L’objectif essentiel de tout traitement dentaire est la conservation des dents naturelles le plus longtemps possible sur l’arcade dentaire. Cet objectif peut être atteint soit par des mesures préventives régulières, soit par une thérapeutique mûrement élaborée et adaptée à chaque cas précis, ou alors par l’association des deux à la fois. Le monde médical et la chirurgie dentaire en particulier, a connu un essor et une avancée technologique et thérapeutique fulgurants depuis la seconde moitié du 19e siècle jusqu’à nos jours. C’est ainsi que dans notre pratique quotidienne, force nous est de constater l’augmentation sans cesse croissante du nombre de patients à vouloir conserver le plus longtemps possible le plus grand nombre de dents sur l’arcade. En effet, ceux-ci s’attendent à des traitements conservateurs plutôt qu’à des extractions. Cet impératif a permis de transformer la simple dentisterie en une science pluridisciplinaire.
La maladie parodontale, les mobilités dentaires, les traumatismes dentaires, les désordres dentaires, les malformations congénitales, le souci esthétique sont autant de problèmes qui rendent le choix d’un traitement unique et adéquat de plus en plus difficile. D’où la nécessité de poser un diagnostic et des indications précises, afin de garantir un succès thérapeutique et une guérison de l’odonte et du parodonte. De nombreux appareils et dispositifs ont été mis au point afin de résoudre, sinon d’améliorer les problèmes fonctionnels et esthétiques spécifiques à chaque patient. C’est dans cette lignée que nous pouvons citer la prothèse de contention, premièrement décrite par Pierre Fauchard (1678- 1761). Son évolution a permis l’amélioration de son système jusqu’à l’obtention de bridges de contention. L’objectif essentiel des bridges de contention est la stabilisation des phénomènes de parodontolyse par la suppression de toute surcharge sur le complexe dento parodontal d’une part, et la conservation des acquis de l’ensemble des traitements pré-prothétiques d’autre part. Son utilisation s’avère donc de plus en plus indispensable pour garantir une pérennité de l’odonte et du parodonte.
RAPPELS ANATOMIQUES, PHYSIOLOGIQUES ET PHYSIOPATHOLOGIQUES DU PARODONTE
RAPPELS ANATOMIQUES
Le parodonte peut être défini comme étant l’ensemble des tissus soutenant et entourant les dents. Comme structures anatomiques parodontales nous comptons (figure 1-1):
– la gencive
– le cément
– le desmodonte
– l’os alvéolaire.
La gencive
C’est le tissu superficiel et visible du parodonte. Elle entoure le collet des dents et recouvre les crêtes alvéolaires. De couleur rose pâle, de consistance ferme, la gencive est dans certains cas teintée par des pigmentations brunâtres (grains de mélanine) ou alors entièrement tatouée (phénomène culturel et / ou social). Cliniquement on lui décrit trois zones spécifiques à savoir (figure 1-2) :
✧ la gencive libre
✧ la gencive attachée
✧ la gencive papillaire.
La gencive libre
Encore appelée gencive marginale, elle correspond à la partie non attachée de la gencive, qui sertit étroitement le collet des dents en y adhérant par le biais de fibres circulaires. Sa hauteur varie entre 0,8 et 1,8 mm. La gencive libre s’étend apicalement sur la surface gingivale, vers une dépression virtuelle appelée sillon gingival (ou marginal) qui réalise la ligne de démarcation avec la gencive attachée.
La gencive attachée
Séparée de la gencive marginale par le sillon marginal, elle est fortement attachée à la surface de l’os alvéolaire sous- jacent par l’intermédiaire des fibres gingivales. De teinte rose pâle et d’aspect en granité de peau d’orange, sa hauteur varie de 1 à 9 mm. La gencive attachée se démarque de la muqueuse alvéolaire par la ligne de jonction mucogingivale, que l’on peut mettre en évidence soit en exerçant une traction sur les lèvres et les joues (du côté vestibulaire), soit en mobilisant le plancher buccal (du côté lingual).
