L‘incidence et la prévalence de la maladie rénale chronique (MRC) ne cessent d‘augmenter dans le monde, L‘insuffisance rénale chronique (IRC) est une maladie générale. Ses deux grandes causes sont le diabète sucré et les néphropathies vasculaires chroniques. L‘âge des patients augmente progressivement et, à la première dialyse, ils ont en moyenne plus de 60 ans . Le dépistage, la quantification et le suivi du déficit fonctionnel rénal reposent en pratique sur une correcte interprétation de la créatininémie. Dès que le Débit de Filtration Glomérulaire (DFG) est amputé de plus de 50%, il faut activement traiter le patient : prendre toutes les mesures pour essayer de ralentir la vitesse de dégradation de cette insuffisance rénale, assurer un bon contrôle de l‘homéostasie et protéger les deux grands organes menacés, le système cardiovasculaire et ostéoarticulaire.
Les techniques de traitement de l‘insuffisance rénale terminale sont l‘hémodialyse, la dialyse péritonéale et la transplantation rénale . Le traitement de suppléance par dialyse assure à l‘heure actuelle la survie de plus d‘un million de personnes à travers le monde. Son utilité et sa place dans le traitement de l‘urémie chronique ne sontplus à démontrer La biologie tient une place importante dans la surveillance des traitements par hémodialyse. Elle permet de surveiller l‘efficacité des séances et des paramètres associés à la survie ou à la survenue de complications (bilan ionique, hématologique, nutritionnel, phosphocalcique, cardiaque) . Notre étude a pour objectif de décrire le profil épidémiologique et biologique de patients atteints de maladie rénale chronique suivis dans un centre d‘hémodialyse.
RAPPELS BIBLIOGRAPHIQUES SUR L’INSUFFISANCE RENALE ET LA MALADIE RENALE CHRONIQUE
Définitions
L’insuffisance rénale est la réduction ou l’impossibilité que présente le rein, à assurer la filtration et l’élimination& des déchets du sang. La maladie rénale chronique (MRC) est définie, indépendamment de sa cause, par la présence pendant plus de 3 mois de marqueurs d‘atteinte rénale ou une clairance de la créatinine inférieure à 60 mL/min/1,73 m2 .
Epidémiologie
La MRC affecte environ 10% de la population adulte mondiale et plus de 30% des personnes âgées de plus de 70 ans . En méta-analysant 50 cohortes, incluant plus de 2 millions de participants dans le monde, le consortium international Chronic Kidney Disease Prognosis Consortium a montré que la baisse du DFG et l‘augmentation de l‘albuminurie étaient due à une augmentation de la mortalité générale, des maladies cardiovasculaires et de la progression vers l‘insuffisance rénale terminale indépendamment de l‘âge, du sexe et de l‘ethnicité . En France, l‘épidémiologie de la MRC est connue grâce aux données du programme REIN (Réseau Epidémiologique et Information en Néphrologie) mis en place en 2002. Aux Etats-Unis, la prévalence de la MRC (stade 1—5) est supérieure aux prévalences du diabète et des maladies cardiovasculaires (respectivement 14%, 9.3% et 8.5% de la population). Ces dernières années, la prévalence de la MRC a connu une croissance d‘environ 10% par an, ce qui correspond à un doublement de la prévalence tous les 7 ans .
Cela peut s‘expliquer à la fois par un allongement de la survie des patients, par l‘augmentation des facteurs de risque de la MRC et par un diagnostic plus précoce de la maladie, notamment grâce à l‘estimation systématique du DFG accompagnant les dosages de la créatininémie.
En Afrique sub-saharienne, la MRC a été estimée à 13,9% . Les projections de 2030 prévoient que plus de 70% de la population mondiale avec insuffisance rénale chronique terminale se retrouveront dans les pays en voie de développement dont fait partie la plupart des pays de l’Afrique subsaharienne . Au Sénégal, la MRC constitue l‘une des préoccupations majeures du gouvernement. La prise en charge de cette morbidité a connu un développement important ces dernières années avec l‘ouverture des centres de dialyse dans plusieurs régions du pays . La prévalence de la MRC dans la commune de Guéoul, une zone semi-urbaine au Sénégal, était de 37% ., et de 4,9% . Dans la région de Saint louis au nord du Sénégal.
Etiologies
Un grand nombre de maladies peut être à l‘origine d‘une IRC et le rythme de progression de ces maladies vers l‘IRT est très variable en fonction de la maladie. Les unes affectent primitivement les reins, les autres peuvent conduire à une atteinte rénale comme le diabète, l‘hypertension artérielle ou les maladies systémiques . En France, l‘épidémiologie de l‘IRT est connue grâce aux données du programme REIN (réseau épidémiologique et information en néphrologie) mis en place en 2002.
L‘atteinte rénale est plus fréquente et semble plus sévère en Afrique que dans les pays développés. Les raisons de cette prépondérance des atteintes glomérulaires ne sont pas bien élucidées mais peuvent être dues à la persistance ou la réémergence des maladies tropicales . La MRC complique souvent une hypertension artérielle, un diabète sucré, une obésité, voire une infection comme le paludisme ou l‘infection à VIH . Traditionnellement, les néphropathies chroniques sont jusqu‘à dix fois plus fréquentes en Afrique sub-saharienne qu‘en Europe . L‘infection par le VIH, les glomérulonéphrites aigues post streptococciques et les maladies parasitaires occupent une place importante parmi les étiologies infectieuses des atteintes rénales sous les tropiques .
Facteurs de risques
Le risque de présenter une insuffisance rénale chronique est favorisé par un ensemble de facteurs intervenant lors des différents stades évolutifs de la maladie rénale chronique.
On peut distinguer :
– les facteurs de susceptibilité, qui augmentent la probabilité de développer une maladie rénale chronique : antécédents familiaux de néphropathie, petit poids de naissance, diminution de masse rénale, âge élevé, prise de médicaments néphrotoxiques, épisodes d’insuffisance rénale aiguë, exposition à des toxiques professionnels (plomb, mercure, cadmium), bas niveau de revenus ou d‘éducation;
– les facteurs d‘initiation, qui jouent un rôle direct dans l‘initiation de l‘IRC. Ces facteurs diffèrent selon la lésion rénale primitive considérée: diabète, hypertension artérielle, maladies auto-immunes, infections systémiques, infections urinaires, calculs, obstructions, toxicité médicamenteuse, maladies héréditaires.
– les facteurs de progression, qui sont susceptibles d‘aggraver le dommage rénal et d‘accélérer le déclin de la fonction rénale. Ils sont modifiables par une prise en charge adaptée : protéinurie importante, pression artérielle élevée, glycémie élevée, dyslipidémie, tabagisme, médicaments néphrotoxiques, grossesse, certaines mesures de régime, diabète survenant dans le cadre de néphropathies non diabétiques . L‘hypertension artérielle (HTA) et la protéinurie représentent deux facteurs majeurs de progression de l‘IRC :
o L‘HTA induit une hyperfiltration des néphrons résiduels, ce qui entraîne leur destruction accélérée et l‘évolution vers la glomérulosclérose. Elle peut également induire une insuffisance cardiaque par augmentation de la post-charge du ventricule gauche, dont les effets s‘ajoutent à ceux de l‘insuffisance rénale.
o La protéinurie est favorisée par l‘hyperfiltration des néphrons restants. Lorsqu‘elle est abondante (glomérulopathies avec syndrome néphrotique), elle accentue l‘évolution de l‘IRC par un effet ―toxique‖ sur le néphron.
La maîtrise de l‘HTA et de la protéinurie sont les principaux moyens utilisés actuellement pour ralentir la progression de l‘insuffisance rénale chronique, quelle que soit l‘origine de la néphropathie .
Diagnostic biologique
Il est important de dépister l‘altération de la fonction rénale le plus précocement possible afin de pouvoir mettre en œuvre une stratégie de néphro-protection susceptible de stabiliser ou de ralentir la progression de l‘insuffisance rénale.
Principes du diagnostic de l’IRC
Lors de la découverte d‘une insuffisance rénale, il est recommandé :
❖ de confirmer la réalité de l’insuffisance rénale;
La découverte d‘une insuffisance rénale nécessite de confirmer l‘insuffisance rénale en recherchant les facteurs de variation de la créatininémie: interférences liées à d‘autres substances, médicamenteuses ou non, à la prise de médicaments affectant la sécrétion tubulaire de créatinine (cimétidine, triméthoprime) ou aux circonstances du dosage. En cas de doute, une deuxième estimation du DFG par la formule de Cockcroft et Gault est recommandée. Le dosage de la créatininémie doit être pratiqué avec la même méthode de dosage et, si possible, dans le même laboratoire. Si le doute persiste, une mesure du DFG est recommandée.
❖ d’éliminer une insuffisance rénale aiguë et d’affirmer le caractère chronique ;
Devant une élévation de la créatininémie et une diminution du DFG estimé, il faut rechercher:
– une insuffisance rénale fonctionnelle, en particulier chez le sujet âgé;
– une insuffisance rénale aiguë, nécessitant un bilan uro-néphrologique en urgence, en particulier:
o un obstacle;
o une cause médicamenteuse (produits de contraste iodés, IEC, antagonistes des récepteurs de l‘angiotensine II, anti-inflammatoires non stéroïdiens, aminosides…);
o une glomérulonéphrite rapidement progressive (insuffisance rénale rapidement progressive, protéinurie, hématurie, signes extrarénaux);
o une cause vasculaire.
Les arguments en faveur du caractère chronique de l‘insuffisance rénale sont:
– l‘existence d‘antécédents familiaux de néphropathie, d‘antécédents personnels de diabète, d‘hypertension artérielle, d‘infections urinaires hautes récidivantes, d‘uropathie, de maladie athéromateuse, la prise chronique de médicaments néphrotoxiques;
– l‘existence antérieure d‘une protéinurie, d‘une hématurie, d‘une créatininémie élevée;
– l‘existence d‘une anémie normochrome normocytaire arégénérative, d‘une hypocalcémie;
– l‘existence d‘une diminution de la taille des reins à l‘imagerie (diamètre bipolaire < 10 cm à l‘échographie rénale).
La taille des reins peut cependant ne pas être diminuée si la maladie rénale initiale est un diabète, une amylose, et peut même être augmentée en cas de polykystose rénale.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS BIBLIOGRAPHIQUES SUR L‘INSUFFISANCE RENALE ET LA MALADIE RENALE CHRONIQUE
1. Définitions
2. Epidémiologie
3. Etiologies
4. Facteurs de risques
5. Diagnostic biologique
5.1. Principes du diagnostic de l‘IRC
5.2. Marqueurs d‘atteinte rénale
5.3. Mesure du Débit de Filtration Glomérulaire
5.3.1. La formule de Cockcroft et Gault
5.3.2. La formule MDRD
5.3.3. La formule CKD-EPI
6. Stades de la maladie rénale chronique
7. Prise en charge
7.1. Prise en charge étiologique
7.1.1. Prise en charge de l‘hypertension artérielle et du débit protéinurie
7.1.2. Prise en charge du diabète
7.1.3. Limitation des apports en protéines
7.1.4. Limiter l‘iatrogénie : éviter l‘aggravation aigue d‘une IRC
7.2. Prise en charge du retentissement
7.2.1. L‘anémie
7.2.2. L‘acidose métabolique
7.2.3. L‘hyperkaliémie
7.3. Traitements de suppléance
7.3.1. La transplantation rénale
7.3.2. L‘hémodialyse
7.3.2.1. Généralités
7.3.2.2. Principes
7.3.2.3. Réalisation pratique
7.3.2.4. Clinique
7.3.3. La dialyse péritonéale
7.3.3.1. Généralités
7.3.3.2. Principes
7.3.3.3. Réalisation pratique
7.3.3.4. Clinique
7.4. Surveillance biologique de l‘hémodialysé
8. Prévention
DEUXIEME PARTIE
1. Objectif
2. Type d‘étude
3. Cadre de l‘étude
4. Considérations éthiques
5. Matériels et méthodes
5.1. Organisation de la prise en charge des patients au niveau du centre
5.2. Population d‘étude
5.3. Estimation du débit de filtration glomérulaire (DFG) et de la clairance de la créatinine
5.4. Autres paramètres biologiques étudiés
5.5. Outils de dialyse
5.5.1. Le générateur de dialyse
5.5.2. Types de concentrés
5.6. Collecte des données
5.7. Méthodes statistiques
6. Résultats
6.1. Caractéristiques socio-démographiques de la population d‘étude
6.1.1. Le genre
6.1.2. L‘âge
6.1.3. Lieu de résidence
6.1.4. Niveau d‘instruction
6.1.5. Profession
6.2. Caractéristiques cliniques
6.2.1. Stades de la maladie rénale chronique
6.2.2. Facteurs de comorbidités associés
6.3. Données biologiques à l‘inclusion en dialyse
6.4. Données biologiques au cours du suivi en dialyse
6.5. Données dialytiques
6.6. Données thérapeutiques
6.7. Projet de greffe
DISCUSSION
CONCLUSION ET RECOMMANDATIONS
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
ANNEXES