Regard des enquêtées avant la migration et les images diffusées par les télénovelas

Les Représentations Sociales

Nous allons maintenant nous intéresser aux notions de représentations sociales (RS), aux stéréotypes et clichés.
« Les Français sont romantiques ; Paris est la ville de l’amour ; les Brésiliens aiment faire la fête » : des mots préfabriqués ?
Le Cadre européen commun de référence (désormais CECR) affirme que fréquemment avant d’apprendre une langue, l’individu a déjà acquis une certaine connaissance du monde qui lui permettrait de comprendre les différences entre les cultures.
D’où vient cette connaissance ? En effet, nous avons une image du monde forgée à partir d’autres images diffusées par des «créateurs de représent ations» (Develotte, 2013), concept que nous développerons dans ce chapitre. On voit donc le monde à travers les représentations que l’on nous propose de celui-ci.
Mais à quoi se réfère exactement cette notion de représentation sociale ? Ce terme se réfère à «quelque chose», désigné sous l’expression «d’objet». Ainsi, la classe de langue étrangère, les Français», la France etc… sont considérés, parmi d’autres, d’objets de représentations sociales. La représentation sociale peut être définie comme « une forme de connaissance, socialement élaborée et partagé, ayant une visée pratique et concourant à la construction d’une réalité commune à un ensemble social » (Jodelet, 1989 : 36, cité par Amossy & Pierrot, 2005 :50).
Une représentation sociale est donc une structure mentale (cognitive) associée à un objet et aussi une forme de connaissance partagée par un groupe au sujet de la réalité.
En effet, plusieurs personnes créent et diffusent des représentations sociales (désormais RS) pour interpréter le monde dans lequel elles vivent.
Au XIXe siècle, Durkheim fut le premier à évoquer le concept de RS dans des analyses des faits sociaux. En 1961, Moscovici a développé le concept de Durkheim, prenant en charge les éléments significatifs qui organisent la structure des RS et les relations entre ces divers éléments (Guimelli, 1994, cité par D. Moore, 2001:10). C’est grâce à Moscovici que l’on peut avoir accès à une étude plus structurée de la question. Les RS sont devenues un objet de recherche dans plusieurs disciplines. Aujourd’hui, les chercheurs de la sociologie, de l’anthropologie, de la linguistique, de la psychologie sociale s’intéressent au sujet.
D’autres chercheurs ont également développé la notion. Zarate emprunte le concept de RS à la psychologie sociale. D’après l’auteure, les RS sont liées à l’appartenance des individus à des groupes divers (communautaires, familiaux, religieux, entre autres). Grâce à ces appartenances, l’individu organise sa connaissance de la réalité. Autrement dit «comprendre une réalité étrangère, c’est expliciter les classements propres à chaque groupe et identifier les principes distinctifs d’un groupe par rapport à un autre» (Zarate, 1993). Cependant, une représentation qui donne sens dans une culture peut s’avérer inappropriée dans une autre. Moliner (cité par Miller, 2014) stipule, en plus des concepts de représentations sociales développés par Moscovici, que les objets des représentations sont polymorphes. Ainsi, le même objet est construit de façon différente selon le groupe social.
Le concept de représentation sociale permet de mieux comprendre la façon dont les individus se perçoivent eux-mêmes et perçoivent les autres. En effet, nous nous sommes construits avec un certain nombre d’image dans nos rapports aux autres. Durkheim (c ité par Develotte, 2014 :24) distingue les représentations collectives et individuelles. Les représentations collectives sont transmises d’une façon stable, elles découlent de la société dans sa globalité. A l’inverse, les représentations individuelles sont éphémères et découlent de la conscience propre de chaque personne. Ces images nous aident à mieux appréhender le monde et à s’y ajuster. Dans notre travail, nous chercherons l’interprétation du réel par les enquêtées à travers leurs RS. Parfois ce même o bjet d’une enquêtée à l’autre n’est pas perçu de façon similaire.
Dans les sociétés occidentales, les médias conjointement avec les personnes qui détiennent le savoir contribuent à fabriquer les RS. On les appelle les créa teurs de représentations : les enseignants, les manuels scolaires, les médecins, les médias entre autres. C’est la raison pour laquelle les représentations sociales sont «générées et acquises» (Develotte, 2014). Bourdieu (cité par Develotte, ibid.) utilise la métaphore des lunettes pour parler du rôle des médias dans la diffusion des représentations. Selon lui, les journalistes ont tous des «lunettes» particulières leur permettant de voir certaines choses et pas d’autres. Ainsi ils procèdent à une sélection des informations à partager.
D’après les travaux de Serge Moscovici la RS « met en rapport la vision d’un objet donné avec l’appartenance socioculturelle de l’objet » (cité par Amossy & Pierrot, 2005 :50). On construit donc une réalité commune à une société via les RS.
Moscovici (cité par Millet, 2014) parle de trois conditions nécessaires pour que les représentations sociales surgissent :
 La dispersion : Quand on est confronté à un objet à propos duquel les informations sont incomplètes.
 La focalisation : L’objet en question est le lie u d’implication des individus ou des groupes sociaux (l’objet devient un enjeu social).
 La pression à l’inférence : L’enjeu social est suffisamment fort et les individus ou groupes sociaux sont exhortés à prendre une position vis-à-vis de l’objet.
Ensuite, l’auteur énumère trois formes de transmission de RS :
 La diffusion (sans jugement de valeurs) : La diffusion des opinions, notamment par la presse qui crée des opinions.
 La propagation (qui crée des attitudes) : Les valeurs partagées par un même groupe et qui filtre les informations données.
 La propagande (le filtre) : Aide à la construction des stéréotypes. On parle ici d’une idéologie partagée par un groupe. Celui-ci lit et interprète d’abord la réalité sociale et politique, et la diffuse ensuite se lon son propre filtre.
Après avoir réuni les trois conditions d’émergence des RS, deux processus cognitifs se mettent alors en place pour la construction de ces RS, l’objectivation et l’ancrage :
 L’objectivation : Ce processus consiste à donner les valeur s du groupe à l’objet social afin de l’intégrer dans le système de pensée dudit groupe. En d’autres termes, les idées abstraites sont transformées en objets concrets perceptibles et compréhensibles. Ainsi les individus peuvent interpréter leur environnement et donc agir. A ce moment, le noyau figuratif est établi. Celui -ci devient un cadre cognitif stable orientant perception et jugement.
 L’ancrage : Processus cognitif qui permet à l’objet de s’enraciner et de s’intégrer dans les systèmes de croyance et de savoirs antérieurs et dominants dans le groupe, selon Millet (2014). En d’autres termes, le groupe s’approprie l’objet de représentation avec l’intention de le maîtriser. Ainsi, il l’intègre dans des catégories et significations préexistantes. L’objet commence à faire sens.
Les deux processus combinés rendent la réalité intelligible permettant aux groupes d’évoluer et d’agir dans des situations de la vie.
En 1976 Abric (cité par Champalle, 2013 :18 ) présente la théorie du noyau central.
D’après lui, les RS sont structurées par un noyau central et des éléments périphériques :
 Noyau central : Le cœur de la RS, constitue la base commune aux groupes. Sa fonction génératrice donne du sens à la RS. Sa fonction organisatrice unifie et stabilise la RS.
 Éléments périphériques : C’est grâce à eux que chaque individu s’approprie et peut changer les RS. Selon Abric (cité par Champalle , 2013 :17) les RS ont quatre fonctions :
 de savoir : comprendre et expliquer la réalité
 identitaire : servant à définir l’identit é de chacun, préservant la spécifié des groupes sociaux.
 d’orientation : permettant aux individus d’anticiper, de produire des attentes et de fixer ce qu’il est possible de faire.
 justificatrice : justifier nos choix et attitudes.