La gencive papillaire
Encore appelée gencive interdentaire ou papille interdentaire, elle correspond à la partie de la gencive qui occupe l’espace interproximal entre deux dents adjacentes, en-dessous de la surface de contact de celles-ci. De forme pyramidale, elle est formée de deux papilles, l’une vestibulaire et l’autre linguale ou palatine, réunies par le col papillaire.
Remarques :
➤ La non adhérence de la gencive marginale à la dent est à l’origine d’un sillon virtuel pouvant être inspecté par une sonde parodontale : il s’agit du sulcus gingival ou sillon gingivo-dentaire . Sa profondeur varie entre 0,5 et 2 mm, et il est délimité en dedans, par la paroi dentaire, en dehors par la gencive marginale et au fond par l’attache épithéliale. A l’intérieur de ce sulcus circule le fluide gingival.
➤ L’attache épithéliale (ou épithélium de jonction) réalise le joint entre la gencive et la dent .
Le cément
C’est un tissu minéralisé qui recouvre la surface des racines dentaires. Il constitue d’une part, une zone d’attache pour les fibres desmodontales (ou fibres de Sharpey), et d’autre part une protection pour la dentine.
Le desmodonte
Encore appelé ligament alvéolo-dentaire, périodonte ou ligament parodontal, il représente l’ensemble des tissus conjonctifs qui relient la racine de la dent à l’os alvéolaire. Il se situe dans un espace compris entre l’os et la racine, appelé espace desmodontal.
L’os alvéolaire
Formé sur l’os basal, il constitue la charpente osseuse de l’organe dentaire, dans laquelle sont creusées les alvéoles. Son existence est liée à la présence des dents. Il est en continuité avec l’os basal au maxillaire comme à la mandibule et forme de part et d’autre des alvéoles, des remparts appelés procès alvéolaires. L’os alvéolaire se compose principalement d’un os spongieux, recouvert par un os compact très dur appelé corticale. Ainsi nous distinguons de l’extérieur vers l’intérieur :
➤ le périoste : fine membrane jaunâtre, très fibreuse adhérant à la surface osseuse
➤ l’os périosté traversé par de nombreuses fibres de collagène
➤ la corticale externe vestibulaire constituée par un os compact et dur
➤ la corticale interne tapissant l’alvéole et percée de nombreuses trabéculations, allant permettre le passage d’éléments vasculaires, nerveux et fibreux. Radiologiquement, cette corticale se matérialise par une fine bande opaque et prend ainsi le nom de Lamina dura (ou lame cribliforme)
➤ la corticale externe linguale ou palatine.
Il est à noter que les corticales externe et interne se rejoignent coronairement pour former les crêtes alvéolaires. Par ailleurs, selon la localisation et les rapports de l’os alvéolaire avec l’odonte, on parlera :
➤ d’os radiculaire lorsque l’os alvéolaire se situe sur les faces vestibulaire, linguale ou palatine des racines des dents
➤ d’os inter-radiculaire si on le situe entre les racines des dents pluriradiculées
➤ d’os inter-proximal ou de septum inter-dentaire, si on le situe entre les racines de deux dents adjacentes.
NB : La gencive marginale, la gencive attachée et la papille interdentaire forment le parodonte superficiel, tandis que le parodonte profond est constitué du desmodonte, du cément et de l’os alvéolaire.
L’espace biologique
Il représente la distance entre le fond du sulcus gingival et le sommet de la crête osseuse alvéolaire. Cet espace est occupé par l’attache épithéliale et l’attache conjonctive, qui assurent l’ancrage du tissu gingival de recouvrement. D’après une étude, Gargiuolo et collaborateurs ont établi que la profondeur moyenne du sillon gingivo-dentaire est de 0,69 mm, que la hauteur moyenne de l’attache épithéliale est de 0,97 et celle de l’attache conjonctive gingivale de 1,07 mm. D’où une hauteur normale de 2,04 mm de l’espace biologique.
Toute irritation mécanique ou biologique de cet espace engendrera une destruction du système d’ancrage des tissus gingivaux de recouvrement, ce qui représente les prémices d’une atteinte parodontale. Selon la nature et la qualité des tissus de recouvrement, l’atteinte de cet espace se manifestera cliniquement par l’apparition soit d’une récession, soit d’une hyperplasie gingivale inflammatoire, avec formation d’une poche parodontale, s’accompagnant en quelques mois d’une destruction osseuse. Cet espace doit donc être rigoureusement respecté, pour assurer le maintien d’une bonne santé parodontale.
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GENERALITES
1 / RAPPELS ANATOMIQUES, PHYSIOLOGIQUES ET PHYSIOPATHOLOGIQUES DU PARODONTE
1-1 / RAPPELS ANATOMIQUES
1-1-1 / La gencive
1-1-1-1 / La gencive libre
1-1-1-2 / La gencive attachée
1-1-1-3 / La gencive papillaire
1-1-2 / Le cément
1-1-3 / Le desmodonte
1-1-4 / L’os alvéolaire
1-1-5 / L’espace biologique
1-2 / RAPPELS PHYSIOLOGIQUES
1-2-1 / La gencive
1-2-2 / Le cément
1-2-3 / Le desmodonte
1-2-4 / L’os alvéolaire
1-3 / RAPPELS PHYSIOPATHOLOGIQUES DU PARODONTE
2 / L’OCCLUSION DENTAIRE
2-1/ RAPPELS PHYSIOLOGIQUES
2-1-1 Les mouvements mandibulaires dans les plans sagittal et frontal
2-1-2 Les mouvements mandibulaires dans le plan horizontal
2-2 / PARAMÈTRES OCCLUSAUX
2-2-1 / Quelques définitions
2-2-1-1 / Le plan de Camper
2-2-1-2 / Le plan de Francfort
2-2-1-3 / Plan d’occlusion
2-2-1-4 / La dimension verticale
2-2-1-5 / La pente condylienne
2-2-1-6 / La pente incisive
2-2-1-7 / La courbe de Spee
2-2-1-8 / La courbe de Wilson
2-2-1-9 / Le guidage
2-2-1-10 / L’articulé
2-2-2 / Aspects biomécaniques de l’occlusion en prothèse
2-3 / LES TROUBLES OCCLUSAUX : L’OCCLUSION DE CONVENANCE
2-3-1/ Occlusion de convenance équilibrée
2-3-2/ Occlusion de convenance déséquilibrée
3 / LA MOBILITE DENTAIRE
3-1 / LA MOBILITE DENTAIRE PHYSIOLOGIQUE
3-1-1 / La mobilité dentaire spontanée
3-1-2/ La mobilité dentaire provoquée
3-2 / LA MOBILITE DENTAIRE PATHOLOGIQUE
3-2-1 / Les facteurs qualitatifs
3-2-1-1 / L’inflammation parodontale
3-2-1-2 / Les traumatismes dentaires
3-2-1-3 / Les déplacements dentaires
3-2-2/ Les facteurs quantitatifs
4 / NOTIONS GENERALES SUR LA CONTENTION EN PROTHESE CONJOINTE
4-1 / HISTORIQUE DE LA CONTENTION
4-2 / DÉFINITION ET BUT DE LA CONTENTION
4-2-1 / Définition
4-2-2 / Buts
4-3 / CLASSIFICATION GENERALE DES TYPES DE CONTENTION
4-4 / BASES BIOMECANIQUE DE LA CONTENTION
4-4-1 / Bases mécaniques
4-4-1-1 / Principe de Roy (1930)
4-4-1-2 / Principe du polygone de sustentation (Held et Chaput)
4-4-1-3 / Principes de fixation occlusale (Dargent)
4-4-2/ Bases biologiques
4-4-2-1 / Notion de seuil de sensibilité parodontique (Petit)
4-4-2-2 / Notion de seuil de destruction osseuse (Fourel)
4-4-2-3 / Nécessité d’une analyse fonctionnelle de l’occlusion
4-5 / TYPES DE CONTENTION RENCONTRES EN PROTHESE CONJOINTE
4-5-1 / Le système « composition »
4-5-1-1 / Définition
4-5-1-2 / Indications
4-5-1-3 / Contre-indications
4-5-1-4 / Avantages
4-5-1-5 / Inconvénients
4-5-1-6 / La mise en œuvre
4-5-1-6-1 / Le matériel
4-5-1-6-2 / La technique
4-5-2 / Les bridges de contention
4-5-2-1 / Définition
4-5-2-2 / Indications
4-5-2-3 / Contre-indications
4-5-2-4 / Avantages
4-5-2-5 / Inconvénients
DEUXIEME PARTIE : REALISATION CLINIQUE D’UN BRIDGE DE CONTENTION
1 / INTRODUCTION
2 / PRÉSENTATION DU CAS
2-1 / ETAT CIVIL
2-2 / MOTIF DE LA CONSULTATION
2-3 / INTERROGATOIRE MÉDICAL
2-4 / EXAMEN EXOBUCCAL
2-5 / EXAMEN ENDOBUCCAL
2-6 / EXAMEN DE L’OCCLUSION
2-7 / EXAMEN RADIOLOGIQUE
2-8 / CHOIX D’UN PLAN DE TRAITEMENT
3 / TRAITEMENT DU CAS
3-1 / PHASE PREPARATOIRE
3-1-1 / Phase chirurgicale
3-1-1-1 / Incision et drainage de l’abcès vestibulaire
3-1-1-2 / Extractions dentaires
3-1-1-3 / Exérèse du kyste mandibulaire
3-1-2 / Phase parodontale
3-1-2-1 / La préparation initiale
3-1-2-2 / Le comblement chirurgical
3-1-3 / Phase endodontique
3-1-3-1 / Le matériel
3-1-3-2 / Technique opératoire
3-2 / PHASE PROTHETIQUE TRANSITOIRE
3-2-1 / Réalisation du bridge provisoire maxillaire
3-2-1-1 / Taille des moignons
3-2-1-2 / Réalisation et pose des couronnes provisoires
3-2-1-3 / Réalisation et pose du bridge provisoire
3-2-2 / Réalisation du bridge provisoire mandibulaire
3-2-2-1 / Taille des moignons et réalisation des couronnes provisoires
3-2-2-2 / Réalisation du bridge provisoire
3-3 / VERS LA PROTHESE DEFINITIVE
3-3-1 / Prise des empreintes finales
3-3-1-1 / Matériel et matériaux
3-3-1-2 / Protocole opératoire
3-3-2 / Travaux au laboratoire
3-3-2-1 / Réalisation du bridge maxillaire
3-3-2-1-1 / Réalisation du modèle de travail
3-3-2-1-2 / Les attachements
3-3-2-1-3 / Le modelage en cire
3-3-2-1-4 / La mise en revêtement
3-3-2-1-5 / La coulée
3-3-2-1-6 / Finition de la pièce coulée
3-3-2-1-7 / Essayage de l’armature
3-3-2-1-8 / Réalisation des facettes esthétique du bridge
3-3-2-2 / Réalisation du squeletté
3-3-2-2-1 / L’empreinte de position
3-3-2-2-2 / L’armature
3-3-2-2-3 / Les étapes de la réalisation
3-3-2-2-4 / Essayage de l’armature
3-3-2-2-5 / Derniers travaux au laboratoire
3-3-2-3 / Réalisation du bridge mandibulaire
3-3-3 / Livraison de la prothèse définitive
3-3-3-1 / Les essais pré-cliniques
3-3-3-2 / Les essais cliniques
3-3-3-3 / Le scellement provisoire
3-3-3-4 / Le scellement définitif
3-4 / VISITES DE CONTRÔLE
4 / LES SUITES PROTHETIQUES
4-1 / L’INCIDENT
4-1-1 / Les causes
4-1-2 / Les risques
4-1-3 / La technique de réfection
4-2 / LES RÉSULTATS FINAUX
4-3 / LIMITES
4-4 / RECOMMANDATIONS
5 / ILLUSTRATION
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE