La grossesse, si elle se déroule normalement dans la grande majorité des cas, peut se révéler difficile dans certaines situations, mettant en jeu le pronostic maternel et fœtal qui imposent parfois l’accouchement dans une maternité de référence niveau 3, c’est-à-dire avec présence d’un service de réanimation néonatale [1]. Plus de 350 000 femmes meurent chaque année de complications liées à la grossesse ou à l’accouchement dans le monde, presque toutes (99%) vivent dans des pays en développement [2]. On estime également qu’un tiers de mortinatalité dans les pays en voie de développement se produit intrapartum, et ceci est provoqué principalement par des complications surgissant pendant le travail et l’accouchement [3]. Les dystocies sont parmi les cinq causes directement responsables d’environ deux tiers des décès liés à l’accouchement ou à la grossesse [4].
La plupart de ces décès peuvent être évités. Un des chemins critiques à emprunter pour réduire la mortalité maternelle et néonatale est d’améliorer la disponibilité, l’accès, l’utilisation et la qualité des soins obstétricaux et néonatals d’urgence pour traiter au moment opportun les complications durant la grossesse et l’accouchement [5]. Mais ces problèmes sont loin d’être résolus car la moitié des femmes dans le monde donnent naissance à la maison, en absence de personnel de santé qualifié, pour des raisons socio-économiques (tradition familiale, intimité, manque de moyen de transport pendant le travail…) .
À Madagascar, la santé maternelle reste une préoccupation majeure car en moyenne 8 femmes décèdent chaque jour de complications liées à la grossesse et à l’accouchement ; le taux de mortalité maternelle est estimé à 498 décès pour 100000 naissances vivantes pour la période de 2002-2009 et le taux d’accouchement dans les formations sanitaires est de 18,35% des naissances attendues pour l’ensemble du pays [8]. Une étude sur les accouchements dystociques à la maternité de Befelatanana, Centre Hospitalier Universitaire d’Antananarivo a montré l’imperfection du système de référence – recours à Madagascar alors que tout retard accusé à ce niveau se répercute de façon dramatique sur le pronostic maternel et périnatal [9]. Cette situation inquiétante justifie la réalisation de notre étude sur le pronostic des accouchements en ville référés au Centre Hospitalier de Soavinandriana (CENHOSOA) pour pouvoir évaluer les issues des accouchements et apprécier les risques materno-fœtales lors de ces accouchements et enfin, essayer d’identifier des éventuels facteurs de risque d’accouchement compliqué.
RAPPELS SUR L’ACCOUCHEMENT EUTOCIQUE
CONSIDERATIONS GENERALES
L’accouchement nécessite le passage de trois obstacles :
❖ Le bassin : la traversée de ce défilé rigide nécessite une adaptation constante des différentes parties du fœtus au contenant ;
❖ Le col : fermé pendant la grossesse, il se dilate pendant le travail ;
❖ Le périnée : son franchissement constitue l’expulsion.
Les passages du col et du bassin se font sous l’influence des contractions utérines et peuvent être simultanés. L’expulsion se fait sous l’influence des contractions utérines renforcées par les efforts expulsifs maternels. Dans le cadre de l’accouchement même normal, on peut être amené à corriger certaines anomalies (dystocies de démarrage, dystocies fonctionnelles, dystocies d’engagement), ce qui va à l’encontre de « l’accouchement naturel ». Ainsi Kreiss et Schickele ont inventé l’accouchement médicale avec rupture de la poche des eaux et antispasmodiques. Pigeaud a utilisé les ocytociques (accouchement dirigé) dans le but d’améliorer la contraction utérine et de diminuer la durée du travail. La comme a défini ainsi l’accouchement normal : « travail au minimum de puissance avec un maximum de confort, ce qui permet une diminution de la mortinatalité et une baisse de la morbidité ». Le monitorage systématique, le pH fœtal et l’échographie permettent de conduire au mieux l’accouchement en contrôlant à tout instant le bien-être fœtal. Pour augmenter le confort de la patiente, les accoucheurs utilisent la préparation à l’accouchement (psychoprophylactique, sophrologie,…) et surtout l’analgésie péridurale.
PHENOMENES MECANIQUES
Pour naître par voies naturelles, le fœtus doit parcourir la filière pelvienne ou canal pelvigénital.
Le canal pelvien est limité par un cadre osseux rigide qui va imposer à la progression fœtale une voie déterminée et donc un trajet et précis, même s’il existe certains mouvements des pièces osseuses du bassin au cours de la parturition. Cette ceinture osseuse est recouverte par des parties molles.
Bassin osseux
Généralités
La ceinture pelvienne forme la base du tronc et constitue les assises de l’abdomen. Elle réalise la jonction entre le rachis et les membres inférieurs (figures 1, 2, 3). C’est un anneau ostéoarticulaire symétrique constitué de quatre pièces osseuses et de quatre articulations.
Les quatre pièces osseuses sont :
− Les deux os coxaux (l’os coxal est pair et symétrique, constitué par la fusion de trois os : os iliaque, ischion et pubis) ;
− Le sacrum, impair et symétrique, bloc vertébral formé par la soudure de cinq vertèbres sacrées. La première vertèbre sacrée (S1) s’articule avec la dernière vertèbre lombaire (L5) en formant une forte saillie appelée angle sacrovertébrale ou promontoire, un disque cartilagineux intervertébral réunit les deux os en comblant la distance qui les sépare. La face antérieure du sacrum décrit une courbe régulière concave en avant. La hauteur du sacrum de la base à la pointe est égale à 11 cm (mesure directe) ;
− Le coccyx.
Les quatre articulations, très peu mobiles, sont :
− Les deux articulations sacro-iliaques réunissant le sacrum à chaque os iliaque, ce sont des diarthroses condyliennes. Les mouvements de l’articulation sacroiliaque sont la nutation et la contre-nutation ;
− La symphyse pubienne réunissant en avant les deux os pubiens. C’est une diarthroamphiarthrose, sa mobilité est quasiment nulle ;
− La sacrococcygienne.
La ceinture pelvienne a la forme d’un entonnoir à grande base supérieure faisant communiquer la grande cavité abdominale avec le pelvis à travers le détroit supérieur (DS). A la fin de la grossesse et lors de l’accouchement, l’imbibition aqueuse des parties molles entraîne une augmentation de l’amplitude des mouvements de toutes les articulations. Ce phénomène est bénéfique du point de vue obstétrical car il est valable pour les sacro-iliaques qui ont une amplitude de mouvement augmentée et pour l’articulation pubienne où il entraîne de faibles mouvements de glissement et d’écartement.
La filière pelvienne obstétricale doit être décrite selon trois étages :
− Un orifice d’entrée ou DS qui doit être conçu comme un cylindre ;
− Une excavation dont les dimensions sont habituellement très supérieures aux dimensions de la tête fœtale ;
− Un orifice inférieur à grand axe sagittal, constitué par l’ensemble des détroits moyen et inférieur (orifice inférieur du bassin de Farabeuf).
Détroit supérieur
− Aire du DS
Théoriquement, le DS est un plan dont la circonférence est limitée par une ligne qui part en arrière de l’angle sacrovertébral, suit les bords antérieurs des ailerons sacrés, puis les lignes innominées pour se terminer en avant à la partie supérieure de la symphyse pubienne .
En réalité, il faut considérer le DS comme un canal : c’est le « cylindre d’engagement » de Demelin. Ce cylindre est limité en haut par le DS anatomique et en bas par le DS obstétrical.
− Indices du DS
Ils sont destinés à chiffrer le pronostic obstétrical. De nombreux auteurs en ont proposé : Weinberg et Scadron, Allen, Turner, Mengert, Magnin, Morgan. L’indice de Magnin est le plus utilisé en France, il est égal à la somme du diamètre promontorétropubien et du diamètre transverse médian (IM = PRP+TM). Le pronostic obstétrical est jugé bon si l’indice de Magnin est supérieur à 23, il est encore favorable jusqu’à 22. Le risque de dystocie mécanique est grand pour un indice de Magnin inférieur à 20. Morgan a décrit un index de confrontation foetopelvien.
Excavation pelvienne
Entre le cylindre d’engagement et l’orifice inférieur du bassin, l’excavation ou canal pelvien est formée par la face antérieure du sacrum et du coccyx et par la face postérieure du pubis. Elle correspond à un segment de tore (cylindre courbe à concavité antérieure dont la paroi postérieure mesure 10 à 11 cm et dont la paroi antérieure mesure seulement 4 à 5 cm), sa section circulaire est de diamètre pratiquement constant au niveau de tous les plans (environ 12 cm). Les diamètres de l’excavation pelvienne sont compatibles avec les dimensions d’une tête fœtale, même très modérément fléchie.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GÉNÉRALITÉS
RAPPELS SUR L’ACCOUCHEMENT EUTOCIQUE
Considérations Générales
Phénomènes Mécaniques
Phénomènes Dynamiques
RAPPELS SUR L’ACCOUCHEMENT DYSTOCIQUE
Définition
Prises en charge des dystocies
DEUXIEME PARTIE : METHODOLOGIES ET RESULTATS
Méthodologies
Résultats
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES ET DISCUSSIONS
Fréquence
Aspects épidémiologiques maternels
Caractéristiques fœtales
Issues des accouchements référés
Pronostic materno-fœtal
Facteurs de risque d’accouchement compliqué
SUGGESTIONS
CONCLUSIONS