Le lupus érythémateux systémique (LES), autrement appelé lupus érythémateux disséminé (LED), représente le prototype des maladies auto-immunes, atteignant souvent les femmes en période d’activité génitale et les individus de race noire. Ses modes de présentation polymorphes doivent être connues et faire demander le dosage des anticorps caractéristiques. Maladie très souvent mortelle dans les premières années de son évolution, elle est devenue une affection chronique habituellement marquée par la succession de poussées entrecoupées de périodes de rémissions plus ou moins prolongées (1).
C’est une maladie rare, par définition, sa prévalence varie selon les enquêtes : de 15 à 60 pour 100 000 habitants (2). De ce fait elle est souvent sous-diagnostiquée en ambulatoire. De plus, le coût élevé des examens biologiques impératifs au diagnostic ne permet pas de cadrer à temps le malade et retarde ainsi sa prise en charge efficace dans les meilleurs délais. L’atteinte cardiaque constitue une des principales causes de morbidité et de mortalité.
RAPPEL SUR LE LUPUS ERYTHEMATEUX SYSTEMIQUE
DEFINITION
Le lupus érythémateux systémique est une maladie inflammatoire systémique autoimmune non spécifique d’organe, et dont la cause exacte est actuellement inconnue. C’est le type de connectivite le plus fréquemment rencontré en pratique médicale. Le mode de présentation extrêmement polymorphe de la maladie lupique, le groupement varié des différents organes intéressés, rendent très difficiles une définition purement clinique de la maladie. Selon DUBOIS, il s’agit d’« un syndrome clinique de cause inconnue, caractérisée par une atteinte systémique et par une évolution par poussées atteignant un ou plusieurs appareils, entrecoupées de rémissions multiples. Le diagnostic est le plus souvent confirmé par la découverte de cellule de Hargraves ou d’anticorps antinucléaires » .
Ses caractères majeurs sont:
– sa rareté : aux Etats-Unis, sa prévalence est estimée à 15 à 50 pour 100 000 habitants, plus élevée dans la race noire (4);
– sa survenue chez la femme dans environ 90 % des cas (2) (5) (6) (7), généralement en période d’activité ovarienne ;
– ses manifestations cliniques très polymorphes et erratiques ;
– sur le plan biologique, la production de multiples auto-anticorps dont les plus caractéristiques sont dirigés contre certains composants du noyau, tel que l’ADN natif.
– son évolution par poussées, difficile à prévoir;
– son pronostic, fonction de la nature des lésions viscérales, dominé par les atteintes rénales, cardiovasculaires et neuro-psychiatriques.
EPIDEMIOLOGIE
Le lupus érythémateux systémique touche 1 homme pour 9 femmes. La maladie se rencontre à tout âge. Dans la majorité des cas, la maladie survient chez une femme jeune entre 13 et 40 ans (5). Une étude malgache sur les maladies lupiques observées dans les hôpitaux d’Antananarivo entre 1997 et 2001, montre une moyenne d’âge de 30 ans (8).
Le LES est 2 à 5 fois plus fréquent chez les sujets de race noire que chez les caucasiens, 3 fois plus fréquent chez les sujets originaires d’ Extrême-Orient (2), plus fréquent également chez les populations d’origine hispanique et asiatique. Ceci étant, les auteurs sont d’accord pour n’accorder aucun caractère pronostique péjoratif au facteur racial.
L’incidence de la maladie varie selon les pays de 0.2 à 10. En Amérique du Nord et dans le nord de l’Europe, sa prévalence est entre 15 et 50 pour 100 000 habitants, plus de 80 % des cas survenant chez la femme en période d’activité génitale (9). La rareté de cette affection classiquement admise en Afrique, par rapport aux séries d’Amérique du Nord et des Caraïbes, pourrait être due à une sous-évaluation du fait d’un certain nombre de cas non diagnostiqués, comme l’ont déjà noté certains auteurs (10). Environ 50 % des malades présenteraient une manifestation cardiaque (6). On ne dispose malheureusement d’aucune étude épidémiologique sur le sujet à Madagascar .
De nombreux arguments plaident en faveur du rôle prépondérant de la prédisposition génétique. La fréquence des lupus familiaux varie de 5 à 12 % (11). Chez les jumeaux monozygotes, le taux de concordance clinique de la maladie est de 23 à 57 % et la concordance sérologique de 70 à 80 % contre une concordance respective de 3 à 10 % et 15 à 20 % entre jumeaux dizygotes (11). On remarque également que la maladie est plus fréquente chez les jumeaux monozygotes (25% à 50%) que chez les jumeaux hétérozygotes (5%) .
ETIOPATHOGENIE
Le lupus érythémateux systémique est le prototype même des maladies auto-immunes. Son étiologie précise reste inconnue. Des études sur les modèles murins et la forme humaine de la maladie ont montré la multiplicité des anomalies immunologiques liées à l’individu, son contexte génétique et son environnement. Le mécanisme d’action de la pathologie fait encore l’objet de plusieurs investigations, mais on sait que le mécanisme majeur des dommages causés est induit par les réponses immunes anormales : production de sous-groupes pathologiques d’auto-anticorps et de complexes immuns. La caractéristique essentielle de cette connectivite est d’ailleurs la présence d’une grande variété d’auto-anticorps circulant dont les plus spécifiques sont dirigés contre un ou plusieurs composants du noyau cellulaire (anticorps anti-nucléaires). Les mécanismes initiaux, mais aussi les mécanismes pathogènes intermédiaires, peuvent être différents d’un patient à l’autre. Ces différences rendent compte des diverses formes cliniques de la maladie et sont très certainement en grande partie d’origine génétique.
