Réduction du gonflement d’une montmorillonite sous sollicitation hygrique par l’utilisation de molécules organiques

Définition d’un enduit en terre crue

     D’après le guide des bonnes pratiques de la construction en terre crue (ARESO et al., 2018), un enduit en terre crue est défini comme « un mélange plastique ou mortier avec lequel on recouvre un mur ou un plafond brut, en général pour leur donner une surface uniforme et plane et éventuellement d’autres caractéristiques et fonctions comme celle de protéger des intempéries ou de constituer un parement uniforme à caractère décoratif. L’enduit peut être appliqué en une ou plusieurs couches, d’une épaisseur déterminée, et n’atteint ses propriétés définitives qu’une fois posé et durci ». Pour être utilisée en tant qu’enduit, la terre doit être dans un état visqueux, compris entre l’état plastique et l’état liquide. Notez qu’aucune mesure quantitative de l’état de consistance ne semble être disponible dans la littérature pour définir les enduits et l’état est apprécié de manière empirique et évalué grâce à l’expertise de l’artisan spécialisé. Un enduit en terre crue est composé de sable, d’argile et parfois de fibres végétales ou autres adjuvants (Hamard et al., 2013; Melià et al., 2014). Le sable (avec une granulométrie comprise entre 0.0625 et 2 mm) permet de constituer le squelette granulaire de l’enduit tandis que les argiles lui donnent de la cohésion. L’ajout de fibres permet de limiter les phénomènes de fissuration lorsque l’enduit sèche mais aussi une fois sec, en présence de variations hygrométriques. Un bon enduit doit contenir suffisamment de minéraux argileux pour assurer la cohésion des particules et prévenir son érosion mais un excès entraîne de la fissuration au séchage (Hamard et al., 2013). C’est pourquoi il est préconisé d’utiliser des terres ne contenant pas ou peu d’argiles gonflantes, mais plutôt des minéraux argileux de type kaolinite (Houben et al., 2006). Cependant, lorsqu’il n’est pas possible d’utiliser un sol pauvre en argiles gonflantes, des ajouts de sable sont nécessaires pour diminuer la fraction argileuse dans le matériau constitutif de l’enduit et ainsi réduire sa capacité à gonfler de manière excessive et à se fissurer au séchage. Cet ajout est pratiqué de manière courante avec des ratios volumiques de 1 pour 1, 1 pour 2 ou 1 pour 3 en argile/sable (Figure I-1). Les terres argileuses sont donc réservées aux enduits que l’on modifie par ajout de sable jusqu’à ce que la fissuration au séchage soit absente tout en gardant une certaine cohésion du matériau (propriété rhéologique) nécessaire pour la pose. In fine, la question est de savoir s’il est possible d’utiliser des terres trop riches en argiles gonflantes, alors considérées comme des déchets d’excavation. En effet, le stockage pouvant coûter cher tant sur le plan économique qu’écologique, il est important de pouvoir réemployer ces terres en mettant en place un plan d’économie circulaire. Stabiliser ces terres par différentes techniques est donc impératifs (voir partie I – 1 – 2 – c. sur la stabilisation du matériau terre crue). L’enduit appliqué doit être perméable à la vapeur d’eau (enduit respirant) : la vapeur doit passer à travers sans la retenir  trop longtemps ou gonfler sous son action. Si l’eau présente dans le mur ne peut pas s’évaporer à travers l’enduit, elle va condenser à l’interface entre l’enduit et le mur, créant des dommages encore plus importants que sans la présence de l’enduit (Morel and Hamard, 2012). De plus, un des avantages de la construction en terre crue est la régulation hygrique de l’environnement intérieur. Si les enduits appliqués sont totalement imperméables, les murs perdent leur capacité de tampon hygrique et l’avantage du confort hygrique est perdu. De plus, des moisissures et problèmes d’humidité peuvent également se développer à l’intérieur en cas de trop forte hygrométrie.

Charges de surface des minéraux argileux

     Lors de la formation des feuillets (de l’interaction entre les couches O et T), les feuillets peuvent être électriquement neutres ou chargés négativement. La neutralité existe si les sites octaédriques des argiles dioctaédriques sont occupés par des cations trivalents, si les sites octaédriques des argiles trioctaédriques sont occupés par des cations divalents et si les sites tétraédriques sont occupés par des Si4+. Si ces conditions ne sont pas respectées, c’est-à-dire s’il y a une substitution des cations Si4+ des couches tétraédriques par des cations Al3+ ou des Al3+ des couches octaédriques par des cations Mg2+/Fe2+ ou encore une vacance en site octaédrique, une charge négative se créée (Tournassat et al., 2015). Cette charge négative permanente va être contrebalancée par les charges interfoliaires positives : les cations interfoliaires. Dans une montmorillonite, ces cations échangeables sont principalement Ca2+, Mg2+ , Na+ et K+ (Yariv, 1992; Schoonheydt and Johnston, 2006). Sur les surfaces latérales des minéraux argileux, les groupements –OH qui s’y trouvent ne sont pas autant coordonnés que les –OH des surfaces basales. Ainsi, en fonction du pH du milieu, ils peuvent être négatifs, neutres ou positifs (Schoonheydt and Johnston, 2006). Une propriété de ces surfaces est le point de charge nulle (ou pzc) qui correspond au pH pour lequel la quantité de charge positives et négatives est identiques ou bien tous les groupements sont sous la forme –OH. Si le pH est inférieur au pzc, alors des groupements terminaux sont sous la forme –OH2+ , la surface attire préférentiellement des anions. Si le pH est supérieur au pzc alors des groupements terminaux sont sous la forme –O- et attirent préférentiellement les cations (Schoonheydt and Johnston, 2006). Ainsi, en fonction du pH du milieu, les minéraux argileux ne vont pas attirer les mêmes espèces sur leurs surfaces latérales capables de complexer des espèces telles que des métaux lourds. En fonction de la méthode utilisée, le point de charge nulle de la montmorillonite est compris entre 4.0 et 5.3 (Pecini and Avena, 2013), celui de l’illite est à 7.3 (Rand and Melton, 1975) et celui de la kaolinite est à 2.4 (Zhao et al., 2014).

Les composés inorganiques utilisées comme inhibiteurs de gonflement

    Depuis plusieurs décennies, le gonflement des argiles est stabilisé à l’aide de composés inorganiques, notamment dans les domaines du forage pétrolier et en conservation de la pierre. Des traitements au ciment et à la chaux (Gomes et al., 2016), des traitements thermiques (Wang et al., 1990) ou des échanges chimiques avec des cations issus de sels tels que KCl, CaCl2 ou NaCl sont réalisés dans ce cas. Des silicates à base de SiO2, d’alcalin (Na2O/K2O) et d’eau avec différentes structures moléculaires montrent des propriétés d’inhibition du gonflement par formation de gels de silice et de phénomènes de précipitation (Gomez and Patel, 2013). Mais la demande énergétique pour le traitement thermique et ceux à base de chaux et de ciment doit être importante pour être efficace (Thomas et al., 2012). Malgré des avantages financiers (le ciment et la chaux sont des produits largement répandus donc peu chers) et de stabilité du traitement au cours du temps même sous des conditions environnementales difficiles (Gomez and Patel, 2013), les sels inorganiques ne présentent pas que des avantages. En premier, d’un point de vue environnemental, ils ne sont efficaces qu’à partir d’une concentration supérieure au seuil d’acceptabilité de l’environnement (Suter et al., 2011; Gomez and Patel, 2013). Deuxièmement, une fois que la solution saline n’est plus en contact avec l’argile (après un lessivage lié à des pluies météoriques par exemple), celle-ci se remet à gonfler en présence d’eau, montrant un traitement facilement réversible. Et troisièmement, les composés inorganiques sont la plupart du temps sous forme de sels. Lors de cycles de solubilisation/cristallisation en fonction des conditions d’humidité, ils peuvent créer des contraintes mécaniques importantes sur le matériau, le fragilisant. Pour pallier les problèmes liés à l’utilisation des sels, de nouvelles méthodes de stabilisation des argiles sont mises en place, et notamment par l’utilisation de molécules organiques à base d’amines, mais également par le développement d’inhibiteurs du gonflement à base de molécules bio-sourcées. Ces molécules sont présentées dans la partie suivante (I – 5 – 2. ).

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Table des matières

Introduction générale
Contexte général de la construction en terre crue
La problématique des argiles gonflantes
Contexte et objectifs de la thèse
Plan détaillé de la thèse
Chapitre I. Etat de l’art
I – 1. Les enduits
I – 2. Les argiles et minéraux argileux
I – 3. Les phénomènes d’adsorption sur l’argile
I – 4. Conséquences de l’adsorption d’eau sur les argiles dites gonflantes
I – 5. Les inhibiteurs de gonflement des argiles
I – 6. Synthèse et questions ouvertes : choix des molécules organiques
Chapitre II. Matériaux et méthodes
II – 1. Les minéraux argileux et le sable : présentation et caractéristiques
II – 2. Les molécules organiques testés sur les minéraux argileux
II – 3. Techniques expérimentales
II – 4. Tableaux récapitulatifs des essais
Chapitre III. Comparaison des performances de différentes molécules organiques sur l’inhibition du gonflement de la montmorillonite
III – 1. Impact des molécules sur la distance basale et le gonflement de la montmorillonite
III – 2. Impact des molécules organiques sur le gonflement macroscopique de la montmorillonite
III – 3. Corrélations entre le gonflement de la montmorillonite aux échelles macroscopiques et cristallines et les propriétés des molécules organiques
III – 4. Impact des molécules organiques sur la résistance à la compression
Chapitre IV. Etude du phénomène de sorption des alkyl--diamines sur la montmorillonite, l’illite et la kaolinite
IV – 1. Utilisation de la sorption d’eau ou d’azote sur les minéraux argileux non traités pour caractériser leur surface
IV – 2. Etude de la sorption des alkyl--diamines sur la montmorillonite
IV – 3. Etude de la sorption de l’eau sur la montmorillonite traitée aux alkyl--diamines et son impact sur le gonflement de l’argile
IV – 4. L’octan-1,8-diamine (DC8) sur l’illite et la kaolinite
IV – 5. Configuration des molécules adsorbées sur la montmorillonite
Chapitre V. Caractérisation de la mouillabilité de la surface de la montmorillonite et évolution après traitement
V – 1. Vérification des paramètres d’analyse et répétabilité de la mesure
V – 2. Résultats sur les films argileux
V – 3. Résultats sur les pastilles d’argiles
V – 4. Lien entre tension superficielle des solutions, modification de la surface et réduction du gonflement de la montmorillonite ?
Conclusion générale
Perspectives
Tables des figures, tableaux et équations
Tableaux
Figures
Équations
Bibliographie

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