Repères sémantiques et historiques
La question, « passer du journal scolaire papier au journal scolaire sur Internet ? » me sert de base de travail pour ma recherche.
En tant que journaliste, je suis plutôt sensible à l’aspect « information de presse » et « information d’actualité ». En tant que stagiaire au sein de l’Education nationale, je me pré¬occuperai également de l’aspect pédagogique, qui intéresse en priorité l’Inspection et l’équipe enseignante de l’école Paul-Claudel.
Comme je dois limiter mon sujet, je ne m’attarderai pas à la question « éducation aux médias ou éducation par les médias ». Les recherches en ce domaine me serviront cependant à compléter ma démarche.
Certains termes ont besoin d’être définis pour mieux comprendre ce dont nous parlons, sans ambiguïté. Prenons le terme « information », on peut lui trouver plus d’une dizaines de sens différents selon les domaines où il est employé ‘.juridique, scientifique, journalistique…
Dans l’expression «sciences de l’information» elle-même, Yves Jeanneret distingue l’information au sens mathématique (message codé par un système binaire pour être transmis par un dispositif de télécommunication) du sens social (une information « modifie la perception que nous avons du monde, informe notre esprit, met en forme notre relation au réel »). Il ajoute que l’expression « technologies de l’information » « entretient la confusion entre deux définitions parfaitement distinctes du mot information […], ce qui a pour intérêt, du point de vue des technologues, de suggérer que le traitement mathématique des signes est en lui-même vecteur d’information sociale ».
Dans notre exposé, « information » aura ce double sens : journalistique et informatique.
Nous aurions pu aussi comme Dominique Wolton, distinguer l’information-presse,l’information-service, l’information-connaissance, l’information-loisir. Mais, ici, le terme « information » regroupe toutes ces nuances.
Une autre précision est nécessaire entre NTIC et NTICE. Pascal Marquet, chercheur en sciences de l’éducation, dans un article intitulé « Pour passer vraiment des « NTC » aux Sabine BERTAUX BRANDICOURT Mémoire Maîtrise SID Journal scolaire sur Internet « NTE » », indique : « On confond trop souvent les NTIC, les nouvelles technologies de l’information et de la communication, et les NTE, les nouvelles technologies éducatives. Les premières s’inscrivent dans un contexte économique concurrentiel, les secondes dans un contexte scolaire public. Sinon, ne tombe-t-on pas dans l’illusion que le recours à un dispositif technique aux mille prouesses aura des effets pédagogiques positifs et des vertus éducatives automatiques ? […] De nombreux travaux didactiques l’ont montré : informer n’est pas former et encore moins faire apprendre. Aussi, ne suffit-il pas de souhaiter que les outils modernes d’information deviennent des outils non moins modernes de formation pour que ceux-ci le soient effectivement. »
Dans le cas qui nous préoccupe,les technologies éducatives nous intéressent si elles sont liées aussi à l’information et la communication puisque notre sujet est le journal scolaire, donc un produit d’information et de communication. Cependant, nous employons « NTIC » quand ces technologies sont utilisées en général et «NTICE» quand elles s’appliquent à l’enseignement. Dans les directives ministérielles de 1998, c’est le terme « NTICE » que l’on trouve le plus souvent. En revanche, les expressions « autoroutes de l’information »,
« inforoutes », les mots formés avec le préfixe « cyber- » ont vécu leurs heures de gloire et sont moins employées, notamment dans l’Education nationale.
Certains termes seront définis au moment où nous les évoquerons. Un lexique des termes techniques concernant Internet figure en annexe. Vous pouvez vous y reporter si vous n’êtes pas familier de ce nouveau mode de communication. Cependant, nous nous attarderons plus longuement sur ce que nous entendons par « journal scolaire » .
Journal scolaire : définition
Qu’entend-on par journal scolaire ? Le journal scolaire, au sens large, est un outil pédagogique qui permet aux élèves de s’exprimer, de relater les événements qui les concernent, que ce soit l’actualité de leur école, les actions pédagogiques ou encore l’actualité nationale ou internationale à laquelle ils ont envie de réagir. L’intérêt est de produire des documents et de les communiquer à un public.
Le journal scolaire existe en diverses versions : sur papier (imprimé, polycopié, ronéotypé et parfois encore manuscrit) ; sonore (circuit interne de radio ou même sur des radios périphériques), en vidéo, etc. On trouve également des journaux scolaires en version numérique, télématique, sur Minitel, sur cédérom, sur Internet…
En France, le journal scolaire, à partir du moment où il fut imprimé et diffusé, a été assimilé aux autres publications et donc soumis au droit de la presse. Jacques Gonnet, dans son ouvrage.
Version papier, polycopiée
Un journal scolaire en version papier peut donc être défini par rapport à sa forme : il ressemble souvent aux quotidiens ou aux magazines de presse. Dans ce cas, il comporte une présentation en colonnes, des illustrati<|nj des chapeaux, des titres, des rubriques… Il peut être imprimé, ronéotypé, polycopié, ou manuscrit et recopié à la main comme la gazette de Janusz Korczak.
Ses contenus peuvent être divers et dépendent principalement de la cible des lecteurs.
Celle-ci doit être définie dès le départ : le journal sera-t-il distribué aux élèves, aux parents, au voisinage de l’école ? Sert-il de support à des échanges entre écoles ? En fonction de ces choix, une ligne éditoriale est établie.
Le type de bulletin édité par l’école Paul-Claudel de Tourcoing est assez significatif de ce qui existe aujourd’hui dans de nombreux établissements scolaires depuis l’arrivée de la publication assistée par ordinateur (PAO).
Ce journal se présente sous la forme d’un magazine de format A 4 (21 cm X 29,7 cm) édité en PAO. Il comporte une trentaine de pages. Il existe depuis une vingtaine d’années et a pris différentes formes. Il s’appelait La Voix du Roitelet jusqu’à l’année 2000, l’école étant située rue du Roitelet et l’Amicale laïque du Roitelet en assurait la publication grâce à son aide matérielle. Cette année scolaire 2000-2001, le journal est paru deux fois (en janvier et en juin) sous le titre La Voix des enfants. Un titre qui, pour la directrice, reflétait mieux le fait que la publication soit réalisée par les élèves.
Les pages en noir et blanc présentent des textes écrits à la main ou saisis sur ordinateur, des photos, des dessins. La plupart des documents sont réalisés par les enfants et mis en page par une partie de l’équipe éducative. Les pages sont imprimées par ordinateur sur des feuilles A 3, pliées en deux et polycopiées par l’Union post scolaire de Tourcoing (UPS).
Ce journal polycopié est distribué gratuitement aux élèves à raison d’un par famille. A eux de remettre un exemplaire à leurs parents.
Un numéro présente en général des reportages, des comptes-rendus de spectacles, de visites ou de rencontres sportives, des jeux ayant trait à l’actualité ; des dessins ; des poèmes, des activités scolaires, etc. La plupart des textes et illustrations sont réalisés par les élèves. Cependant, la ligne éditoriale est fixée par les enseignants, plus ou moins directifs.
Version en ligne, sur Internet
Lorsque nous parlons de journal scolaire sur Internet, nous entendons un document qui fait partie d’un site édité en ligne par une école. La partie journal est celle qui donne des informations de type presse, qui relate l’actualité de l’école (ou les réactions à l’actualité régionale, nationale, internationale), qui publie les textes et illustrations visuelles ou sonores des élèves et qui est mise à jour régulièrement.
Mais qu’est-ce au juste qu’Internet ? Philippe Quéau (1996), donnait la définition suivante de cette autoroute de l’information : « Internet est avant tout la mise en forme, d’une idée simple et géniale […]. C’est l’idée de fédérer, grâce à une norme commune, tous les ordinateurs et tous les réseaux de télécommunications, et donc de permettre la communication de n ‘importe quel ordinateur de la planète avec n ‘importe quel autre ordinateur par tout moyen de télécommunication, dont naturellement le réseau téléphonique mondiale. »
Le principal réseau est le World Wide Web (WWW) ou Web ou Toile. Les services disponibles via Internet sont, entre autres, le courrier électronique, l’hébergement de sites ; les forums de discussion en direct ou en différé, l’échange de fichiers informatiques, la navigation dans les bases de données mondiales grâce aux liens hypertextuels et aux moteurs de recherche, etc.
Doit-on parler de « journal scolaire sur Internet », ou de « journal scolaire en ligne » ?
Sans doute influencée par mon expérience de journaliste, j’ai d’abord opté pour l’expression « journal scolaire en ligne » par analogie avec les journaux comme Le Monde ou Le Figaro qui ont souhaité créer, à côté de leur quotidien imprimé, un « journal en ligne », c’est à dire un site Internet d’actualités, avec « un contenu éditorial spécifique pour s’adapter à l’univers d’Internet et répondre aux exigences des internautes » (extrait d’une offre d’abonnement du Mondé).
Avantages, inconvénients, contraintes
La création d’un site Internet s’inscrit dans la tradition du journal scolaire. Ainsi, de nombreuses écoles se réclamant de Célestin Freinet sont présentes sur la Toile. Mais quel est l’intérêt pour un établissement scolaire de créer son site Web ?
Pourquoi créer un journal scolaire sur Internet?
Cette question est la première que l’on doit se poser. Voici la réponse que donne sur son site l’école de Cuvillers, près de Cambrai (Nord)17 : « L’école doit vivre avec son temps et donc, aujourd’hui, intégrer les nouvelles technologies d’information et de communication. C’est dans ce but que les élèves de l’école à classe unique de Cuvillers – et plus particulièrement ceux de cycle 3 – ont contribué à la réalisation de ce projet. Ainsi, ils ont été confrontés à de multiples tâches parmi lesquelles : la production de textes variés, l’utilisation d’un logiciel de traitement de texte, la prise de clichés photographiques, la manipulation du scanner et du logiciel de retouche d’images, la réalisation de dessins pour illustrer certaines pages du site, la recherche et le choix d’extraits musicaux, d’images, via Internet. […] Ce site veut être un outil au service des différents partenaires de l’école : enfants, parents, enseignants, municipalité…
Il intègre aussi des documents réalisés au cours des années précédentes : romans, contes, recherches sur le patrimoine local…
Reste maintenant à faire vivre ce site en alimentant régulièrement les différentes pages qui le constituent, mission qui devrait motiver l’ensemble des élèves de la classe unique, de la section enfantine au CM2. Grâce à l’accès à la messagerie électronique intégrée au menu du site, chaque visiteur peut faire part de ses remarques, critiques, suggestions,… Ces e-mails seront autant d’encouragements pour les écoliers de Cuvillers et leur enseignant. »
D’autres arguments peuvent être avancés. Le journal en ligne permet d’élargir l’audience car le journal papier n’est diffusé qu’à un champ restreint (parents d’élèves ; milieu scolaire…)
Ce mode d’expression, en permettant à chacun de s’exprimer, peut être une alternative à l’écrit traditionnel, notamment dans les établissements classés en ZEP , où les élèves sont parfois en situation d’échec scolaire.
Dans une société où la télévision, en tant que moyen d’information, prédomine au détriment de l’imprimé, où l’informatique (et plus spécialement les jeux vidéos) exerce son pouvoir attractif auprès des enfants, il peut-être utile de passer par un réseau multimédia pour diffuser des photos, des images animées, de la 3D, du son…
Le journal scolaire papier paraît quand il peut et souvent longtemps après la date des reportages. Diffuser son journal sur Internet est une façon rapide d’actualiser régulièrement les informations, à condition d’assurer la mise à jour.
Quelle est la situation à l’école Paul-Claudel
Pour l’instant, l’école dispose d’une connexion à Internet par modem téléphonique dans le bureau de la directrice. La mairie a installé le site informatique au deuxième étage en complétant l’installation existante. Pour l’instant, six postes sont reliés en réseau, réseau qui se limite au partage de l’imprimante. Suite à des réunions avec la mairie et l’Inspection, il a été décidé d’équiper toutes les écoles avec un vrai réseau relié à un serveur. D’où le rééquipement prévu de Claudel, et de Lavoisier. Les sites de Rouget-de-Lisle et de l’élémentaire Descartes devraient être complétés d’ici la fin du mois. A terme, toutes les écoles devraient être équipées d’un site avec postes en réseau.
Quelles sont les écoles qui disposent d’un site Internet ?
Sur la circonscription, nous avons Pasteur, Lavoisier et la maternelle Camus pour l’instant. Ils sont en cours d’élaboration dans les maternelles Chateaubriand, Claudel, Rouget-de-Lisle. Pour la création de pages web, les enseignants volontaires suivent un stage long.
Comment les enseignants sont-ils formés à ces nouveaux outils ?
Depuis cette année, toute la formation passe par l’IUFM 5. Même si les stages se déroulent dans les locaux de l’Inspection, ils dépendent de l’IUFM.
Avant, chaque circonscription gérait ses stages. Ainsi des stages d’hypernautes ont été proposés par le SIVU en partenariat avec l’Education nationale.
Des enseignants ont été formés, en général un par école, à l’utilisation de la messagerie électronique lors de la mise en place du Minitel. Toute la formation à l’audiovisuel, et aujourd ‘hui à Internet, s’est fait sur le même principe. Chaque établissement scolaire désigne au moins une personne ressource qui sera formée, non seulement à l’utilisation du matériel, à la maintenance technique, mais aussi à l’intérêt pédagogique de ces outils multimédias.
Par exemple, chaque circonscription a été dotée d’un caméscope avec la possibilité pour les écoles de l’emprunter pour leurs projets vidéos. Les personnes ressources ont appris les techniques : usage du caméscope, programmation du magnétoscope et de la télévision pour visionner les films disponibles par le câble, etc. Côté pédagogique, les stagiaires ont été initiés à la lecture de l’image, à l’aspect critique… Ils ont réfléchi sur la nécessité de visualiser le film avant la diffusion aux élèves, de choisir si l’on montre le film en début, en cours ou en fin d’activité pédagogique et pour quelle utilisation.
Comment les enseignants s’adaptent-ils à ces technologies ?
Certains font des propositions de sites, de créations de pages web. Mais c ‘est surtout une question de motivation. On note une réticence de la part de l’adulte au début. Souvent la première réaction face à l’ordinateur est : « j’écris plus vite à la main qu ‘avec un traitement de texte ! » ; puis deux ans plus tard, la même personne revient en disant « j’ai ma fille qui surfe sur Internet et j’aimerais savoir comment on s’en sert car mes élèves aussi s’y sont mis. » On constate alors une forte demande pour la création de sites, la création de pages web, notamment pour créer ses propres exercices pédagogiques. Surtout depuis que sont proposés des « exerciseurs », des logiciels d’aide automatique à la création d’exercices pédagogiques. Il me semble que c ‘est motivant pour l’enseignant de pouvoir, à partir de son propre travail, créer soi même ses exercices.
Et du côté des élèves ?
Pour l’élève, c’est intéressant. Le travail par demi-classe avec les aide-éducateurs permet d’individualiser la progression. Les élèves vont plus à leur rythme. Le travail est plus coopératif. En réalisant un journal scolaire sur Internet, les élèves passent du stade « on fait de l’informatique » à celui de « on utilise l’informatiquepour travailler ». Cela correspond davantage à l’idée de l’Education nationale qui souhaite intégrer les NTIC au sein des programmes scolaires. L’informatique est un outil multioutils qui permet d’écrire, rechercher de la documentation, jouer tout en apprenant, échanger avec d’autres, s’autoévaluer… M.
Allègre, lorsqu ‘il était ministre, avait fait une priorité de l’intégration des NTIC à la pratique quotidienne. Mais il y a moins d’impulsion aujourd’hui.
L’informatique est-elle utilisée dans la réalisation du journal scolaire ?
Oui et le journal scolaire a même été l’élément déclencheur de l’utilisation de l’informatique par le biais du traitement de texte. En plus de gagner du temps avec la fonction copier-coller, s’ajoute l’attrait de la présentation : la mise en page, la diversité des polices de caractères, la netteté des photocopies.
Petit à petit, d’autres outils ont été intégrés : le scanner pour les photos et dessins. Mais comme il fallait venir chercher le scanner à l’Inspection et que le prix a baissé, beaucoup d’écoles se sont équipées de leur propre scanner. On voit le même phénomène avec l’appareil photo numérique. Au début, on l’emprunte à l’Inspection puis l’école a son propre appareil photo !
Les enfants peuvent plus facilement participer à l’élaboration du journal.
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Table des matières
INTRODUCTION
1 REPÈRES SÉMANTIQUES ET HISTORIQUES
1.1 Journal scolaire : définition
1.2 Un siècle d’éducation par les médias
2 REGARD SUR LES PRATIQUES DES NTIC DANS L’ENSEIGNEMENT
2.1 Les NTIC dans l’enseignement
2.2 Les NTICE dans la circonscription
3 OBSERVATION ET EXPÉRIENCE SUR LE TERRAIN
Exemple de l’école Paul-Claudel de Tourcoing
3.1 Elèves et enseignants utilisent-ils Internet ?
3.2 Analyse de mes interventions en classe
3.3 Réalisation du journal scolaire polycopié
3.4 Un projet pédagogique à long terme
CONCLUSION
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