Les infections nosocomiales (IN) ou infections associées aux soins sont les infections contractées à l’hôpital ou dans un établissement de soins. Une infection nosocomiale est définie comme toute infection contractée lors d’un séjour dans un établissement de santé et qui apparait au moins 48 heures après l’entrée dans l’établissement. Ce délai est étendu à 30 jours lorsque l’infection a lieu à l’endroit où une opération chirurgicale a été réalisée et est porté à un an en cas de pose de matériel étranger (valve cardiaque, prothèse, stimulateur cardiaque…). Elles constituent une situation préoccupante du fait de leur morbidité et mortalité élevées, mais également de l’émergence des bactéries multirésistantes (BMR) [23]. Le risque de contracter une infection à l’hôpital a toujours existé et ce risque s’est accru avec l’évolution des pratiques de soins et de recrutement des patients. La pratique de soins plus efficaces, souvent plus invasifs s’est accompagnée d’une possibilité de contamination par des micro-organismes d’origine endogène ou exogène. De même le recrutement des patients hospitalisés s’est modifié avec la prise en charge de personnes de plus en plus vulnérables à l’infection (patients immunodéprimés, interventions chirurgicales lourdes, patients présentant plusieurs pathologies graves, patients polytraumatisés en réanimation) [4]. La lutte contre les infections nosocomiales constitue une bataille essentielle et emblématique de par ses enjeux. La médecine moderne a apporté des bénéfices sans précèdent, mais elle a également apporté ses risques. Ainsi les infections nosocomiales sont la cause directe de 4000 décès et représentent un coût important pour la société. Toutes les infections nosocomiales ne sont pas évitables, mais il y a peu de domaines où la prévention s’est avérée aussi efficace et efficiente.
Rappel sur les infections liées aux activités de soins
L’infection est la pénétration dans un organisme vivant d’un agent étranger (bactérie, virus, champignon, parasite) capable de s’y multiplier et d’y induire des lésions. L’infection peut s’accompagner de manifestations cliniques.
Nosocomial vient du grec, c’est un mot composé qui dérive de deux racines «nosos» = qui signifie maladie et « komein » = qui veut dire prendre soin de. La traduction littérale serait « une maladie qui survient au cours des soins ». Une infection est dite nosocomiale si elle apparait au cours ou à la suite d’une hospitalisation et si elle était absente (ni symptomatique ni en incubation) à l’admission .
La définition des infections nosocomiales a connu une évolution ces dernières années, rejoignant celle des pays anglo-saxons, en élargissant le concept à l’ensemble des infections associées aux soins (IAS) qui englobent tout événement infectieux en rapport plus ou moins proche avec un processus, une démarche de soins, une structure de soins, incluant non seulement les établissements de soins de tous types, mais aussi le domicile du patient, les cabinets ou les laboratoires de ville.
Lorsque la situation à l’admission n’est pas connue, un délai d’au moins 48 heures après l’admission (ou un délai supérieur à la période d’incubation lorsque celle-ci est connue) est communément accepté pour distinguer une infection nosocomiale d’une infection communautaire. Toutefois, il est recommandé d’apprécier, pour chaque cas douteux, la plausibilité du lieu causal entre hospitalisation et infection.
Pour les infections du site opératoire on considère comme nosocomiale les infections survenues dans les 30 jours suivant l’intervention, ou celles survenues dans les 90 jours en cas d’infection virale et celles survenues dans les 365 jours s’il y a eu mise en place d’une prothèse ou d’un implant [5, 8, 15, 51]. Les infections nosocomiales sont reconnues, comme des problèmes majeurs de santé publique de par leur fréquence, leur coût, et gravité. Le risque de contracter une infection à l’hôpital est de 7% c’est-à-dire que sur 100 personnes hospitalisées, sept d’entre elles auront une infection nosocomiale. Ce chiffre varie en fonction du service dans lequel la personne est hospitalisée. Il peut même atteindre 30% dans un service de réanimation .
Historique
Il nous semble important de distinguer la période avant et après Pasteur. Avant Pasteur et jusqu’au 18eme siècle, on ignorait les causes des infections, les modes de transmission et il n’avait pas de traitement efficace. On rassemblait les malades dans de grandes salles communes, ce qui entraînait une grande dissémination des maladies contagieuses parmi les malades hospitalisés [11, 48]. Ainsi, en cas d’épidémies, les malades atteints, étaient hospitalisés et contaminaient tous les autres. En chirurgie, les opérés et les accouchées faisaient de nombreuses complications septiques .
Au 19eme siècle, en milieu chirurgical, les premières tentatives d’antisepsie ont été le fruit de deux accoucheurs (Holmes à Boston et Semmel Weiss à Vienne) qui avaient compris que l’infection puerpérale (septicémie à streptocoque après accouchement) était due à la contamination de la femme enceinte. Ces deux médecins imposaient alors le lavage des mains avec un antiseptique (eau de javel, chlorure de chaux) .
Lister avait pensé que la suppuration des plaies était un phénomène comparable à la fermentation bactérienne et utilisait contre la suppuration de l’acide phénique. Pasteur avait montré que les microbes sur les instruments étaient plus dangereux et plus en cause que les microbes de l’air. Ainsi de nouvelles règles étaient appliquées en chirurgie :
– Brossage des mains des chirurgiens ;
– Stérilisation des blouses, des compresses et des instruments utilisés .
Le 20eme siècle, avait vu la généralisation en chirurgie de l’hygiène hospitalière alors qu’en médecine les progrès étaient plus lents du fait que l’isolement des malades était difficilement réalisable [11, 48]. Les complications intra-hospitalières n’avaient pas disparu mais restaient limitées aux infections respiratoires hivernales et aux gastroentérites. La période contemporaine est caractérisée par l’apparition des sulfamides en 1936 et quelques années plus tard des pénicillines. On a pensé que la découverte des antibiotiques pouvait pallier les déficiences de l’hygiène, et signer la fin proche des maladies infectieuses .
Epidémiologie
Les infections nosocomiales constituent un problème de santé publique préoccupant. Leur prévalence en France est estimée à 6-7% voire 20% dans les services de réanimation. Les services les plus touchés sont ceux de réanimation, d’hématologie, de chirurgie et des brulés [4, 2]. Les cinq principaux sites des infections nosocomiales qui représentent 70% de l’ensemble des infections nosocomiales sont par ordre d’importance les infections urinaires (35%), les infections respiratoires basses (12%), les infections du site opératoire (11%), les bactériémies (6%) et les infections par les cathéters (4%) [4, 2]. Les principaux micro-organismes responsables sont les bacilles Gram négatif (53%), les cocci Gram positifs (33%) à savoir Escherichia Coli (21%), Staphylococcus Auréus (16%), Pseudomenas aeruginosa (11%) et Enterococcusspp (8%). Ces quatre espèces représentent 56% des microorganismes retrouvés dans les infections nosocomiales [4, 2]. Les conséquences des infections nosocomiales sont essentiellement [4, 2] :
– la mortalité et morbidité avec une estimation de 20.000 décès dus chaque année aux infections nosocomiales aux USA et 7000 à 8000 décès en France ;
– l’augmentation de la durée du séjour hospitalier. On estime que les infections nosocomiales sont responsables en France d’une prolongation du séjour hospitalier de 3 à 7 jours ;
– le surcoût des dépenses ;
– la désaffection des populations pour les hôpitaux où surviennent de nombreuses infections nosocomiales ;
– la sélection des germes multi résistants ;
– les conséquences médico-légales avec la responsabilité médico-légale concernant les infections nosocomiales qui est engagée que lorsqu’il est démontré que le médecin ou le personnel soignant a été négligent dans l’adhésion aux soins appropriés standards et que l’infection est le résultat d’une défaillance des procédures de référence.
Principaux germes responsables d’IN
Les infections nosocomiales sont dues à de très nombreux micro-organismes tels que les bactéries, les champignons (Candida, Aspergillus), les parasites et les virus (virus de l’hépatite B, Herpesviridae, virus respiratoire syncitial, Adenovirus, Rotavirus) [6, 7]. Tous les agents infectieux peuvent être concernés, le point commun étant leur caractère opportuniste à savoir leur possibilité de ne devenir pathogènes que chez les sujets fragilisés. Cependant les bactéries sont à l’origine de près de 99% des infections nosocomiales [1, 6, 7]. Les principales bactéries nosocomiales sont représentées par les espèces pathogènes comme Staphylococcus aureus mais souvent il s’agit de bactéries opportunistes à Gram négatif dans 50% des cas. Le réservoir bactérien est représenté par le tube digestif pour les Entérobactéries et par l’environnement pour les autres germes comme Pseudomonas aeruginosa, Acinetobacter, et Burkholderia [1]. Certaines de ces bactéries posent un problème de résistance croisée avec plusieurs familles ou sous familles d’antibiotiques d’où le terme de bactéries multirésistantes ou BMR. Le traitement des infections dans lesquelles sont impliquées ces BMR peut être problématique.
Le Staphylococcus aureus et Escherichia Coli sont au premier rang des germes responsables d’infections nosocomiales, puis viennent Pseudomonas aeruginosa, les autres bactéries à Gram négatif et les Entérocoques.
|
Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
1- Rappel sur les infections liées aux activités de soins
1.1. Historique
1.2. Epidémiologie
1.3. Principaux germes responsables d’IN
1.4. Rappels cliniques
1.4.1. Staphylococcus aureus
1.4.2. Escherichia Coli
1.4.3. Klebsiella, Enterobacter, Serratia
1.4.4. Pseudomonas aeruginosa
1.4.5. Acinetobacter baumanii
1.4.6. Burkholderia cepacia
1.5. Mesures de prévention
1.5.1. L’antisepsie
1.5.2. Asepsie
1.5.3. La décontamination
1.5.4. La désinfection
1.5.5. La stérilisation
1.5.6. Stockage, conditionnement et présentation du matériel
1.5.7. L’antibioprophylaxie
1.5.8. Principes généraux de prévention pour les hôpitaux
1.5.9. Principes de prévention en milieu chirurgical
2. Programme National de Lutte contre les Infections Nosocomiales(PRONALIN)
2.1. Les objectifs du PRONALIN
2.2. Réglementation au Sénégal
2.3. Organisation de PRONALIN
2.3.1. Au niveau national
2.3.2. Au niveau régional
2.3.3. Au niveau opérationnel
DEUXIEME PARTIE : TRAVAIL PERSONNEL
1. Objectif de l’étude
2. Cadre d’étude
3. Matériel et Méthodologie
3.1. Population d’étude
3.2. Méthodologie
3.2.1. Type et période d’étude
3.2.2. Instruments d’étude
3.2.3. Critères d’inclusion
3.2.4. Critère de non inclusion
4. Analyse et saisie des données
5. Difficultés rencontrées
6. Considérations éthiques
7. RESULTATS
7.1. Les données socioprofessionnelles
7.1.1. Age
7.1.2. Sexe
7.1.3. Catégorie professionnelle
7.1.4. Service
7.1.5. Ancienneté dans le service et la profession
7.2. Connaissance sur les IN
7.2.1. Connaissance de la définition de l’IN
7.2.2. Connaissance des modes de contamination liées aux IN
7.2.3. Connaissance des sites de localisation des IN
7.2.4. Connaissance des facteurs favorisants les IN
7.2.5. Connaissance des conséquences néfastes d’une IN sur l’état clinique
7.2.6. Efficacité du lavage des mains sur les IN
7.3. Données sur le lavage des mains
7.3.1. Formation du personnel sur l’hygiène des mains
7.3.2. Régularité du lavage des mains
7.3.3. Importance du lavage des mains dans l’hôpital
7.3.4. Produits utilisés pour le lavage des mains
7.3.5. Soutien de la direction de l’hôpital pour le lavage des mains
7.3.6. Disposition de la solution hydro-alcoolique
7.3.7. Existence d’affiches sur l’hygiène des mains dans les services
7.3.8. Formation du personnel sur le lavage des mains
7.3.9. Importance du lavage des mains chez les collègues
7.4. Données sur la prévention
7.4.1. Port des gants
7.4.2. Changement régulier de la blouse
7.4.3. Connaissance du sigle PRONALIN
7.4.4. Efficacité des actions de prévention des IN
7.4.5. Participation aux réunions sur la prévention des IN
8. DISCUSSION
CONCLUSION et RECOMMANDATIONS
REFERENCES
ANNEXES