne pas les présenter dans ce travail.
N : effectif; moy ± ET : moyenne ± écart-type; dpm : désintégration par minute; p: valeur brute ; p1: valeur ajustée sur âge au moment du prélèvement + sexe + IMC; p2: valeur ajustée sur âge au moment du prélèvement âge + sexe + FVIII ; p3: valeur ajustée sur âge au moment du prélèvement + sexe + VWF; p4 : valeur ajustée sur âge au moment du prélèvement + sexe + groupe sanguin; p5 : valeur ajustée sur âge au moment du prélèvement + sexe + groupe sanguin et prise en compte du facteur d’interaction entre le groupe ABO(H) et le statut cas- témoins.
L’activité GTA a été mesurée chez 105 témoins et 85 cas de groupe O(H). Cette mesure correspond essentiellement à une activité de dégradation du substrat radioactif, les individus de groupe O(H) ne possédant pas d’enzyme fonctionnelle. Cette activité de dégradation était différente entre les cas et les témoins (1088 ± 262 dpm/30l vs 999 ± 1053 dpm/30l ; p<10-4). Pour tenir compte de cette différence, nous avons introduit à dans notre modèle un facteur d’interaction entre le groupe ABO(H) et le statut cas-témoins. Après prise en compte de cette différence d’activité de dégradation, nous avons observé que la différence d’acticité GTA entre cas et témoins, restait significative (Tableau 8, p5=0,0015). Ces résultats soutiennent l’existence d’une association entre l’activité GTA et le statut cas-témoins de la MTEV.
Concernant l’activité GTB, nous n’avons pas observé de différence d’activité entre les cas (N=12) et les témoins (N=15) de groupe O(H) : 1719 ± 592 vs 1954 ± 455 dpm, p=0,40. L’introduction d’un facteur d’interaction dans le modèle n’était donc pas pertinente.
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Table des matières
Introduction
I. La Maladie Thrombo-Embolique Veineuse
I.1. Définition
I.2. Epidémiologie
I.3. Physiopathologie
I.4. Facteurs de risque de MTEV
II. Le groupe sanguin ABO(H)
II.1. Découverte et définition du groupe sanguin ABO(H)
II.2. Répartition géographique du groupe sanguin ABO(H)
II.3. Le locus ABO(H)
II.4. Synthèse des antigènes ABO(H)
II.5. Expression des antigènes ABO(H)
II.6. Génotype/Phénotype sécréteur
II.7. Détermination du groupe sanguin ABO(H)
II.8. Groupe sanguin ABO(H) en pathologie
III. Relation maladie thrombo-embolique veineuse et groupe sanguin ABO(H)
Objectif du travail
Matériels et Méthodes
I. Population d’étude
I.1. Sélection des cas
I.2. Sélection des témoins
II. Recueil des données cliniques
II.1. Variables cliniques
II.2. Variables biologiques
II.3. Génotypage du groupe sanguin ABO(H)
II.4. Détermination du statut Sécréteur/ non-sécréteur chez les témoins
II.5. Analyse statistique
Résultats
Première partie : Etude cas-témoins
I. Description de la population
I.1. Caractéristiques des cas et des témoins
I.2. Particularité de l’étude
I.3. Caractéristiques de la MTEV chez les cas
II. Comparaison des taux de VWF et de FVIII entre les cas et témoins en fonction du groupe sanguin
III. Comparaison des activités glycosyltransférases A et B entre les cas et les témoins
IV. Comparaison des activités glycosyltransférases B chez les cas et les témoins en fonction du groupe sanguin
V. Comparaison des activités glycosyltransférases A chez les cas et les témoins en fonction du groupe sanguin
V.1. Etude de l’activité glycosyltransférase A en fonction du nombre d’allèles A1 chez les cas et les témoins
V.2. Comparaison cas-témoins de l’activité glycosyltransférase A en fonction du nombre d’allèles A1
Résultats
Deuxième partie : Etude des marqueurs de la MTEV chez les témoins
I. Etude de l’association entre les activités glycosyltransférases A et B et les taux de VWF et FVIII
II. Etude de l’association entre le statut Se/se et les marqueurs de la MTEV
II.1. Association entre le statut Se/se et les taux de VIII et de VWF
II.2. Association entre le statut Se/se et les activités glycosyltransférases A et B
Discussion
Conclusion
Bibliographie
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