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Principe à retenir
« Quand le processus d’organisation neurologique présente un manque ou des défauts de maturation, on peut “imposer”, grâce à des exercices spécifiques les mouvements neuroévolutifs de chaque phase. Ce procédé s’appelle Réorganisation Neurologique Fonctionnelle (RNF). La RNF est la récapitulation des phases du développement naturel de l’enfant qui sont significativement importantes pour l’organisation neurologique. » (Padovan, 1995)
Description pratique de la méthode
En sollicitant différents muscles (par les différentes chaînes musculaires), on permet la transmission correcte de l’information au cerveau et donc l’installation durable des fonctions. Durant toute la thérapie, nous observons des évolutions du programme selon le patient. Le programme homolatéral est systématiquement proposé aux enfants de moins de neuf mois, aux patients avec peu de contrôle de leurs mouvements ou hypotoniques, en début de thérapie et jusqu’à ce que les mouvements soient assez bien intégrés pour passer au programme croisé.
Ce programme homolatéral permet un travail dissocié mais équivalent pour chaque côté du corps afin de permettre l’ancrage des connexions induites en homolatéral. Le programme croisé permet ensuite d’établir des connexions entre les deux hémisphères cérébraux et d’instaurer la notion de latéralité, étape importante du processus de maturation neurologique.
Chaque exercice met en lien une région biologique (neuronale ou musculaire) et une fonctionnalité. L’importance de cette méthode réside dans la globalité. L’objectif de chaque exercice est donc de communiquer une information séquentielle au sein d’un travail complet qui respecte le neurodéveloppement. (Lauria, 2022)
Les séances sont à réaliser de manière régulière. Padovan préconise au moins deux séances par semaine. C’est la régularité de la répétition des mouvements qui va permettre la mise en place des connexions synaptiques.
Nous allons désormais nous intéresser plus spécifiquement aux exercices de la méthode.
Comme sa réalisation, nous allons la décrire selon l’ordre évolutif.
Certains mouvements sont à faire quel que soit le programme (homolatéral ou croisé), d’autres ne sont à faire que dans l’un des programmes (ils sont précédés d’une indication en italique dans la liste qui suit).
Voici les noms des mouvements, leurs explications sont en annexe (voir annexe I).
– Hamac initial
– Moteur des jambes 1
– Moteur des jambes 2
– Moteur des bras 1– homolatéral
– Si programme croisé : Moteur des bras 2 – croisé
– Patron homolatéral
– Si programme croisé : Patron croisé
– Rouler
– Ramper homolatéral
– Si programme croisé : Ramper croisé
– Si programme homolatéral : Marche à quatre pattes (transfert de poids seulement)
– Si programme croisé : Marche à quatre pattes
– Si programme homolatéral : Marche sur les extrémités (transfert de poids seulement)
– Si programme croisé : Marche sur les extrémités
– Accroupir/Lever
– Si programme homolatéral : Brachiation (suspension seulement)
– Si programme croisé : Brachiation
– Si programme croisé : Marche croisée
– Si programme croisé : Marche sautillante
– Si programme homolatéral : Culbute (réflexe de protection seulement)
– Si programme croisé : Culbute
– Hamac final giratoire
– Si programme homolatéral : Exercices des mains (pronation/supination seulement)
– Si programme croisé : Exercices des mains
– Si programme homolatéral : Exercices visuels (réflexe photomoteur et mouvements horizontaux et verticaux seulement)
– Si programme croisé : Exercices visuels
– Si programme croisé : Exercice de coordination œil-main
– Si programme croisé : exercice de la corde à sauter
Présence des poèmes
Dans la rééducation neurofonctionnelle, chaque exercice est accompagné d’un poème ou d’une comptine.
Cela apporte à l’enfant un cadre structuré pour chaque séance et chaque exercice. La proposition langagière permet aux enfants de coordonner leurs mouvements au rythme des mouvements proposés. Il est donc important de choisir les poèmes en fonction de chaque patient.
Ces poèmes permettent aux patients d’aiguiser leur ouïe, d’harmoniser les bruits extérieurs. Ils permettent de replacer le patient dans l’écoute de la voix.
Aussi, nous pouvons dire que les poèmes apportent au patient un bain de langage, que l’on sait essentiel au bon développement neurologique. En plus du lexique et des modèles syntaxiques, ils permettent à l’enfant de recevoir un modèle visuel articulatoire. L’enfant va pouvoir s’approprier les mots, mais aussi les émotions, les mélodies, les silences, les respirations, etc.
Par ailleurs, les poèmes sont des supports de communication, et plus précisément de communication verbale, ils facilitent donc les représentations mentales et l’imaginaire. Ils sont donc modèles de langage, mais également des « supports et stimulations pour les associations mentales, qui sont à la base de l’organisation de la pensée et de l’imagination ». (Lauria, 2022) Padovan a défini deux critères pour les poèmes, ils doivent « avoir un rythme juste et qui élève à l’état de personne ».
Nous retrouvons dans le principe des poèmes le lien des trois étapes fondamentales de la méthode : la marche (caractérisée par le rythme), la construction de la parole (les mots) et la pensée (la symbolisation).
PRÉSENTATION DE LA TRISOMIE 21
Présentation générale
Le syndrome de Down, plus communément connu sous le nom de trisomie 21 (ou T21) est la première cause diagnostiquée de trouble du développement intellectuel d’origine génétique en France (Rebillat & al., 2014). Elle se caractérise par une anomalie chromosomique entraînant différentes particularités.
Révélée dès 1833 par le français Esquirol, l’exposition des symptômes apparaît dans la littérature dès 1866 à travers la description clinique de Seguin, puis au sein de l’article du médecin britannique Langdon Down. Il regroupe les particularités morphologiques ou cognitives similaires entre les patients.
Près d’un siècle plus tard, en 1960, le professeur Jérôme Lejeune et son équipe découvrent que la trisomie résulte d’une anomalie chromosomique présente dès la naissance. Le chromosome 21 comporte trois exemplaires, portant donc à 47 le nombre de chromosomes de l’individu contre 46 dans un caryotype normal. Cette différence chromosomique entraîne chez les individus porteurs de T21 différentes caractéristiques. Le syndrome est donc dû à l’expression d’un trop grand nombre d’informations génétiques qui entraînent une désorganisation de celles-ci.
Il existe plusieurs formes de T21. La forme la plus fréquente est la trisomie libre et homogène. Elle se produit lors de la méiose et provient d’un accident qui unit un gamète à 24 chromosomes à un gamète à 23 chromosomes. Les cellules ont donc 47 chromosomes (dont 3 au niveau du chromosome 21) et non 46.
Il existe aussi des trisomies mosaïques qui ne voient apparaître un chromosome surnuméraire que sur certaines cellules. Les cellules paternelles et maternelles comprenaient 46 chromosomes, mais une répartition inégale se produit après quelques divisions cellulaires.
La dernière forme de trisomie est la trisomie par translocation. L’ensemble ou une partie d’un chromosome 21 vient se greffer à d’autres chromosomes. Dans ce cas, l’un des parents étant porteur du bris de chromosome 21, il y a davantage de possibilités génétiques de donner naissance à un autre enfant porteur de trisomie 21. (Qu’est-ce que la trisomie 21 ?, 2022)
Ces personnes peuvent présenter différentes affections médicales comme des anomalies qui peuvent être congénitales ou non, malformatives ou non, et différentes dysrégulations au cours de la vie (thyroïde, épilepsie…). Les personnes porteuses de trisomie 21 ont des traits morphologiques spécifiques : un visage rond avec un nez de petite taille, un cou court, de petites oreilles positionnées plus bas que la norme, des yeux en amande, un pli palmaire simple, une petite bouche et une taille inférieure à la moyenne.
La trisomie entraînant différentes particularités développementales, il est nécessaire d’effectuer un suivi médical tout au long de la vie (Rondal, 2010).
Actuellement, la T21 est observée dans 27 grossesses sur 10 000 (Trisomie 21 : la HAS actualise ses recommandations concernant le dépistage prénatal de la trisomie 21, 2017) ou 1 naissance pour 2000 (Trisomie 21, s. d.)
La prévalence de la T21 est plus grande chez les garçons que chez les filles. L’espérance de vie de ces personnes a fortement augmenté ces dernières années en passant de neuf ans dans les années 1930 à soixante-dix ans aujourd’hui en France (Cuilleret, 2011). Cette évolution est due aux prises en charge de plus en plus précoces, spécialisées, ainsi qu’aux progrès chirurgicaux.
Profil spécifique
Les personnes porteuses de trisomie 21 peuvent être sujettes à différentes particularités neurologiques, cognitives, motrices et organiques. Nous présenterons dans cette partie différents éléments en lien plus ou moins direct avec l’orthophonie.
Le profil neurologique
Les trajectoires développementales sont souvent similaires entre les personnes porteuses de T21. Le développement cérébral est perturbé par des anomalies cérébrales que l’on peut retrouver dans les analyses post-mortem. Ces analyses ont montré une taille plus réduite du cerveau, notamment des lobes frontaux, des lobes temporaux et du cervelet, avec toutefois une préservation des zones sous-corticales (Gardiner et al., 2010).
Les dysfonctionnements neuronaux apparaissent dès la neurogenèse (formation, qui a lieu dès la dixième semaine de vie in utero, des neurones à partir des cellules souches). Il y aurait une réduction de la prolifération des cellules souches et une mort neuronale plus importante. Nous observons donc une réduction de la boîte crânienne, de la taille du cerveau et du nombre de neurones. Aussi, les neurones ne s’organisent pas correctement à cause d’une inadéquation entre la production neuronale et la production de cellules gliales. Par ailleurs, la production neuronale n’étant pas équilibrée au sein du cerveau, cela serait la cause de certains troubles cognitifs. En outre, la myélinisation se fait lentement à la naissance et entraînerait des retards, notamment psychomoteurs. La production de neurones, tout comme leur migration, contribuerait aux anomalies développementales (La trisomie 21 à l’origine de défauts de la neurogenèse, 2021).
Caractéristiques cognitives et motrices
Profil neurocognitif et cognitif
Nous retrouvons chez toutes les personnes porteuses de trisomie 21 un trouble du développement intellectuel.
La diminution du volume céphalique, les caractéristiques architecturales et le dysfonctionnement de certaines zones sont un ensemble de causes au trouble du développement intellectuel (Pennington & al. 2003).
Dans le cadre de la trisomie 21, le profil neurocognitif est très variable d’une personne à l’autre. Nous observons toujours un trouble de développement intellectuel, qui varie entre un profil de déficience légère (quotient intellectuel [QI] entre 55 et 69) à sévère (QI inférieur à 35). Le trouble est généralement modéré, les personnes porteuses de trisomie 21 ayant un QI autour de 45 (PNDS Trisomie 21).
L’atteinte de la zone fronto-cérébelleuse entrave le développement langagier, par son côté moteur (articulation) et par la mémoire verbale de travail. La mémoire verbale à court terme est peu efficiente, contrairement à la mémoire visuospatiale, celle-ci pouvant cependant être altérée par les difficultés d’analyse visuoperceptive (Kumin, 2012).
La mémoire épisodique et explicite à long terme est également touchée à cause du dysfonctionnement de la zone hippocampique. La mémoire à long terme implicite est cependant préservée (Comblain & Thibaut, 2009).
L’atteinte de la zone frontale fait également apparaître des difficultés dans les fonctions exécutives : planification, résolution de problème, inhibition, flexibilité (Comblain & Thibaut, 2020). Cependant, les tâches spatiales sont souvent bien préservées chez ces patients.
Par ailleurs, des difficultés de suivi oculaire sont également relevées auprès des patients porteurs de trisomie 21. Les contacts oculaires arrivent plus tardivement, ils sont de moins bonne qualité et assez courts (Ansenne & Fettweis, 2005). L’exploration visuelle est également restreinte. La coordination oculo-manuelle est également tardive.
Concernant le langage, nous observons des difficultés motrices et cognitives. Le développement du langage est retardé en comparaison au développement langagier de leurs pairs du même âge. On observe un babillage, mais le langage expressif entraîne plus de difficultés. Des difficultés phonologiques et syntaxiques altèrent régulièrement le langage oral, auxquelles s’ajoutent des difficultés articulatoires et d’imitation vocale.
Les enfants porteurs de trisomie 21 ont recours plus facilement aux gestes communicatifs (français signé, gestes « Makaton »). Les gestes permettent de faire intervenir la mémoire visuelle, plus efficace que la mémoire auditive chez ces patients. En raison du retard du langage expressif, une aide à la communication doit être mise en place précocement pour favoriser l’interaction, la production étant plus en retard que la réception. La rééducation précoce de la communication va stimuler le tour de rôle et l’interaction. En prenant conscience de son rôle dans l’échange, l’enfant comprendra ses possibilités de communication, et cela peut diminuer la survenue de troubles comportementaux. La communication multisensorielle (auditive, mais aussi visuelle ou kinesthésique) permettra à l’enfant une meilleure intégration des informations (Ternissien, 2014).
Profil moteur
Une hypotonie (manque de tonus musculaire) est observée dès la naissance. Le développement correspond aux étapes attendues, mais avec un retard d’acquisition, le temps de développement étant multiplié par deux. Nous pouvons prendre comme point de repère la tenue assise qui n’apparaît qu’à l’âge de douze mois (entre six et huit mois chez un enfant normotypique) et la marche autonome vers l’âge de vingt-cinq mois (entre dix et dix-huit mois chez un enfant normotypique). Ces retards développementaux sont dus aux caractéristiques syndromiques de la trisomie 21 (hypotonie, manque d’endurance, manque de coordination oculo-manuelle, etc.), mais également à la présence du trouble de développement intellectuel. Nous notons également l’existence d’un temps de latence (délai entre l’application d’un stimulus et la réaction volontaire consécutive) et une interaction peu fonctionnelle entre le cortex préfrontal et le cervelet, ce qui altère la planification et la mise en place de mouvements coordonnés.
D’après la description de Cuilleret (2003), cette hypotonie musculaire touche le corps dans sa globalité, mais également la sphère orofaciale avec les muscles bucco-faciaux dont les muscles masticateurs, de la langue, des lèvres, ainsi que les muscles orbitaires, respiratoires et vélaires. L’intervention précoce est donc fortement recommandée pour compenser le retard moteur. L’hypotonie va également gêner le contact visuel, précurseur au langage, du fait des difficultés dans le port de tête (Kumin, 2012).
Caractéristiques organiques
Profil cardiaque
Il existe de nombreuses malformations cardiaques qui peuvent être présentes dès la naissance. 40 à 50 % des patients porteurs de trisomie 21 ont une cardiopathie (PNDS Trisomie 21, 2020). La malformation la plus fréquente concerne la communication auriculo-ventriculaire. Les filles présentent davantage de risques que les garçons de développer une cardiopathie complexe. Cette prévalence entraîne plus de mortalité fœtale et pédiatrique chez les filles, ce qui peut expliquer la prévalence plus importante de garçons porteurs de trisomie 21 dans la population générale.
Les cardiopathies peuvent être repérées dès la période prénatale et le dépistage peut permettre aux parents de choisir le lieu d’accouchement en conséquence (choix d’une maternité disposant d’un service de réanimation néonatale, par exemple). À la naissance, une échographie cardiaque permet également de détecter précocement toute anomalie cardiaque.
L’une des complications des malformations cardiaques est l’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) qui entraînera des dyspnées. L’HTAP est à surveiller dans le cadre de l’allaitement (qui peut entraîner des essoufflements et une mauvaise prise de poids), de l’apnée du sommeil, d’infections, etc.
Profil gastroentérologique
Régulièrement, des malformations digestives sont à l’origine de complications associées. Nous notons une fréquence importante de RGO (reflux gastro-œsophagien) qui peut, outre les difficultés digestives, entraîner également des difficultés respiratoires (asthme, apnée du sommeil, etc.). Ces difficultés peuvent entraver l’oralité, notamment par une introduction compliquée de la diversification alimentaire, également tardive du fait des difficultés masticatoires.
Profil orofacial
D’un point de vue ORL (oto-rhino-laryngologie), de nombreuses difficultés apparaissent fréquemment et constituent un véritable syndrome orofacial. Les difficultés peuvent être causées par des caractéristiques anatomiques, musculaires, dentaires, infectieuses, etc.
Chez les patients porteurs de trisomie 21, nous observons fréquemment des conduits auditifs externes étroits. Cela complique les examens et altère l’audition, notamment par un risque plus accru d’otites et de sinusites (Kumin, 2012). Nous observons régulièrement des otites séreuses, parfois asymptomatiques. L’audition doit donc être fréquemment contrôlée afin d’anticiper une potentielle perte auditive. On observe également une incidence plus importante de surdités de transmission et de perception (5 % contre 1 % dans la population générale pour les surdités de perception). (Fréminville & al., 2007)
Le développement des fonctions orales chez l’enfant porteur de T21 est généralement atypique. Dans la plupart des cas, lorsque le profil général de l’enfant est hypotonique, nous observons également une hypotonie linguale et labiale. L’impression de langue volumineuse est donc causée par l’hypotonie musculaire qui ne permet pas à la langue de garder un emplacement correct. Par ailleurs, les lèvres hypotones ne peuvent contrer suffisamment la force de la langue et les lèvres peuvent donc avoir tendance à s’affaisser. Ce phénomène peut entraîner un bavage (dont l’évitement demande un véritable contrôle musculaire) parfois accentué par une hypersalivation. Ce manque de tonus aura des répercussions développementales puisqu’il ne va pas permettre une croissance normale du maxillaire supérieur. Par ailleurs, la dysmorphose dentaire, régulièrement présente au sein de la trisomie 21, va davantage compliquer le fonctionnement correct orofacial. Cela entraînera des conséquences notamment sur la mastication, mais également sur l’articulation.
Ces différentes particularités bucco-faciales anatomiques et fonctionnelles peuvent gêner le positionnement buccal de la personne au repos. Cela est en partie la cause du bruxisme (mouvement, souvent inconscient, de grincement des dents) que nous observons très fréquemment chez les patients porteurs de trisomie 21.
Pour différentes raisons − conduits aériens trop petits qui entraînent régulièrement des infections, insuffisance du développement maxillaire, hypotonie linguale et autres anomalies posturales −, la respiration est très souvent buccale. Cela va entraîner des complications infectieuses et d’apnée du sommeil.
Le développement oromoteur atypique et ses anomalies physiologiques sont complétés par des difficultés lors de l’alimentation. Chez les nourrissons porteurs de trisomie 21 qui rencontrent des difficultés pour s’alimenter, nous relevons différents troubles de la déglutition possibles. La déglutition est le fait d’avaler sa salive et tous types d’aliments liquides ou solides. Selon Senez (2002), elle se décompose en trois phases : la phase orale (automatico-volontaire), la phase pharyngée (automatico-réflexe) et la phase œsophagienne (réflexe).
Chez les enfants porteurs de T21, nous observons une incidence de 58 % de dysphagie pharyngée et de 64 % de dysphagie orale.
Concernant l’allaitement, une durée plus courte est rapportée pour les nourrissons porteurs de trisomie 21, avec une durée moyenne de huit semaines par rapport à vingt-trois semaines chez les enfants normotypiques. Les difficultés d’allaitement sont fréquentes et concernent notamment une succion peu efficace, des anomalies anatomiques bucco-faciales et une hypotonie (entraînant une mauvaise dépression intrabuccale) qui ne permettent pas un passage en quantité suffisante de lait. L’allaitement est possible, mais a parfois besoin d’être complété. Il peut cependant progresser en efficacité et peut donc devenir exclusif après quelques semaines (Coentro & al., 2020).
Par ailleurs, l’autostimulation que l’enfant devrait effectuer au cours des premiers mois de sa vie ne va être que faiblement mise en place.
D’après une étude d’Anil et al. (2019), les difficultés d’alimentation sont très fréquentes chez les bébés porteurs de trisomie 21. Dès 1984, Gisel pointait le manque de maturation des patterns qui impactait la mastication.
Ces difficultés résultent donc d’une interaction complexe entre les difficultés médicales, physiologiques, anatomiques et comportementales. Les premières études pointaient des difficultés dans les phases orales et pharyngées de la déglutition (dues aux difficultés oromotrices, aux anomalies de développement dentaire, mais aussi à l’hypotonie qui ralentit le mouvement des lèvres, des mâchoires et de la langue). Ces éléments entraînent donc une mastication immature (avec mauvaises formation, préhension et direction du bolus, c’est-à-dire du bol alimentaire) et, étant complétés par une déglutition primaire persistante, entravent donc fortement la phase orale. La phase pharyngée est également impactée puisque la mastication immature ne permet pas une prise complète des aliments et laisse donc des résidus alimentaires dans la bouche. L’hypotonie et le temps de latence ralentissent la déglutition et donc l’expulsion du bol alimentaire vers le pharynx. Cela peut également faire apparaître de fausses routes.
D’autres auteurs ont également mis en exergue la fonction œsophagienne, notamment par l’importance du taux d’incidence de l’atrésie de l’œsophage (interruption entre l’œsophage et l’estomac) et de la fistule trachéoœsophagienne (interruption entre la trachée et l’œsophage). Par ailleurs, cette phase de la déglutition est également impactée par l’hypotonie musculaire générale et donc un péristaltisme lent (contractions musculaires du tube digestif permettant le parcours des aliments). Nous retrouvons également un impact des difficultés de la phase orale, la mastication défectueuse, qui peut entraîner une obstruction pharyngée.
De façon générale, nous notons des difficultés plus marquées sur les aliments solides que liquides, quel que soit le temps de la déglutition.
Fiels et al. (2003) révèle également une prévalence importante de sélectivité alimentaire. Celle-ci peut avoir des conséquences sur l’acceptation des goûts, des textures, de la température, etc. Ces difficultés peuvent également impacter la vie quotidienne de ces personnes. Les parents peuvent se sentir démunis face aux difficultés d’alimentation de leur enfant. Ces difficultés quotidiennes peuvent engendrer des répercussions sociales (retrait social par exemple).
Les patients porteurs de trisomie 21 vont devoir bénéficier de différentes prises en charge (PEC) paramédicales et médicales tout au long de leur vie. L’importance est la précocité de la PEC. En orthophonie, de nombreuses méthodes de rééducation peuvent être mises en place. Dans ce mémoire, nous allons décrire uniquement la méthode Padovan, c’est-à-dire la méthode de réorganisation neurofonctionnelle.
RÉÉDUCATION PADOVAN DANS LE CADRE DE LA TRISOMIE 21
Dans cette partie, nous allons présenter les liens entre la rééducation neurofonctionnelle et les caractéristiques de la T21.
En effet, ayant décidé d’observer la rééducation neurofonctionnelle de patients porteurs de T21, nous allons donc présenter l’intérêt d’utiliser une telle méthode pour ces patients. Les patients T21 ont besoin de travailler les fonctions oromyofaciales, la perception, les précurseurs à la communication et la communication orale. Cependant, travailler le corps dans sa globalité en orthophonie ne peut être que bénéfique pour ces patients. On sait que l’être humain naît avec des caractéristiques, mais que l’influence de l’environnement (et donc de l’épigénétique) joue également un grand rôle sur le développement. En fonction de l’environnement, la symptologie peut varier (Cuilleret, 2011). L’épigénétique est la part de l’histoire humaine que l’on peut changer. Le patient porteur de trisomie 21 ayant un développement plus lent, la méthode Padovan va lui permettre un apport de stimulations permettant d’atteindre plus facilement son potentiel de développement.
Nous avons vu que la méthode de rééducation neurofonctionnelle était une méthode de travail globale. Nous ne pouvons établir un intérêt pour chaque exercice, car les exercices puisent leur bénéfice principalement par leur lien et leur enchaînement. Il peut cependant être intéressant de savoir ce que travaille chaque exercice sans pour autant effectuer l’exercice dans l’optique de ne travailler que cela.
Afin d’illustrer au mieux la méthode, nous allons exceptionnellement présenter quelques intérêts ciblés qui pourraient poser question dans ce travail de mémoire d’orthophonie. Cette présentation ne sera donc que la citation d’exemples non exhaustifs et n’est pas l’illustration de la méthode. En effet, l’explication que nous allons donner pour un élément travaillé n’est ni exclusive ni complète.
Exemples d’exercices
Les mouvements moteurs des jambes et des bras
Le mouvement « moteur des jambes » travaille la circulation veineuse et donc l’oxygénation du cerveau. Les patients porteurs de T21 présentant une importante hypotonie, ce mouvement effectue un renforcement musculaire et prépare à la marche, qui peut être fortement impactée. L’hypotonie musculaire touche les muscles du corps et engendre des répercussions en motricité globale comme en motricité fine, externes comme internes. Les conséquences peuvent être multiples et sur différentes échelles.
La marche permettra aussi une meilleure circulation sanguine et donc une meilleure oxygénation qui aura des effets positifs sur les fonctions cognitives. Ce mouvement moteur peut également avoir des conséquences directes sur le tonus des sphincters et des viscères en s’adressant au système nerveux autonome parasympathique qui a de nombreux réseaux profonds (au niveau de la ceinture pelvienne). Cela engendrerait des effets indirects ou non sur l’oralité (reflux, plaisir de manger…).
Par ailleurs, les mouvements « moteurs des bras » permettent de renforcer musculairement le contrôle de tête. Ils permettent également de travailler la division des territoires musculaires. Il est important de travailler la dissociation des mouvements, peu présente chez les patients porteurs de T21, afin de hiérarchiser les fonctionnements. Cela permet de minimiser la réaction en chaîne lorsqu’une fonction est altérée et de renforcer l’efficacité des fonctions préservées. Le renforcement du contrôle de tête aura des répercussions favorables sur le tonus et sur la respiration. Les patients porteurs de T21 étant de grands respirateurs buccaux, il est donc primordial de travailler cette partie du corps avec eux (Benkaddour & al., 2014).
Les exercices des mains
Dans ce travail, nous pouvons nous questionner sur l’intérêt en orthophonie de travailler les mains avec les patients porteurs de T21.
Outre l’explication neurologique déjà présentée concernant les liens neurologiques du développement, nous pouvons mettre en lumière l’importance du travail des mains à travers différents travaux.
Des études ont mis en évidence le lien entre la parole et la motricité manuelle (Babkin, 1960 ; Futagi & al., 2013).
Le premier lien neurologique entre la bouche et la main est mis en évidence par le réflexe de Babkin, normalement intégré vers trois mois. Une stimulation dans la paume entraîne une rotation de la tête, une ouverture de bouche et des mouvements de langue.
Aussi, William Penfield a mis en évidence la place primordiale au niveau sensoriel et moteur que tiennent la langue, la bouche et les lèvres et la proximité corticale entre les mains et la bouche qui entraîne des stimulations conjointes (Cherici, 2018).
Il a représenté ceci sous forme d’homoncule, c’est-à-dire de « représentation de l’effet des fonctions des différentes parties du corps humain à la surface du cortex moteur et sensoriel ». Une stimulation de la bouche a donc des répercussions sur une stimulation des mains, et inversement. Par ailleurs, l’étude de Wang et al. (2012) a prouvé que les performances motrices à un an et demi pouvaient prédire les performances de communication à trois ans.
Nous avons vu précédemment que les patients porteurs de T21 présentaient fréquemment une faiblesse musculaire qui pouvait se retrouver sur les muscles oraux tels que la langue, les lèvres, etc. On sait que ceci peut entraîner notamment des troubles d’alimentation et d’articulation. À travers les différentes études que nous venons de citer, nous pouvons donc comprendre l’importance du travail des mains de la rééducation Padovan qui complétera, entre autres, le travail des fonctions prélinguistiques auprès des patients porteurs de T21.
Exemples de caractéristiques de la méthode
Le rythme
La méthode Padovan porte une attention particulière au rythme. Ce dernier est omniprésent dans notre quotidien (respiration, digestion, veille/sommeil, saisons…).
Le rythme est travaillé à partir de la coordination des mouvements, mais aussi et surtout à partir des poèmes et chansons.
On connaît les bénéfices de la musique dans de nombreux domaines, et son importance pour la rééducation orthophonique est désormais prouvée. Il ne s’agit cependant pas de faire simplement écouter de la musique en rééducation, mais de la faire ressentir par le patient. Que celui-ci soit guidé dans son écoute. Selon Habib (2017), « l’apprentissage musical utilise et renforce des connexions entre des zones cérébrales distantes et de ce fait pourrait restaurer les circuits impliqués dans l’intégration intermodalitaire ».
Des convergences existent entre la musique et le langage. Le son est contenu au sein d’un espace-temps et s’adapte au cadre rigide de la structure, mais également à la liberté d’expression. « La liberté d’une structure se conjugue avec la rigueur d’une autre » (Estienne, 2019).
Les patients porteurs de T21 rencontrant fréquemment des difficultés rythmiques (cognitives, sociales, biologiques…), cette caractéristique de la méthode est donc un véritable atout (Ternissien, 2014).
Les troubles cérébelleux engendrent fréquemment un délai de la commande motrice et à plus grande échelle un trouble du rythme moteur (Cuilleret, 2007). Cette observation avait déjà été énoncée par Bihel en 1972 qui mettait en lien la lenteur du développement moteur et du rythme avec la lenteur de la découverte du monde.
Le trouble du rythme perturbe également la parole par le manque d’organisation de la structure langagière : le débit de parole peut être explosif, les accents et les pauses ne sont pas toujours adaptés et cela engendre une perte de sens et de qualité de message (Cuilleret, 2007). Présenter des modèles rythmiques lors de rééducations avec des patients porteurs de T21 a donc un véritable intérêt.
Le travail autour des poèmes permet aussi d’aborder la temporalité, notamment par la variation des poèmes en fonction des saisons par exemple.
La rééducation propose donc une stimulation par le rythme, mais respecte cependant le rythme de chaque patient.
La répétition
La méthode Padovan est constituée de répétitions de mouvements. La répétition va permettre la formation, mais surtout l’automatisation de chemins neuronaux. Elle permet d’ancrer et d’automatiser des fonctions acquises et de préparer l’organisme à l’arrivée de nouvelles fonctions. Le patient a un potentiel génétique, mais le retard développemental peut repousser, voire empêcher la manifestation de la fonction. Aussi, nous pouvons observer chez le patient T21 des phases d’acquisition, de stagnation, ou parfois même de régression transitoire. Cette répétition entraîne une véritable maturation dont a besoin le patient porteur de T21, du fait des connexions neuronales et de la myélinisation perturbées.
Les patients porteurs de T21 ont une certaine lenteur qui peut être présente dans de nombreux domaines. Celle-ci se traduit notamment par un temps de latence, dont nous avons parlé précédemment, qui illustre des connexions synaptiques plus lentes.
