Rappels bibliographiques : principales méthodes de synthèse des cyclopropanes

En raison de leur présence dans de très nombreux produits naturels ou synthétiques biologiquement actifs ainsi que de leur réactivité, liée à leur structure particulière et à leur tension de cycle, la synthèse de composés cyclopropaniques a suscité un grand intérêt auprès des chimistes organiciens.

Rappels bibliographiques : principales méthodes de synthèse des cyclopropanes 

La construction du cycle à trois chaînons peut être réalisée par différentes stratégies. Celles-ci se différencient par l’analyse rétrosynthétique sur laquelle elles reposent et les synthons impliqués .

Deux liaisons du cyclopropane peuvent être formées simultanément par interaction entre un carbène et une oléfine [Schéma 4, stratégie (a)]. La formation de ces deux liaisons peut également avoir lieu de manière séquentielle et monotope par couplage entre un synthon gem-dinucléophile et un 1,2-bis-électrophile [Schéma 4, stratégie (b)] ou, inversement, un synthon gem-diélectrophile et un 1,2-bis-nucléophile [Schéma 4, stratégie (c)]. Une autre approche consiste à coupler deux synthons 1,1- et 1,2-difonctionnalisés susceptibles de se comporter une première fois comme nucléophile et électrophile respectivement, puis inversement dans un second temps [Schéma 4, stratégie (d)].

Les stratégies correspondant aux analyses rétrosynthétiques (b), (c) et (d) font toutes intervenir, une fois la première liaison du futur cycle à trois chaînons formée, un intermédiaire 1,3-difonctionnalisé et la fermeture du cycle est alors finalement réalisée grâce à une cyclisation ionique. A partir de précurseurs 1,3-difonctionnalisés convenablement substitués, le cycle à trois chaînons peut être directement formé par cyclisation ionique [Schéma 4, stratégie (e)] ou, plus rarement, par cyclisation radicalaire [Schéma 4, stratégie (f)].

Cycloaddition [2+1] [Schéma 4, stratégie (a)]

Cyclopropanation d’oléfines par des carbènes ou des carbénoïdes

La voie d’accès la plus classique aux cyclopropanes est une cycloaddition [2+1], concertée et stéréospécifique, entre une oléfine et un carbène (singulet) ou un réactif se comportant comme tel chimiquement (carbénoïde). C’est à cette stratégie que nous avons eu recours pour préparer tous les cyclopropanes intervenant dans nos travaux. La déprotonation du chloroforme ou du bromoforme par une base forte (t BuOK par exemple) en milieu organique, ou encore par la soude en catalyse par transfert de phase, constitue une excellente méthode de synthèse de gem dihalogénocyclopropanes. La décomposition thermique des organomercuriques PhHgCX3 (X = Br, Cl) est une méthode également employée qui permet d’opérer dans des conditions neutres (Tableau 1, entrée 1). Les carbénoïdes métalliques, engendrés à partir du diiodométhane ou du chloroiodométhane, constituent des réactifs de choix pour réaliser la cyclopropanation d’oléfines avec insertion d’une unité « méthylène ». Depuis la découverte de la réaction par Simmons et Smith en 1958,  les plus importants développements ont été réalisés avec les carbénoïdes zinciques, bien que l’utilisation des carbénoïdes d’aluminium, de samarium ou encore de magnésium ait aussi été décrite (Tableau 1, entrée 2). La combinaison de CH2I2 avec du zinc métallique ou avec le couple Zn(Cu) dans un solvant éthéré, initialement utilisée pour engendrer le carbénoïde ICH2ZnI (Tableau 1, entrée 3), a été supplantée par les systèmes ICH2X / Et2Zn (X = I, Cl) qui conduisent, par échange iode/zinc, aux carbénoïdes de zinc XCH2ZnEt ou (XCH2)2Zn, selon la stœchiométrie des réactifs, et permettent d’opérer dans des solvants non complexants (Tableau 1, entrées 4 et 5). Etant donné le caractère électrophile du carbénoïde, la cyclopropanation des oléfines riches en électrons est plus efficace. De plus, la présence d’un groupement complexant (basique au sens de Lewis) en position allylique ou homoallylique accélère la cyclopropanation de façon significative et permet d’en contrôler la diastéréosélectivité le cas échéant.

Les carbénoïdes de type ICH2Zn(OR), dans lesquels R est un groupement électroattracteur [R = 2,4,6-trichlorophényle, R = P(=O)(On-Bu)2, R = COCF3 ], sont beaucoup plus réactifs et bien adaptés pour la cyclopropanation d’une grande variété d’alcènes, y compris ceux dépourvus de groupement complexant au voisinage de la double liaison .

Cyclopropanation d’oléfines par des complexes métalliques de carbènes 

La cyclopropanation des oléfines peut être réalisée par des complexes métalliques de carbènes. Ceux-ci sont habituellement engendrés par décomposition d’un composé diazo en présence d’un sel ou d’un complexe de métal de transition en quantité catalytique, ceux dérivés du cuivre et du rhodium ayant été les plus utilisés [Schéma 6, équation (a)].  Cette fois, l’utilisation de ligands chiraux du métal permet d’accéder potentiellement à des cyclopropanes optiquement enrichis. Cependant, un catalyseur est souvent bien adapté à une classe particulière de substrats et les meilleurs résultats ont été obtenus en version intramoléculaire avec les complexes dinucléaires de rhodium(II) (tétracarboxylates ou tétracarboxamides).

Signalons que le complexe métal-carbène peut également être engendré par d’autres processus, tels que :
– une métathèse entre un carbène métallique et un alcyne (processus stœchiométrique  ou catalytique ) [Schéma 6, équation (b)],
– la cycloisomérisation d’énynes catalysée par les complexes de certains métaux électrophiles (platine, or, …) [Schéma 6, équation (c)]. Dans ce cas particulier, les carbènes métalliques, engendrés par attaque nucléophile de la double liaison sur la triple liaison activée par le métal, possèdent un motif bicyclo[n.1.0]alcane. Ces carbènes évoluent généralement par des réarrangements de squelette cependant quelques exemples de cyclopropanations intra- et intermoléculaires d’oléfines ont été rapportés.
– le réarrangement de carboxylates propargyliques par assistance du carbonyle et migration-1,2 du groupe acyloxy [Schéma 6, équation (d)],
– l’ouverture de cyclopropènes en vinylcarbènes métalliques [Schéma 6, équation (e)].

La stratégie reposant sur l’analyse rétrosynthétique (d) (Schéma 4) correspond au couplage initial d’un dérivé gem-difonctionnalisé, agissant tout d’abord comme nucléophile, avec un synthon 1,2-difonctionnalisé se comportant comme électrophile, suivi d’une cyclisation ionique. La réaction initiale représentative est l’addition de Michael d’un nucléophile carboné, substitué par un groupe partant, sur une double liaison appauvrie en électrons (substituée par un groupe électroattracteur). Le carbanion peut être stabilisé par le groupement R3 (R3 = GEA) et, dans ce cas, le groupe partant le plus classique est un atome d’halogène. Cependant, le groupe partant peut lui-même contribuer à la stabilisation du carbanion comme c’est le cas avec les anions dérivés de sulfones, les ylures de phosphonium, de sulfonium, de sulfoxonium ou d’ammonium (GP = SO2Ar, + PR3, + SR2, + S(=O)R2, +NR3 (Schéma 10).

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 : Étude bibliographique : couplages croisés métallo-catalysés impliquant des organométalliques ou des halogénures cyclopropaniques
1 – Rappels bibliographiques : principales méthodes de synthèse des cyclopropanes
1.1 – Cycloaddition [2+1] [Schéma 4, stratégie (a)]
1.1.1 – Cyclopropanation d’oléfines par des carbènes ou des carbénoïdes
1.1.2 – Cyclopropanation d’oléfines par des complexes métalliques de carbènes
1.2 – Formation séquentielle monotope de deux liaisons du cyclopropane [Schéma 4, stratégies(b), (c) et (d)]
1.3 – Formation de cyclopropanes par cyclisation 3-exo-tet ou 3-exo-trig
1.3.1 – Cyclisation ionique [Schéma 4, stratégie (e)]
1.3.2 – Cyclisation radicalaire [Schéma 4, stratégie (f)]
1.4 – Bilan
2 – Rappels bibliographiques : additions sur les cyclopropènes
2.1 – Hydrogénation, hydroformylation, hydroacylation et hydroalcynylation de cyclopropènes
2.1.1 – Hydrogénation
2.1.2 – Hydroformylation, hydroacylation et hydroalcynylation
2.2 – Hydrométallations et métallométallations de cyclopropènes
2.2.1 – Hydrométallations
2.2.2 – Métallométallations
2.3 – Carbométallations de cyclopropènes
2.3.1 – Carbométallations catalysées par le fer
2.3.2 – Carbométallations catalysées par le cuivre
3 – Couplages croisés impliquant des organométalliques ou des halogénures cyclopropaniques
3.1 – Généralités
3.2 – Formation de liaisons carbone-carbone par couplages croisés impliquant des organométalliques cyclopropaniques
3.2.1 – Couplages de Corriu-Kumada (réactifs de Grignard cyclopropaniques)
3.2.2 – Couplages de Negishi (organozinciques cyclopropaniques)
3.2.3 – Couplages de Stille (cyclopropylstannanes)
3.2.4 – Couplages de Suzuki-Miyaura (cyclopropylboranes)
3.2.4.1 – Acides cyclopropylboroniques
3.2.4.2 – Cyclopropylboronates
3.2.4.3 – Cyclopropyl-MIDA-boronates
3.2.4.4 – Cyclopropyltrifluoroborates de potassium
3.2.5 – Couplages d’Hiyama-Denmark
3.3 – Formation de liaisons carbone-carbone par couplages croisés impliquant des halogénures cyclopropaniques
3.3.1 – Cas particulier des gem-dihalogénocyclopropanes
3.3.2 – Cas des monohalogénocyclopropanes
3.3.2.1 – Couplages de Suzuki-Miyaura
3.3.2.2 – Couplage de Negishi
3.4 – Formation de liaisons carbone-hétéroatome à partir d’organométalliques ou d’halogénures cyclopropaniques
3.4.1 – A partir d’organométalliques cyclopropaniques
3.4.2 – A partir d’halogénures cyclopropaniques
3.5 – Bilan
Chapitre 2 : Synthèse de cyclopropanes hétérosubstitués par couplages croisés pallado-catalysés
1 – Couplages croisés pallado-catalysés impliquant des 2-alcoxycyclopropyl métaux
1.1 – Synthèse de 2-alcoxycyclopropyl métaux cis- et trans-1,2-disubstitués
1.1.1 – Synthèse de trans-2-alcoxycyclopropyl métaux C1
1.1.1.1 – Analyse rétrosynthétique
1.1.1.2 – Etude des différentes voies de synthèse
1.1.2 – Synthèse de cis-2-alcoxycyclopropylboranes C2
1.1.2.1 – Analyse rétrosynthétique
1.1.2.2 – Synthèse de cis-2-benzyloxycyclopropylboranes
1.2 – Couplages croisés pallado-catalysés impliquant des 2-benzyloxycyclopropyl métaux
1.2.1 – Couplage d’Hiyama-Denmark
1.2.2 – Couplages de Suzuki-Miyaura impliquant des 2-benzyloxycyclopropylboronates
1.2.2.1 – Premiers essais
1.2.2.2 – Optimisation du système catalytique et des conditions opératoires
1.2.2.3 – Couplages dans les conditions opératoires précédemment optimisées : bilan et perspectives
2 – Développement de couplages d’Hartwig-Buchwald impliquant des iodures cyclopropaniques
2.1 – Aminations d’Hartwig-Buchwald intermoléculaires
2.1.1 – Synthèse des 2-iodocyclopropaneméthanols 25 et 26
2.1.2 – Essais d’aminations intermoléculaires d’Hartwig-Buchwald
2.2 – Aminations d’Hartwig-Buchwald intramoléculaires
2.2.1 – Préparation des substrats requis pour l’étude
2.2.2 – Essais de cyclisation de l’amide 40
2.2.3 – Essais de cyclisation de l’amide 43
2.2.4 – Essais de cyclisation de l’amine 45 catalysés par le palladium
2.2.5 – Essais de cyclisation de l’amine 45 catalysés par des sels de cuivre ou de fer
2.3 – Bilan
Chapitre 3 : Couplages de Sonogashira impliquant des iodures cyclopropaniques substitués
1 – Couplages de Sonogashira impliquant des 2-iodocyclopropylméthanols
1,2-disubstitués
1.1 – Essais préliminaires
1.2 – Couplages de Sonogashira de 2-iodocyclopropylméthanols 1,2-disubstitués avec divers alcynes terminaux
1.2.1 – Couplages de Sonogashira impliquant le cis-2-iodocyclopropylméthanol 25 et son éther de p-méthoxybenzyle 56
1.2.2 – Couplages de Sonogashira impliquant le trans-2-iodocyclopropylméthanol 26
2 – Couplages de Sonogashira impliquant des 2-iodocyclopropylméthanols trisubstitués
2.1 – Préparation des substrats requis pour l’étude
2.2 – Couplages de Sonogashira impliquant des 2-iodocyclopropylméthanols trisubstitués
2.2.1 – Réactivité de l’iodure cyclopropanique 73
2.2.2 – Réactivité de l’iodure cyclopropanique 76
2.2.3 – Réactivité de l’iodure cyclopropanique 79
3 – Couplages de Sonogashira impliquant des dérivés de l’acide 2-iodocyclopropanecarboxylique
3.1 – Préparation des substrats requis pour l’étude
3.2 – Couplages de Sonogashira impliquant des dérivés de l’acide 2-iodocyclopropanecarboxylique
3.2.1 – Etude préliminaire
3.2.2 – Réactivité des 2-iodocyclopropanecarboxamides 90 et 94
3.2.3 – Réactivité d’autres dérivés de l’acide 2-iodocyclopropanecarboxylique
4 – Bilan
Conclusion générale

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