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Recommandations pour l’évaluation des troubles en LTLE
Dans le cadre de l’épilepsie temporale gauche pharmaco-résistante, les recommandations d’évaluation neuropsychologique pour les troubles cognitifs incitent à considérer le patient dans son ensemble, dans son contexte social et culturel large. L’évaluation des capacités à proprement parler concerne alors le dépistage systématique des troubles de l’humeur, du comportement et de la cognition à travers l’évaluation de la mémoire à long terme, à court terme et de travail ; de l’attention ; des fonctions exécutives ; de la vitesse de traitement et des capacités motrices ; du langage ; du traitement visuel ; et des praxies (Wilson & al, 2015 ; Brissart & al, 2019). Les batteries de tests fréquemment utilisées sont donc des échelles d’évaluation de la mémoire (MEM : Weschler Memory Scale), de l’intelligence globale (WAIS : Weschler Adult Intelligence Scale), ainsi que des tests complémentaires concernant l’attention et les capacités d’inhibition et de planification : le Stroop (Albaret & Migliore, 1999) ; le Trail Making Test (1944) ; la Figure de Rey (Rey & Osterrieth, 1944)….
En orthophonie, les recommandations préconisent d’évaluer individuellement les différentes fonctions du langage, à savoir : la parole spontanée, les capacités discursives, la dénomination, la compréhension auditive, la lecture, l’écriture et la répétition (Bartha-Doering & Trinka, 2014). Dans le but d’obtenir un profil linguistique fiable et complet, une étude de Crerar de 2004 insiste également sur l’importance de prendre en compte la chronométrie lors de la passation des épreuves, afin de ne pas négliger l’ampleur d’une déficience fonctionnelle résiduelle, si les résultats métalinguistiques sont bons en terme de précision. Cependant, à ce jour, il n’existe aucune recommandation internationale préconisant l’utilisation d’un test adapté à l’évaluation langagière des patients LTLE. De ce fait, le test de dénomination orale d’images avec ébauche phonétique, le Boston Naming Test (Kaplan & al, 1983), est le plus utilisé en post-opératoire (Busch & al., 2016), au détriment des autres aspects du langage, rarement évalués en totalité. Les francophones utilisent classiquement le Test de Dénomination Orale d’images DO80 (Deloche & Hannequin, 1997) qui est une version plus complète du Boston Naming Test. Cette évaluation post-opératoire est donc non seulement incomplète, mais présente également d’autres limites, comme le fait par exemple que les items ne soient pas équilibrés en fonction de leur fréquence ou de leur longueur, et est donc aujourd’hui considérée comme obsolète (Rousset & Gatignol, 2014).
Lien déficit linguistique – cognitif
En résumé, les patients LTLE peuvent présenter des troubles à la fois cognitifs et langagiers, et plus particulièrement des troubles de la mémoire, et de la dénomination.
Si l’on considère les modèles théoriques de Baddeley, concernant la mémoire de travail (Figure 4), et de Caramazza, sur le traitement lexical (Figure 3), on se rend compte que les systèmes de mémoires sémantique et épisodique, particulièrement atteintes en LTLE (Bartha-Doering & Trinka, 2014), interviennent à la fois dans la tâche de dénomination et dans la mémoire de travail, suggérant de possibles interactions dans les compétences testées.
Evaluation langagière – BETL
La Batterie d’Evaluation des Troubles Lexicaux (Tran et Godefroy, 2011) a été élaborée à partir du modèle du traitement lexical d’Hillis et Caramazza. Elle permet de mettre en évidence un trouble lexico-phonologique ou bien lexico-sémantique à travers 8 épreuves informatisées (dénomination orale d’images, désignation d’images, appariement sémantique, lecture à haute voix, désignation de mots écrits, appariement de mots écrits, dénomination écrite d’images, questionnaire sémantique), chronométrées et étalonnées en fonction de l’âge et du niveau socio-culturel des patients.
Chaque épreuve tourne autour de 54 items cibles qui ont été sélectionnés en fonction de 3 critères : leur fréquence, leur longueur et leur catégorie sémantique (manufacturé vs naturel).
La BETL comprend donc :
– 18 mots de haute fréquence, 18 mots de fréquence moyenne et 18 mots de fréquence basse.
– 18 mots de 1 syllabe, 18 mots de 2 syllabes et 18 mots de 3 syllabes.
– 27 mots de catégories naturelles (animaux, végétaux, parties du corps) et 27 mots correspondant à des objets manufacturés.
Les patients inclus dans notre étude ont passé la totalité de ces épreuves ; cependant, dans le but de vérifier nos hypothèses, nous nous sommes intéressés plus particulièrement à leurs résultats aux épreuves de dénomination orale et écrite.
Pour la dénomination orale, les items sont présentés un à un sur l’écran, sous forme de dessin, dans un ordre pseudo-aléatoire (permettant d’équilibrer les différentes variables linguistiques tout au long de la tâche), et avec une durée d’exposition non limitée, terminée par la réponse orale du patient. En fonction de cette réponse, l’examinateur appuie sur une des deux touches réponse (une pour la réponse attendue et l’autre pour les autres réponses) ce qui permet d’enregistrer automatiquement le résultat ainsi que le temps de réponse.
La présentation des résultats de cette épreuve permet une analyse quantitative du score et du temps obtenus, en les comparant aux seuils pathologiques (Tableau 2) ; mais elle permet également une analyse qualitative des erreurs observées, grâce à un tableau récapitulant les items selon leur fréquence, leur longueur et leur catégorie sémantique (Tableau 3).
Dans cette étude, nous avons établi un score d’effet de fréquence lexicale en calculant un score différentiel entre les mots les plus fréquents et les mots les moins fréquents (score mots haute fréquence-score mots basse fréquence). Nous avons également établi un score d’effet de longueur en établissant un score différentiel entre les mots les moins longs et les mots les plus longs (score mots 1 syllabe-score mots 3 syllabes).
Évaluation de l’intelligence globale – WAIS-III
La Wechsler Adult Intelligence Scale a été mise au point par Wechsler, qui ne concevait pas l’intelligence comme purement cognitive, mais bien comme une faculté générale qui englobe le raisonnement et l’adaptation à l’environnement dans des domaines très divers. Ainsi, la 3ème version de son échelle d’intelligence (1997), propose des tests variés qui permettent d’obtenir un QI total (QIT), mais également un QI verbal (QIV) et un QI de performance (QIP) dont les moyennes sont de 100 ± 15 ET.
Le QIV est obtenu à partir des résultats aux épreuves de vocabulaire, similitudes, information, compréhension, arithmétique, séquences chiffres-lettres et mémoire des chiffres.
Le QIP quant à lui est calculé d’après les scores aux épreuves de code, cube, matrices, symboles, complètement d’images, arrangement d’images et assemblage d’objets. (Figure 5)
Les résultats bruts de ces subtests sont transformés en notes standards, prenant en compte l’âge et le niveau socio-culturel des patients, et dont la moyenne se situe autour de 10 ± 3 ET.
Mise en relation des données langagières et cognitives
Parmi l’ensemble des données récoltées, nous avons sélectionné les résultats des subtests pré- détaillés, pertinents pour vérifier nos hypothèses, soit parce qu’ils représentaient des mesures spécifiques à la mémoire de travail (subtests du BNP), de la vitesse de traitement (tests chronométrés du BNP et du BO), soit parce qu’ils étaient susceptibles de refléter sur le plan langagier à la fois le fonctionnement sémantique (recherche d’un effet de fréquence) et phonologique (recherche d’un effet de longueur) (variables de dénomination du BO). Ces résultats ont été regroupés dans des tableaux facilitant leur lecture et leur analyse (Annexes 1 et 2), et dont les premières lignes sont présentées dans les tableaux 5 et 6.
Matrice de corrélation entre les données du BNP et du BO
La Figure 8 présente la matrice de corrélation établie entre les données du bilan neuropsychologique (BNP) et du bilan orthophonique (BO) retenues pour cette étude. Cette exploration des données met en évidence les relations entre les différentes variables neuropsychologiques et linguistiques ainsi que les critères d’âge et de niveau socio-culturel des patients, qui sont susceptibles d’avoir un impact sur les différents scores analysés.
Dans cette matrice, plus la surface des points de corrélation est grande et plus la couleur est contrastée, plus la corrélation est forte. La couleur bleue représente une corrélation positive (les deux variables augmentent conjointement) et la couleur rouge, une corrélation négative (lorsqu’une variable augmente, l’autre diminue).
ATTMDTMEM : quotient attention – mémoire de travail de la MEM ; LCMEM : subtest séquence lettres-chiffres de la MEM ; VSMEM : subtest mémoire spatiale de la MEM ; empWAIS : épreuve de mémoire de chiffres de la WAIS ; LCWAIS : épreuve de séquence lettres-chiffres de la WAIS ; tpsBETL : temps de l’épreuve de dénomination orale de la BETL ; BETLtotal : épreuve de dénomination orale de la BETL ; Efffreq : score d’effet de fréquence lexicale ; Efflong : score d’effet de longueur phonologique.
La première observation que l’on peut faire grâce à cette figure, est la nette distinction de deux blocs de corrélations qui correspondent respectivement aux scores issus du BNP et à ceux issus du BO. Cette distinction entre les deux types d’évaluation, alors même que les épreuves sont fortement corrélées entre elles au sein d’un même bilan, confirme la distinction des différents domaines testés entre le BNP et le BO, malgré le fait que certaines habiletés mesurées par le BNP reposent sur le langage, et que le langage ne puisse fonctionner indépendamment des autres fonctions cognitives testées par le BNP.
L’intérêt de cette matrice est donc de pouvoir sélectionner les points de corrélation pertinents entre ces deux domaines afin d’analyser statistiquement leur niveau de corrélation.
On note ainsi de fortes relations entre les scores :
– ATTMDTMEM et BETLtotal (positif).
– ATTMDTMEM et Efffreq (négatif).
– LCMEM et Efffreq (négatif).
– VSMEM et BETLtotal (positif).
– VSMEM et Efffreq (négatif).
On note également une forte liaison entre les critères « âge » et certains scores. L’effet du niveau socio-culturel (NSC), n’apparaît pas sur la matrice de corrélation. Or les effets de l’âge et du NSC sont connus en psychométrie et sont la plupart du temps pris en compte dans la cotation des épreuves. C’est notamment le cas de la WAIS, de la MEM et de la BETL. L’impact de ces effets a été contrôlé dans les tests statistiques qui sont appliqués par la suite.
Analyse de significativité des corrélations observées
Parmi les corrélations observées au sein de la matrice de corrélation, la variable LCMEM n’a pas été retenue dans les études statistiques car elle n’était corrélée qu’à une seule variable du bilan de langage, contrairement aux variables ATTMDT et VSMEM. Une analyse statistique a été appliquée pour étudier l’effet des variables neuropsychologiques et démographiques sur les variables de dénominati
on orale en utilisant des modèles de régression linéaire multiples. Cependant, après vérification des corrélations entre âge, niveau socio-culturel et les valeurs de la BETL, il est apparu que ni BETLTotal, ni TpsBETL n’étaient corrélés à l’âge (avec respectivement p=0.2976 et p=0.2151). En revanche, les corrélations entre le score total de la BETL et le temps de passation sont significativement influencés par le NSC (respectivement p=0.01672 et 0.00558). L’âge n’est donc pas une variable qui influence les résultats de notre échantillon, contrairement au NSC qui est introduit comme co-variable dans les modèles de régression linéaire qui suivent. Les valeurs de p obtenues sont répertoriées dans le Tableau 7. Le seuil de significativité est fixé à p<0.05.
corrélation significative des autres variables neuropsychologiques sur les scores de langage, même si la corrélation BETLtotal – VSMEM est proche du seuil de significativité.
Le Tableau 8 présente les résultats de l’étude de corrélation entre les notes standards du subtest de vitesse de traitement graphique du BNP (épreuve des codes) et du temps de dénomination écrite du BO TpsBETL (épreuve également chronométrée). Une analyse de variance a été réalisée entre le score à la BETL et la réussite aux Codes.
La note standard du subtest Codes tenant compte de l’âge et du NSC alors que le temps de dénomination écrite du BO est une donnée brute, une régression linéaire multiple tenant compte à la fois de l’influence du score Codes, de l’âge et du NSC sur le temps de dénomination écrite à la BETL a également été réalisée de manière complémentaire et est présentée dans le Tableau 9.
Interprétation des résultats
La matrice de corrélation exploratoire des données du BNP et du BO nous a tout d’abord permis de différencier deux blocs de corrélations correspondant aux deux types d’évaluations et aux domaines spécifiques qu’elles évaluent. Cette nette distinction souligne bien l’intérêt de cette double évaluation lors de l’exploration cognitive des patients, et met en évidence l’importance de pratiquer un bilan orthophonique complet, et permettant une analyse fine du niveau de déficit langagier. L’utilisation actuellement la plus fréquente du Test de dénomination Orale d’images DO80 (Deloche et Hannequin) ne nous semble pas pouvoir répondre à ce niveau d’exigence. Nos premières hypothèses prévoyaient une implication de la mémoire de travail sur les éventuels effets de fréquence lexicale et/ou de longueur phonologique en dénomination orale. L’analyse statistique n’a pas permis de confirmer un tel lien malgré l’observation de corrélations dans la matrice entre l’effet de fréquence (Efffreq) et le quotient de mémoire de travail (ATTMDTMEM), ainsi que les subtests (LCMEM et VSMEM). On peut supposer que ces résultats étaient trop hétérogènes ou que l’effectif n’était pas suffisant pour pouvoir faire apparaître une significativité statistique. En revanche, l’analyse statistique des corrélations a mis en évidence une influence significative du score visuo-spatial de la MEM (VSMEM) sur le temps de réponse à la BETL, ce qui pourrait se traduire par une influence de la mémoire de travail sur la vitesse de dénomination orale. Il est possible que ce résultat s’explique en partie par la sensibilité des épreuves en question. Les performances en mémoire visuo-spatiale et en rapidité de dénomination sont probablement des mesures plus exigeantes et sensibles des domaines testés.
Bien qu’un lien entre mémoire de travail et dénomination orale ait été mis en évidence, nos hypothèses 1 et 2 ne sont donc pas validées.
Une seconde étude a été menée sur la variance des résultats à partir des données de vitesse de traitement graphique du BNP (épreuve des codes) et du temps de dénomination écrite du BO TpsBETL (épreuve chronométrée). Le résultat de cette analyse montre une corrélation significative entre les deux épreuves (p=0.03423).
Cependant, les résultats de l’épreuve de codes exprimés en notes standards, tiennent compte de l’âge et du niveau socio-culturel des patients, tandis que TpsBETL est une valeur brute. Ces facteurs étant susceptibles d’avoir un effet sur les performances, nous avons inclus dans une seconde analyse de régression linaire multiple les critères âge et NSC des patients. Le résultat de cette corrélation tend vers la significativité (p=0.06452). Ces résultats sont plutôt en faveur de nos hypothèses, et supposent qu’il pourrait exister un lien entre les capacités attentionnelles et la vitesse de traitement lexical, mais ce résultat devrait être validé par d’autres analyses pour pouvoir confirmer un tel lien.
Variables neuropsychologiques et linguistiques
Les différentes épreuves étudiées dans la matrice de corrélation ont été choisies en fonction des différents domaines cognitifs qu’elles évaluent et en lien avec nos hypothèses. Dans le BNP, nous avons ainsi conservé tous les scores concernant la mémoire de travail : séquence lettres chiffres (LCMEM) et mémoire spatiale (VSMEM) de la MEM qui constituent le quotient attention et mémoire de travail (ATTMDTMEM), séquence lettres-chiffres (LCWAIS) et empan de chiffre (empWAIS). Dans le BO, les scores de réussite (BETLtotal) et de temps (TpsBETL) à l’épreuve de dénomination orale ont été retenus en référence au niveau de déficit des patients et aux étapes du modèle du traitement lexical de Caramazza et Hillis (1990) en lien avec les processus mnésiques. Le fait que certaines épreuves aient été plus sensibles que d’autres lors de l’analyse peut s’expliquer de la manière suivante : l’épreuve de dénomination orale de la BETL est présentée uniquement en modalité visuelle avec une image qui apparaît sur l’écran et que le patient doit dénommer. Or, les épreuves de la WAIS sont toutes deux présentées en modalité uniquement auditive, tout comme l’épreuve de séquence lettres-chiffres de la MEM. L’épreuve de mémoire spatiale VSMEM, corrélée significativement au temps de dénomination orale TpsBETL (p=0.01986), est, quant à elle, présentée en modalité visuelle.
Le quotient ATTMDTMEM qui regroupe le score de l’épreuve LCMEM et celui de l’épreuve VSMEM, est également corrélé aux variables de la BETL, sans doute par influence du score VSMEM sur le score total ATTMDTMEM.
Enfin, seul le critère de temps de dénomination (TpsBETL) est influencé de manière significative par les variables neuropsychologiques. La sensibilité de cette mesure pourrait également intervenir et ce critère d’évaluation nous semble déterminant dans l’évaluation des patients LTLE. En effet, les patients peuvent parfois ressentir un manque du mot puis réussir à le produire après un certain laps de temps. Cette difficulté peut être interprétée par le clinicien comme un authentique trouble lexical mais également comme un manque de disponibilité lexicale lié à un trouble de fonctions exécutives à condition que la chronométrie soit prise en compte. Crerar (2004) rappelle que « si certains sujets sont capables d’utiliser leurs compétences métalinguistiques pour retrouver des scores de précision normaux, il est peu probable que le temps nécessaire soit ramené dans la fourchette de normalité. ». Cette observation nous encourage à utiliser des épreuves chronométrées du langage comme le permet la BETL, ce qui peut être très important pour mettre en évidence une déficience fonctionnelle résiduelle, masquée par de bons scores de réussite (Crerar, 2004). La sensibilité accrue de l’épreuve de dénomination sur définition orale, telle qu’encouragée par Hamberger et al. (1999, 2003), pourrait également s’expliquer par une sollicitation plus importante en mémoire de travail et son intérêt dans l’évaluation reste à discuter (Da-Fonseca and al., 2009). Cependant, certains domaines restent non explorés par ce bilan comme par exemple les capacités de répétition de phrases. Or cet aspect du langage est un bon indicatif de mémoire verbale (Majerus, 2010) et son évaluation est d’ailleurs préconisée chez les patients LTLE (Bartha-Doering & Trinka, 2014). S’il avait été évalué, cet aspect aurait pu être étudié dans notre travail.
Limites de l’étude
Une première limite de l’étude concerne l’effectif de notre cohorte. L’évaluation complète et homogène des fonctions langagières des patients LTLE étant peu répandue, nous n’avons pu étudier qu’une cohorte de patients relativement réduite, au sein même de laquelle de nombreux scores ou épreuves étaient manquants (Annexes 1 et 2). Si tous les patients de l’étude ont normalement dû passer tous les tests, certaines passations ont pu être écourtées du fait de la fatigabilité des patients LTLE, induisant des données manquantes. Par ailleurs, certaines évaluations dans un domaine, non contemporaines à l’évaluation de l’autre domaine n’ont pas été retenues dans nos analyses. Nous pouvons imaginer qu’avec un plus grand nombre de patients et de données, d’autres effets auraient pu être mis en évidence en rendant anecdotiques les résultats non homogènes.
Une autre limite de cette étude est la prise en compte de la temporalité des évaluations. En effet, pour notre étude de corrélation, nous avons choisi pour chaque patient les bilans neuropsychologique et orthophonique les plus proches dans le temps. Cependant, la durée de prise en charge de certains patients étant très longue, tous les bilans ne sont pas parfaitement contemporains, avec parfois des écarts de plusieurs années entre les deux évaluations. De plus, la chirurgie intervenait parfois entre les deux dates, ce qui entraine un biais dans les corrélations puisque les résultats cognitifs comme langagiers peuvent être impactés par cette chirurgie (Helmsteadter & al, 2003 ; Hermann & al., 2006 ; Busch & al., 2016). Enfin, tous les patients n’ont pas subi les évaluations au même moment au cours de leur prise en charge ce qui peut également introduire de l’hétérogéneité au sein du groupe et des biais.
Il aurait été intéressant de proposer une analyse par sous-groupes, cependant le faible effectif dont nous disposions ne nous l’a pas permis.
Perspectives
Une étude similaire portant sur un effectif plus important semble intéressante afin de mieux comprendre les interactions entre les domaines cognitifs et langagiers chez les patients présentant une épilepsie affectant le langage. Cependant, d’autres facteurs pourraient être à considérer également.
Notre étude a notamment mis en évidence le rôle notable que joue le niveau socio-culturel des patients sur leurs résultats. Cet effet avait déjà été remarqué par Wang et al., (2019). Ils soulignent par ailleurs l’importance de la fréquence des crises d’épilepsie dont le contrôle constitue un facteur de protection des fonctions cognitives. L’influence de l’âge du début des crises (Busch and al., 2016, 2018 ; Allone & al., 2019) et du traitement anti-épileptique (Wang et al., 2019 ; Subramaniam et al., 2020) devraient également être prise en compte. Une influence de l’état psychologique des patients (dépression, anxiété) sur les fonctions cognitives est également supposé. Cet aspect est actuellement débattu dans la littérature (Bartha-Doering & Trinka, 2014 ; Wang & al., 2019 ; Miller & al., 2019). Il semble d’après Miller & al. que si la dépression n’est pas corrélée au handicap linguistique au niveau des scores, elle joue tout de même un rôle important et aggravant au niveau de sa perception. Là encore, nous soulignons l’intérêt d’un bilan orthophonique complet pour l’évaluation de la sévérité des troubles du langage, mais également de la plainte en utilisant les outils les plus adaptés aux patients LTLE. Bien que la communauté médicale plaide actuellement en faveur d’une démarche standardisée d’évaluation des troubles cognitifs dans l’épilepsie (Baxendale et al;, 2019; Conradi et al., 2020), encore trop peu d’auteurs soulignent l’intérêt d’explorer les différentes dimensions des compétences sémantiques et langagières (Hermann et al., 2017; Baumgartner and al., 2019).
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Table des matières
I. Introduction
1.Généralités
2. Troubles cognitifs
3. Troubles du langage
4.Recommandations pour l ‘évaluation des troubles en LTLE
5. Lien déficit linguistique – cognitif
6.Hypothèses
II. Méthodologie
1. Participants
2. Évaluation langagière – BETL
3. Évaluation de l’intelligence globale – WAIS III
4. Évaluation mnésique – MEM III
5. Mise en relation des données langagières et cognitives
6. Analyse des résultats
III. Résultats
1.Matrice de corrélation entre les données du BNP et du BO
2. Analyse de significativité des corrélations observées
IV. Discussion
1. Interprétation des résultats
2.Variables neuropsychologiques et linguistiques
3. Limites de l’étude
4. Perspectives
V. Conclusion
Références bibliographiques
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