Rapport des concepts de science et de métaphysique chez Kant

ANALYSE CONCEPTUELLE DES NOTIONS DE SCIENCE ET DE METAPHYSIQUE

L’étude des concepts de science et de métaphysique nous permet de comprendre et de situer la place qu’ils occupent dans le système Kantien. On pourrait même dire en toute quiétude que ces deux notions structurent la pensée de Kant, dans la mesure où elles délimitent clairement les deux grands axes, qui constituent sa doctrine à savoir (le phénoménal et le nouménal). Nous allons donc consacrer notre étude ici à la délimitation des contours de validité de ces deux notions. En d’autres termes, ces deux sections seront réservées à une analyse conceptuelle de ces deux vocables ; car il serait inconcevable de faire des développements sur ces notions sans mettre à jour leur signification dans le corpus kantien.

Qu’est ce que la science 

Contrairement à ces prédécesseurs qui avaient généralement une conception formelle de la science, Kant va accorder une dimension importante au contenu des propositions dans les jugements. Ainsi, à propos de cette science formelle, il dit dans son texte de la logique : « Cette science des lois nécessaires de l’entendement et de la raison en général ou, ce qui est la même chose, de la simple forme de la pensée en général, nous la nommons : logique. » Elle est donc une science qui s’occupe des règles formelles de l’entendement. A ce propos, Kant dit : « La logique au contraire, en sa qualité de propédeutique universelle de tout usage de l’entendement et de la raison en général, ne pouvant pas empiéter sur les sciences ni anticiper leur matière, est seulement un art universel de la raison, celui d’accorder des connaissances à la forme de l’entendement. » .

En effet, Kant va rompre avec cette méthode de la logique générale qui contient les règles absolument nécessaires de la pensée, sans lesquelles il ne peut y avoir aucun usage de l’entendement, et concerne par conséquent l’entendement, abstraction faite de la diversité des objets auxquels il peut être appliqué. Mais cette logique est différente de celle de l’usage particulier de l’entendement, qui contient les règles à suivre pour penser justement et sur une certaine espèce d’objet. On peut l’appeler logique élémentaire ou l’organon de telle ou de telle science. Cette logique est représentée la plus part du temps dans les écoles à titre de propédeutique des sciences. Elle est donc une logique générale mais pure ; car elle ne s’occupe que de purs principes a priori ; elle est par conséquent le domaine ou le canon de l’entendement, et de la raison, mais seulement par rapport à ce qu’il y a de formel dans leur usage, quel qu’en soit d’ailleurs leur contenu (empirique ou transcendantal). Kant dit à propos de cette logique : « On n’étend pas,mais on défigure les sciences,quand on en fait se pénétrer les limites ;or,les limites de la logique sont rigoureusement déterminées par cela seul qu’elle est une science qui expose dans le détail et prouve de manière stricte,uniquement les règles formelles de toute pensée(que cette pensée soit a priori ou empirique,qu’elle ait telle ou telle origine ou tel ou tel objet,qu’elle trouve dans notre esprit des obstacles accidentels ou naturels). » Cela veut dire en d’autres termes, que cette logique dite générale est une pensée qui ne s’occupe que de la cohérence formelle des énoncés et non pas de leur contenu.

Mais, il y’a une autre logique générale, mais dite appliquée parce qu’elle s’occupe de règles de l’usage de l’entendement sous les conditions subjectives ou empiriques que nous enseigne la psychologie. Cependant, au delà des diverses manières de faire œuvre de science à travers la logique de l’usage de l’entendement, Kant pense que les critères simplement logiques d’une vérité ne suffisent pas pour qu’une science soit rigoureuse et apodictique. Car une connaissance peut for bien être conforme à la logique formelle, c’est à dire ne pas se contredire elle-même, et cependant être en contradiction avec l’objet. Kant montrera même dans l’analytique transcendantale que la logique formelle n’est pas une logique de la vérité. Pour Kant de tels critères ne concernent que la forme de la vérité, c’est-à-dire de la pensée en générale et, s’ils sont à ce titre très justes ils sont pourtant insuffisants.

Au total, contrairement à ces prédécesseurs qui réduisaient la science à un raisonnement logique et formel des concepts, Kant porte une attention toute particulière au contenu des énoncés scientifiques. Il appréhende, ainsi, l’apodicticité et la rigueur d’une vérité scientifique non pas dans sa logique purement formelle, mais dans son adéquation avec un objet réel. Donc l’examen et l’appréciation de la connaissance, quant à sa forme, ne suffisent pas pour établir une vérité positive. Il faut nécessairement l’examiner dans son contenu pour voir si oui ou non cette connaissance peut se référer à un objet réel dans l’expérience. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre ces mots de Kant : « Tout concept exige d’abord la forme logique d’un concept (de la pensée) en générale, et ensuite la possibilité de lui donner un objet auquel il se rapporte. Sans ce dernier, il n’a pas de sens, et il est complètement vide de tout contenu, quoiqu’il puisse cependant contenir toujours la forme logique qui a pour but de tirer un concept de certaines données » . Pour Kant, la logique générale, considérée comme organon, est toujours une logique de l’apparence, c’est-à-dire dialectique. Car elle ne nous apprend rien sur le contenu de la connaissance, mais qu’elle ne fait qu’enseigner tout simplement les conditions formelles de l’accord avec l’entendement. C’est-à-dire, que cette forme de connaissance ne fait pas référence à une intuition, or sans intuition, toute notre connaissance manque d’objet et demeure complètement vide. Kant considère ainsi la science comme une croyance suffisante ou bien subjectivement, qu’objectivement. La suffisance subjective s’appelle conviction et la suffisance objective, certitude. Par conviction il faut entendre que cette vérité n’est valable que pour moi, mais par certitude il faut entendre que cette vérité est universellement valide. Il dit dans ce sens : « Il devait être naturellement plus difficile pour la raison d’entrer dans la voie sûre de la science, quand elle n’a plus affaire simplement à elle-même mais aussi à des objets ;c’est pourquoi la logique même en tant que propédeutique ne constitue, que le vestibule des sciences,et quand il est question des connaissances,on suppose il est vrai,une logique pour les apprécier,mais l’acquisition de ces connaissances est à chercher dans les sciences proprement et objectivement appelées de ce nom.» .

Cela revient à dire que cette logique formelle pouvait servir à apprécier la cohérence et la conséquence des propositions scientifiques, mais ne pouvait pas accéder réellement à une connaissance scientifique digne de ce nom. Ceci nous amène à dire donc que, c’est le contenu ou l’objet de la connaissance qui peut rendre compte de sa validité ou non. Car la validité subjective d’une vérité est insuffisante pour donner un crédit à une proposition. Par ailleurs, à coté de la logique générale qui s’appuie sur l’usage des lois de l’entendement, Kant propose une logique transcendantale. Celle-ci est une science qui détermine l’origine, l’étendue et la valeur de l’idée d’une science de l’entendement pur et de la connaissance de raison par laquelle nous pensons les objets complètement a priori. Et dans ce sens Philonenko dit à propos d’une vérité scientifique : « Loin de dépendre de la logique formelle, la logique transcendantale la conditionne. » En effet, cette science n’a affaire qu’aux lois de l’entendement et de la raison, et cela, simplement dans la mesure où elles se rapportent à des objets a priori, et non comme la logique générale qui elle se rapporte aux connaissances de raison empirique ou pure sans distinction. En outre, la partie de la logique transcendantale qu’on peut considérer comme une logique de la vérité, est l’analytique transcendantale. Une logique transcendantale diffère de la logique générale (c’est à dire de la simple réflexion sur les opérations du discours humain en raison) en ce sens que, contrairement à ce qui se passe pour cette dernière, il faut en montrer la nécessité pour qu’une connaissance véritable soit possible. La logique générale traditionnelle est la prise de conscience des actes qu’accomplit l’entendement lorsqu’il juge et est parfaitement indifférente au contenu de ce qui est affirmé, car elle ne se préoccupe que de cohérence et non de synthèse a priori. Il appartient à une logique transcendantale de justifier sa capacité à produire des jugements synthétiques a priori. En plus, aucune connaissance ne peut être en contradiction avec cette logique sans perdre aussitôt tout contenu, c’est-à-dire tout rapport à un objet quelconque, bref toute vérité.

Tout ceci montre très clairement la place importante que Kant accorde à l’objet de la connaissance dans la science. Ainsi il ne s’agit plus d’une analyse formelle de propositions pour trouver des contradictions, mais plutôt de sortir des énoncés formels pour trouver les objets qui leurs correspondent dans la réalité. Donc le principe de non contradiction ne suffit plus pour qu’une science soit rigoureuse et apodictique. Il faut nécessairement sortir de l’énoncé formel pour voir s’il y a dans la réalité objective un élément matériel qui lui correspond et qui vérifie sa vérité. Kant rompt avec cette vieille logique générale qui ne se fiait uniquement qu’aux lois de l’entendement et de la raison, sans référence aucune à un quelconque objet. Et on peut dire que c’est cette logique générale qui caractérise globalement l’ancienne méthode de faire de la science avant Kant. A partir de Kant, nous avons une autre manière de concevoir la démarche scientifique. Et comme nous l’avons vue dans les analyses ci-dessus, cette démarche insiste plus sur le contenu réel de la connaissance que sur sa simple forme. En outre, qu’ils s’agissent de la logique transcendantale ou même de la logique empirique, il y’ a toujours une possibilité de se référer à un objet que ce soit a priori ou a posteriori. Donc dans les deux cas, nous voyons apparaître une manière rigoureuse de déploiement d’une œuvre scientifique. Mais le choix ou la préférence que Kant porte sur le concept de logique transcendantale s’explique par le fait que dans celle-ci, c’est l’entendement qui par la médiation de l’objet transcendantal impose des bornes (ou si l’on préfère des limites aux prétentions de la sensibilité, qui veut déjà voir dans la simple perception l’ordre de l’objet). En définitive, chez Kant, l’entendement est la principale instance régulatrice de l’activité scientifique. Et qu’aucune intuition sensible ne peut prétendre au statut de loi tant que l’entendement ne la juge pas comme telle. En résumé, pour Kant, toute théorie censée être un système, c’est-à-dire un tout de connaissance ordonné par des principes peut se nommer science. Mais seule doit être nommée science à proprement parler celle dont la certitude est apodictique. Une connaissance qui contient aussi une certitude simplement empirique n’est un savoir qu’en un sens impropre. Le tout de connaissance qui est systématique peut de ce fait se nommer science, et même science rationnelle, quand la liaison de la connaissance, dans ce système, est un enchaînement de fondements et de conséquences.

En toute théorie de la nature, il n’est à proprement parler de science qu’autant qu’il s’y trouve de mathématique. Une science proprement dite (de la nature) exige une partie pure qui soit à la base de sa partie empirique, et qui repose sur une connaissance a priori des choses de la nature. Cette science est, elle découvre des lois nécessaires dans le domaine de la physique, elle l’a fait depuis longtemps dans les mathématiques et a cru le faire en métaphysique. En ce qui concerne cette dernière, compte tenu du fait qu’elle ne progresse pas, que les systèmes s’opposent entre eux, il sera nécessaire de se demander si elle est possible en tant que science.

Qu’est ce que la métaphysique 

Depuis Aristote, la métaphysique, dite générale, qui se définit, elle-même comme la science de l’être est, en faite la science de l’étant comme tel et de l’étant en totalité. Toutefois, chez Platon et Aristote eux mêmes, le problème demeurait dans une ambiguïté caractéristique qui, comme le constate Heidegger, laissait la voie ouverte à diverses possibilités de développement. Cette ambiguïté est demeurée inaperçue de leurs successeurs. La conception chrétienne du monde, qui fait de tout étant une créature de dieu et accorde à l’homme, image de dieu, une place privilégiée dans la création par quoi il est absolument de la nature, aboutit à une division tripartite du contenu de la métaphysique. Ainsi naissent la théologie naturelle ou théodicée qui est la science de dieu, la psychologie qui est la science de l’homme, et la cosmologie qui est la science de la nature. En conséquence, la métaphysique à l’exemple des mathématiques se mua en une science de pure raison. Lorsque nous disons que Kant part de la métaphysique de l’école de Wolff qui est un disciple de Leibniz, cela ne signifie pas qu’il s’ y tient radicalement. Mais mention doit être faite de ce point de départ, car on comprend alors que sa réaction contre la métaphysique scolastique n’équivaut pas à un refus de toute métaphysique, mais celle qui se définit comme la science de pure raison. Il n’ y a donc aucun paradoxe à faire de Kant le destructeur et l’initiateur de la métaphysique. Kant ne peut s’empêcher de mettre en parallèle la disposition naturelle qui voue l’homme à la métaphysique, et les discussions sans issues des métaphysiciens. Or ces discussions auxquelles n’échappent aucun des problèmes de la métaphysique, ni aucune de leurs solutions prétendues, sont d’autant plus scandaleuses qu’elles s’opposent au progrès continu, à la certitude contraignante des sciences positives. Car cette métaphysique dogmatique n’a même pas pu prouver théoriquement la réalité des objets suprasensibles, pour, à plus forte raison, prétendre offrir une connaissance de ces objets. C’est une philosophie pure qui s’appuie sur des principes a priori et restreinte à des objets déterminés de l’entendement (Dieu, l’immortalité de l’âme).

Cette métaphysique est, selon la définition même qu’en donne Kant, la connaissance a priori par concepts purs d’un objet. « La métaphysique,connaissance spéculative de la raison tout à fait isolée et qui s’élève complètement au dessus des enseignements de l’expérience par de simples concepts(et non, pas comme la mathématique,en appliquant ses concepts à l’expérience),et où,par conséquent la raison doit être son propre élève, n’a pas encore eu jusqu’ici l’heureuse destinée de pouvoir s’engager dans la voie sûre d’ une science ;elle est cependant plus ancienne que toutes les autres et elle subsisterait quand bien même toutes les autres ensembles seraient englouties dans le gouffre d’ une barbarie entièrement dévastatrice .

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Table des matières

INTRODUCTION GENERALE
PREMIERE PARTIE : Rapport des concepts de science et de métaphysique chez Kant
CHAPITRE I : Analyse conceptuelle des notions de science et de métaphysique
Section 1 : Qu’est ce que la science
Section 2 : Qu’est ce que la métaphysique
CHAPITRE II : Principe fondamental de la différence des notions de science et de métaphysique chez Kant
Section 1 : jugements analytiques par concept ou domaine de la métaphysique
Section 2 : Jugements synthétiques a priori ou domaine de la science
DEUXIEME PARTIE : Fondement d’une métaphysique à la dimension de la science
Chapitre 1 : Critique de la raison dogmatique comme principe de la science métaphysique chez Kant
Section 1 : Usage abusif de la raison
Section 2 :Usage légitime de la raison
Chapitre 2 : Traité d’une méthode scientifique en métaphysique
Section 1 : Critique des idées transcendantales
Section 2 : L’expérience domaine de la science ou d’une métaphysique fiable
CONCLUSION GENERALE
BIBLIOGRAPHIE

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