Les maladies diarrhéiques constituent encore un problème majeur de santé publique au Sénégal. La prévalence est toujours élevée dans la population infantojuvénile (44). Selon l’OMS, les maladies diarrhéiques constituent l’une des principales causes de mortalité et de morbidité dans les pays en voie de développement où l’on note 2 à 12 épisodes diarrhéiques par personne et par an. La tranche d’âge la plus touchée est celle comprise entre 0 et 5 ans et chaque jour 200 millions de personnes à travers le monde sont touchées par ce fléau. Sur 1 milliard de cas de diarrhées observées par an, en Asie, en Afrique et en Amérique latine, chez des enfants de moins de 5 ans, 4 à 6 millions de décès sont enregistrés, soit 12 000 décès par jour. Ces chiffres sont suffisamment éloquents pour montrer que les maladies diarrhéiques sont un des grands problèmes de santé publique dans le monde et plus particulièrement dans les pays en voie de développement, en raison de leur fréquence et de leur possible gravité, surtout chez l’enfant (14). Force est de reconnaître qu’une baisse sensible de cette mortalité a été enregistrée ces dernières années, suite à l’application du programme national de lutte contre les maladies diarrhéiques (44). Mais depuis la dévaluation du franc CFA en 1994, la majorité des populations des pays africains en général et du Sénégal en particulier, n’arrive plus à se soigner correctement du fait de la cherté des médicaments dans les structures sanitaires (40).
PHYSIOPATHOLOGIE DE LA DIARRHEE
Définition
La définition de la diarrhée est basée sur trois (03) critères :
– La fréquence d’émission de selles par 24 heures en général plus de trois fois,
– L’abondance des selles, plus de 300g/j ;
– surtout, l’aspect liquide des selles.
Plusieurs définitions ont été ainsi proposées. Mais, dans la pratique quotidienne, aucune ne paraît satisfaisante car ces paramètres varient selon l’individu et le type d’alimentation. La plus communément utilisée était : « évacuation des selles liquides ou aqueuses, généralement émises plus de trois fois par 24 heures » Elle a aussi des limites car elle prête à confusion avec les selles fréquentes (en général plus de trois fois par jour) de l’enfant sous allaitement maternel. Actuellement, on considère qu’il s’agit d’une émission de selles plus fréquentes et plus liquides que d’habitude ; ce qui paraît plus facile à comprendre.
Rappel de la physiologie intestinale
➤ Equilibre normal des liquides au niveau intestinal
Normalement, l’absorption et la sécrétion de l’eau et des électrolytes ont lieu dans la totalité de l’intestin. Par exemple, un adulte sain absorbe environ deux (02) litres de liquide par jour. La salive et les sécrétions de l’estomac, du pancréas et du foie ajoutent environ 7 litres ; c’est donc un total d’environ 9 litres de liquide qui pénètre chaque jour dans l’intestin grêle (56). L’essentiel est réabsorbé puisque 1,5 litres parviennent au cæcum et la teneur en eau quotidienne des selles est de l’ordre de 100 g. Ces différentes estimations ne correspondent en fait qu’à la résultante des échanges hydroélectrolytiques intestinaux qui se produisent simultanément de la lumière intestinale vers le secteur extracellulaire et du plasma vers la lumière intestinale (53).
➤ Absorption intestinale de l’eau et des électrolytes
La résorption d’eau par l’intestin grêle est due aux gradients osmotiques qui se produisent lorsque les solutés (et notamment le sodium) sont activement absorbés, à partir de la lumière intestinale par les cellules épithéliales des villosités (56).
➤ Sécrétion intestinale de l’eau et des électrolytes
La sécrétion d’eau et d’électrolytes se produit normalement dans les cryptes de l’épithélium de l’intestin grêle, où le chlorure de sodium est transporté du liquide extracellulaire dans les cellules épithéliales à travers leur membrane basolatérale (56). La régulation des mouvements hydroélectrolytiques est sous la dépendance des messagers intracellulaires. L’élévation de l’AMPc inhibe l’absorption couplée du Na et du Cl et stimule la sécrétion du Cl. L’action du GMPc est identique. L’élévation du calcium intrasystolique active la calmoduline et stimule les processus sécrétoires. De nombreux médiateurs contrôlent ces transferts hydroélectrolytiques et stimulent l’absorption. L’acétylcholine et la sérotonine augmentent la concentration intracellulaire de calcium et stimulent la sécrétion hydroélectrolytique. Le Vip ainsi que les prostaglandines augmentent le taux d’AMPc et stimulent également la sécrétion d’hydroélectrolytique (53).
Physiopathologie de la diarrhée
Actuellement quatre mécanismes physiopathologiques de la diarrhée peuvent être distingués :
➤ La diarrhée osmotique
Elle est secondaire à la présence intraluminale de solutés peu absorbables qui crée une pression osmotique supérieure à celle du plasma ce qui retient ou attire l’eau. C’est le cas des maldigestions et des malabsorptions mais également des laxatifs osmotiques qui renferment des ions divalents(Mg2+, PO4 3-, So4 2-) outrivalents, des anti acides et surtout d’hydrates de carbone non absorbables ou mal absorbés(déficits en dissacharidases ou atrophie villositaire) .
En effet la malabsorption de ces sucres au niveau du grêle va provoquer dès leur arrivée dans le colon, une fermentation bactérienne considérable, aboutissant à la production d’acides gras volatiles et d’acides lactiques, ayant eux-mêmes un pouvoir osmotique puissant(23).