Immunogénétique du lupus chez l’homme :
Bien que formellement établies, les bases génétiques de la susceptibilité au lupus restent en grande partie inconnues. Le lupus se transmet selon un mode génétique complexe ou polygénique. Différents gènes ou allèles peuvent être impliqués selon l’origine ethnique considérée : les allèles de classe II du CMH, HLA-DR2 et DR3; gène gouvernant le taux de TNF alpha; gènes codant pour les composés C4 et C2 de la voie classique du complément ; gènes gouvernant les allotypes des chaînes légères d’immunoglobulines …
Les facteurs environnementaux :
– les rayons ultraviolets B et parfois les rayons ultraviolets A. Chez les patients atteints de lupus, 70% ont une photosensibilité ;
– les hormones sexuelles telles que les œstrogènes expliquent la prédominance de la maladie chez la femme. En outre, les hormones mâles auraient un rôle protecteur ;
– certains médicaments sont aptes à induire la maladie (lupus induit);
– le stress ;
– certains agents infectieux, notamment le virus cependant jusqu’à aujourd’hui l’agent viral n’a pu être identifié.
La pathogénie fait intervenir en premier lieu, l’action des anticorps anti-nucléaires contre les structures cellulaires ou membranaires : réaction de type II ou cytotoxique. Ils jouent également un rôle pathogène par l’intermédiaire de la formation de complexes immuns (réaction de type III). La production des auto-anticorps par les lymphocytes B se fait en réponse à un stimulus antigénique. D’autre part, les interactions de reconnaissance entre cellules B et cellules T sont essentielles pour la production des auto-anticorps.
Ainsi, les anticorps anti-ADN ont des propriétés néphrotoxiques, les anticorps antiphospholipides sont responsables de certaines pathologies cardiologiques telles que les valvulopathies, les infarctus du myocarde, les cardiomyopathies, les thrombis intracardiaques ainsi que les complications thrombotiques et les lésions vasculaires.
Le polymorphisme du tableau clinique du lupus érythémateux s’explique par l’interaction des facteurs suivants :
– le type et la qualité d’anticorps produits ;
– les organes, fragment d’organes ou produits métaboliques cellulaires dont ils peuvent être la cible ;
– la manière dont le système immunitaire du sujet se défend.
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPEL SUR LE LUPUS ERYTHEMATEUX SYSTEMIQUE
1 – DEFINITION
2 – EPIDEMIOLOGIE
3 – ETIOPATHOGENIE
4 – MANIFESTATIONS CLINIQUES
4-1 – SIGNES GENERAUX
4-2 – MANIFESTATIONS CARDIAQUES
4-2-1 – Les péricardites
4-2-2 – Les myocardites
4-2-3 – Les endocardites
4-2-4 – Les atteintes coronariennes
4-3 –LES AUTRES MANIFESTATIONS VISCERALES
5 – EXAMENS PARACLINIQUES
5-1 – LES EXAMENS BIOLOGIQUES STANDARDS
5-2 – ANOMALIES IMMUNOLOGIQUES
6 – LUPUS ET SYNDROME DES ANTICORPS ANTIPHOSPHOLIPIDES
7 – LES AUTRES FORMES CLINIQUE
8 – DIAGNOSTIC POSITIF
9 – DIAGNOSTIC DIFFERENTIEL
10 – TRAITEMENT
10-1 – OBJECTIFS DU TRAITEMENT
10-2 – MESURES GENERALES
10-3 – MOYENS THERAPEUTIQUES
10-4 – INDICATIONS THERAPEUTIQUES
10-4-1 – LES FORMES CARDIOLOGIQUES
10-4-2 –LES AUTRES FORMES VISCERALES
10-5 – SYNDROME DES ANTIPHOSPHOLIPIDES
DEUXIEME PARTIE : ETUDE PROPREMENT DITE
1 – METHODOLOGIE
1.1 – METHODE D’ETUDE
1.2 – SELECTION DES PATIENTS
1.2.1 – CRITERES D’INCLUSION
1.2.2 – CRITERES D’EXCLUSION
1-3 – PARAMETRE A ETUDIER
1-4 – REALISATION DE L’ETUDE
2 – OBSERVATIONS
3 – RESULTATS
3-1 – L’AGE
3-2 – LE SEXE
3-3 – LES MOTIFS D’HOSPITALISATION ET SIGNES CARDIOLOGIQUES
3-4 – LES ATTEINTES CARDIAQUES
3-5 – L’ATTEINTE PERICARDIQUE
3-6 – LES AUTRES ATTEINTES VISCERALES
3-7 – LES ANOMALIES IMMUNOLOGIQUES
3-8 – LE SYNDROME DES ANTIPHOSPHOLIPIDES ASSOCIE
3-9 – TRAITEMENT ET EVOLUTION
TROISIEME PARTIE : COMMENTAIRES ET SUGGESTIONS
1 – COMMENTAIRES ET DISCUSSIONS
1-1 – CARACTERISTIQUE DE L’ECHANTILLON
1-2 – FREQUENCE DES DIFFERENTES ATTEINTES CARDIAQUES
1-3 – L’ATTEINTE PERICARDIQUE
1-4 – L’ATTEINTE MYOCARDIQUE
1-5 – L’ATTEINTE ENDOCARDIQUE
1-6 – L’ATTEINTE CORONARIENNE
1-7 – LES AUTRES ATTEINTES VISCERALES
1-8 – LES ANOMALIES BIOLOGIQUES
1-9 – LES ANOMALIES IMMUNOLOGIQUES
1-10 – LE SYNDROME DES ANTIPHOSPHOLIPIDES ASSOCIE
1-11 – TRAITEMENT
1-12 – LIMITES DE VALIDITE DE NOTRE ETUDE
2 – SUGGESTIONS ET RECOMMANDATIONS
CONCLUSION
ANNEXES
BIBLIOGRAPHIE