Représentations sociales ou attitudes ?

Moore (2001) explique que les recherches sur la notion d’attitude en matière de langage se sont développées à partir des années 1960. Les études se concentreraient alors sur les comportements linguistiques et les valeurs que les locuteurs donnaient à la langue. Même si les deux notions peuvent être utilisées l’une à la place de l’autre, l’attitude est généralement définie «comme une disposition à réagir de manière favorable ou non à une classe d’objet :« une (pré)-disposition psychique latente, acquise, à réagir d’une certaine manière à un objet. » (Kolde, 1991, cité par Castellotti & Moore, 2002:7 ). Ce sont des informations qu’un individu possède sur le monde en général et qui peuvent parfois être empruntes de préjugés ou de stéréotypes. D’après Moore (2001) les attitudes ne peuvent pas être directement observées, mais elles peuvent être associées et évaluées selon les comportements qu’elles génèrent chez les individus. On les acquiert et elles évoluent ou se modifient à travers le temps et les expériences vécues.
Les attitudes sont comme les RS, à savoir, des organisatrices de conduite et de comportements, selon Moore (2001).

Stéréotype

Selon la définition de Larousse, stéréotype partage avec cliché son origine typographique, c’est-à-dire, « imprimé avec des planches dont les caractères ne sont pas mobiles, et que l’on conserve pour de nouveaux tirages » ( Amossy & Pierrot , 2005 :25).
Cette notion est associée à l’idée de reproduction de masse, de tirage massif et de fixité, d’après Moore (2001). C’est l’idée que l’on de de quelque chose qui ne se modifie, qui est fixe et qui se reproduit en grande quantité.
D’après le Larousse:
 Expression ou opinion toute faite, sans aucune originalité, cliché.
 Caractérisation symbolique et schématique d’un groupe qui s’appuie sur des attentes et des jugements de routine
Le terme ne prendra le sens de formule figée qu’au XXe siècle. Dans les années 1920, le journaliste américain Walter Lippmann sera le premier à introduire cett e notion dans son œuvre « Public Opinion » (cité par Amossy & Pierrot, 2005 :26). Lippmann désigne les images «dans notre tête qui médiatisent notre rapport au réel ». (ibid). En d’autres termes, ce sont des croyances partagées, des représentations toutes faites et préexistantes à travers lesquelles on filtre la réalité. Ces images seraient indispensables à la vie en société, elles expriment un imaginaire social. On a besoin de catégoriser le monde autour de soi.
Toutefois, les psychologues sociaux américains ont pointé le caractère nocif et réducteur des stéréotypes. D’après Amossy & Pierrot (ibid) les stéréotypes sont souvent péjoratifs favorisant une vision schématique et déformée de l’autre, ce qui entraîne des préjugés.
Des recherches plus récentes apportent une autre définition du terme :
 Fischer (1996 :133 ibid) « : Manières de penser par clichés, qui désigne les catégories descriptives simplifiées basées sur des croyances et des images réductrices par lesquelles nous qualifions d’autres personnes ou d’autres groupes sociaux, objets de préjugés »
 Morfaux (1980 :34 ibid) : «Clichés, images préconçues et figées, sommaires et tranchées, des choses et des êtres que se fait de l’individu sous l’influence de son milieu social…et qui déterminent à un plus ou moins grand degré nos manières de penser, de sentir et d’agir ».
On remarque le rapprochement fait entre les termes stéréotype et cliché. Selon Amossy & Pierrot (2005.) dans les usages, ces deux termes n’ont pas été retenus comme des synonymes. D’après les auteures, depuis les années cinquante, des chercheurs américains ont remis en cause « les critères de dépréciation du stéréotype » (ibid : 28). En effet, les stéréotypes sont des croyances partagées sans avoir forcément un sens péjoratif.
Le stéréotype catégorise et schématise le monde dans lequel on vit, et pourtant nous avons besoin de « rapporter ce que nous voyons à des modèles préexistants » (ibid. : 28) de façon à avoir des repères pour pouvoir « comprendre le monde, faire des prévisions et régler nos conduites » (ibid. :28)
En revanche, dans l’imaginaire collectif, le stéréotype continue à avoir un sens péjoratif tout en étant associé au cliché. On insiste sur sa banalisation et ces phrases toute faites qui renvoient les individus à des images r éductrices : le Juif avare, le Français et son rapport à l’hygiène, le Brésilien enclin aux fêtes en tout genre, la Brésilienne sexy et frivole.
Depuis la publication de l’œuvre de Lippmann en 1920, la notion «d’image dans notre tête» intéresse les chercheurs, mais c’est la psychologie sociale qui théorise la notion de stéréotype. Pour ce faire, cette discipline propose d’analyser l’image que les membres d’un groupe se font d’eux-mêmes et des autres. On reprend la notion établie par Lippmann selon laquelle le réel est filtré par les images préexistantes dans la tête des gens . Tout d’abord, on catégorise le monde, ensuite on insère l’autre dans ces catégories préexistantes.
En effet, on dit que quelqu’un est noir ou blanc, Juif ou maghrébin, Français ou Allemand, femme ou homme, hétérosexuel ou homosexuel.
Par ailleurs, l’image que l’on a de soi-même « est également médiatisée par son appartenance à un ou plusieurs groupes » (ibid. :32). Il ne faut pas oublier que les images que l’on se fait des autres sont filtrées par des représentations culturelles préexistantes (ibidi : 32). Dans ce sens, les stéréotypes ne correspondent forcement pas à la réalité . Mais ils se propagent en dehors de toute base objective (ibid. : 36).
Amossy & Pierrot (2005) attribuent alors à la culture dans laquelle on vit la transmission des stéréotypes. Comme nous l’avons dit, on associe les individus à des catégories précises, c’est ce que l’on appelle le processus de catégorisation sociale. Selon Tajfel (1998, cité par Trimaille 2013) l’individu construit son identité sociale à travers la conscience d’appartenir à un ou à plusieurs groupes. D’après l’auteur, (cité par Baugnet , 1998) , les processus de catégorisation permettent d’organiser le réel , afin de « rendre le monde plus stable et intelligible permettant aussi une économie cognitive » (Trimaille, 2013 :50). La segmentation du monde en catégories nous aide à simplifier la réalité et à « spécifier qui nous sommes » (Baugnet, 1998 :67). Cette catégorisation implique forcement des « stéréotypes à l’intérieur de chacune des catégories qui par conséquent vont accentuer les contrastes entre les catégories » (Baugnet, 1998 :68). En plus d’être un processus cognitif, la catégorisation est un processus social. On partage avec ses group es d’appartenance son système de valeurs. L’individu servira donc de ce système pour se définir socialement (Baugnet, 1998).
Dans ce processus de catégorisation sociale, Matthey (2013) explique que les recherches attestent que les individus sous-estiment les différences entre les membres d’une même catégorie tandis que l’on surestime les différences entre les catégories distinctes. Ainsi les stéréotypes permettent de créer, d’une façon symbolique, les frontières d’un groupe (Moore, 2001:14).
En 2008 une définition simple est proposée par Legal & Delouvée (ibid : 20) : le stéréotype est un ensemble de croyances à propos d’un groupe social. Cependant, cette définition reste incomplète car on restreint l’usage du terme pour qualifier les images des membres d’un groupe à propos d’un autre.
D’après Matthey (2013), le stéréotype est souvent associé à un préjugé. Or ce jugement de valeur à priori sur les groupes est utilisé pour les raisons suivantes :
 Pour simplifier la réalité : le stéréotype nous fournit des « prêts-à-penser, un raccourci conceptuel, outil pratique pour interpréter le monde.
 Pour aider dans la construction du NOUS par opposition à EUX.
 Pour rejeter ou approuver des valeurs, des modes de pensée et de façons d’agir d’autrui.
Pour Matthey (2013), on ne peut pas chasser les stéréotypes, ils « fonctionnent chez tout le monde » (ibid. :22). Toutefois, certains individus arrivent mieux à les freiner.
D’après Amossy & Pierrot (20005) « le préjugé est plus courant mais plus péjoratif et chargé affectivement ». Le stéréotype est une croyance, opinion sur un groupe tandis que le préjugé est l’attitude (souvent négative), le jugement que l’on adopte envers les membres du groupe en question. Par ailleurs il nous semble important de souligner la définition d’attitude fournie par les auteures : la position qu’adopte un agent individuel ou collectif envers un objet donné, position qui s’exprime par des symptômes et qui règle des conduites (ibid. :35).

Clichés

La notion de cliché, telle qu’elle est connue aujourd’hui, comme un langage reçu, répété et commun n’apparaît qu’au XIXe siècle. C’est à ce moment qu’une prise de conscience des poètes et prosateurs émerge et définit comme notions péjoratives le cliché et l’expression « idées reçues ».
Définitions de cliché d’après le Larousse:
• Phototype négatif servant au tirage des épreuves.
• Lieu commun, banalité qu’on redit souvent et dans les mêmes termes ; poncif.
• Planche métallique en relief établie par moulage en vue de l’impression typographique.
A la fin du XIXe siècle, on utilise le terme cliché dans les discours critiques littéraires. Il commence à être défini comme une formule banale, une expression figée et répétable, incorporé à l’inconscient collectif. « Par allusion à une opération de fonderie élémentaire usitée dans les imprimeries, on a donné à ces phrases, à ces blocs infrangibles et utilisables à l’infini le nom de clichés. Certains pensent avec des phrases toutes faites et en usent exactement comme un écrivain original qui use des mots tout faits du dictionnaire. (Gourmont 1899 :284 cité par Amossy & A.H. Pierrot, 2005 :12)
En ce qui concerne nos enquêtées, nous allons voir dans la 4e partie de ce travail, que les jeunes femmes interviewées ont construit leur regard sur la France à partir d’images stéréotypées fournies par les telenovelas, version brésilienne des soap operas américains.
Ce processus de construction mentale leur a permis de définir la France, pays dans lequel elles ont fini par immigrer, d’une façon quelquefois commune aux quatre. Des travaux scientifiques cités ont démontré que les RS sont des images produites et partagées dans un certain environnement. De ce fait les RS ne sont pas la vérité et le seul regard possible sur un objet. Cependant, les enquêtées croyaient à cette ima ge reçue. Dès leur arrivée en France, les enquêtées ont été surprises de découvrir la « vraie vie » française : une vie normale sans glamour ni richesse. Leurs RS ont été déconstruites avec le temps mais dans les premiers mois, les enquêtées avaient besoin de se servir de leurs RS pour interpréter ce nouveau pays. Les RS permettent à l’individu d’élaborer son interprétation de la réalité qui se présente devant lui.

Les télénovelas : une passion brésilienne

Les effets des médias se font sentir dans l’image que nous avons d’une autre culture. Claude Bertrand (cité par De Oliveira Roman, 2007) dans ses études sur la déontologie des médias affirme que les médias exercent une forte influence à long terme causant des effets bons et mauvais. Cette principale influence se fait par omission « ce qu’ils ne disent pas a plus d’influence que ce qu’ils disent » (ibid. : 67). L’auteur admet que la majorité des médias se croit obligée de faire vite et d’amuser son public, simplifiant alors la réalité ; « d’où l’abus de stéréotypes, la division en bons et vilains, la réduction des phénomènes à des individus pittoresques (ibid.). D’après Bertrand, ce que l’on connaît du monde, la façon dont on le voit est façonnée par l’école, les relations avec les autres, la famille et surtout les médias. Par conséquent, notre regard sur l’inconnu est imprégné de clichés et stéréotypes. L’individu voit le monde à travers ce filtre, des idées qui étaient déjà présentes dans l’imaginaire collectif depuis des générations. Les images diffusé es ne correspondant en rien à la réalité sont dissimulées donc par les médias, « la presse et la littérature de masse » (Amossy & Pierrot, 2005 : 37). Les médias donc, nous aident à construire l’image d’un groupe avec lequel on n’a aucun contact.
Pour Thompson (cité par Develotte : 53) les médias jouent un rôle important en ce qui concerne la construction d’un « projet symbolique » de l’individu. En d’autres termes, les médias contribuent à donner un sens à la vie des gens, en leur permettant de se définir .
Les telenovelas surgissent dans les années 1960 et revendiquent aujourd’hui une identité brésilienne (Thomas, 2003). Diffusées quotidiennement dans presque toutes les principales chaînes télévisées du pays, elles sont devenues la passion nationale. La principale chaine du pays, TV Globo, possède dix studios d’enregistrement et diverses cités scénographiques construits sur une surface d’environ 140.000 m².
Selon Godoi (2005) ces feuilletons ont été, en principe, élaborés pour le public appartenant à la classe C, mais aujourd’hui toutes les classes sociales confondues les regardent. Prenant en considération le salaire minimum brésilien (880 réais mensuels soit environ 200 euros à ce jour) l’Instituto Brasileiro de Geografia e Estatistica, IBGE, partage la population brésilienne en 5 classes sociales, à savoir : Classe A (1,1% de la population) regroupe les personnes dont les revenus s’élèvent au -dessus de 15 salaires minimum (environ 3300 euros à ce jour). La classe B (9,4 % de la population) possède des revenus mensuels entre 5 et 15 salaires minimum, classe C ( 50,6% de la population) entre 3 et 5 salaires minimum, classe D entre 1 et 3 salaires minimum et classe E jusqu’à 1 salaire minimum. Les classes D et E ensemble représentent 38% de la population. L’ IBGE définit une classe sociale comme un groupe de personnes ayant un statut social similaire partageant certains critères liés à la position sociale, comme les revenus et la profession, par exemple.

L’altérité

Cuq dans son Dictionnaire de didactique de français langue étrangère et seconde (2003) définit l’altérité «comme le fait de comprendre autrui comme un sujet semblable à soi -même, mais un sujet responsable, singulier, incomparable, différent de moi et identique à moi en dignité» (page 17).
Matthey & Simon (2009 :10) préfèrent utiliser le terme altérité à la place d’interculturel. Selon les auteures, par le biais de ce terme, on peut établir un contact entre le moi et les autres. Sous cette optique, l’individu devient lui-même au contact des autres tout en prenant conscience de sa « spécificité » et de sa « pluralité » (Paul Ricoeur, 1990, cité par Mathey & Simon, 2009 :10). L’individu perçoit donc son identité lorsq u’il est confronté à des cultures différentes de la sienne. Selon Blanchet (2004), les théoriciens de l’identité affirment que l’identité se construit par la similitude et l’altérité. En plus, Blanchet explique que l’individu a besoin de dialoguer avec l’autrui pour construire sa propre identité. En se confrontant avec les autres, l’individu prend conscience de sa propre différence.
D’après Murphy-Lejeune (2003), trois facteurs aident à la construction de l’altérité chez l’étranger : la curiosité, l’attrait pour la nouveauté et la différence, l’envie d’établir des relations sociales. Cette dernière pousserait les êtres humains à rechercher les contacts sociaux. Ces caractéristiques propres à chaque individu « disposent à l’ouverture à l’altérité, que ce soi t l’ouverture intellectuelle avec la curiosité, l’ouverture affective avec l’attrait pour la différence ou encore l’ouverture sociale avec le désir d’autres connaissances » (p. 23). Pour Thamin (2007), la découverte de l’altérité est un choix personnel. Les personnes qui aiment voyager sont normalement attirées par la nouveauté et la différence. Elles auront tendance à goûter de nouveaux plats, accepteront les différentes conditions de vie trouvées dans un pays étranger, accueilleront plus facilement les façons de penser des autres. Les personnes qui ne possèdent pas ces caractéristiques peuvent avoir des problèmes d’adaptation à cette nouvelle culture. A contrario, les individus qui ont acquis ces particularités développeraient davantage la notion d’altérité. Grâce à celle-ci, ils auraient une meilleure adaptation à la culture étrangère.
Concernant l’apprentissage des langues, l’apprenant doit accepter les différences de la culture de la langue étudiée. L’enseignant doit, dans la mesure du possible, proposer un panorama des différentes cultures liées à la même langue. Par exemple, malgré que le portugais soit la langue parlée au Brésil, au Portugal et dans dix autres pays il existe des différences culturelles entre les habitants de ces endroits. On caractér ise les Brésiliens comme optimistes qui se préoccupent du collectif, des gens qui pensent à court terme tandis que les Portugais seraient individualistes et pessimistes bien qu’ils arrivent à planifier l’avenir d’une façon méthodique (Duarte, 2008). Le traitement est également différent entre les deux cultures de langue portugaise. Au Portugal on vouvoie les personnes alors qu’au Brésil on peut tutoyer son supérieur hiérarchique.
L’altérité dans l’apprentissage d’une langue étrangère aide les apprenants à devenir l’autre, d’après Revuz (2001, cité par Almeida, 2008). Même si l’on ne comprend pas totalement ni sa culture ni celle des autres, intégrer les différences est un moyen nécessaire à l’apprentissage d’une langue étrangère, expliquent Fenner & Newby (c ité par Almeida, 2008). Pour Almeida, l’altérité est un dialogue avec autrui (« A alteridade é um dialogo com outro » p. 128).
Pour Ladimiral & Lipiansky (1989) l’acception de l’autre et, par conséquence, ses différences, n’est pas un processus naturel mais le résultat d’un parcours que commence quand l’individu prend conscience du regard qu’il porte sur l’autrui. Kristeva (1988) explique que le premier pas vers l’acceptation de l’altérité est la reconnaitre présente en soi. De cette manière, ce serait plus facile d’être tolérant envers les autres et leurs différences. Reconnaître les différences est admettre qu’il y a d’autres références, d’autres coutumes et de différentes façons de voir le monde (Almeida, 2008). Cela aide l’individu à sortir de son ethnocentrisme et enfin accepter l’altérité, selon l’auteure. Pour le sociologue américain William G. Summer (cité par Develotte, 2013), l’éthonocentrisme est une « vue des choses selon laquelle notre propre groupe est le centre de toutes choses, tous les groupes étant mesurés et évalués par rapport à lui. »
Pour Ladimiral & Lipiansky (1989 :137-138 cité par Almeida, 2008) l’ethnocentrisme est : « Inhérent à toute affiliation à un groupe socio-culturel, ethnique ou national. Il est corrélatif du mécanisme de distinction qui sépare le tien du mien, les proches et les étrangers, les « gens d’ici » et « les gens d’ailleurs »… (il) traduit ce qui est différent dans notre langage habituel en réinterprétant donc l’altérité dans le registre du même ou les rejetant ».

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Table des matières

Remerciements 
Sommaire 
Introduction
Partie1 Cadre Historique 
1.1 XVIE ET XVIIE SIÈCLES
1.2 L’INFLUENCE FRANÇAISE AU BRÉSIL
1.3 L’UNIFICATION DE LA LANGUE FRANÇAISE
1.4 L’ENSEIGNEMENT DU FRANÇAIS AU BRÉSIL
Partie 2 Cadre Théorique 
2.1 MIGRANT, IMMIGRÉ OU ÉTRANGER ?
2.1.2 L’ETRANGER / L’IMMIGRE
2.1.3 L’IMMIGRATION BRESILIENNE EN FRANCE
2.2 LES REPRÉSENTATIONS SOCIALES
2.2.1 REPRESENTATIONS SOCIALES OU ATTITUDES ?
2.3 STÉRÉOTYPE
2.4 CLICHÉS
2.5 LES TÉLÉNOVELAS : UNE PASSION BRÉSILIENNE
2.6 CULTURE
2.7 L’IDENTITÉ
2.8 L’INTERCULTUREL
2.9 L’ALTÉRITÉ
Partie 3 : Méthodologie
3.1 LE CHOIX MÉTHODOLOGIQUE
3.2 NOUS OU JE ?
3.3 LE PUBLIC
3.4 LE RECUEIL DE DONNÉES : L’ENTRETIEN COMPRÉHENSIF
3.5 LE FOCUS GROUP
3.6 DÉMARCHE D’ANALYSE DES DONNÉES
Partie 4 : Démarche d’analyse des données 
4.1 MOTIVATIONS POUR LA MIGRATION
4.2 REGARD DES ENQUÊTÉES AVANT LA MIGRATION ET LES IMAGES DIFFUSÉES PAR LES TÉLÉNOVELAS
4.3 CHANGEMENT DE REGARD APRÈS L’IMMIGRATION : LE CHOC CULTUREL
4.3.1 LES FRANÇAIS NE SONT PAS BLANCS
4.3.2 LA VRAIE VIE FRANÇAISE
4.3.3 LES FRANÇAIS SONT FROIDS MAIS GENTILS
4.3.4 TABLEAU DES REPRESENTATIONS DES ENQUETEES AVANT ET APRES LA MIGRATION EN FRANCE
4.3.5 CHANGEMENTS IMPORTANTS DANS LEUR VIE APRES LA MIGRATION
4.4 LA COMMUNICATION ET LES DIFFICULTÉS RENCONTRÉES
4.4.1 LES FRANÇAIS NE FONT PAS D’EFFORT POUR COMPRENDRE LES ETRANGERS
4.4.2 LA SOUFFRANCE LORSQU’ON NE PARLE PAS LA LANGUE
4.4.3 IL FAUT SAVOIR PARLER FRANÇAIS POUR TROUVER UN TRAVAIL ?
4.5 LES RÉSEAUX, LES AMIS
4.5.1 LES MAGASINS DE PRODUITS «EXOTIQUES»
4.5.2 LES AMIS
Partie 5 : Pistes didactiques – Comment déconstruire les stéréotypes ? 
Conclusion
Bibliographie 
ANNEXE 1 Guide d’entretien thématique 
ANNEXE 2 Entretien en langue portugaise 
ANNEXE 3 Fiche pédagogique

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