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Physiopathologie de la survenue des infections chez le brûlé
L’infection est un débordement des moyens de défense de l’organisme par la virulence des germes. La fréquence et la gravité des infections s’expliquent par la rupture de la barrière cutanée, les dispositifs invasifs mais aussi par l’existence d’une dépression immunitaire marquée. Cette dernière, touche aussi bien l’immunité humorale que l’immunité cellulaire. Elle est en relation avec les effets suppresseurs de certains médiateurs de l’inflammation déversés massivement dans la circulation et est aggravée par la dénutrition. La présence, après quelques jours d’évolution, de germes pathogènes au niveau d’une brûlure doit être considérée comme normale tant qu’il n’existe pas de signes d’infection locale ou générale et ne nécessite aucun traitement particulier. Les germes les plus souvent en cause dans ces complications septiques sont Pseudomonas aeruginosa et Staphylococcus aureus. L’infection peut avoir une origine endogène, à partir de la peau ou du tube digestif, ou exogène, par contamination à partir de l’air, des dispositifs invasifs, des objets ou du personnel soignant [22].
Plusieurs sites d’infection sont retrouvés chez le brûlé grave et sont principalement la peau, le sang, les urines et les poumons.
Facteurs de survenue
Les facteurs intrinsèques
Ils sont liés à la gravité de la brûlure : le mécanisme, sa SCB, sa profondeur sa localisation, le terrain et les lésions associées [22].
Parmi les mécanismes, l’électrisation constitue un facteur particulier de complications infectieuses. En effet en plus des lésions de brûlures thermiques, le courant électrique est pourvoyeur de lésions musculaires profondes exposant très souvent à des infections à anaérobies [22].
L’importance de la surface brûlée et de la profondeur augmentent le risque infectieux sur peau brûlée à cause des escarres induits et de l’allongement des délais de cicatrisation. La surface brûlée, siège des nécroses cellulaires et de transsudation devient rapidement un milieu propice à la pullulation microbienne. De plus, les moyens de défense de l’organisme sont abaissés, la peau étant détruite. Donc la majoration de ses différents facteurs contribue à diminuer la résistance immunitaire ou à diminuer la perfusion tissulaire du patient, favorisant ainsi la survenue d’infection chez le brûlé [22].
Concernant les localisations, les brûlures du périnée sont les plus pourvoyeuses de complications infectieuses [74].
La brûlure survenant chez des patients porteurs de pathologies chroniques telles que le diabète ou sujets à des traitements immunosuppresseurs se compliquent facilement d’infections. Ce qui justifie souvent la mise en œuvre rapide d’un traitement anti-infectieux par voie générale devant toute suspicion d’infection [74].
Les lésions associées à la brûlure telles que les fractures ouvertes sont souvent responsables de complications infectieuses précoces [19].
Les facteurs extrinsèques
Ils sont liés aux soins en milieu de réanimation. L’écologie bactérienne hospitalière et les gestes invasifs de réanimation sont hautement pourvoyeurs d’infections nosocomiales qui sont graves chez le brûlé en raison du terrain d’immunodépression chez ce dernier [22].
Conséquences de l’infection sur l’organisme
Au niveau locorégional
Les phénomènes de thromboses capillaires dues à la prolifération microbienne entraînent des troubles de la cicatrisation et l’absence de prise de greffe [26].
Si le moyen de défense naturelle cellulaire et humorale est renforcé, les germes vont envahir les conduits lymphatiques et veineux hypodermiques. Cette propagation loco régionale se fait probablement au stade de revascularisation du tissu sous cutané, nécrosé et colonisé [26].
A long terme la survenue de l’infection augmente l’incidence de la cicatrisation pathologique (cicatrices dyschromiques, cicatrices hypertrophiques, cicatrices rétractiles) [22].
Au niveau général
La survenue d’infection chez le brûlé va entrainer une réponse de l’organisme. Il s’agira d’une réponse inflammatoire excessive déjà amorcée par la brûlure elle-même. La présence de certains composants de la membrane des agents pathogènes va induire la libération en cascade de différents médiateurs, dont les cytokines. La libération de médiateurs pro-inflammatoires caractérise la phase initiale du sepsis. La persistance de ce dernier entraîne une immunodépression acquise, liée à un profil anti-inflammatoire. Lors d’un sepsis, des cytokines sont plutôt pro-inflammatoires (TNF-α, interleukine-1ß notamment), tandis que d’autres, produites de façon concomitante ou secondaire, sont plutôt anti-inflammatoires (IL-10 en particulier). En fait, la plupart des cytokines ont des effets multiples et intriqués ; elles sont médiatrices des défenses immunitaires, mais aussi de manifestations pathologiques. De très nombreux autres médiateurs interviennent : systèmes de la coagulation ou du complément, système contact, produits de dégradation des phospholipides membranaires, métabolites de l’acide arachidonique, radicaux libres, monoxyde d’azote. L’endothélium joue un rôle clé dans la survenue de la défaillance vasculaire au cours du sepsis par suite d’anomalies de la vasomotricité et de la thrombo-modulation. Le système régulateur anticoagulant est perturbé ; il existe une diminution de la protéine C avec inactivation de sa forme active, qui possède des propriétés pro-fibrinolytiques, ainsi qu’une diminution de l’antithrombine III [22].
Le TNFα et l’IL-1ß semblent être particulièrement incriminés dans le déclenchement des manifestations graves observées au cours du choc septique. Ces cytokines entraînent en effet la libération de nombreux autres médiateurs : NO (monoxyde d’azote), molécules d’adhésion, médiateurs lipidiques (PAF), cytokines pro-inflammatoires (IL-6, IL-8, interférons) et des cytokines anti-inflammatoires (récepteurs solubles au TNF, IL-4, IL-10, etc.) [22].
L’activation cellulaire et la libération des médiateurs pro-inflammatoires sont responsables d’altérations cellulaires et microcirculatoires qui vont s’étendre au système vasculaire et entraîner :
une augmentation de la perméabilité capillaire ;
une défaillance cardiocirculatoire, qui associe une hypovolémie absolue (hyperperméabilité capillaire, augmentation des pertes insensibles, troisième secteur) à une hypovolémie relative par vasodilatation périphérique. On note en outre une atteinte myocardique précoce conduisant à une altération de la fonction systolique ventriculaire mais réversible. L’élément prédominant reste cependant la vasoplégie artérielle et veineuse, qui conditionnera le traitement symptomatique initial (remplissage + drogues vasoconstrictives) ; une modification de la régulation de la perfusion de chaque organe à l’origine d’une maldistribution des débits sanguins régionaux, entraînant une diminution de la perfusion tissulaire, une altération de la microcirculation et l’apparition de dysfonctions d’organes ; une activation de la coagulation, conduisant à une coagulation intravasculaire disséminée (CIVD). Cette CIVD est fréquente (environ 30 % des cas), d’intensité variable, corrélée à la survenue d’un syndrome de défaillance multiviscérale et à la mortalité [22].
Diagnostic
Diagnostic positif
Les critères de SRIS ne sont pas toujours prédictifs d’infection chez le brûlé. En effet toute brûlure > 20 % de la SCT et/ou toute brûlure avec lésion d’inhalation de fumée est susceptible de présenter les critères de SRIS en dehors de tout processus infectieux [36].
Tout SRIS d’apparition et d’évolution non justifiées par la brûlure est prédictif d’infection. Les critères diagnostiques d’une infection chez le brûlé sont :
– l’apparition des signes locaux positifs chez un patient dont les lésions sont <20% de la SCT et n’ayant pas de lésions d’inhalation de fumées ;
– la présence d’au moins 2 des 4 critères ci-dessous chez un patient porteur d’une brûlure > 20 % de la SCT et/ou de lésions d’inhalation de fumée ;
– une température > 39, 5°C ou < 35,5°C ;
– une augmentation de 50 % de la fréquence cardiaque basale ;
– une augmentation de 50 % de la fréquence respiratoire basale ;
– une augmentation ou diminution de 100 % du nombre de leucocytes ;
– une défaillance hémodynamique nécessitant l’instauration ou l’augmentation des posologies d’un traitement par les catécholamines [36].
Les infections cutanées
Critères cliniques
Il s’agit de la présence d’une réaction inflammatoire locale ou locorégionale, et/ou une évolution locale défavorable et inattendue [45].
Au niveau des brûlures : on note la présence de pus, une détersion et des séparations rapides, l’apparition de tâches noirâtres traduisant une nécrose ou une hémorragie, la conversion inexpliquée d’une lésion superficielle en profonde au-delà de la 48e heure [36].
Au niveau des prises de greffe : on note la présence de pus, un retard de cicatrisation inexpliqué ou des escarres [36].
Au niveau des greffes : on note la présence de pus, une lyse des greffes ou une nécrose de la graisse située sous la greffe [36].
Au niveau des zones cicatrisées : on a un impétigo ou une lyse des zones guéries [36].
Critères paracliniques
Ils sont destinés à connaître le(s) germe(s) en cause. Le plus souvent un simple écouvillonnage suffit. La biopsie n’est jamais systématique, elle peut être réalisée dans les cas difficiles [36].
Un examen microbiologique qui consiste à l’apposition d’une empreinte sur une lame avec coloration et mesure semi-quantitative des germes. La quantification des pathogènes présents par gramme de tissu après broyat sera réalisée : le seuil de 105 UFC/g est retenu comme significatif du risque de dissémination hématogène [36].
Un examen anatomopathologique extemporané après congélation est également possible. Il permettra d’apprécier la notion d’invasivité et de différencier une colonisation qui est la présence de germes dans les tissus non vascularisés d’une infection qui indique présence de germes dans les tissus vivants et au contact des vaisseaux [36].
Les pneumopathies
Elle se manifeste par la présence de signes généraux, et celle ou non de signes spécifiques d’organe. Les critères diagnostiques sont les suivants :
– au moins un des signes suivants, ou deux en l’absence de critères microbiologiques : il s’agit de l’apparition de sécrétions purulentes ou modification de leurs caractéristiques, d’une dyspnée, une tachypnée ou une toux, si le patient n’est pas sous ventilation mécanique, d’une hypoxémie d’apparition ou d’aggravation récente ;
– deux clichés radiographiques au moins, avec une nouvelle image évocatrice de pneumopathie ou la modification d’une image précédente [44].
– Un des critères suivants permet le diagnostic microbiologique : le lavage broncho-alvéolaire (LBA) avec un seuil de 104 UFC/ml ou ≥ 5 % de cellules avec inclusion bactériennes à l’examen direct ; avec la brosse de Wimberley, un seuil de 103 UFC/ml est retenu ; avec le brossage bronchique protégé (BBP) un seuil de 103 UFC/ml est retenu ; avec l’aspiration bronchique quantitative, un seuil de 106 UFC/ml est retenu ; une hémoculture ou un prélèvement de tissu bronchique ou de liquide pleural positif en l’absence d’autre source infectieuse [45].
Les infections urinaires
Les critères de diagnostic diffèrent selon qu’il s’agit d’une bactériurie asymptomatique ou symptomatique [44]. La bactériurie asymptomatique est définie :
chez un patient porteur d’une sonde urinaire les 7 jours précédents avec présence d’une uroculture quantitative positive (≥ 105 UFC/ml), sans qu’il y ait plus de 2 espèces bactériennes différentes, et une absence de signes cliniques [44] ;
chez un patient non porteur de sonde urinaire les 7 jours précédents, présence de deux urocultures quantitatives consécutives positives aux mêmes micro-organismes (≥105 UFC/ml), sans qu’il y ait plus de 2 espèces bactériennes différentes et une absence de signes cliniques [44].
La bactériurie symptomatique quant à elle est définie par l’association, chez un sujet porteur de sonde urinaire ou non :
d’un des signes cliniques suivants : une fièvre avec température > 38°C sans autres localisations infectieuses, une envie impérieuse d’uriner, une dysurie, une pollakiurie ou une sensibilité sus-pubienne ; et un des critères suivants : une uroculture quantitative positive (105 UFC/ml), sans qu’il y ait plus de 2 espèces bactériennes différentes ; une bandelette urinaire positive pour l’estérase leucocytaire et/ou les nitrites ; une pyurie avérée (> 10 leucocytes/mm3) ; l’observation de micro-organismes sur coloration de Gram des urines non centrifugées ; l’isolement répété de la même bactérie à Gram négatif sur 2 urocultures quantitatives (≥ 102 UFC/ml) ; l’isolement d’un micro-organisme pathogène sur uroculture quantitative (≤102 UFC/ml) chez un patient recevant une antibiothérapie adéquate [44].
Les infections sur cathéter vasculaire
L’infection sur cathéter vasculaire se définit par une infection locale ou générale non bactériémique avec tous les critères suivants :
– l’absence d’hémoculture positive au même germe ;
– l’absence de signes généraux ;
– la culture CVC est positive avec la quantification de pathogènes supérieure à 103 UFC/ml ;
– la régression du syndrome infectieux dans les 48 heures suivant le retrait du cathéter [92].
La confrontation des résultats microbiologiques et des données de la clinique permet d’indiquer que l’infection est liée au cathéter si : la culture du cathéter est positive associée à une bactériémie dans les 48h encadrant le retrait du cathéter avec un micro-organisme identique à celui isolé du cathéter ou si la culture du cathéter est positive sans bactériémie due à un micro-organisme identique à celui isolé du cathéter, mais les signes infectieux régressent totalement ou partiellement dans les 48h suivant l’ablation [92].
Dans la majorité des deux cas, la concentration des micro-organismes isolés du cathéter est supérieure au seuil défini [92].
Les bactériémies
Elle se manifeste par la présence de signes généraux, associés à une (des) hémoculture(s) positive(s) :
– au moins une hémoculture positive à un germe réputé pathogène prélevée au pic thermique ;
– deux hémocultures positives, à 48 heures d’intervalle maximum, prélevées au pic thermique pour les germes suivants : Staphylococcus à coagulase négative, Bacillus sp., Corynebacterium sp., Propionobacterium sp., Micrococcus sp., Acinetobacter sp. [44] ;
– une bactériémie peut être primitive sans foyer infectieux identifié, ou secondaire avec un foyer infectieux identifié [90].
Le diagnostic associera donc les signes de bactériémie à ceux de l’organe considéré. Dans le cas particulier d’une bactériémie lié au cathéter veineux central, il faudra : un diagnostic de bactériémie, avec hémoculture positive au même germe, survenant dans les 48 heures encadrant le retrait du cathéter en l’absence d’autres foyers infectieux et une régression du syndrome infectieux dans les 48 heures suivant le retrait du cathéter [44, 90].
Diagnostic de gravité de l’infection
Sur le plan clinique
Les principaux signes cliniques de gravité sont contenus dans les définitions des états infectieux graves et du choc septique chez les brûlés. Ils comportent une tachycardie, une hypotension artérielle, des marbrures cutanées, une polypnée, une encéphalopathie septique (agitation, confusion, troubles de conscience pouvant parfois conduire à un coma profond), une oligoanurie. L’état de choc septique sera évoqué préférentiellement en cas d’infection connue, de frissons, de fièvre ou d’hypothermie [85].
Sur le plan paraclinique
Sur un plan biologique, on peut noter une hypoxémie parfois sévère en cas de syndrome de détresse respiratoire aiguë, une acidose métabolique avec un pH inférieur à 7,38, une réserve alcaline inférieure à 25, une hyperlactatémie supérieure à 2 mmol/L, une insuffisance rénale aiguë avec une augmentation de l’urée sanguine et de la créatininémie, un syndrome cytolytique et rétentionnel, une CIVD (consommation des facteurs de la coagulation avec un taux de prothrombine abaissé, associé à une élévation du TCA, une diminution du taux des plaquettes et une fibrinolyse, visualisée par une augmentation des PDF ou des D-dimères). On note fréquemment une hyperleucocytose, parfois une neutropénie transitoire. Il existe souvent un syndrome inflammatoire avec augmentation de la protéine C réactive et/ou de la procalcitonine [85].
Diagnostic étiologique de l’infection
Les facteurs étiologiques
Les facteurs intrinsèques
Le risque d’infection chez le brûlé est augmenté par tout facteur contribuant à affaiblir le patient, sa résistance immunitaire ou à diminuer la perfusion tissulaire. Ce sont essentiellement :
– les comorbidités : le diabète sucré, l’immunodépression, l’hypoxie par mauvaise perfusion tissulaire causée par une anémie ou une pathologie artérielle/cardiaque/respiratoire, l’insuffisance rénale, une tumeur cancéreuse, la polyarthrite rhumatoïde, l’obésité ou la malnutrition ;
– les âges extrêmes (< 1 an ou > 60 ans) [83].
Une neutropénie une infection à distance favoriserait la survenue d’infections sur cathéter vasculaire [35, 89].
Les lésions d’inhalation de fumée et les brûlures respiratoires sont incriminées dans les infections pulmonaires [58].
L’étendue de la SCB faciliterait les infections cutanées et urinaires. Dans ce dernier cas elle augmenterait la durée du sondage urinaire [35, 89].
Les facteurs extrinsèques
Ils peuvent être limités car ne pouvant venir que de l’entourage. Cet entourage est représenté par l’atmosphère du milieu hospitalier, le matériel de service, les accompagnants, les personnels soignants et les autres malades. On distingue :
la contamination aéroportée : Elle se fait à partir des germes provenant de la pollution de l’ensemble du service. Ces pathogènes sont en majeure partie constitués par les staphylocoques ;
la contamination manu-portée : ce mode de contamination est plus fréquent et dangereux pour les brûlés. Elle se fait par : le personnel traitant, le matériel du service ou les autres malades [26].
Ce sont surtout ces germes qui sont redoutables par leur virulence et leurs multi-résistances aux antibiotiques [26].
