Le syndrome de SHARP appelé encore connectivite mixte est une entité associant des manifestations du lupus érythémateux systémique, de la sclérodermie, de la polymyosite, de la polyarthrite rhumatoïde, et caractérisée sur le plan immunologique par un titre élevé d’auto anticorps antiU1RNP. Le diagnostic, peu aisé, peut être établi selon un ensemble de critères diagnostiques dont celui d’ALARCON SEGOVIA VILLAREAL est actuellement le plus utilisé .
C’est une pathologie peu connue dans notre pays et notre étude rapporte les premiers cas décrits au centre hospitalier universitaire d’Antananarivo.
RAPPELS SUR LE SYNDROME DE SHARP
GENERALITES
Historique et définition
En 1972, SHARP et coll. avaient suggéré l’existence des connectivites mixtes à différencier des autres maladies auto-immunes bien déterminées. A coté des formes typiques de connectivites existent certains tableaux cliniques impossibles à classer dans un cadre nosologique défini. Ces tableaux associent des symptômes ou des atteintes viscérales appartenant à différentes maladies. Le syndrome de SHARP est une entité qui associe des manifestations de lupus érythémateux disséminé, de la sclérodermie et de la polymyosite et d’arthrite rhumatoïde. Sur le plan biologique, elle est caractérisée par des titres élevés d’auto anticorps antinucléaires de type anti RNP, et au plan clinique par l’absence ou par la rareté d’atteintes viscérales graves. Cette connectivite mixte est encore de diagnostic controversé, et reste actuellement discutée dans sa nosologie et dans son pronostic. Il faut noter que certains auteurs n’y voient qu’une forme clinique particulière de lupus érythémateux ou de sclérodermie.
Epidémiologie du syndrome de SHARP
La fréquence :
La fréquence mondiale n’est pas encore estimée, mais au Japon, elle est de 2,7 cas pour 100 000 habitants. Aux USA, la prévalence serait plus élevée que celle de la dermatomyosite (1 à 2 cas pour 100 000 habitants) et moins élevée que celle du lupus (15 à 50 cas pour 100 000 habitants) [3]. La race: La littérature suggère qu’il n’y a pas de protection spécifique liée à la race ou une tendance raciale dans la connectivite mixte.
Le sex ratio:
On note une prédominance féminine, ce qui est typique des maladies autoimmunes avec un sex. ratio estimé à 1 :10 [2]. Le sex ratio du lupus érythémateux systémique dans une étude malgache est de 1 :11.
L’âge :
Le syndrome de SHARP atteints les personnes âgées de 4 à 80 ans, avec un âge moyen de 37 ans mais il peut survenir chez les nourrissons.
L’étiologie :
L’étiologie et la prévalence restent encore inconnues. [10] Les facteurs incriminés dans le développement du syndrome de SHARP restent indéterminés. Il a été rapporté que des facteurs environnementaux peuvent intervenir dans la susceptibilité à développer une connectivite mixte ou une sclérodermie systémique [11,12] Des agents infectieux, bactériens ou viraux, étaient suspectés comme facteurs contribuant à l’émergence de ces deux pathologies .
La morbidité et la mortalité:
La mortalité est estimée entre 0 à 50%. Certains auteurs ont trouvé une mortalité à 7,6%. Les atteintes d’organes peuvent être sévères. 47% des patients présentent des atteintes rénales, 54% une pneumopathie restrictive.
Les caractéristiques génétiques :
De grandes avancées ont été faites depuis quelques années dans la compréhension des rôles des facteurs génétiques dans les connectivites et il a été mis en évidence que la prédisposition génétique est probablement un facteur majeur dans la susceptibilité à développer la maladie et à son expression. Dans de nombreuses études, il a été mis en évidence l’association de l’haplotype HLA DR4 avec l’expression de l’auto-anticorps U1RNP dans la connectivite mixte [16].l’HLA DR2 avait été également mis en évidence [5] Il a été rapporté que les patients atteints de syndrome de SHARP ont un taux sérique plus élevé en tumor necrosis factor alpha (TNF alpha) que les patients atteints de lupus érythémateux systémique [17]. Cela possède très probablement des bases génétiques depuis que l’haplotype DR4 était associé à une forte induction du TNF alpha . Les cas suédois atteints de connectivite mixte ont l’haplotype MICA4/HLADRB1*04/TNF1 .
Physiopathologie
Les mécanismes étiologiques et pathogéniques de la connectivite mixte restent inconnus mais certains auteurs ont suggérés l’existence d’une hyperactivité lymphocytaire B provoquant un taux sérique élevé d’auto-anticorps antiU1RNP et U170Kd. Les lymphocytes T seraient activés en présence d’auto-anticorps anti U170Kd-reactive T lymphocyte circulants dans le sang périphérique des patients atteints. On constaterait ensuite une modification apoptotique de l’antigène U1-70Kd. La réponse immune surviendrait contre l’auto modification apoptotique des antigènes. On noterait une association génétique avec le gène humain majeur d’histocompatibilité antigénique leucocytaire (HLA) DRB1*04/*15. Il y aurait une prolifération endothéliale vasculaire avec infiltration tissulaire étendue lymphocytaire et plasmocytaire.
SIGNES
Cliniques
Les circonstances de découvertes :
La circonstance de découverte la plus fréquemment rapportée est constituée par les doigts boudinés donnant un aspect en saucisse des doigts [5] Les manifestations cliniques sont caractérisées par trois éléments constants :
– phénomène de Raynaud.
– Infiltration des doigts ou doigts boudinés.
– Polyarthrites non destructrices.
Des atteintes viscérales de fréquence variable peuvent y être associées, mais le plus souvent sans gravité. La présentation initiale du syndrome de SHARP est assez difficile à distinguer et comprend un syndrome de Raynaud, des doigts boudinés, une polyarthrite et des lésions cutanées. Quand la maladie évolue, les caractéristiques cliniques du lupus érythémateux systémique, de la sclérodermie, de la polymyosite ou de l’arthrite rhumatoïde tendent à survenir de façon séquentielle sur une longue durée.
Phénomène de Raynaud
C’est un acrosyndrome vasculaire témoignant de l’existence de troubles vasomoteurs des extrémités et intéressent essentiellement les mains et ou les pieds, plus rarement le nez ou les oreilles. C’est un phénomène paroxystique et transitoire permettant de la distinguer d’une cyanose permanente (acrocyanose) ou de l’ischémie digitale. Le phénomène de Raynaud est de diagnostic clinique. Il survient par crise paroxystique intéressant un ou plusieurs doigts et est provoqué par le froid ou le stress. Trois phases surviennent alors successivement :
– une phase syncopale caractérisée par la décoloration paroxystique d’un ou de plusieurs doigts qui deviennent blancs, froids et hyposensibles. Cette phase est non douloureuse a une durée variable de quelques minutes à parfois plus d’une heure.
– Une phase asphyxique de durée ne dépassant pas habituellement trente minutes. Les doigts sont cyanosés et engourdis.
– Une phase erythermalgique : les doigts deviennent rouges et peuvent être douloureuses pendant quelques minutes.
Ce phénomène de Raynaud est souvent inaugural et peur précéder de plusieurs années les autres manifestations systémiques. L’évolution peut se faire vers l’acrosclérose.
Infiltration des doigts :
Les doigts ont un aspect boudiné en saucisse très caractéristique, pouvant évoquer certaines formes de sclérodermie. Cet aspect peut parfois régresser en partie sous traitement.
La polyarthralgie ou polyarthrite
Presque tous les patients ont une arthralgie mais 75% des cas présentent une arthrite franche. L’arthrite est non déformante mais des érosions osseuses et des déformations articulaires ressemblant à celles au cours de l’arthrite rhumatoïde peuvent survenir.[1,10]. C’est une arthrite sensible aux anti-inflammatoires non stéroïdiens [1]. On rencontrer avoir dans certains cas des déformations de Jaccoud au niveau des mains et des pieds avec atteinte péri articulaire, laxité ligamentaire et capsulaire. [21]. Des érosions démontrées radiologiquement sont également fréquentes. Elles affectent principalement les articulations inter phalangiennes et carpo-métacarpiennes. L’évolution peut se faire exceptionnellement vers une arthropathie mutilante. [5,22] Une atteinte spinale est possible avec subluxation et peut être cause de décès [23,24] Au cours du syndrome de SHARP, une association entre les arthrites et l’haplotype HLA DR4 avait été mise en évidence. [25] Certains auteurs avaient mis en évidence de petits nodules péri-tendineux, fréquemment trouvés autours des coudes, mains et pieds. Histologiquement, ces nodules montrent une inflammation non spécifique et l’absence de la morphologie typique des nodules rhumatoïdes.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS SUR LE SYNDROME DE SHARP
A- GENERALITES
A – 1 Historique et définition
A- 2 Epidémiologie
– La fréquence
– La race
– Le sex ratio
– L’âge
– L’étiologie
-La morbidité et la mortalité
– Les caractéristiques génétiques
A – 3- Physiopathologie
B- SIGNES
B- 1 – Cliniques
B- 1 -1 les circonstances de découvertes
B- 1-2 Phénomène de Raynaud
B- 1- 3 Infiltration des doigts
B – 1- 4 La polyarthralgie ou la polyarthrite
B -1- 5 les atteintes viscérales
a – Atteintes musculaires
b – Atteintes pulmonaires
c –Atteintes cardio-vasculaires
d –Atteintes digestives
e – Atteintes neurologiques
f – Atteintes rénales
g – Atteintes glandulaires
B -2 – paracliniques
B -2 – 1 Biologie
a – syndrome inflammatoire
b – hémogramme
c – bilan rénal
d – dosage des enzymes musculaires
e – dosage du complément sérique
g – Les examens immunologiques
f – bilan thyroïdien
B -2 -2 Imagerie
B – 3 histopathologie
C- FORMES CLINIQUES
C- 1 Connectivite mixte de la femme enceinte
C -2 Connectivite mixte de l’enfant
D- DIAGNOSTIC
D -1 Diagnostic positif
a – Critères diagnostiques de SHARP
b – Classification d’ALARCON SEGOVIA VILLAREAL
c – Critères de KASUKAWA
D – 2 Diagnostics différentiels
E- PRISE EN CHARGE ET TRAITEMENT
E- 1 Les objectifs du traitement
E – 2 Les moyens thérapeutiques
a – Moyens médicaux
b – Moyens chirurgicaux
c – Autres moyens thérapeutiques
E – 3 les indications thérapeutiques
E -4 Surveillance
E – 5 Prise en charge d’une femme enceinte atteinte de syndrome de SHARP
F – EVOLUTION ET PRONOSTIC
G – CONTROVERSES DANS LE SYNDROME DE SHARP
DEUXIEME PARTIE : LES OBSERVATIONS
Première observation
Deuxième observation
Troisième observation
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES – SUGGESTIONS
A- LES COMMENTAIRES
I – Sur le plan épidémiologique
II – Sur le plan clinique et paraclinique
II – 1 les circonstances de découvertes
II – 2 Première observation
II – 3 Deuxième observation
II – 4 Troisième observation
B- LES SUGGESTIONS
CONCLUSION