Dans tous les pays touchés par la désindustrialisation on voit apparaître au sein des villes ou dans leur périphérie des friches industrielles. Ces zones « anciennement tournées vers des activités industrielles ou d’autres activités en liaison avec l’industrie » sont pour la plupart inoccupées ou bien sous-utilisées. Ce sont des espaces à l’abandon qui sont bien souvent perçus d’une manière négative. En effet, on parle de « pertes sur les plans esthétique, économique et écologique ». Ces espaces désertés sont donc de plus en plus visés par des acteurs variés qui y voient chacun un intérêt particulier, qui va d’augmenter la rente foncière de la commune à renaturaliser et valoriser la biodiversité de ces sites. Mon projet concerne une de ces zones, il s’agit de la friche industrielle des papeteries de Lancey. Celle-ci est située sur la commune de Villard-Bonnot à proximité de Grenoble. Au pied du massif de Belledonne (Alpes) dans la vallée du Grésivaudan. L’usine, anciennement dédiée à l’activité papetière qui a permis le développement de la vallée du Grésivaudan, a fermé ses portes en 2008 et occupe depuis un espace à l’abandon de 6 hectares (sur les 500 que compte la commune).
L’emploi de cette zone va permettre de résoudre différentes problématiques à laquelle la commune fait face : une perte de dynamisme due en partie à la désindustrialisation mais aussi un manque d’équipements. On peut donc se poser la question suivante : quel nouvel usage peut on trouver à la friche industrielle des papeteries afin de répondre aux besoins en équipements de la commune, tout en lui offrant une certaine attractivité. Cet usage devra s’inscrire comme un devoir de mémoire envers l’usine qui a été l’élément fondateur de la commune telle qu’elle est visible aujourd’hui, et donner une valeur écologique à un lieu aujourd’hui pollué et sans attrait particulier.
Etude de la commune et du site des papeteries
Etat des lieux de la commune de Villard-Bonnot
Le site d’étude, la papeterie de Lancey, se situe sur la commune de Villard-Bonnot. Celle ci est située sur la rive gauche de l’Isère au pied du massif de Belledonne (Alpes) à mi-chemin entre Grenoble et Chambéry dans la vallée du Grésivaudan. Cette commune s’étend sur une superficie de 5,84 km2 compte 7 300 habitants et fait partie d’une communauté de communes « Le Grésivaudan » qui rassemble 46 communes (100 000 habitants) de la vallée et des coteaux avoisinants. Les limites de Villard-Bonnot telles qu’on les connaît aujourd’hui sont nées du regroupement de 3 bourgs :
• Brignoud en amont
• Villard-Bonnot situé entre les 2 bourgs
• Lancey en aval
Cela a engendré une des particularités de la commune. Celle-ci ne s’étant pas formée autour d’un centre bourg mais autour de l’axe routier reliant les différents hameaux on peut voir aujourd’hui une sorte de «commune rue». Il n’y a pas de centre bourg à Villard-Bonnot, qu’il s’agisse d’un centre historique ou actuel. Ainsi, on ne peut pas trouver la «place centrale» emblématique de beaucoup de villages français. Cela se traduit par un manque de lieux de rencontres au sein de la commune. Les contacts intra et intergénérationnels sont donc, en règle générale, très limités, ce qui ne favorise pas le dynamisme de la commune par manque de rencontres Etant située à flanc de montagne et à proximité d’un fleuve la commune de Villard-Bonnot est touchée par deux risques principaux :
• Les inondations : liées à la présence de l’Isère dont le débit peut parfois augmenter de manière très importante après de gros orages ou à la fonte des neiges mais aussi aux torrents de montagnes. Les crues de l’Isère, bien que de grande ampleur ont un impact modéré sur la commune car la gestion de celles-ci est bien réalisée avec des plages de dépôts et des zones libres en bordure de fleuve pouvant être inondées. Les crues torrentielles quand à elles sont plus imprévisibles, charrient plus de déchets et ne font pas l’objet de protection spécifique, ce qui explique les nombreux dégâts matériels de la crue de 2005. Cette crue a été particulièrement importante car un embâcle s’est formé au niveau de la papeterie dans un tunnel. Son explosion a généré encore plus de déchets.
• Le risque de glissement de terrain: plus localisé, celui ci est présent sur la commune au niveau des parcelles les plus proches de la montagne. Ce risque est cependant plus faible que le risque d’inondation.
Le climat quand à lui est très particulier. On retrouve des influences mi-océaniques, micontinentales, méditerranéennes mais aussi un climat de montagne. C’est d’ailleurs ce dernier qui influence le plus la région. On retrouve ainsi les caractéristiques suivantes :
• des amplitudes thermiques journalières très importantes
• un ensoleillement important (2066 heures par an en moyenne pour 1973 heures par an au niveau national en moyenne)
• des précipitations qui peuvent être violentes et qui sont caractérisées par leur durée. Les montagnes empêchant les perturbations de s’évacuer rapidement (934mm par an en moyenne pour 770mm par an au niveau national) .
Il faut donc prendre en compte le fait que malgré un climat ensoleillé les conditions climatiques « défavorables » (pluie, orages, neige) sont régulières et assez intenses. Nous allons maintenant nous intéresser à l’histoire de la commune qui est très liée à celle de mon site d’étude. Nous verrons ensuite quels constats peuvent être faits actuellement quant à la commune en terme de population et d’équipements, puis nous verrons quelles sont les orientations à l’échelle du territoire pour la commune.
Une identité liée à une ressource et son exploitation : la Houille Blanche et l’industrie papetière
La commune de Villard-Bonnot est directement issue de la révolution industrielle. En effet, à cette période va se développer l’utilisation de l’énergie hydraulique (ou Houille Blanche par analogie au charbon). Ce type d’énergie va principalement être utilisé dans les zones de montagnes où la force des torrents peut être améliorée facilement à l’aide de conduites forcées placées dans des zones avec des dénivelés importants. L’industrie papetière va être particulièrement intéressée par cette ressource. A tel point que deux papeteries vont s’installer sur l’actuelle commune de Villard-Bonnot. L’une d’elle va être implantée sur le hameau de Brignoud (toujours en activité à l’heure actuelle) et une sur le hameau de Lancey (celle étudiée dans ce projet). Après l’implantation de ces deux usines la population des deux hameaux va connaître un essor très important, puisque entre 1821 et 1921 elle va être multipliée par 6. Cet essor est notamment dû à l’immigration italienne et ibérique. La politique paternaliste des dirigeants des papeteries est toujours visible et perceptible à l’heure actuelle. Les quatre cités ouvrières bâties à cette époque sont toujours habitées. Le cinéma, construit pour divertir les ouvriers, aujourd’hui reconverti en logement garde la mémoire de son ancienne fonction par l’inscription « cinéma » sur le fronton. Enfin, l’harmonie des papeteries de Lancey a été à l’origine d’une association musicale. Cette association perdure encore sous la forme d’une école de musique dans laquelle environ 300 enfants sont inscrits. Ainsi, l’implantation des papeteries a forgé le visage de la commune de Villard-Bonnot en favorisant la croissance des différents hameaux au point que ceux-ci fusionnent et ne forment plus qu’une seule commune. Jusqu’à leur fermeture les papeteries ont donc été le lieu de travail de nombreuses personnes sur la commune. Cela a influencé l’attachement de la population à cette usine comme en témoigne ces paroles recueillies auprès d’ouvriers à la liquidation de la papeterie de Lancey en 2008: «Toute ma famille y a bossé. Quand on rentrait là-bas, on connaissait déjà quelqu’un.» «En 2008, tout le monde était dans le mouvement: les ouvriers, les cadres, les maîtrises. On tractait le matin à Brignoud. On a bazardé du papier au tribunal. Ca a été très suivi parce que les gens se sont dit qu’il n’y avait pas d’issue».
Equipements et espaces publics
D’après le POS on peut voir qu’une seule zone dans la commune est classée Ucj ; zone de jardins familiaux et équipements publics de loisirs. On a donc un seul espace urbain dédié à l’accueil d’équipements publics de loisirs. Les zones classées comme naturelles sont quand à elles dédiées à l’agriculture, le traitement de produits d’extraction des métaux et des déchets encombrants, la protection de site ou la création de ZAC. Une zone NAe est dédiée à l’équipement public mais celle-ci recouvre une zone de pâture destinée à des vaches. De plus, on ne trouve pas d’espaces verts publics tels que des parcs ou des jardins sur la commune. Et, pour ce qui est des aires de jeux pour enfants, on retrouve seulement 3 sites sur lesquels des infrastructures sont en place, l’un d’eux étant réservé à une résidence privée. Ainsi, la commune possède des espaces naturels mais ils ne sont pas destinés au public. Il y a donc un manque en matière d’espace verts ce qui va de pair avec un manque d’équipements et d’espaces de loisirs de plein air pour la population. De plus, étant donné que la commune ne possède pas d’espace central permettant des rencontres entre les habitants ceci est encore plus dommageable car les espaces verts tels que des parcs ou des aires de jeux pour enfants sont des lieux de rencontre et d’échange au sein et entre les générations. Si le constat est sévère pour les espaces publics celui qui concerne les équipements est plus nuancé. Au niveau de la culture on retrouve: un cinéma, une école de musique, un centre socio-culturel, une médiathèque répartie sur 2 sites et un musée. Le musée est dédié à la Houille Blanche et son «inventeur» Aristide Bergès. Il est situé dans l’ancienne maison de ce dernier juste au niveau de la friche industrielle des papeteries. Le nombre de visiteurs est assez faible car le musée est peu mis en valeur. En effet il y a un manque de signalétique et l’environnement immédiat est actuellement pauvre en centre d’attraction touristique. La présence d’une école de musique laisse supposer des équipements permettant des représentations, mais ce n’est pas le cas. Au sein des locaux de l’école de musique il n’y a pas de salle de concert. La commune ne possédant pas non plus de salle adaptée (le cinéma possède une salle mais la programmation est saturée et la gestion est effectuée au niveau de la communauté de communes) pour des concerts ceux-ci ont lieu dans le boulodrome. L’espace n’est donc pas parfaitement adapté: les spectateurs se retrouvent pour une bonne partie dans des gradins en béton inconfortables et de dimension ne permettant pas une assise confortable.
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Table des matières
Introduction
1. Etude de la commune et du site des papeteries
1.1. Etat des lieux de la commune de Villard-Bonnot
1.1.1. Une identité liée à une ressource et son exploitation : la Houille Blanche et l’industrie papetière
1.1.2. Evolution de la population
1.1.3 Equipements et espaces publics
1.1.4. Les orientations du SCoT pour la commune
1.2. Localisation des papeteries et spatialisation des éléments caractéristiques
1.2.1. Historique des papeteries
1.2.2. Dégradation du bâti
1.2.3. Des risques naturels liés à l’emplacement
1.2.4. Une activité qui a laissé des traces dangereuses
2. Objectif de l’aménagement
3. Quel aménagement pour répondre à ces objectifs ?
3.1. Hypothèses quant au site
3.2. Aménagement d’un parc communal
3.2.1. Aménagement du bassin de rétention
3.2.2. Aménagement du reste du parc
3.2.2.1. Aire de loisirs pour enfants
3.2.2.2 Parcours de santé
3.2.2.3. Espace destiné au pique-nique
3.3. Quelles activités implanter dans le bâti afin de créer une zone de loisirs ?
3.3.1. Création d’un espace de concert modulable
3.3.2. Création d’un espace dédié au tourisme
3.3.3 Ouverture d’un espace de restauration
3.3.4. Implantation d’infrastructures permettant les loisirs
3.3.4.1. Des loisirs sportifs en intérieur
4. Quelle spatialisation pour cet aménagement ?
Conclusion
Annexes
Bibliographie
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