Concernant les infections pulmonaires, les facteurs exogènes dépendent du type de ventilation notamment avec le maintien d’une sonde d’intubation, de la durée de la ventilation, et du changement fréquent des circuits du respirateur. L’immobilisation, le décubitus dorsal, la mise en place d’une sonde gastrique et la prescription d’antiacides sont aussi incriminés en favorisant les micro inhalations par reflux et en facilitant la colonisation trachéo-bronchique [58].
Les sondages vésicaux sont surtout des facteurs de survenue d’infections urinaires [35].
Les mauvaises conditions de pose, l’utilisation de cathéter en polyéthylène, le cathéter à voie multiple, l’utilisation d’un cathéter veineux central, le recours à la voie jugulaire, la pause de cathéter à proximité ou à travers les lésions de brûlures sont des facteurs de survenue d’infections sur cathéter et de bactériémies [58, 89].
Les pathogènes
Les principaux groupes de pathogènes isolés dans les infections chez les brulés sont : les entérobactéries, les bacilles gram négatif non fermentaires, les staphylocoques les streptocoques et les champignons [6].
Les entérobactéries sont fréquemment rencontrées chez les sujets victimes de brûlure du fait qu’elles constituent la flore commensale du tube digestif. Chez ces derniers, les principales entérobactéries rencontrées sont : Klebsiella pneumoniae, Escherichia coli, Proteus mirabilis, Enterobacter aerogenes, Enterobacter cloacae et Serratia marscescens [56].
Les bacilles gram négatifs non fermentaires sont familiers des établissements de santé. En effet elles résistent aux intempéries et s’incrustent parfaitement dans l’environnement des malades (draps, rideaux, lits). Il s’agit essentiellement du Pseudomonas aeruginosa et de l’Acinetobacter baumanii [56].
Les infections cutanées
Avant l’avènement des antibiotiques, Streptococcus pyogenes (streptocoques bêta-hémolytiques du groupe A) était le pathogène prédominant dans les infections cutanées des brûlés [11, 26]. Par la suite il est remplacé par Staphylococcus aureus peu après l’introduction de la pénicilline G, au début des années 1950 [26].
Bien que Staphylococcus aureus reste une cause fréquente d’infection précoce de plaie de brûlure, Pseudomonas aeruginosa de la flore gastro-intestinale endogène du patient et / ou d’une source de l’environnement, est la cause la plus commune d’infections cutanées dans de nombreux CTB [4].
L’incidence des infections dues à des microbes moins couramment rencontrés, tel que certaines bactéries à Gram positif et à Gram négatif, les champignons et les virus, a également augmenté de façon constante durant les dernières décennies [26,11].
Bien que moins courantes, les infections dues à des bactéries anaérobies se produisent généralement secondairement à des brûlures électriques.
Les champignons pathogènes, notamment Candida sp., sont de plus en plus fréquent du fait de l’utilisation importante d’agents topiques et systémiques à large spectre. Ils ont également démontré un degré croissant de résistance aux antifongiques [8].
Les pneumopathies
Les principaux pathogènes responsables des pneumopathies sont : les bacilles à Gram négatif (60%) dominés par Pseudomonas sp. (30%), avec l’incidence croissante d’Acinetobacter sp. (10 à 12% des pneumonies) ; le groupe Klebsiella, Escherichia, Serratia (8%), et les staphylocoques (30% de Staphyloccocus aureus et 10% de Staphyloccocus épidermidis). Il faut noter la place non négligeable des agents fongiques dont Candida sp. (10%). Streptoccocus pneumoniae et Haemophilus influenzae sont responsables de pneumonies précoces. Les anaérobies sont difficiles à mettre en évidence [14, 26].
Les infections urinaires
Les micro-organismes responsables des infections urinaires se caractérisent par leur multi-résistance aux antibiotiques et sont par ordre de fréquence décroissante : Escherichia coli, Entérocoques, Pseudomonas aeruginosa, et les entérobactéries du genre Klebsiella, Enterobacter, Serratia et Candida sp. [26, 35].
Les infections sur cathéter vasculaire
Les staphylocoques sont en cause dans 30 à 50% des cas. Staphylococcus epidermidis est moins souvent responsable que Staphylococcus aureus. Les bactéries à Gram négatif et les champignons sont peu fréquents. De nouveaux pathogènes peuvent être en cause particulièrement chez les sujets immunodéprimés comme : Acinetobacter sp., Micrococcus sp., Bacillus sp. [26].
Les bactériémies
Les micro-organismes les plus fréquemment retrouvés sont Acinetobacter baumannii, Staphylococcus aureus, Pseudomonas aeruginosa, les entérobactéries et les entérocoques. Les bactéries à Gram positif, en particulier Staphylococcus aureus et les staphylocoques à coagulase négative résistant à la méticilline, sont aussi observés en général à la 1ère semaine. Pseudomonas aeruginosa, Escherichia coli et Klebsiella pneumoniae sont les plus fréquentes dans l’ordre décroissant [38]. Pseudomonas aeruginosa est associé à une plus grande mortalité [26].
Traitement
Buts
Les buts du traitement seront :
– de lutter contre l’infection ;
– d’éviter les complications.
Moyens
Les moyens médicaux
Les antibiotiques
Les principales familles d’antibiotiques utilisées sont les bétalactamines, les fluoroquinolones, les glycopeptides et les aminosides [77].
Les bétalactamines utilisées chez les brûlés sont : les pénicillines, les carboxypénicillines, les céphalosporines et les imipénèmes [77].
Au sein pénicillines on distingue :
– la cloxacilline et l’oxacilline qui sont administrées en en perfusion continue.
Leur posologie est de 150-200 mg/kg/J avec une dose de charge de 50/mg/kg ;
– l’amoxicilline administrée en perfusion continue. Sa posologie est de 150-200 mg/kg/J et la dose de charge de 50/mg/kg. Sa stabilité est de 6h avec un solvant NaCl. En cas d’administration à la seringue électrique, il faudra remplacer la seringue toutes les 6h [77].
Dans les carboxy ou ureidopénicillines nous retrouvons :
– la ticarcilline administrée en perfusion continue à raison de 150-200 mg/kg/J avec une dose de charge de 50/mg/kg. Sa stabilité est de 24h à 25°C ;
– la pipéracilline administré en perfusion continue à raison de 240-320 mg/kg/J avec une dose de charge de 50/mg/kg.
Les céphalosporines utilisées sont essentiellement celles de 3e génération :
– la céfotaxime administrée en perfusion continue avec une posologie de 100-150 mg/kg/J, la dose de charge est de 25/mg/kg ;
– la ceftazidime administrée en perfusion continue à raison de 100-150 mg/kg/J avec une dose de charge 25/mg/kg. Il est préférable de l’administrer en poches souples par pompe volumétrique en raison du risque de dégagement gazeux, mais l’administration continue à la seringue électrique est parfaitement possible [77].
Les imipenèmes sont administrés en perfusion continue à raison de 50-100 mg/kg/J et une dose de charge 10/mg/kg [77].
Dans la famille des fluoroquinolones nous retrouvons la ciprofloxacine. Elle est administrée de façon réitérée avec 3 à 4 injections par jour. La posologie est de 10 à 20 mg/kg par injection (dose totale 30-80 mg/kg/j). Il est perfusé en 30mn [77].
Chez les aminosides les principaux antibiotiques utilisés sont :
– l’amikacine administrée en dose unique journalière à raison de 30 mg/kg par injection en 60 minutes ;
– la gentamycine administrée en dose unique journalière à raison de 10 mg/kg par injection en 60 minutes [77].
– au sein des glycopeptides nous retrouvons la vancomycine administrée en perfusion continue à raison de 30 mg/kg par injection avec une dose de charge 5/mg/kg [77].
Il existe quelques règles essentielles à l’utilisation des antibiotiques chez le brûlé :
– Règle 1 : pas d’antibiotique en l’absence d’infection avérée ;
– Règle 2 : l’infection locale relève d’un traitement local ;
– Règle 3 : tenter de réduire l’inoculum bactérien ;
– Règle 4 : l’antibiothérapie est une urgence thérapeutique ;
– Règle 5 : choisir de préférence des antibiotiques bactéricides ;
– Règle 6 : savoir associer les antibiotiques en cas d’infection grave ;
– Règle 7 : adapter l’antibiothérapie ;
– Règle 8 : savoir pratiquer la désescalade / Savoir arrêter l’antibiothérapie ;
– Règle 9 : respecter les modalités d’administration [36, 77].
Les antiseptiques
Les topiques locaux sont essentiellement composés par :
– la sulfadiazine d’argent : c’est un topique bactéricide à large spectre. La résistance de germes est occasionnellement rapportée ;
– le cérium nitrate sulfadiazine d’argent : c’est un topique bactéricide à large spectre et antifongique. Il assure la protection mécanique d’autres topiques antibactériens ;
– la mafénide : topique bactériostatique utilisé comme traitement adjuvant dans l’invasion bactérienne des brûlures du 2ème degré profond et du 3è degré ;
– le nitrofurazone : à un large spectre. Une résistance élevée pour Escherichia coli et Staphylococcus aureus est notée, de même qu’une sensibilité moindre ou intermédiaire des Pseudomonas ;
– la vaseline salicylée topique : elle a une action antimicrobienne et une action kératinolytique. Elle trouve son indication chez les diabétiques, elle améliore la circulation locale des zones brûlées et intensifie l’activité de l’insuline [71].
Les autres moyens médicaux
Ils sont essentiellement représentés par :
– les solutés : on distingue les cristalloïdes et les colloïdes. Les cristalloïdes sont essentiellement constitués par le sérum salé et le Ringer lactate. Les colloïdes à l’instar du Dextran, de l’Albumine et de l’Hydroxy-éthylamidon sont également utilisés [43] ;
– les antipyrétiques : le principal antipyrétique utilisé est le paracétamol administré en intraveineuse en à raison de 15mg/kg/6h [87].
– les amines vasopressives : noradrénaline, adrénaline, dobutamine, dopamine [87].
Les moyens chirurgicaux
Ils sont essentiellement constitués par :
– les incisions de décharge et aponévrotomies ;
– les débridements ou détersions mécaniques ;
– les greffes cutanées ou lambeaux ;
– les amputations ;
– les pansements [80].
Autres moyens
Ils sont constitués par :
– l’oxygénothérapie qui peut aller du masque simple à la ventilation mécanique en passant par les masques à haute concentration, son objectif est de maintenir une bonne oxygénation tissulaire ;
– la kinésithérapie respiratoire afin d’éviter les atélectasies et de favoriser les expectorations ;
– l’hémodialyse dans les cas d’insuffisance rénale [85].
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : REVUE DE LA LITTERATURE
1. RAPPELS ANATOMOPHYSIOLOGIQUES ET PHYSIOPATHOLOGIQUES DE LA BRULURE
1.1. Anatomie et physiologie de la peau
1.1.1.Anatomie de la peau
1.1.1.1. L’épiderme
1.1.1.2. Le derme
1.1.1.3. L’hypoderme
1.1.2.Physiologie
1.2. Physiopathologie de la brûlure
1.2.1.Cascade immuno-inflammatoire chez le brûlé
1.2.2.Réaction locorégionale
1.2.3.Réaction générale
1.2.3.1. La température centrale
1.2.3.2. L’équilibre hormonal
1.2.3.3. L’immunité
1.2.4.Conséquences physiopathologiques
1.2.4.1. Hémodynamiques
1.2.4.2. Ventilatoires
1.2.4.3. Métaboliques
1.2.4.4. Rénales
1.2.4.5. Cicatrisation
1.3. Critères de gravité de la brûlure
1.3.1.Mécanisme des brûlures
1.3.1.1. Les brûlures thermiques
1.3.1.2. Les brûlures électriques
1.3.1.4. Les brûlures par radiation
1.3.2.Surface de la brûlure
1.3.3.La profondeur
1.3.4.La localisation
1.3.5.Le terrain
1.3.6.Les lésions associées
1.3.7.Les indices pronostiques
1.3.7.1. Indice de Baux modifié
1.3.7.2. Unité de brûlure standard (UBS)
1.3.7.3. Abbreviated burn severity index (ABSI)
2. PHYSIOPATHOLOGIE DE LA SURVENUE DES INFECTIONS CHEZ LE BRULE
2.1. Facteurs de survenue
2.1.1.Les facteurs intrinsèques
2.1.2.Les facteurs extrinsèques
2.2. Conséquences de l’infection sur l’organisme
2.2.1.Au niveau locorégional
2.2.2.Au niveau général
3. DIAGNOSTIC
3.1. Diagnostic positif
3.1.1.Les infections cutanées
3.1.1.1. Critères cliniques
3.1.1.2. Critères paracliniques
3.1.2.Les pneumopathies
3.1.3.Les infections urinaires
3.1.4.Les infections sur cathéter vasculaire
3.1.5.Les bactériémies
3.2.1.Sur le plan clinique
3.2.2.Sur le plan paraclinique
3.3. Diagnostic étiologique de l’infection
3.3.1.Les facteurs étiologiques
3.3.1.1. Les facteurs intrinsèques
3.3.1.2. Les facteurs extrinsèques
3.3.2.Les pathogènes
3.3.2.1. Les infections cutanées
3.3.2.2. Les pneumopathies
3.3.2.3. Les infections urinaires
3.3.2.4. Les infections sur cathéter vasculaire
4. TRAITEMENT
4.1. Buts
4.2. Moyens
4.2.1.Les moyens médicaux
4.2.1.1. Les antibiotiques
4.2.1.2. Les antiseptiques