La méthode Padovan permet de soulager le rôle du cortex. En effet, le thérapeute permet la réorganisation des structures du système nerveux sans passer par le cortex (nous ne devons jamais énoncer explicitement ce qu’il faut faire ou ne pas faire). Le patient porteur de T21 pouvant rencontrer des difficultés à gérer cognitivement les différents stimuli pourra donc entièrement se laisser guider par le thérapeute. La répétition et la régularité de l’application de la méthode vont permettre l’installation pérenne des nouveaux chemins synaptiques par une myélinisation plus efficace. (Ternissien, 2014)
OBJECTIFS ET HYPOTHÈSES THÉORIQUES
À la suite de notre partie théorique, nous pouvons donc relever l’importance du travail oromyofacial précoce en orthophonie pour faire face aux difficultés présentées par les personnes porteuses de T21. Ce travail permettra une meilleure oralité alimentaire, mais également verbale. Nous pouvons regrouper les fonctions travaillées par la rééducation oromyofaciale sous le terme de « fonctions prélinguistiques ». Nous notons également un retard développemental, incluant un retard intellectuel, qui devra être pris en compte lors de la rééducation.
Nous avons donc fondé notre étude sur la problématique suivante :
Comment permettre à un enfant porteur de trisomie 21 d’accéder correctement aux fonctions prélinguisitiques malgré un retard développemental ?
Pour répondre à cette interrogation, nous nous sommes donc intéressés à la méthode Padovan. Cette dernière est très présente dans les rééducations orthophoniques à l’étranger, mais encore peu développée et peu enseignée en France. Pourtant, face aux difficultés présentées par les patients porteurs de trisomie 21, nous pouvons mettre en lien les bénéfices que pourrait apporter une telle rééducation.
Notre travail de recherche s’est appuyé sur un objectif principal : l’étude de l’effet de la méthode Padovan au niveau des fonctions prélinguistiques dans le cadre de la T21.
Afin de répondre au mieux à cet objectif, nous proposons différentes hypothèses opérationnelles.
Premièrement, nous suggérons qu’une rééducation orthophonique par la méthode Padovan permet d’améliorer la respiration (Hypothèse 1). Aussi, nous suggérons qu’une rééducation orthophonique par la méthode Padovan permet d’améliorer la succion (H2). Ensuite, nous suggérons qu’une rééducation orthophonique par la méthode Padovan permet d’améliorer la mastication (H3). Enfin, nous suggérons qu’une rééducation orthophonique par la méthode Padovan permet d’améliorer les mouvements de déglutition (H4).
Bien évidemment, nous prenons en compte que la rééducation avec la méthode Padovan est une méthode globale. Nous faisons le choix d’observer ici certaines fonctions, mais celles-ci sont à considérer dans une évolution globale du patient.
Pour compléter notre analyse, nous avons donc mis en place un objectif secondaire : l’étude des améliorations d’autres habiletés développementales entraînées par la méthode Padovan. Pour répondre à cet objectif, nous proposons deux hypothèses opérationnelles.
La méthode Padovan entraîne une amélioration sensori-motrice (H1) et la méthode Padovan entraîne une amélioration des fonctions d’oralité alimentaire et verbale (H2).
Ces objectifs reprennent donc, dans l’ordre d’apparition, les éléments du schéma neurodéveloppemental suivi par la méthode Padovan, dans lequel le développement moteur devance le développement langagier.
Dans cette étude, nous avons donc étudié quatre sujets porteurs de trisomie 21 qui suivent une rééducation neurofonctionnelle. Nous analyserons leur profil en début et fin d’étude afin d’observer leur évolution.
Population
Présentation de la patiente 1 (E.)
E. est une petite fille née en avril 2017 (âgée de 4;2 ans au début de l’étude), présentant une trisomie 21. Elle a deux grandes sœurs.
La grossesse s’est déroulée correctement et E. est née à terme. E. a d’abord été nourrie par sonde naso-gastrique puis au biberon, car elle présentait des vomissements au moment de l’allaitement. E. a subi une opération gastrique lors de ses premiers jours de vie et des pathologies cardiaques et sanguines ont été détectées.
D’après les parents, elle n’a pas présenté de difficultés au moment de la diversification alimentaire. La présence d’un RGO était signalée, mais il est désormais traité. E. fait de l’apnée du sommeil. Concernant le développement moteur, la tenue assise a été effectuée à 10 mois et la marche à 16 mois.
Cette année, E. est entrée à l’école.
Concernant les suivis, elle a commencé un suivi orthophonique en CAMPS puis a été suivie en libéral à l’âge de 2 ans et 2 mois pour une rééducation de la dysoralité et une importante hypersensibilité. Elle a bénéficié de séances de kinésithérapie et de psychomotricité jusqu’à ses 2 ans et demi.
Face aux difficultés globales et notamment celles qui concernent les fonctions prélinguistiques (succion, mastication, respiration) une rééducation en Padovan est proposée depuis juin 2020 (à 3 ans). E. utilise quelques gestes Makaton et la verbalisation se met en place (quelques mots reconnaissables en contexte : maman, papa, non, encore, etc.). E. peut comprendre et exécuter quelques consignes (avec aide gestuelle et contexte).
Durant ces 10 mois d’observation, le suivi de E. a été très irrégulier. E. a souvent été malade et absente en séance. Le suivi orthophonique n’a donc pas pu suivre les recommandations de la méthode Padovan d’un suivi régulier. Aussi, lors de certains temps d’observation, E. est arrivée endormie ou s’endormait en séance.
Présentation du patient 2 (U.)
U. est un petit garçon né en avril 2018 (âgé de 3;2 ans au début de l’étude). Il a une petite sœur née en mai 2021.
U. est né à 32 semaines. Il a été hospitalisé deux mois à la naissance et a été nourri par sonde nasogastrique pendant 6 semaines. Ensuite, les prises de biberon étaient lentes et fatigantes. Les parents de U. indiquent qu’il a rencontré des difficultés lors de la diversification. Les prises de purées étaient coûteuses. Un réflexe nauséeux est très présent. U. ne mange que des purées, des compotes et du lait. Un diagnostic de trouble de l’oralité alimentaire a été posé. Aucune pathologie cardiaque ni cœliaque n’a été diagnostiquée.
Un essai de mise en place de plaque palatine a été effectué, mais cela a engendré de nombreuses régurgitations.
Les prérequis à la communication se sont mis en place petit à petit. Il entre en communication avec autrui et apprend le Makaton tout en travaillant le langage oral.
Il est entré à l’école en septembre 2021, accompagné par une AESH.
Il est suivi depuis mars 2019, deux fois par semaine. Il bénéficie également d’une séance de psychomotricité et d’une séance de kinésithérapie par semaine.
Présentation du patient 3 (M.)
M. est un petit garçon né en mai 2020 (âgé de 13 mois au début de l’étude). C’est le premier enfant de la famille, il a une petite sœur née en 2022. Il est suivi depuis novembre 2020 à raison de deux séances par semaine.
La grossesse s’est bien passée, mais la suspicion de trisomie a entraîné un suivi intensif lors des dernières semaines. M. est né à 38 semaines.
Il n’a pas de pathologie cardiaque ni d’autres pathologies signalées. Le sommeil est de bonne qualité.
Il a été allaité pendant trois mois puis l’alimentation au biberon et la diversification se sont bien passées. Il a régulièrement une tétine en caoutchouc.
Le babillage s’est bien mis en place lors des premiers mois. M. exprime également ses affects par des pleurs ou des sourires.
Nous ne notons pas d’hyper ou hyposensibilité au moment du bilan. M. vient de manière régulière en séance. En semaine, il est gardé à la crèche.
Actuellement, il a un suivi orthophonique deux jours par semaine. Il est également suivi en kinésithérapie, en psychomotricité et en pédo-orthodontie (pour la pose d’une plaque palatine).
Présentation du patient 4 (A.)
A. est un petit garçon né en novembre 2020 (âgé de 7 mois au début de l’étude). Il est né à 39 semaines de grossesse par césarienne.
A. a été allaité, mais il rencontrait des difficultés pour téter. Il a donc été nourri au biberon, puis la diversification alimentaire a été effectuée vers 4-5 mois et s’est bien passée.
Il n’a pas de pathologie cardiaque. Il a une laryngomalacie qui cause une respiration bruyante (appelée stridor). Il a été victime d’une anoxie à l’âge de 2 mois, à la suite d’une obstruction des voies aériennes. Une intervention chirurgicale a eu lieu sur le larynx trop étroit. Depuis, nous notons la présence du stridor. A. présente une forte hypotonie.
Actuellement, il est suivi deux fois par semaine en orthophonie. Il est aussi suivi en kinésithérapie.
Lors des premiers temps, il était impossible pour lui de tourner la tête vers la gauche. Il est suivi chez l’ostéopathe une fois par mois et a maintenant une meilleure mobilité de tête. Lors du bilan, il n’y a pas d’hyper ou d’hyposensibilité relevée.
En décembre 2021, il a eu différentes bronchiolites qui ont entraîné diverses hospitalisations et une assistance respiratoire pour la nuit. Un diagnostic d’asthme sévère a été posé début 2022. Ces épisodes infectieux ont donc entraîné une grande fatigue chez A. et une irrégularité des suivis orthophoniques. Par ailleurs, en fin d’observation, A. est à nouveau hospitalisé pour infection respiratoire.
Présentation du matériel
Après différentes recherches théoriques et observations de séances Padovan, nous avons créé une grille d’observation (voir annexe II). Cette grille d’observation suit le schéma neuro-évolutif, mais ne cite pas toutes les étapes de ce développement. En effet, nous avons cherché à récapituler les grandes étapes qui étaient importantes pour l’observation de nos hypothèses. Il est cependant important de signaler que, dans la logique complète de la méthode Padovan, toutes les étapes sont importantes pour le développement de l’enfant. Il est donc évident que tous les exercices des séquences étaient observés pour voir l’enfant dans sa globalité, même s’ils ne sont pas tous inscrits dans la grille d’observation.
La grille d’observation comporte deux grandes parties : une partie concernant le développement moteur et une partie concernant la sphère oromyofaciale.
La partie « moteur » regroupe différentes étapes, nous retrouvons donc cinq catégories : le ramper, la marche à quatre pattes, la marche, les mains et le regard. Ces éléments sont à prendre en considération au sein de la séquence neuro-évolutive.
Concernant la partie « oromyofaciale », nous observons la sensibilité, les productions vocales, et les quatre fonctions prélinguistiques (respiration, succion, mastication et déglutition).
Ces dernières sont composées de différentes observations. La respiration correspond à la respiration de repos, au souffle buccal et au souffle nasal. La succion correspond à l’analyse de l’efficacité du mouvement non nutritif et au positionnement lingual et labial. La mastication est composée de l’analyse de son efficacité, mais également au positionnement mandibulaire.
La déglutition est observée à travers les mouvements préparatoires (notamment les mouvements linguaux) à celle-ci.
Chaque observation correspond à une séance d’orthophonie. Les séances d’orthophonie durent 45 minutes. Les observations ont été faites lors de la séance ou en différé, grâce à des vidéos. La cotation de cette grille d’observation est qualitative. Afin d’apporter une vue d’ensemble à notre travail, nous effectuerons également un tableau récapitulatif pour chaque fonction prélinguistique. Un questionnaire d’alimentation (voir annexe III) a également été rédigé afin de compléter les informations anamnestiques que nous avions des patients. Ce questionnaire a été proposé en septembre 2021 et en avril 2022 afin d’évaluer le regard du parent vis-à-vis de l’alimentation de son enfant en deux temps, en début et fin d’observation. Ce questionnaire comporte donc des questions qui concernent uniquement l’alimentation de l’enfant, de l’anamnèse aux caractéristiques actuelles. Ces dernières concernent aussi les difficultés potentielles et leur façon d’être exprimées. Nous avons fait le choix de rédiger un questionnaire rapide à remplir par les parents et sans l’aide de l’orthophoniste afin d’avoir un regard objectif de leur ressenti et d’éventuelle plaintes.
Déroulé de la recherche
La recherche s’est déroulée en plusieurs étapes.
Nous avons décidé d’observer des patients suivis en orthophonie avec la méthode Padovan sur dix mois afin d’observer les potentielles évolutions durant les rééducations. Nous avons sélectionné quatre patients qui suivaient une rééducation Padovan au sein du même cabinet. Ils ont été sélectionnés par leurs caractéristiques : enfant de moins de cinq ans ayant commencé une rééducation orthophonique par la méthode Padovan.
Les patients ont été tous informés de la future étude pour la première fois en juin 2021 par leur orthophoniste. Tous ont donné un premier accord tacite.
Pour pouvoir présenter notre projet aux patients et avoir une méthode adaptée au droit à l’image, un formulaire de consentement expliquant les tenants et les aboutissants de notre recherche a été rédigé et distribué aux familles (voir annexe IV).
Après différentes recherches théoriques et observations de séances Padovan, nous avons créé la grille d’observation. Le questionnaire d’alimentation a également été rédigé et proposé en juin 2021 et en avril 2022.
Afin d’effectuer notre analyse, nous avons observé les patients sur quatre séances d’orthophonie. La première observation a eu lieu en juin 2021 (Temps 1), la deuxième en octobre 2021 (T2), la troisième en décembre 2021 (T3). Enfin, la dernière observation a eu lieu en mars 2022 (T4).
Les patients ont tous été pris en charge par des orthophonistes formées en Padovan.
Lors de ces séances, des films ont été pris afin de garder une trace visuelle des différents comportements observés.
Après chaque séance, la grille d’observation est complétée afin d’effectuer des comparaisons des différents temps.
Les résultats permettent d’obtenir des statistiques descriptives. Ayant une grande part de subjectivité, nous avons principalement coté qualitativement chaque critère. Un tableau récapitulatif sera effectué par fonction avec une cotation par symbole.
RÉSULTATS
Pour rappel, le T1 correspond à une observation de juin 2021, le T2 à une observation d’octobre 2021, le T3 à une observation de décembre 2021 et le T4 à une observation de mars 2022.
Nous allons présenter les résultats en fonction de nos différents objectifs. Nous nous attacherons dans un premier temps aux résultats qui concernent les fonctions prélinguistiques avant d’observer les résultats qui concernent la sensorimotricité et l’oralité.
L’étude de l’effet de la méthode Padovan au niveau des fonctions prélinguistiques dans le cadre de la T21
Dans cette partie, nous allons présenter les résultats qui sont en lien avec notre objectif principal. Nous nous détachons donc de la méthode Padovan pour analyser seulement les évolutions des fonctions prélinguistiques.
Dans un premier temps, nous allons présenter les principales caractéristiques de l’évolution des patients. Nous détaillerons ensuite les résultats observés.
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Table des matières
Introduction
PARTIE THEORIQUE
1. LA MÉTHODE DE LA RÉORGANISATION NEUROFONCTIONNELLE
1.1. Rappels neurologiques
1.1.1. Structures neurologiques
1.1.2. Organisation neurologique
1.1. Historique et fondements de la méthode
1.2.1. Historique
1.2.2. Steiner et la relation « marcher, parler, penser »
1.2.3. Les travaux de Temple Fay
1.2.4. La méthode Padovan
a. Principe à retenir
b. Description pratique de la méthode
c. Présence des poèmes
2. PRÉSENTATION DE LA TRISOMIE 21
2.1. Présentation générale
2.2. Profil spécifique
2.2.1. Le profil neurologique
2.2.2. Caractéristiques cognitives et motrices
a. Profil neurocognitif et cognitif
b. Profil moteur
2.2.3. Caractéristiques organiques
a. Profil cardiaque
b. Profil gastroentérologique
c. Profil orofacial
3. RÉÉDUCATION PADOVAN DANS LE CADRE DE LA TRISOMIE 21
3.1. Exemples d’exercices
3.1.1. Les mouvements moteurs des jambes et des bras
3.1.2. Les exercices des mains
3.2. Exemples de caractéristiques de la méthode
3.2.1. Le rythme
3.2.2. La répétition
4. OBJECTIFS ET HYPOTHÈSES THÉORIQUES
PARTIE PRATIQUE
1. PARTIE MÉTHODOLOGIQUE
1.1. Population
1.1.1. Présentation de la patiente 1 (E.)
1.1.2. Présentation du patient 2 (U.)
1.1.3. Présentation du patient 3 (M.)
1.1.4. Présentation du patient 4 (A.)
1.2. Présentation du matériel
1.3. Déroulé de la recherche
2. RÉSULTATS
2.1. L’étude de l’effet de la méthode Padovan au niveau des fonctions prélinguistiques dans le cadre de la T21
2.1.1. La méthode Padovan permet une amélioration de la respiration (H1)
Principales caractéristiques de l’évolution des patients concernant la respiration
Patiente 1 (E.)
Patient 2 (U.)
Patient 3 (M.)
Patient 4 (A.)
2.1.2. La méthode Padovan permet une amélioration de la succion (H2)
Principales caractéristiques de l’évolution des patients concernant la succion
Patiente 1 (E.)
Patient 2 (U.)
Patient 3 (M.)
Patient 4 (A.)
2.1.3. La méthode Padovan permet une amélioration de la mastication. (H3)
Principales caractéristiques de l’évolution des patients concernant la mastication
Patient 1 (E.)
Patient 2 (U.)
Patient 3 (M.)
Patient 4 (A.)
2.1.4. La méthode Padovan permet une amélioration de la déglutition. (H4)
Principales caractéristiques de l’évolution des patients concernant la déglutition
Patiente 1 (E.)
Patient 2 (U.)
Patient 3 (M.)
Patient 4 (A.)
2.2. L’étude des améliorations d’autres habiletés développementales entraînées par la méthode Padovan.
2.2.1. La méthode Padovan permet une amélioration sensori-motrice (H1)
Patiente 1 (E.)
Patient 2 (U.)
Patient 3 (M.)
Patient 4 (A.)
2.2.2. La méthode Padovan permet une amélioration des fonctions d’oralité alimentaire et verbale (H2)
Patiente 1 (E.)
Patient 2 (U.)
Patient 3 (M.)
Patient 4 (A.)
PARTIE DISCUSSION
1. ÉVOLUTION DE CHAQUE PATIENT
1.2. Patient 1 (E.)
1.2. Patient 2 (U.)
1.3. Patient 3 (M.)
1.4. Patient 4 (A.)
2. OBSERVATIONS ANNEXES
2.1. Évolutions sous-jacentes
2.2. Bienfaits du rythme
2.3. Désensibilisation
3. LIMITES DE L’ETUDE
3.1. Contraintes de la démarche expérimentale
3.1.1. Présentation d’une méthode unique
3.1.2. Importance de la régularité et de la répétition
3.2. Perspectives
3.2.1. Apport de notre démarche
3.2.2. Poursuite de l’étude
Conclusion
Bibliographie
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