L’écho-doppler est une technique d’imagerie médicale utilisant les ultrasons et permettant de faire une exploration vasculaire (morphologie, vélocimétrie et spectre). C’est un examen non invasif, reproductible et accessible [1-2]. Selon la Haute Autorité de Santé en 2006, l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs (AOMI) se définit comme un rétrécissement du calibre des artères à destination des membres inférieurs, qui entraîne une perte de charge hémodynamique, avec ou sans traduction clinique et dont le meilleur témoin est la chute de l’index de pression systolique (IPS) [3]. Elle est plus fréquente chez les diabétiques que les patients non diabétiques et rentre dans le cadre de macroangiopathie. C’est une affection grave, pouvant être source d’amputation chirurgicale invalidant le patient. Pour ces raisons, nous avons réalisé une étude prospective et analytique intitulée « Intérêts de l’écho-doppler dans le dépistage d’artériopathie oblitérante des membres inférieurs chez les diabétiques ». A notre connaissance, c’est la première étude réalisée à Madagascar concernant les aspects échographiques de cette pathologie.
RAPPELS THEORIQUES
RAPPELS SUR LA VASCULARISATION ARTERIELLE DES MEMBRES INFERIEURS
Rappels anatomiques
La vascularisation des membres inférieurs est assurée par l’aorte abdominale et ses terminaisons . L’aorte abdominale fait suite à l’aorte thoracique à la hauteur de la douzième vertèbre dorsale. Elle donne naissance à deux artères iliaques primitives qui se bifurquent en artères iliaques interne et externe à un niveau variable. L’artère iliaque externe se dirige vers la tête fémorale en suivant la ligne innominée et se termine derrière l’arcade crurale en donnant l’artère fémorale commune. Cette dernière va se diviser en artère fémorale profonde et superficielle. L’artère fémorale profonde constitue l’artère nourricière de la cuisse. L’artère fémorale superficielle va continuer le trajet dans la direction de l’artère fémorale commune puis au niveau de la fosse poplitée, elle devient artère poplitée. Cette dernière constitue le tronc de passage entre l’artère fémorale et les artères de la jambe. Elle se termine au niveau de l’arcade soléaire où elle se divise en deux branches terminales: l’artère tibiale antérieure et le tronc tibiopéronier. L’artère tibiale antérieure descend dans la loge postérieure de la jambe et parcourt toute la loge antérieure de la jambe. Elle se termine au niveau de l’interligne tibio-tarsienne où elle devient artère pédieuse ou artère dorsale du pied. C’est à ce niveau que l’on palpe le pouls pédieux. Le tronc tibio-fibulaire ou tibio-péronier va continuer la direction de l’artère poplitée. Elle descend verticalement dans la loge postérieure de la jambe et se termine en artère tibiale postérieure et en artère fibulaire. L’artère tibiale postérieure prolonge la direction de l’artère poplitée et distalement, elle passe dans la gouttière rétro-malléolaire médiale où l’on peut palper son pouls, pour rejoindre la plante du pied .
Structure histologique d’une artère
Il est classique d’individualiser trois zones ou tuniques disposées concentriquement autour de la lumière et constituent la paroi :
– La couche interne ou intima, au contact direct avec le sang, se compose d’un endothélium, variété d’épithélium pavimenteux, se reposant sur une membrane basale et un tissu conjonctif.
– La couche moyenne ou média a une composante variable selon le calibre de l’artère. Elle est surtout élastique avec quelques fibres musculaires pour les artères de gros calibre et est surtout musculaire et ne possède pas de membrane élastique externe pour les artères de moyen calibre.
– La couche externe ou adventice a une structure essentiellement conjonctive. Elle renferme un tissu adipeux, des fibres nerveuses (nervi vasorum) et des vaisseaux sanguins (vasa vasorum).
ARTERIOPATHIE OBLITERANTE DES MEMBRES INFERIEURS
Définition
L’artériopathie oblitérante des membres inférieurs est la conséquence d’une obstruction partielle ou totale de la lumière artérielle principalement d’origine athéromateuse [9] dans le cadre d’une macroangiopathie chez les diabétiques.
Epidémiologie
Chez les diabétiques, la prévalence de l’AOMI est variable. Elle va de 1,2% pour des sujets avec un âge moyen de 52 ans et un diabète de découverte récente jusqu’à 21% chez les diabétiques connus et traités avec un âge moyen de 65 ans et elle dépasse 50% chez les sujets plus de 85 ans. Les diabétiques ont une AOMI 3 à 6 fois plus fréquente que les non diabétiques .
Physiopathologie
Le mécanisme de l’artériopathie chez les diabétiques concourt à un dysfonctionnement des cellules endothéliales. Normalement, les cellules endothéliales synthétisent du NO (monoxyde d’Azote), un potentiel vasodilatateur qui inhibe l’activation plaquettaire et la migration cellulaire dans les muscles lisses vasculaires. Le diabète détériore le médiateur de ce NO ainsi que sa capacité de vasodilatation. Ce dysfonctionnement des cellules endothéliales contribue à l’athérosclérose [11]. Il regroupe des anomalies de la synthèse ou de la dégradation du NO au niveau des cellules endothéliales, associées à une augmentation des facteurs vasoconstricteurs, à différentes altérations des signaux de transduction aussi bien au niveau endothélial que musculaire lisse (secondaires à l’hyperglycémie), au taux élevé d’acide gras libre et à l’hyperlipidémie ainsi qu’à une augmentation de plusieurs facteurs thrombotiques et une dysfonction plaquettaire.
A l’athérosclérose s’ajoute, dans le diabète, un facteur de vieillissement accéléré de la paroi artérielle : l’artériosclérose. Celle-ci pourrait être liée à une glyco oxydation de la matrice extra-cellulaire et se caractérise, entre autres, par des dépôts calciques au sein de la média, ou médiacalcose .
Clinique
Les symptomatologies de l’artériopathie des membres inférieurs peuvent être récapitulées dans la classification de LERICHE et FONTAINE [13].
– Stade I : Absence de symptomatologie fonctionnelle
– Stade II : Claudication intermittente
– Stade III : Douleurs de décubitus
– Stade IV : Troubles trophiques cutanés et gangrène .
L’artériopathie peut être totalement asymptomatique, découverte lors d’un examen systématique, qu’il soit ou non orienté par une pathologie athéromateuse associée. L’AOMI asymptomatique répond à une définition hémodynamique : un index de pression systolique cheville/bras inférieur ou égal à 0,9 [14]. La claudication intermittente se caractérise par un arrêt de la marche provoqué par une douleur à type de crampe, typiquement au niveau du mollet, survenant après une certaine distance. La douleur disparaît à l’arrêt et se reproduit pour un périmètre fixe. Les douleurs de décubitus au niveau du pied ou de la jambe surviennent lorsque le patient est allongé, et sont soulagées par la position « jambes pendantes » qui entraîne un œdème de stase aggravant l’insuffisance circulatoire. Les troubles trophiques témoignent d’une ischémie permanente engendrant une nécrose tissulaire. Il s’agit de gangrène ou d’ulcère. La gangrène intéresse les extrémités; elle débute au niveau de la pulpe des orteils et s’étend plus ou moins en amont. Les tissus prennent une couleur sombre puis noire et deviennent douloureux, sauf en cas de neuropathie associée. Les ulcères ischémiques souvent douloureux siègent sur le pied, la cheville, souvent sur une zone d’appui ou sur la jambe. Leur fond est nécrotique, atone ; leur taille est variable [14]. Actuellement, cette classification est abandonnée et l’artériopathie des membres inférieurs est divisée en deux groupes : la claudication (ischémie d’effort) et l’ischémie critique (douleurs de décubitus et troubles trophiques) .
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I. RAPPELS SUR LA VASCULARISATION ARTERIELLE DES MEMBRES INFERIEURS
I. 1-Rappels anatomiques
I. 2-Structure histologique d’une artère
II. ARTERIOPATHIE OBLITERANTE DES MEMBRES INFERIEURS
II. 1- Définition
II. 2- Epidémiologie
II. 3- Physiopathologie
II. 4- Clinique
II. 5- Examens paracliniques
II. 5-1- Examens biologiques
II. 5-2- Mesure transcutanée de la pression artérielle
II. 5-3- Imagerie
II. 5-1- Echographie – Doppler artérielle des membres inférieurs
II. 5-2- Opacification artérielle
II. 5-2- 1- Angio-scanner des membres inférieurs
II. 5-2-2- Angiographie par résonnance magnétique
II. 5-2-3- Artériographie des membres inférieurs
III. ECHO-DOPPLER ARTERIEL DES MEMBRES INFERIEURS
III. 1- Principes
III. 2- Intérêts
III. 3- Techniques
III. 4- Conduite de l’examen
III. 5- Résultats
DEUXIEME PARTIE : METHODE ET RESULTATS
I. METHODE
I. 1-Type, lieu et période de l’étude
I. 2- Critères d’inclusion
I. 3- Critères de non inclusion
I. 4- Aspect éthique
I. 5- Méthode
I. 6- Paramètres étudiés
I. 7- Analyse des données
II. RESULTATS
II. 1- Résultats descriptifs
II. 2- Résultats analytiques
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION
I. AGE ET GENRE
I. 1- Age
I. 2- Genre
II. DONNEES RELATIVES AU DIABETE
II. 1- Type du diabète
II. 2- Durée d’évolution du diabète
III. FACTEURS DE RISQUE VASCULAIRE
III. 1- Diabète
III. 2- Hypertension artérielle
III. 3- Tabac
III. 4- Dyslipidémie
III. 5- Antécédents cardio-vasculaires
IV. DONNEES CLINIQUES
IV. 1- Symptomatologie
IV. 2- Abolition des pouls périphériques et présence de souffle vasculaire à un certain niveau
V. DONNEES DE L’ECHO-DOPPLER ARTERIEL DES MEMBRES INFERIEURS
V. 1- Index de pression systolique
V. 2- Etude morphologique lors de l’écho-Doppler artériel des membres inférieurs
V. 2-1- Médiacalcose
V. 2-2- Plaque d’athérome
V. 3- Etude vélocimétrique et spectrale
VI. LIMITES DE L’ETUDE
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES