RELATION ENTRE DIVERSIFICATION ALIMENTAIRE ET AMÉLIORATION DE NUTRITION

Sécurité alimentaire

                  La Région Atsimo Atsinanana se trouve parmi les Régions les plus affectées par l’insécurité alimentaire à Madagascar avec une période de soudure structurelle de 6,4 mois (6 mois et 12 jours) par an en moyenne (Randriamiandrisoa & Ballet, 2014). L’augmentation du prix des denrées alimentaires en cette période peut conduire les ménages à un grand risque d’inaccessibilité à l’alimentation, compte tenu de leur faible pouvoir d’achat. Généralement, ils présentent un mauvais profil alimentaire tant en quantité qu’en qualité : peu de fruits et légumes et avec un apport négligeable en protéines animales. (Badjeck et al., 2014). Les principales sources de nourritures se concentrent sur la production propre et les achats au marché. L’insécurité alimentaire à Atsimo Atsinanana touche essentiellement la population en milieu rural en particulier la zone littorale de la Région et peut se basculer en une famine passagère. Les Communes Rurales d’Ankarana-Miraihina et de Mahabo-Mananivo en sont les plus affectées. La consommation des aliments de cueillette tels que le tavolo ou tacca (Tacca leontopetaloïdes) et le viha ou banane aquatique (Typhonodorum lydleyanum), la vente de manioc sec et des fruits non mûrs ainsi que la migration temporaire, forment leurs stratégies de survie pendant la période de soudure extrême, février à mars : temps des fortes pluies où les denrées alimentaires sont de faible disponibilité au niveau du marché (SISAV, 2013).

Reconnaissance de la zone d’étude et échantillonnage

                      Cette reconnaissance a été nécessaire pour l’obtention des informations concernant les réalités socio-culturelles (ethnie, hiérarchie sociale, us et coutumes, tabous, éducation, santé), économiques (activités agricoles et extra-agricoles) et environnementales de la zone à étudier ; ceci en effectuant une visite de courtoisie au niveau des autorités locales (Ampanjaka et le président Fokontany) et une lecture du paysage. Cette dernière a été menée pour la caractérisation du milieu physique (relief, pédologie, hydrographie, végétation) et le mode de vie de la population. Cette observation directe s’est parfois effectuée au moyen d’une discussion auprès des villageois pour avoir de plus amples explications sur les faits observés. L’explication du sujet d’étude a été effectuée à plusieurs reprises à travers des regroupements et à chaque ménage enquêté afin de faciliter l’intégration. Suite à cette exploration, un échantillonnage a été réalisé. Au début, les questionnaires ont été posés sur des exploitants agricoles au hasard pour établir une pré-typologie. Ensuite, pour avoir une bonne représentativité de la population, un échantillonnage raisonné a été établi. Il a été basé sur l’identification des ménages les moins représentés. Le choix s’est fait aléatoirement et selon la disponibilité des enquêtés. Aux termes, 125 exploitants agricoles ont été enquêtés (Cf. Annexe 7).

Typologie des exploitants

                  Après traitement, les125 ménages enquêtés ont été classés dans 6 catégories d’exploitations agricoles. Les paramètres de classification se résument à travers les caractéristiques des exploitations (le chef de ménage, le niveau d’éducation, la taille du ménage, le nombre d’actifs familiaux, l’équivalent adulte et le recours à la main d’œuvre extérieure), les terroirs possédés (statut et superficie des bas-fonds et tanety), les activités de production et extra-agricoles ; et les performances économiques (revenu total par actif et disponibilité par actif). Ces différentes variables sont qualifiées par rapport aux moyennes de la totalité des enquêtés et leur significativité.

Volume et fréquence de fabrication

              La fabrication du charbon s’effectue souvent sur des parcelles nettoyées que ce soit après abattis brûlis ou un simple espace forestier. La meule (ou four) est en fosse de forme rectangulaire avec une dimension moyenne de L*H*l =1,5-2 m*0,60-1 m*1-1,5 m soit un volume de 0,9-3 m3 de bois. Le nombre de sacs produits en charbon à chaque fabrication varie en fonction de la dimension du four. En moyenne, à chaque fabrication, 3 sacs sont produits avec une fréquence mensuelle de fabrication moyenne de 8. Annuellement, la fabrication du charbon peut consommer un grand volume de bois (7802,96-26009,86 m3) (Cf. Annexe 17). Or, actuellement, les charbonniers font face à un problème de disponibilité de bois. Ils affirment que la forêt naturelle jadis principale source de bois se raréfie et les restes dûment disponibles sont interdites à toute exploitation. A part la déforestation, la fabrication du charbon entraine un fort dégagement de CO2 dû à la carbonisation. Elle provoque de la maladie de toux qui touche la plupart des charbonniers. Bref, le prélèvement en bois sur toutes ses formes (bois de construction, de bois de chauffe et du charbon) utilise en moyenne 18414,91 m3 de bois dans l’année. Cette quantité exploitée correspond à 78,32 ha soit 0,9% de la superficie de la Forêt Classée est détruit par an. Le charbonnage constitue la principale activité destructrice (plus de 90% du volume de bois utilisé annuellement). A ceci, s’ajoutent les incendies fréquents dus au tavy non contrôlé et au renouvellement du pâturage. Cette situation peut s’aggraver avec l’accroissement de la population.

Dépendance en ressources naturelles

                      Les zones rurales sont tributaires des ressources naturelles en particulier les ressources forestières pour leur subsistance (Ingram et al., 2005). Les activités extra-agricoles liées aux ressources naturelles constituent des moyens complémentaires permettant de renforcer les activités agricoles (Hubert, 1996). Ainsi, les paysans pauvres, limités dans les activités agricoles (catégories 1, 2, et 4) en effectuent pour maintenir la viabilité de leur exploitation (Sraïri et al., 2003). Par contre les exploitants aisés dans l’Agriculture (catégories 3, 5 et 6) en exploitent pour tirer plus de profit. Par ailleurs, la pêche est une source de richesses importantes pour beaucoup de pays côtiers et insulaires en développement (OCDE, 2009), ainsi les produits de pêche sont plus destinés au commerce. Elle est plus pratiquée par les exploitants aisés (Agossou et al., 2016). Les revenus issus de l’exploitation des ressources naturelles sont destinés principalement à l’achat des produits alimentaires et contribuent plus aux moyens d’existence des ménages durant la période de soudure en riz (OCDE, 2009). Du résultat, les revenus des catégories d’exploitation les plus dépendantes (catégories 2 et 4) de la biodiversité en termes monétaires se présentent à plus de 60% de leur revenu total annuel. Par ailleurs, la part pour la catégorie 2 (plus pauvre) est supérieure à celle de la catégorie 4. En effet, une étude faite par l’OCDE (2006c) sur le parc national du mont Elgon, en Ouganda, a mis en évidence que l’environnement assure 19 % du revenu des paysans qui vivent à proximité du parc, et que les ménages pauvres en sont davantage tributaires que les ménages riches. En plus, une étude en Inde a montré que d’une façon générale, plus un ménage est démuni, plus cette part des ressources naturelles dans le revenu des ménages augmente (Beck & Nesmith, 2001). En effet, l’insécurité alimentaire est un facteur qui incite les ménages à la dépendance aux ressources naturelles (FAO, 2013). Sur le plan alimentaire, les ménages d’Analameloka présentent une alimentation déséquilibrée, à base de manioc et du riz, à dominance de glucide (plus de 80% de l’apport calorique journalier), et déficitaire en protéine (7-9%), en lipide (3-4%), en vitamine A et B2 mais excédent en vitamine C. Cette situation se rapproche à l’étude faite par Rakotosalama (2005) sur l’évaluation de la situation alimentaire et de l’état nutritionnel des villages de Takoandra et de Tsaratanana de la Réserve Spéciale de Manombo mais, plus à proximité des ressources maritimes, les produits aquatiques sources en protéine et lipide leurs sont plus disponibles. En outre, la consommation abondante du manioc frais peut entrainer des troubles physiologiques (empêchement de la fixation de l’iode et du calcium) voire un ralentissement de la croissance. Ceci est dû à l’acide cyanhydrique (substance toxique) qui se trouve en quantité importante dans l’écorce et dont la concentration est variable selon les cultivars et les conditions de croissance : le manioc doux contient 40 à 130 mg de cyanure par kg tandis que le manioc amer 80 à 412 mg/kg et le manioc très amer, 280 à 490 mg/kg (Rabehaja, 1999). Ce composé toxique est thermolabile, séchage au soleil et fermentation ; il est très volatile et soluble dans l’eau (Favier, 1977 ; Rabehaja, 1999). Ce qui explique les différents procédés de cuisson du manioc par les ménages d’Analameloka. La racine de manioc est assez bien pourvue d’acide ascorbique, riche en amidon et très pauvre en lipide surtout protéines (Favier, 1977). En effet, l’absence de légumes et fruits cause d’importantes carences en micronutriments, également, les fruits sont saisonniers et à faible rendement (Daihirou & Niaméogo, 2005). Par rapport aux différentes catégories d’exploitation agricole, seules les catégories 6, grands propriétaires terriens pratiquant beaucoup l’agriculture, arrivent à satisfaire ses besoins caloriques journaliers à la fois en ASARA et SAKAVE. La suffisance alimentaire en apport calorique est fortement dépendante de l’agriculture (Badjeck et al., 2014 ; Randriamiandrisoa & Ballet, 2014). Ainsi, les exploitants agricoles à faible superficie (bas-fonds pour le riz et tanety pour le manioc) n’arrivent pas à combler leurs besoins énergétiques. Ce qui explique l’écart calorique entre les catégories 3 et 4. Bref, c’est la catégorie 1, la plus démunie et misant sur la diversification d’activité qui souffre le plus de l’insuffisance alimentaire (Ministère de l’Agriculture et du Développement Rural, 2014). La part des ressources naturelles dans la ration journalière des ménages diffère d’une catégorie à une autre (Mérode et al., 2004). C’est la catégorie 1, la plus pauvre qui en consomme fréquemment et en diversité (OCDE, 2009). Ces aliments peuvent contribuer entre 6-48% des apports en énergie, à 21,05% des protéines journaliers des ménages et sont importants durant le SAKAVE. Cette situation se rapproche des résultats de Van Liere et al. (1995) dans leur étude d’impact de l’insécurité alimentaire saisonnière sur l’apport en énergie et en protéines au Bénin. Cette équipe a constaté que les ressources sauvages fournissent 6-9% des apports caloriques et 1-2% des apports caloriques d’origine protéinique journaliers des ménages, leurs contributions diffèrent selon la saison et que leurs apports en micronutriments varient d’une saison à l’autre. Donc, les exploitants d’Analameloka sont plus rattachés aux ressources naturelles que ceux du Bénin. D’autre part, la biodiversité est une excellente source en produits glucidiques, protéinés, vitamine B1 et en calcium. Les tubercules sont des aliments glucidiques de substitution (Collinlaw et al., 2009). Les crustacés et les poissons sont sources de protéines et de calcium. Par ailleurs, le Bidens pilosa (sornet) est une excellente source de calcium et de vitamine B1. En effet, les ressources naturelles ont une densité nutritive supérieure à celle des autres ressources et elles contribuent de façon importante à la qualité de l’alimentation (Blaney, 2008). Leur contribution en micronutriments diffère selon leur catégorie et la saison (Mérode et al., 2004). La biodiversité peut contribuer fortement dans l’amélioration des revenus et de l’alimentation des vulnérables que des riches. Néanmoins, c’est la catégorie des vulnérables qui exploite plusfréquemment et en diversité les produits alimentaires de cueillette.Ainsi, l’hypothèse 2 qui affirme que ce sont les classes vulnérables qui sont les plus dépendantes en ressources naturelles est partiellement vérifiée

Perspectives et recommandations

                  La sécurité alimentaire des ménages est étroitement liée à leurs moyens de subsistance : les activités sources de revenus, l’agriculture et l’élevage. Ainsi, améliorer l’offre et la disponibilité des aliments serait un outil de sécurité alimentaire pour la population d’Analameloka. En outre, des mesures de gestion locale et de valorisation sont nécessaires pour réduire la destruction de la biodiversité. Augmenter la production rizicole à travers l’amélioration des techniques culturales et l’accès à la terre serait opportun. Comme les sources d’engrais se limitent à l’apport des bouses de vaches et des fientes de volaille, former les exploitants agricoles dans le compostage serait une solution vu l’abondance des sources en matières végétales dans la zone. Penser aussi à l’intégration des systèmes de cultures sous SCV pour les cultures sur tanety : en termes de  fertilisation et de protection des bassins-versants étant donné que le système de culture tend à devenir permanent et que la plupart des tanety sont dominés par des savanes herbeuses. Diversifier les offres alimentaires à travers le développement des cultures maraîchères et fruitières serait intéressant. Pour cela, des formations sur les techniques de cultures, les méthodes de cuisson et de conservation, des appuis sur l’acquisition des intrants (semences, fertilisants) et des études de chaîne de valeur seront indispensables. Pour les arbres fruitiers en particulier, les formations sur méthodes d’entretien des vergers s’avèrent intéressant à insister. Développer l’élevage porcin ou la culture de cocotier procurerait des sources en matières lipidiques dans l’alimentation. Par ailleurs, la pisciculture pourrait être une solution dans la rareté des espèces aquatiques d’eau douce. Promouvoir la durabilité de la pratique de la vannerie serait à encourager car c’est la principale activité source de revenu des femmes : envisager la vulgarisation de la culture des mahampy ou Lepironia mucronata en s’appuyant sur les techniques adoptées par certains exploitants. Par contre, pour le charbon, obliger les exploitants à faire du reboisement individuel pour sa propre consommation afin que l’exploitation ne s’élargisse pas au niveau de la Réserve Spéciale. Sur ce, une formation sur la sylviculture serait nécessaire. Pour toutes les spéculations à développer, former des pépiniéristes et des producteurs semenciers pour faciliter l’accès et la disponibilité des jeunes plants et semences. Faciliter l’accès des femmes aux crédits agricoles : les revenus issus de l’exploitation de la biodiversité (vannerie ou charbon) pourraient leur servir de gage afin qu’elles puissent posséder des terrains à cultiver. Structurer les producteurs agricoles en organisation paysanne serait efficace en matière d’organisation en vue de faciliter les formations et les suivies une fois à appliquer, faire le poids sur les prix des produits agricoles et artisanaux (favoriser la vente groupée) et soutenir l’octroi des crédits agricoles.

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Table des matières

REMERCIEMENTS
LISTE DES ILLUSTRATIONS
LISTE DE FIGURES
LISTE DES TABLEAUX
LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONs
GLOSSAIRE
RÉSUMÉ
ABSTRACT
FAMINTINANA
INTRODUCTION
I. MATÉRIELS ET MÉTHODES
I.1 ZONE D’ÉTUDE
I.1.1 Localisation
I.1.2 Climat
I.1.3 Sol
I.1.4 Hydrographie
I.1.5 Végétation et biodiversité
I.1.6 Caractéristiques de la populatioN
I.1.7 Sécurité alimentaire
I.1.8 Infrastructures socio-économiques
I.2 Activités économiques
I.2.1 Activité agricole
I.2.2 Activité d’élevagE
I.2.3 Activité de pêche
I.2.4 Activité liée à la forêt
I.3 MÉTHODOLOGIE
I.3.1 Reconnaissance de la zone d’étude et échantillonnage
I.3.2 Enquête proprement dite et Entretien Focus Group
I.3.3 Gestion et traitement des donnéeS
I.3.4 Caractérisation de l’alimentation
I.3.5 Estimation des superficies déboisées
I.3.6 Limites de l’étude
II. RÉSULTATS
II.1 Typologie des exploitants
II.2 Formes d’utilisation de la biodiversité
II.3 Exploitation de la biodiversité et environnement
II.3.1 Produits forestiers ligneux
II.3.1.1 Bois de construction
II.3.1.2 Bois de chauffe
II.3.1.3 Charbon
II.3.2 Produits forestiers non ligneux
II.3.2.1 Vannerie
II.3.2.2 Produits forestiers alimentaires (aliments de cueillette)
II.3.2.3 L’arbre du voyageur (Ravenala madagascariensis)
II.3.3 Tavy
II.3.3.1 Systèmes de culture
II.3.3.2 Pratiques culturales
II.3.3.3 Effets sur l’environnement
II.3.4 Produits thérapeutiques
II.3.5 Produits aquatiques
II.3.5.1 Espèce et lieu de prélèvement
II.3.5.2 Fréquence d’exploitation et quantité consommée
II.4 Exploitation de la biodiversité et sources de revenu
II.4.1 Destination des produits du tavy
II.4.2 Destination des produits de cueillette
II.4.3 Revenus issus de l’exploitation de la biodiversité
II.4.4 Part des revenus issus de l’exploitation de la biodiversité
II.5 Situation de l’horticulture
II.5.1 Contexte sur les cultures maraîchères ou CUMA
II.5.2 Destination des CUMA
II.5.3 Contexte des cultures fruitières
II.5.4 Destination des fruits cultivés
II.6 Exploitation de la biodiversité et alimentation
II.6.1 Habitude alimentaire
II.6.2 Profil nutritionnel des ménages
II.6.2.1 Apport calorique journalier
II.6.2.2 Apport en nutriments et vitamines
II.6.1 Sources des produits alimentaires
II.6.2 Part des aliments de cueillette dans la ration journalière
II.6.2.1 Fréquence de consommation des aliments de cueillette
II.6.2.2 Nutriments et vitamines
III. DISCUSSIONS
III.1 Utilisation des ressources naturelles
III.2 Dépendance en ressources naturelles
III.3 Développement des cultures maraîchères et fruitières
III.4 Perspectives et recommandations
CONCLUSION
RÉFÉRENCES BIBLIOGRAPHIQUES

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