➤ La diarrhée sécrétoire
Elle est provoquée par des pertes excessives d’eau et d’électrolytes secondaires à la stimulation de la secrétions et/ou à l inhibition de l’absorption au niveau du grêle et du colon. Le plus souvent, il s’agit d’une stimulation du système de l’AMP adenylate cyclase ou du GMP cyclique avec mobilisation du calcium intracellulaire. Ce mécanisme peut être passif : hypertension postale, obstruction lymphatique ; ou actif: diarrhées aiguës entérotoxigènes (choléra, Escherichia coli entérotoxigène, staphylocoque), diarrhées chroniques d’origine hormonale (choléra endocrine avec hypersécrétion de Vip) mais aussi au cours des maladies inflammatoires .
➤ Les diarrhées par troubles de la motricité intestinale :
Elles regroupent deux (02) mécanismes tout à fait distincts :
– L’accélération du transit due à un hyperpéristaltisme avec réduction du calibre, entraîne une diminution du temps de contact des aliments avec la muqueuse et réduit nettement les phénomènes d’absorption. Il se produit alors une diarrhée motrice dont les causes les plus fréquentes sont la colopathie fonctionnelle, les causes endocriniennes et nerveuses.
– Le ralentissement du transit intestinal quant à lui favorise la pullulation bactérienne chronique avec sécrétion de toxines, ou production de métabolites dangereux (substances cancérigènes ou substances à effet laxatif).
➤ Les diarrhées par altération de la muqueuse
Les lésions sont diverses, pouvant aller de la destruction isolée de la bordure en brosse entérocytaire (atteinte virale) à l’abrasion de la paroi intestinale avec inflammation, ulcération (entérite nécrosante et colites ) en passant par l’atrophie villositaire complète (maladie cœliaque), c’est à dire que les mécanismes sont obligatoirement multiples :
– Malabsorption des sels biliaires et des acides gras par l’iléon ;
– Exsudation de protéines, de mucus et de sang (atteinte intestinale et colique) et possible intervention de certains médiateurs de l’inflammation (prostanoïdes, leucotriènes) sur la réabsorption colique.
Au cours des diarrhées avec « colites » (crohn, colites ischémiques parasitaires et bactériennes), les selles sont nombreuses mais peu abondantes avec glaire et parfois sang et pus. Ce type de diarrhée ne doit pas être assimilé au syndrome d’entéropathie exsudative où la diarrhée n’est pas toujours présente. Les diarrhées avec atrophie villositaire correspond au classique syndrome de malabsorption avec stéatorrhée.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPEL SUR LES MALADES DIARRHEIQUES
I. PHYSIOPATHOLOGIE DE LA DIARRHEE
I.1. Définition
I.2. Rappel de la physiologie intestinale
I.3. Physiopathologie de la diarrhée
II. EPIDEMIOLOGIE ET ETIOLOGIE DE LA DIARRHEE
II.1. Epidémiologie
II.1.1. Transmission des agents responsables de la diarrhée
II.1.2. Facteurs propres à l’hôte qui prédisposent à la diarrhée
II.1.3. Age
II.1.4. Caractères saisonniers
II.1.5. Infections asymptomatiques
II.1.6. Epidémies
II.2. Etiologie
II.2.1. Diarrhées bactériennes
II.2.2. Diarrhées virales
II.2.3. Diarrhées fongiques
II.2.4. Diarrhées parasitaires
II.2.5. Diarrhées de cause iatrogène
III. CLINIQUE
IV. DIAGNOSTIC
V. TRAITEMENT ET PROPHYLAXIE
V.1. Traitement
V.1.1. Traitement symptomatique
V.1.2. Traitement étiologique
V.2. Prophylaxie
DEUXIEME PARTIE : ENQUETES ETHNOBOTANIQUES
I. BUT DU TRAVAIL ET CADRE D’ETUDE
II. METHODOLOGIE
II.1. Echantillonnage
II.2. Critères de sélection
II.3. Instruments de collecte des données
II.4. Traitement des données
II.5. Difficultés rencontrées
III. RESULTATS ET COMMENTAIRES
III.1. Profil des enquêtés
III.1.1. Herboristes et tradipraticiens
III.1.2. Les ménages
III.2. Les Plantes utilisées contre les diarrhées
III.2.1. Les plantes antidiarrhéiques proposées par les herboristes et tradipraticiens
III.2.2. Les plantes antidiarrhéiques utilisées par les ménages
III.2.3. Répertoire général des plantes utilisées
III.2.4. Les plantes antidiarrhéiques et leurs modes d’emploi
IV. ETUDES MONOGRAPHIQUES
IV.1. Anacardium occidentale L. (Anacardiaceae)
IV.1.1.Appellations
IV.1.2. Description botanique
IV.1.3. Répartition géographique et habitat
IV.1.4. Composition chimique
IV.1.5. Propriétés pharmacologiques
IV.2. Adansonia digitata (Bombacaceae)
IV.2.1. Appellations
IV.2.2. Description botanique
IV.2.3. Répartition géographique et habitat
IV.2.4. Composition chimique
IV.2.5. Propriétés pharmacologiques
IV.3. Euphorbia hirta (Euphorbiaceae)
IV.3.1. Appellations
IV.3.2. Description botanique
IV.3.3. Répartition géographique et habitat
IV.3.4. Composition chimique
IV.3.5. Propriétés pharmacologiques
IV.4. Acacia nilotica (Mimosaceae)
IV.4.1. Appellations
IV.4.2. Description botanique
IV.4.3. Répartition géographique et habitat
IV.4.5. Composition chimique
IV.4.5. Propriétés pharmacologiques
IV.5. Psidium guajava L. (Myrtaceae)
IV.4.1. Appellations
IV.4.2. Description botanique
IV.4.3. Répartition géographique et habitat
IV.4.5. Composition chimique
IV.4.5. Propriétés pharmacologiques
V. DISCUSSION
V.1. Statut général des enquêtés
V.2. Les plantes antidiarrhéiques utilisées
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE
ANNEXES