Régime alimentaire et prédation sur les ongulés

L’ expansion et l’intensification de l’utilisation du milieu par l’ homme aboutissent à des modifications du paysage qui touchent aussi bien la composition du milieu, par la perte ou la création d’habitat, que la configuration de celui-ci en agissant sur la fragmentation, la taille des peuplements et l’isolement des parcelles (Fahrig 1997). Considérés comme une menace majeure pour la biodiversité (Noss 1991; Saunders et al. 1991; Fahrig 2003), les impacts de tels changements sont très variables selon le type et l’ intensité des modifications (Andrén 1994), le milieu touché (Fahrig 2001), les caractéristiques physiques, physiologiques et comportementales des espèces considérées (Harrison & Bruna 1999; Gehring & Swihart 2003). De plus, la complexité des écosystèmes et des relations trophiques font que les impacts de ces modifications sur les populations animales sont susceptibles d’inclure conjointement des effets directs et indirects (Polis et al. 2000).

Impacts négatifs sur les populations animales 

De nombreuses études montrent les conséquences négatives des modifications de l’habitat par l’homme sur les populations animales. Parmi celles-ci, la perte d’habitat constitue probablement le facteur le plus important causant le déclin de nombreuses espèces à travers le monde, par une diminution de la disponibilité, voir une disparition des milieux fournissant les conditions nécessaires à la reproduction, à la croissance et la survie (Haila 1999; Schmiegelow & Monkkonen 2002; Whitfield et al. 2007). La fragmentation induite par une destruction partielle de l’habitat conduit quant à elle à la formation d’un paysage constitué de parcelles d’ habitat résiduels dans lesquelles les populations se retrouvent séparées en sous-unités qui sont généralement isolées les unes des autres (Gaona et al. 1998; Jiang et al. 2000; Kinley & Apps 2001; Marino 2003).

A ces effets directs, s’ajoutent plusieurs effets indirects. La dynamique des populations concernées est affectée par un taux de mortalité accru lors de la dispersion des individus dans la matrice d’ habitats modifiée, des échanges faibles entre les populations fragmentées voir inexistants dans le cas des populations isolées (Fahrig 2001). Cela induit également pour ces populations une tendance à développer des problèmes de dérive génétique dus au faible flux génique existant (Sih et al. 2000). Généralement réduites à une petite taille, ces populations sont aussi plus susceptibles de disparaître suite à divers stress environnementaux (Reed 2005; Willi et al. 2006). Enfin, certaines études proposent que la fragmentation de l’ habitat pourrait conduire temporairement à une concentration d’individus dans les habitats résiduels, induisant d’ importantes interactions intra-espèces (compétition) et inter-espèces (compétition, prédation) pouvant mener à des extinctions locales (Holt 1984; Courtois 2003).

Impacts positifs sur les populations animales 

Les changements apportés par l’homme à la composition et/ou à la configuration du milieu peuvent cependant avoir des effets positifs sur certaines espèces. Ainsi, les modifications apportées peuvent aboutir à l’ apparition de nouveaux types d’habitat ou à l’ augmentation de la proportion de certains types d’habitats dans le paysage. Ce faisant, elles peuvent permettre l’ établissement d’espèces jusque là absentes, ou à des espèces présentes d’accroître leur densité (Saunders et al. 1991 ; Andrén 1994). Ainsi en Amérique du Nord par exemple, le cerf de Virginie (Odocoileus virginianus) bénéficiant de l’ extirpation du loup (Canis lupus), mais aussi de l’ouverture du milieu pour des fins d’ agriculture et de foresterie, a vu son aire de répartition s’ étendre vers le Nord et ses populations croîtrent à tel point qu ‘ elles sont considérée comme surabondantes dans plusieurs régions (McShea et al. 1997). Dans la sapinière et la forêt mélangée, les modifications de l’ habitat sont également fortement impliquées dans l’ expansion de l’aire de répartition de l’orignal (Alces alces) (Karns 1998; Darimont et al. 2005). Ce dernier bénéficie entre autres des coupes forestières qui, durant leur phase de régénération, lui fournissent une grande quantité de nourriture (Potvin et al. 2005 ), lui permettant de se maintenir à haute densité (Edenius el al. 2002; Lamoureux et al. 2007).

Des espèces prédatrices, peuvent elles aussi tirer profit des modifications de l’habitat, mais cette fois-ci de façon indirecte. Le coyote (Canis latrans) par exemple, a pu exploiter l’ augmentation des densités d’une de ses proies (i.e. le cerf de Virginie) pour étendre son aire de répartition (Crête & Desrosiers 1995). La création de corridors linéaires (i.e. chemins, lignes sismiques, corridor de pipeline) peut également accroître l’accessibilité du milieu aux prédateurs qui les utilisent comme voies de déplacement (Bennett 1991 ; Noss 2001), leur fournissant ainsi des conditions propices à une plus grande efficacité de prédation (Bergerud 1981 ; James & Stuart-Smith 2000).

Effets sur l’écologie des communautés et la conservation des espèces

Le maintien d’ un écosystème est le résultat d’un certain équilibre entre les communautés d’ espèces qui le composent (Holling 1973). Les perturbations de l’habitat sont susceptibles d’ agir directement ou indirectement sur tous les maillons des chaînes trophiques composant cet écosystème sous la fonne d’ impacts positifs ou négatifs selon les espèces considérées (Saunders et al. 1991 ; Fahrig 2003 ; Courtois & Ouellet Sous presse). Combinées, elles peuvent donc avoir des conséquences très impoltantes sur les relations entre espèces et conduire à une déstabilisation du système (Saunders et al. 1991 ; Schneider 2001 ). Les relations Loup – Orignal – Caribou des bois en Amérique du Nord constituent un très bel exemple pour illustrer cette situation (Seip 1992; James et al. 2004). Le nombre de caribous décline généralement depuis la fin des années 1800. Attribué tout d’abord à une chasse abusive depuis l’établissement des premiers européens (Bergerud 1974), ce déclin est désormais associé également à un effet notable de la prédation accélérée par les modifi cati ons anthropiques de l’ habitat (Seip 1992; Retti e & Messier 1998; Wittmer et al. 2005). En effet, en contribuant à la création de conditions propices au maintien d’ une fOlte densité d’orignaux, certains types de coupes forestière permettent indirectement l’accroissement des populations de loups (Bergerud 1974; Wittmer et al. 2005; Wittmer et al. 2007). Le caribou, en tant que proie alternative du loup, se voit ainsi soumis à une plus grande pression de prédation. Cette interaction indirecte entre deux espèces proies ayant un prédateur commun, appelée compétition apparente (Holt 1977), peut résulter en un déclin voir à l’ extinction de la proie alternative (Holt & Lawton 1994).

Comprendre comment les systèmes écologiques sont affectés par les perturbations est donc d’ une impoltance maj eure dans un objectif de conservation des écosystèmes. Dans un contexte de conservation d’espèce menacée, ces connaissances prennent toute leur importance en aidant à définir les mesures qui doivent être prises pour supprimer ou limiter les effets négatifs directs ou indirects touchant l’espèce considérée. Toutefois, devant la complexité de situations telle celle décrite précédemment, il est nécessaire dans un premier temps d’essayer de comprendre le comportement de chacune des espèces impliquées face aux modifications de l’ habitat.

LA SITUATION DU CARIBOU DE LA GASPÉSIE

Causée par une destruction de l ‘ habitat et une chasse abusive au cours de l’installation des premiers européens, la limite sud de l’aire de répartition des caribous en Amérique du Nord a été très modifiée depuis le milieu du 19 ème siècle (Bergerud 1974). Relique des hardes  qui peuplaient le nord-est des États Unis et le Canada Atlantique au début du 19ième siècle (Bergerud & Mercer 1989), la population des caribous de la Gaspésie est la seule population qu’on retrouve aujourd’hui au sud du fleuve Saint-Laurent (Ouellet et al. 1996). De plus, son isolement géographique des autres hardes l’a conduit à développer une identité génétique unique (Roed et al. 1991 ; Courtois et al. 2003a). Son effectif estimé entre 700 et 1500 individus en 1953 (Moisan 1957), n’était plus que de 250 à 300 à la fin des années 70 (Rivard 1978). Suite à sa désignation comme espèce menacée en 1984 (Comité sur le statut des espèces en péril au Canada [COSEPAC] / Committee on the Status of Endangered Wildlife in Canada [COSEWIC] 2002), un programme de recensement annuel de la population a été mis en place. Ce suivi a permis également d’évaluer la proportion de faons dans la population, et de constater son faible taux de recrutement. Au cours des étés 1989 et 1990, un suivi intensif de faons équipés de colliers émetteurs a permis à Crête et Desrosiers (1995) d’attribuer ce problème à la prédation réalisée par l’ours noir et le coyote.

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Table des matières

CHAPITRE 1 Introduction
1.1. Sélection de l’habitat et utilisation de l’espace
1.2. Modifications de l’habitat et populations animales
1.2. 1. Impacts négatifs sur les populations animales
1.2.2. Impacts positifs sur les populations animales
1.2.3 . Effets sur l’ écologie des communautés et la conservation des espèces
1.3. La situation du caribou de la Gaspésie
1.4. L’ours noir
1.4.1. Domaines vitaux et dynamique des déplacements
1.4.2. Régime alimentaire et utilisation de l’habitat
1.5. Le coyote
1.5.1 . Utilisation de l’ espace
1.5.2. Régime alimentaire et prédation sur les ongulés
1.6. L’ours noir et le coyote en Gaspésie: Réponse théorique à un habitat limitant
1.6.1. L’ours noir : l’espèce indigène
1.6.2. Le coyote : le nouveau venu
1.6.3. Réponse théorique à un habitat limitant
1.7. Objectif général et suivi des prédateurs
1.8. Objectifs spécifiques et plan de la thèse
CHAPITRE Il Extensive predators space use can limit the efficacy of a control program 
2.1. Résumé
2.2. Abstract
2.3. Introduction
2.4. Study area
2.5. Methods
2.5.1 . Gaspésie caribou population
2.5.2. Black bear and coyote data
2.5.3. Data analyses
2.5.4. Simulations
2.6. Results
2.6.1. Black bear space use
2.6.2. Coyote space use
2.7. Discussion
2.7.1. Extensive predator movements
2.7.2. Consequences of extensive predator movements
2.7.3. Other factors affecting predators
2.8. Management implications
CHAPITRE III Black bear adaptation to low productivity in the boreal forest 
3.1. Résumé
3.2. Abstract
3.3. Introduction
3.4. Materials and methods
3.4.1. Study area
3.4.2. Black bear data
3.4.3. Habitat use and seasonality
3.4.4. Resource selection functions
3.4.5. RSF variables
3.4.6. Landcover characteristics
3.5. Results
3.5. 1. Phenology and diet analysis
3.5.2. Landcover characteristics
3.5.3. Resource selection function
3.6. Discussion
3.7. Implications
CHAPITRE IV Spatial scale variation in habitat use of a landscape species 
4.1. Résumé
4.2. Abstract
4.3. Introduction
4.4. Material and methods
4.4. 1. Study area
4.4.2. Black bear data
4.4.3. First-passage time analysis
4.4.4. Environmental variables considered
4.4.5. Statistical analyses
4.5. Results
4.5. 1. Seasonal spatial scales of selection
4.5.2. FPT as a response variable
4.6. Discussion
4.6.1. Seasonal sc ales and habitat selection
4.6.2. Approach used
4.6.3 . Black bears as a landscape species
CHAPITRE V Conclusion

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