La menace d’accouchement prématuré (MAP) se définit comme l’entrée en travail spontané qui associe la présence de contractions utérines régulières, douloureuses et de modifications cervicales, aboutissant à l’accouchement prématuré en absence d’une prise en charge. Elle survient entre 22 à 36 SA révolue [1].
La MAP constitue la première cause d’hospitalisation pendant la grossesse. En France, une étude a retrouvé que 20 % des femmes enceintes ont été hospitalisées durant leur grossesse parmi lesquelles 38 % ont présenté une MAP [2]. Aux États-Unis, parmi les femmes hospitalisées au cours de la grossesse (18 %), le travail prématuré était la première cause d’hospitalisation (29 %) et la fréquence de la prématurité est de 12 à 13% [3]. A Madagascar, une étude faite en 2009 a montré que la MAP représentait 62,6 % des motifs d’hospitalisation [4].
La tocolyse permet de stopper l’activité utérine par le biais d’un médicament. Les inhibiteurs calciques notamment la nifédipine font partie de ces médicaments [5]. La nifédipine est utilisée au Centre Hospitalier Universitaire de Gynécologie Obstétrique de Befelatanana (CHUGOB) dans la prise en charge de la MAP et ceux-ci a motivé notre étude dont l’objectif était de décrire le profil épidémio-clinique de la MAP au CHUGOB et de décrire l’issue de la menace d’accouchement prématuré après la tocolyse par la nifédipine.
Rappels sur la menace d’accouchement prématuré (MAP)
Définition
La menace d’accouchement prématuré se définit par l’association des contractions utérines régulières, douloureuses et des modifications cervicales significatives (Longueur, position, dilatation), survenant entre 22 semaines d’aménorrhée (SA) et moins de 37 SA, évoluant spontanément vers l’accouchement en absence d’un traitement médical et/ou malgré un traitement approprié [6]. La MAP se définit par un processus clinique symptomatique qui peut aboutir à un accouchement prématuré dit « spontané », par opposition aux accouchements prématurés suite à une décision médicale (induit, ou iatrogène). La grande majorité des accouchements prématurés spontanés sont précédés d’une MAP [7].
Epidémiologie
La MAP est la première cause d’hospitalisation au cours de la grossesse et sa gravité réside dans les complications de la prématurité. Les complications de la prématurité et la mortalité périnatale sont fonction de l’âge gestationnel, plus l’âge gestationnel est bas plus les risques pour les prématurés sont élevés [3]. La fréquence de la prématurité dans les pays industrialisés varie selon les pays. En France, le taux de prématurité a augmenté, passant de 5,9 % en 1995, à 7,2 % en 2003, jusqu’ à 7,4 % en 2010. Il concerne 1,5 % des naissances avant 32 SA, 0,8 % entre 32 et 33 SA, et 5,1 % de la prématurité tardive qui constitue le groupe le plus important. L’augmentation de la prématurité se retrouve essentiellement entre 32 et 36 SA [3]. Une même évolution se retrouve aux Etats Unis où le taux de prématurité a augmenté de 20 % depuis 1990, atteignant 12,7 % en 2007 dont les 2/3 de l’augmentation sont entre 34 et 36 SA. Ainsi, 75 % de la prématurité concerne la période 34-36 SA [8 ,9]. La prématurité est responsable des 75% de la mortalité périnatale et de plus de la moitié de morbidité à long terme. La morbi-mortalité néonatale est corrélée à l’âge gestationnel à la naissance [10].
Diagnostic d’une menace d’accouchement prématuré
Diagnostic positif d’une menace d’accouchement prématuré
Diagnostic clinique
➤ Interrogatoire
L’interrogatoire recherche et précise :
● L’âge gestationnel en demandant la date des dernières règles (DDR) ou une échographie du premier trimestre.
● Les signes subjectifs présentés par la patiente traduisant les contractions utérines avec ses caractéristiques : durée, ancienneté, fréquence, régularité, mode évolutif.
● Les manifestations associées : issue de liquide amniotique, saignement génital.
● Les facteurs déclenchant récents : fièvre, signes fonctionnels urinaires, surmenage.
● Les facteurs de risque.
● Les antécédents gynéco-obstétricaux.
● Le déroulement de la grossesse.
● Le niveau socio-économique.
➤ Examen clinique
● Les contractions utérines
Il s’agit des contractions utérines non dépressibles, régulières et douloureuses, de fréquence variable selon les auteurs car il n’existe pas de consensus. La fréquence des contractions utérines varie selon les auteurs : certains admettent une fréquence minimale de 2 contractions utérines en 10 minutes pendant au moins une heure ; d’autres une contraction utérine durant plus de 35 secondes, toutes les 10 minutes [1]. Cette contraction est objectivée à l’examen physique par un durcissement intermittent de l’utérus dont on apprécie la durée et la fréquence [6]. Généralement, la survenue de contractions utérines régulières, d’une fréquence supérieure à une fois en dix minutes pendant une période supérieure à une heure est classiquement considérée comme un signe de travail prématuré. Cependant, les contractions utérines ressenties par la patiente n’ont pas de valeur prédictive pour le diagnostic d’une MAP [5]. Leurs caractéristiques peuvent varier d’un sujet à l’autre. Certaines personnes se plaignent douloureusement des contractions physiologiques tandis que d’autres femmes les ressentent plus tardivement avec des modifications cervicales marquées. D’après la littérature, le taux de concordance entre les dires de la patiente et le tracé tocographique est de 17 % [11].
● Les modifications cervicales
Le toucher vaginal permet de caractériser les modifications cervicales permettant ainsi d’élaborer des scores pronostiques. Dans ce toucher vaginal, on apprécie la position, la consistance, la longueur, l’ouverture éventuelle de l’orifice externe voire de l’orifice interne du col, l’ampliation du segment inférieur, le type et la position de la présentation ainsi que l’intégrité du pôle inférieur de l’œuf si le col est ouvert [6]. En outre, avant le toucher vaginal, on peut faire un examen au spéculum pour mettre en évidence :
– certaines caractéristiques du col utérin (couleur, aspect, etc)
– des leucorrhées pouvant être d’origine infectieuse
– du sang provenant de la cavité utérine
– du liquide amniotique traduisant une rupture de la poche des eaux.
Les examens cliniques nous permettent ainsi d’obtenir :
– le score de Baumgarten [12]
– le score de DELLENBACH [13]
Examens paracliniques
Les examens complémentaires ont pour objectif de confirmer le diagnostic, de rechercher certaines étiologies et d’apprécier la vitalité fœtale :
➤ Cardiotocogramme permet d’enregistrer la durée et la fréquence des contractions utérines et de surveiller le rythme cardiaque fœtal (RCF).
➤ Echographie cervicale par voie endovaginale permet de mesurer la longueur du col et d’apprécier le degré d’ouverture de l’orifice interne. En cas de MAP, les seuils de longueur cervicale les plus discriminants pour prévoir l’accouchement prématuré se situent entre 20 et 30 mm [1]. Il est difficile de recommander un seuil particulier : celui-ci sera fonction du choix du clinicien qui privilégiera soit une sensibilité élevée avec une bonne valeur prédictive négative mais avec de nombreux faux-positifs (seuil élevé autour de 30 mm) soit le contraire (seuil bas vers 20 mm) [1].
➤ La recherche de fibronectine fœtale dans les secrétions vaginales recueillies par écouvillonnage est importante car l’existence d’une protrusion des membranes dans les culs de sacs vaginaux donnant une élévation de ce marqueur traduit une rupture des membranes ou une dégradation de la matrice extracellulaire signant une MAP. Cependant, la fibronectine n’est pas fiable avant 24 SA à cause de sa présence physiologique au niveau de l’endocol [14].
➤ Bilan MAP :
● Dosage de la C Réactive Protéine
La C Réactive Protéine (CRP) est le marqueur d’un syndrome inflammatoire qui est d’origine infectieux le plus souvent [15].
● Numération formule sanguine
Une hyperleucocytose sanguine (≥ 15 000/ml) au cours de la MAP témoigne la présence d’une infection. Définition de l’anémie :
– Hb < 11 g/100ml au 1er et 3ème trimestre
– Hb < 10,5 g/100ml au 2ème trimestre
– Hb < 10 g/100ml en post partum
Une anémie semble également prédisposer à un accouchement prématuré pour des taux d’hémoglobine <9 g/100ml [16,17].
● Examen cytobactériologique des urines
L’examen cytobactériologique des urines (ECBU) est demandé pour rechercher une infection urinaire, ou une bactériurie asymptomatique [15].
● Prélèvements cervico-vaginaux
Dans les MAP, les prélèvements cervico-vaginaux peuvent mettre en évidence la présence des germes pathogènes en cause [18].
Diagnostic étiologique d’une menace d’accouchement prématuré
La MAP peut avoir plusieurs étiologies. L’accouchement prématuré peut être spontané. Mais on note également une prématurité induite par une décision médicale qui est prise dans le but de sauver la mère ou le bébé en cas de pronostics vitaux médiocres [6]. Ces étiologies peuvent donc être :
➤ Les causes locorégionales
➤ Les causes générales
➤ Les facteurs favorisants : les antécédents gynéco-obstétricaux, les causes socioéconomiques
➤ Les causes idiopathiques .
Causes locorégionales
Causes maternelles
Ce sont surtout des anomalies utérines :
➤ Les malformations utérines
Les malformations utérines congénitales sont responsables de l’expulsion fœtale précoce [19]:
● Utérus cloisonné
● Utérus bicorne bi cervical
● Utérus bicorne uni cervical
● Utérus unicorne
➤ L’hypoplasie endométriale
Elle survient souvent après des grossesses successives rapprochées donc chez les multipares [19].
➤ La béance cervico – isthmique
C’est une des causes majeures de l’accouchement prématuré : elle consiste en une ouverture cervicale entraînant une possibilité d’expulsion spontanée du fœtus. D’après la littérature, on peut distinguer trois types de béance selon l’étiologie :
● Les béances congénitales apparaissant avant la première grossesse.
● Les béances fonctionnelles existant au cours d’une grossesse et qui peuvent récidiver ou non lors d’une grossesse ultérieure.
● Les béances secondaires à des traumatismes obstétricaux intempestifs dont le plus fréquent est l’interruption volontaire de la grossesse [19].
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
I. Rappels sur la menace d’accouchement prématuré
I.1. Définition
I.2.Epidemiologie
I.3.Diagnostic
I.3.1.Diagnostic positif
I.3.2.Diagnostic étiologique
I.3.3.Diagnostic différentiel
I.3.4.Diagnostic de gravité
I.4 .Traitements de la MAP
I.4.1.Buts
I.4.2.Moyens
I.4.3.Indications
I.4.4.Surveillance
II. Rappels sur la nifédipine
II.1.Mode d’action de la nifédipine
II.2.Pharmacocinétique de la nifédipine
II.3.Effets indésirables de la nifédipine
DEUXIEME PARTIE : METHODES ET RESULTATS
I.METHODES
I.1.Déroulement de l’étude
I.2.Objectifs de l’étude
I.3.Cadre de l’étude
I.4.Type d’étude
I.5.Durée d’étude
I.6.Période d’étude
I.7.Population cible
I.8.Critères d’inclusion
I.9.Critères d’exclusion
I.10.Variable à étudier
I.11.Limite de l’étude
I.12.Considération éthique
I.13.Analyse statistique des données
II.RESULTATS
II.1.Fréquence
II.2.Variables relatives à la mère
II.3.Variables relatives aux traitements
II.4.Variables relatives aux nouveaux nés
TROISIEME PARTIE : DISCUSSION
I. Fréquence de la MAP
II. Caractéristiques maternels
III. Caractéristiques liés aux traitements
IV. Caractéristiques liés aux nouveaux nés
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES