Recherche d’inhibiteurs de la superoxyde dismutase à partir de substances naturelles

Stress oxydatif et régulateurs cellulaires

    Dans les conditions physiologiques, un équilibre existe entre la génération d’espèces réactives de l’oxygène (ERO) et les systèmes de défense antioxydants (voir figure 1). Cependant, de nombreuses causes peuvent rompre cet équilibre et être à l’origine d’une augmentation du taux d’ERO dans la cellule. Ce processus est appelé « stress oxydatif » ou encore « stress oxydant ». Les ERO sont de puissants oxydants qui vont induire dans la cellule des dommages au niveau des macromolécules, être responsables de la peroxydation lipidique, de l’apparition d’une porosité membranaire et de la cytolyse cellulaire, ainsi que d’une diminution du métabolisme protéique et de l’oxydation des nucléotides. La persistance du stress oxydant peut être liée à l’apparition de maladies de vieillissement telles que les maladies neurodégénératives et certains cancers. Selon le niveau des dommages générés, la cellule peut s’engager soit vers un processus de réparation soit vers la mort cellulaire. Nous présenterons successivement l’oxygène et ses dérivés réactifs puis leurs effets physiopathologiques. Nous étudierons les régulateurs cellulaires du stress oxydatif et une attention particulière sera portée à une enzyme majeure du maintien de l’homéostasie cellulaire : la superoxyde dismutase (SOD).

L’oxygène

   L’oxygène est le 16e élément de la classification périodique. Dans son état fondamental, l’3O2 à l’état triplet est paramagnétique. Il ne peut donc pas réagir avec des espèces diamagnétiques sans que soit levée l’interdiction de spin. En revanche, il est admis que ses dérivés qui le peuvent. In vivo, cette barrière est levée grâce à des enzymes telles que les oxydases ou les oxygénases. Toxique à des concentrations de 40% (Joenje 1989), l’3O2 n’est cependant pas délétère aux concentrations physiologiques. Sa toxicité est liée à sa capacité à générer, après réduction, des espèces radicalaires ainsi que des espèces actives ne possédant pas d’électron non apparié mais au fort pouvoir oxydant (voir figure2).

Lieu de production de l’anion superoxyde

   L’anion superoxyde O2.- est produit majoritairement par les enzymes de la chaîne respiratoire mitochondriale et du réticulum endoplasmique (détoxification de xénobiotiques par le cytochrome P450), et de façon plus marginale, par de nombreuses autres enzymes, comme la xanthine oxydase, l’indoléamine dioxygénase, la tryptophane dioxygénase et l’aldéhyde oxydase (Halliwell 2006), NADPH oxydases (Maghazl et al Free rad Biol med 2012, 53, 1903-1918). Dans la mitochondrie, il est un sous-produit de la phosphorylation oxidative (Cadenas and Davies 2000a). La chaîne respiratoire mitochondriale est composée d’une série de catalyseurs rédox localisés dans la membrane interne de la mitochondrie. Leurs potentiels rédox va de -320 mV à +380 mV. Cependant au cours des différentes réactions d’oxydo-réduction, qui ont lieu au niveau des crêtes mitochondriales, 2 à 5% d’électrons s’échappent à différents niveaux de la chaine respiratoire conduisant à la formation d’ERO et d’anion superoxyde.

Actions du peroxyde d’hydrogène, toxicité et détoxification

   Dans le foie et les bactéries, la concentration du peroxyde d’hydrogène est d’environ 10-8 M dans les conditions normales (Chance, Sies, and Boveris 1979). Le rapport [H2O2]/ [O2.-] dans une cellule normale est de 103 . L’H2O2 est une espèce non radicalaire, peu réactive, mais qui diffuse très bien à travers les membranes (Nordberg and Arnér 2001). Il peut donc, à distance de son lieu de production, former via la réaction de Fenton et en présence de métaux, en particulier l’ion ferreux, le radical hydroxyle (OH.). Le fer étant abondant dans l’organisme et pouvant provenir de diverses sources (ion ferreux, fer complexé, hème), un arsenal enzymatique est capable de détoxifier l’H2O2 : il s’agit en premier lieu de la catalase (voir figure 4), mais aussi de la glutathion peroxydase, de la thioréductase-2, ou encore de la peroxyrédoxine-3. Il faut aussi citer les peroxydases, ces enzymes hémiques qui, bien que d’origines polygéniques, ont en commun la même activité enzymatique vis-à-vis de l’H2O2 (Furtmüller et al. 2006).

L’hypoxie et l’ischémie tissulaire

   Quand un organe ou un tissu n’est plus oxygéné, c’est-à-dire quand la concentration en oxygène dissous est inférieure à 3µM, apparait le phénomène d’hypoxie. Si la concentration en oxygène continue à diminuer, le tissu se trouve alors en anoxie. Pendant cette phase d’anoxie, la chaîne respiratoire mitochondriale ne peut plus fonctionner et la production d’ATP s’arrête. Lors de la ré-oxygénation, les cytochromes de la chaîne respiratoire ne peuvent se réactiver immédiatement, contrairement à l’ubiquinone. Les électrons de l’ubiquinone ne sont alors plus pris en charge par les cytochromes et l’ubiquinone réduit alors l’O2 en O2.- (Chandel and Budinger 2007; Dirmeier et al. 2002; Jezek and Hlavatá 2005; Lesnefsky and Hoppel 2003). L’ATP venant à manquer, les pompes ATP-dépendantes ne fonctionnent plus. Il y a alors une hypercalcémie intra-cellulaire qui active la xanthine oxydase via une protéase, ce qui aboutit à la formation d’une quantité d’O2.- exacerbée : Xanthine + Xanthine oxydase  Xanthine oxydée + O2.- Ce mécanisme provoque in fine la nécrose tissulaire.

Peroxydation lipidique

   La peroxydation lipidique (ou lipoperoxydation) est l’oxydation des acides gras polyinsaturés ou des liopoprotéines par les radicaux libres. Cette réaction se déroule en trois étapes comprenant l’initiation la propagation et la terminaison (Gray J, J. American Oil Chemists’.Society, 1978, 55, 539-546). Le mécanisme d’oxydation met en jeu le radical hydroxyle, qui va arracher le proton d’un acide gras et qui se retrouve alors sous forme radicalaire. Afin de combler le manque d’électron, l’acide gras radicalaire (radical Alkyle) va réagir avec une molécule de dioxygène, formant une espèce réactive de l’oxygène le radical peroxyl. Du fait de son instabilité le radical peroxyl va à son tour réagir avec une autre double liaison, c’est le phénomène de propagation radicalaire (voir figure 7). Au cours de cette phase le radical peroxyl lipidique peut auto-réagir pour former des peroxydes cycliques qui seront rapidement transformés en dialdéhyde malonique (MDA). Cette réaction en chaîne se poursuivra jusqu’à ce que deux composés radicalaires réagissent entre eux pour former des composés non radicalaires (Gray 1978). Cette dernière phase peut être catalysée par certains anti-oxydants (Sachdev and Davies 2008).

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Table des matières

I. Figures
II. Tableaux
III. Photographies
LISTE DES SIGLES ET ABRÉVIATIONS
INTRODUCTION
Chapitre I : RAPPELS BIBLIOGRAPHIQUES
IV. Stress oxydatif et régulateurs cellulaires
V. L’oxygène et les radicaux libres
V.1 L’oxygène
V.2 L’anion superoxyde : O2-
V.2.1 Lieu de production de l’anion superoxyde
V.2.2 Les propriétés de l’anion superoxyde
V.3 Le peroxyde d’hydrogène (H2O2)
V.3.1 Formation du peroxyde d’hydrogène
V.3.2 Actions du peroxyde d’hydrogène, toxicité et détoxification
V.4 Le radical hydroxyle (OH.)
V.4.1 Formation du radical hydroxyle
V.4.2 Mode d’action du radical hydroxyle
V.5 Les dérivés azotés de l’oxygène
VI. Rôles physiologiques du stress oxydant
VI.1 Rôles physiologiques
VI.2 Causes du stress oxydant
VI.2.1 Causes physiopathologiques
VI.3 Les effets du stress oxydant sur les macromolécules biologiques
VI.3.1 Peroxydation lipidique
VI.3.2 Oxydation des protéines
VI.3.3 Oxydation de la molécule d’ADN
VI.3.4 Conséquences physiopathologiques des dommages sur les cibles biologiques
VII. Les régulateurs cellulaires du stress oxydant
VII.1 Systèmes enzymatiques
VII.1.1 Les glutathion peroxydases (GPX)
VII.1.2 La catalase
VII.1.3 Les thiorédoxines
VII.2 Le système antioxydant non enzymatique
VII.2.1 La vitamine E
VII.2.2 La vitamine C
VIII. Molécules antioxydantes exogènes
VIII.1 Tanins et flavonoïdes
VIII.2 β-carotène
IX. Les superoxydes dismutases
IX.1 Introduction
X. La SOD 1 ou CuZnSOD
X.1 Généralités
X.2 Localisation cellulaire
X.3 Structure générale
X.3.1 Structure du site actif
X.3.2 Mécanisme réactionnel
X.4 La SOD 2 ou MnSOD
X.5 La SOD 3 ou FeSOD
XI. SOD1 et pathologie
XI.1 Cancer et SOD 1
XI.1.1 La SOD 1 : une cible pour le traitement du cancer
XI.1.2 Genèse du cancer
XI.1.3 Résistance au Cisplatine
XI.2 Sur-expression de la SOD 1
XI.3 SOD et maladie d’Alzheimer
XI.4 SOD et syndrome de Down
XI.5 SOD et Sclérose Latérale Amyotrophique (SLA)
XII. Pourquoi développer des inhibiteurs de la SOD ?
XIII. Les inhibiteurs de la SOD
XIII.1 Les inhibiteurs synthétiques
XIII.1.1 Inhibiteur synthétique sélectif
XIII.1.2 Inhibiteurs synthétiques non sélectifs
XIII.2 Les inhibiteurs naturels
XIII.2.1 Les furocoumarines
XIII.2.2 Acide aristolochique
XIII.2.3 Flavonoïdes
XIII.2.4 Azoture, Cyanure, H2O2
XIV. Conclusion
Chapitre II : EXTRAITS D’ENDOPHYTES ÉTUDIÉS
I. Généralités sur les endophytes
I.1 Mode de colonisation
I.2 Interaction hôte-endophyte
I.3 Production de molécules bioactives
II. Etude des extraits
II.1 Caractérisation spectrale des extraits
II.1.1 Chromatographie sur couche mince des 197 souches
II.1.2 Spectre UV-Visible
II.2 Variabilité des cultures
III. Conclusion
Chapitre III : ETUDE DES EXTRAITS EN LC-HRMS
I. Introduction
II. Analyse en masse
III. Résultats : identification de molécules d’intérêt
III.1 Recherche de furocoumarines par leur fragmentation MSE, obtenue par le QTOF
III.1.1 Alignement des pics obtenus
III.1.2 Vérification des identifications grâce à la fragmentation MSE
III.1.3 Conclusion
III.2 Vérification des identifications grâce aux spectres UV, obtenue par l’OrbiTrap
III.2.1 Alignement des pics et identifications potentielles
III.2.2 Vérification des identifications par profils UV
III.3 Réseaux moléculaires : identification potentielle de nouvelles furocoumarines
IV. Conclusion et perspectives
Chapitre IV : MISE AU POINT D’UN TEST ENZYMATIQUE DE DÉTECTION DE L’ACTIVITÉ DE LA SOD
I. Introduction
II. Mise au point des tests
II.1 Test au Cytochrome C
II.1.1 Principe et mise au point du test
II.2 Test au WST-1
II.2.1 Principe du test au WST-1
II.2.2 Problèmes rencontrés avec le test au WST
II.3 Test au Mito SOX™ Red
II.3.1 Principe et mise au point du test au Mito SOX™ Red
II.3.2 Problèmes rencontrés avec le test au MitoSOX™ Red
II.4 Test au pyrogallol
II.4.1 Principe du test
II.4.2 Mise au point du test au pyrogallol
II.4.3 Obtention des résultats au pyrogallol
III. Activités biologiques des extraits
III.1 Activités biologiques des extraits d’Ormenis
III.1.1 Introduction
III.1.2 Résultats des différents tests obtenus sur les extraits
III.2 Analyse des résultats obtenus avec le test au pyrogallol en micro plaques sur les extraits d’endophytes
III.2.1 Screening rapide des 86 souches d’endophytes et discussion
III.2.2 Résultats obtenus sur les souches d’intérêt re-cultivées et discussion
III.2.3 Résultats obtenus sur les souches d’intérêt re-cultivées et testées à 160 µg/mL et discussion
IV. Conclusion
V. Perspectives
V.1.1 Test au pyrogallol en cuve de 2 mL
V.1.2 Recherche d’adduits de la SOD par LC-MS
CONCLUSION GÉNÉRALE
CHAPITRE V : MATÉRIEL ET MÉTHODE
I. Matériel et méthode du chapitre II : EXTRAITS ÉTUDIÉS
I.1.1 Culture des endophytes
I.1.2 Repiquage
I.1.3 Conservation des souches
I.1.4 Préparation des extraits
I.1.5 Méthode HPLC pour l’étude de la variabilité des endophytes
I.1.6 CCM
II. Matériel et Méthode du chapitre III: Étude des extraits en LC-HRMS
II.1 Profil LC-HRMS des extraits
II.1.1 Appareillage
II.2 Recueil et analyse des données
II.2.1 Alignement des pics des pools des 8 souches par MZmine
II.2.2 Alignement des pics des pools des 8 souches par MS-DIAL
II.3 Identification de molécules d’intérêt
II.3.1 Par MS-FINDER
II.3.2 Par CFM-id
II.1 Vérification de l’identité des molécules par UV
II.1.1 Profils UHPLC-DAD-FTMS-MS/MS des extraits
II.1.2 Alignement des pics des pools des 8 souches par MZmine
II.1.3 Recherche des profils UV des molécules identifiées dans MZmine dans Xcalibur
II.2 Réseaux moléculaires
II.2.1 GNPS
II.2.2 Cytoscape
III. Matériel et Méthode du chapitre IV: Mise au point d’un test enzymatique de détection de l’activité de la SOD
III.1 Protocole d’extraction des plantes Ormenis africana et Ormenis scariosa
III.2 Mise au point du test xanthine/xanthine-oxydase
III.3 Mise au point du test WST
III.4 Mise au point du test au MitoSOXTM Red
III.5 Mise au point du test au pyrogallol
III.5.1 Conditions générales du test au pyrogallol
III.5.2 Protocole utilisé pour déterminer l’activité des 86 souches du screening rapide
III.5.3 Protocole utilisé pour tester l’activité des 8 souches d’intérêt re cultivées
III.5.4 Protocole utilisé pour tester l’activité des pools des 8 souches d’intérêt recultivées, de concentration finale 160 µg/mL
BIBLIOGRAPHIE GÉNÉRALE

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