4.2.1.3. Les autres moyens médicaux
4.2.2.Les moyens chirurgicaux
4.2.3.Autres moyens
4.3. Indications
4.3.1.Brûlures avec infection cutanée
4.3.2.Les pneumopathies chez les brûlés
4.3.3.Les infections urinaires chez le brûlé
4.3.4.Les infections sur cathéter vasculaire chez le brûlé
4.3.5.Les bactériémies chez le brûlé
4.3.6.Les formes graves
4.4.1.Eléments de surveillance
4.4.2.Evolution
4.4.3.Pronostic
DEUXIEME PARTIE : NOTRE TRAVAIL
1. PATIENTS ET METHODES
1.1. Cadre de l’étude
1.2.1.Structure
1.2.2.Circuit patient
1.2.3.Fonctionnement
1.2. Type et durée d’étude
1.3. Patients
1.3.1.Critères d’inclusion
1.3.2.Critères de non inclusion
1.4. Méthodologie
1.5. Recueil des données
1.6. Les paramètres étudiés
1.7. Exploitation des données
2. RESULTATS
2.1. Etude descriptive
2.1.1.Données épidémiologiques
2.1.1.1. Age
2.1.1.2. Sexe
2.1.1.3. Circonstances et mécanismes de survenue
2.1.1.3.1. Circonstances de survenue
2.1.1.3.2. Mécanismes de survenue
2.1.1.4. Délais d’admission en réanimation
2.1.2.Données cliniques à l’admission
2.1.2.1. Surface cutanée brûlée (SCB)
2.1.2.2. Profondeur
2.1.2.3. Lésions associées
2.1.2.4. Indices pronostiques
2.1.3.Dispositifs invasifs
2.1.4.Données évolutives
2.1.4.1. Evolution favorable
2.1.4.2. Complications
2.1.5.Données microbiologiques
2.1.5.1. Répartition selon le site
2.1.5.2. Répartition selon le type de pathogènes
2.1.5.2.1. Principales bactéries retrouvées
2.1.5.2.1.1. Les entérobactéries
2.1.5.2.1.2. Les bactéries non fermentaires
2.1.5.2.1.3. Dans les Staphylocoques
2.1.5.2.1.4. Les Streptocoques
2.1.5.3. Répartition des bactéries par site d’isolement
2.1.5.3.1. La peau
2.1.5.3.2. Les hémocultures
2.1.5.3.3. Les cathéters veineux centraux
2.1.5.3.4. Les urines
2.1.5.3.5. Les poumons
2.1.5.4. Les profils de résistance
2.1.5.4.1. Les Entérobactéries
2.1.5.4.2. Les bactéries non fermentaires
2.1.5.5. Les Staphylocoques
2.1.6.Mode de sortie
2.2.1.Facteurs intrinsèques
2.2.1.1. Survenue d’IN selon l’âge
2.2.1.2. Survenue d’IN selon le Sexe
2.2.1.3. Survenue d’IN selon les mécanismes de survenue
2.2.1.4. Survenue d’IN selon le délai d’admission
2.2.1.5. Survenue d’IN selon la surface cutanée brûlée
2.2.1.6. Survenue d’IN selon la profondeur
2.2.1.7. Survenue d’IN selon la valeur des indices pronostiques
2.2.1.7.1. Score de Baux
2.2.1.7.2. Score UBS
2.2.1.7.3. Score d’ABSI
2.2.2.Facteurs extrinsèques
2.2.2.1. Incidence du sondage vésical
2.2.2.2. Incidence de la voie veineuse centrale
2.2.2.3. Incidence de la ventilation mécanique
2.2.3.Facteurs évolutifs
2.2.3.1. Mortalité
2.2.3.2. Durée moyenne de séjour
3. DISCUSSION
3.1. Epidémiologie
3.1.1.La fréquence
3.1.2.L’âge
3.1.3.Le sexe
3.1.4.Les circonstances et les mécanismes de survenue
3.1.5.Les délais d’admission
3.2. La surface cutanée brûlée
3.3.1.Indice de Baux
3.3.2.Score UBS
3.3.3.Score ABSI
3.4. Les dispositifs invasifs
3.5. Données microbiologiques
3.5.1.Répartition selon le site
3.5.2.Répartition selon le type de pathogène
3.5.3.Répartition des bactéries par site d’isolement
3.5.3.1. La peau
3.5.3.2. Les hémocultures
3.5.3.3. Les CVC
3.5.3.4. Les urines
3.5.3.5. Les poumons
3.6. Evolution
3.6.1.Mortalité
3.6.2.Durée de séjour (DMS)
CONCLUSION
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
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