Les inondations du XIXème siècle
La Loire a inondé Tours en 1846, 1856 et 1866. La première crue a provoqué de nombreuses ruptures de digues sur toute la vallée de la Loire. A Tours, l’eau est entrée dans la ville par la percée aménagée dans la digue pour la voie ferrée. La crue de 1856 est la crue de référence pour la Loire. A l’ouest de l’avenue de Grammont, la submersion a atteint 4,50 m de hauteur par endroits. Les dégâts sont considérables. D’autant qu’à cette époque, les zones inondables commencent à être de plus en plus urbanisées entre Orléans et Angers. La crue de 1866, est moins importante que la précédente au niveau de Tours, la Loire atteint une hauteur inférieure d’1 m environ. La ville n’est pas inondée mais le reste de la vallée de la Loire connaît des ruptures de digues. Ces crues sont de fréquence plus que centennale .
Les habitants de Tours n’ont pas connu de catastrophe de leur vivant
En dehors des crues du XIXème siècle qui ont causé d’importants dégâts, matériels comme humains, la dernière crue remarquable de la Loire date de 1907. Le niveau du fleuve a atteint une hauteur de 4 m sous le pont Wilson mais cela n’a pas provoqué de rupture de digues. En 1940, le Cher en crue menaça de faire céder la digue à la confluence de celui-ci avec la Loire. La population de Berthenay était prête à évacuer au signal d’alerte, mais cela n’a finalement pas été nécessaire. Cette crue du Cher n’a pas été oubliée par certains habitants de Berthenay qui l’ont vécue. Pour Beck (1986), les risques sont « réels et irréels à la fois » . Or l’aspect réel du risque d’inondation en Touraine qui représenterait les dommages déjà occasionnés n’existe pas puisque, si la population a connu des crues, celles-ci n’ont pas entraîné d’inondations. Personne n’a jamais rien vu qui puisse rester gravé dans les mémoires (CITERES, 2008). Ainsi le risque d’inondation a une composante presque uniquement irréelle et ne peut s’appréhender qu’à travers une projection des dégâts possibles qu’il pourrait causer dans le futur. Cet exercice est d’autant plus compliqué que la forte urbanisation de la vallée de la Loire au cours du siècle passé rend difficile la projection d’une catastrophe sur la base des dégâts occasionnés par les inondations du XIXème siècle.
Les rappels du passé passent inaperçu
Les traces d’inondations antérieures sont encore visibles sur certains bâtiments, comme la chapelle Saint-Eloi à Tours ou à l’intérieur de vieilles fermes sur la commune de Berthenay. Des repères de crues sont également là pour rappeler aux habitants les hauteurs d’eau des différentes crues. Il en existe un sous le pont Wilson, et un à Savonnières, qui sont parmi les plus connus. La loi du 30 juillet 2003 met en place l’article L563-3 du code de l’Environnement : « Dans les zones exposées au risque d’inondations, le maire, avec l’assistance des services de l’Etat compétents, procède à l’inventaire des repères de crues existant sur le territoire communal et établit les repères correspondant aux crues historiques, aux nouvelles crues exceptionnelles ou aux submersions marines. » Le but de cet article est d’assurer la présence de repères de crues sur les territoires communaux, afin que ces évènements ne disparaissent pas de la mémoire collective. On remarque cependant que les repères de crues ne sont pas très nombreux, et qu’il est difficile pour la population de transférer cette information à son lieu d’habitation compte tenu de la distance qui les sépare.
Explication de l’aléa inondation à Tours
La connaissance de l’aléa auquel sont exposées les communes de Tours et Berthenay permettra dans la partie d’analyse des questionnaires de voir s’il existe un décalage entre la perception des habitants et la réalité.
Des évènements climatiques combinés pour provoqués une crue centennale
Les crues de la Loire peuvent avoir deux causes principales. De violents orages responsables de précipitations importantes sur une courte durée sur le haut-bassin de la Loire et de l’Allier provoquent les crues brutales, dites « cévenoles ». Ces crues sont liées à des évènements météorologiques méditerranéens.
Les crues atlantiques résultent d’une longue période de précipitations d’origine océanique pouvant s’étendre à l’ensemble du bassin, même si elles concernent plus précisément l’ouest et le nord de celui-ci. Les crues mixtes résultent d’une conjonction des deux crues citées précédemment. Les crues de 1846, 1856 et 1866 sont de ce type là. Ces crues sont donc plus rares que les deux premières puisqu’elles nécessitent des conditions climatiques océaniques et méditerranéennes défavorables simultanément.
Parmi les 3 types d’inondation, le plus dangereux est la rupture de digue
Le premier type d’inondation possible, et celui qui est le plus fréquent entre la Loire et le Cher, est celui par remontée de la nappe phréatique. Une telle inondation se produit lorsque le sol est saturé d’eau et que la nappe affleure. A la confluence du Cher et de la Loire, il n’est pas rare que de l’eau soit présente dans les creux des terrains alors que les deux rivières sont hautes. Toutefois ce type d’inondation menace rarement les habitations. Si le niveau de la rivière atteint le sommet de la digue, l’eau s’écoule de l’autre côté dans la plaine : il s’agit d’une surverse par dessus la levée. L’eau se répand lentement dans le val, cette inondation n’est pas un évènement brutal. Cependant, avant même que l’eau ait atteint le haut de la digue, la pression qui s’exerce sur cette dernière est très forte et peut provoquer sa rupture. De plus le curage du fleuve et le prélèvement de sable ont contribué à enfoncer le lit de la Loire, ce qui a diminué la solidité de la base des digues. En cas de rupture, l’eau se répand violemment en un courant destructeur. Les dégâts provoqués sur les constructions sont plus graves que dans le cas d’une submersion lente. De plus, les routes étant fréquemment situées sur les levées, cela peut poser un problème pour l’évacuation de la population ou l’arrivée des secours.
Cartographie de l’aléa inondation sur les communes de Tours et Berthenay
La cartographie donnée par l’Atlas des Zones Inondables pour les deux communes d’études permet de représenter le degré de l’aléa sur le territoire concerné.
Le centre ville de Tours est classé en aléa faible, contrairement aux communes de Saint-Pierre-des-Corps (aléa moyen ou fort) et La Riche (aléa fort) qui l’entourent. Cette zone comprend un nombre élevé d’enjeux Le quartier des Prébendes est le quartier le plus bas du centre ville de Tours. Il est traversé en souterrain par le ruisseau de l’archevêque qui a permis de drainer l’ancien marécage sur lequel est construit le quartier. Dans le cas de fortes précipitations, les caves des particuliers tourangeaux peuvent se retrouver inondées.
La commune de Berthenay est située à la confluence du Cher et de la Loire. Même si ses rives sont endiguées, elle est régulièrement soumise à des inondations par remontée de nappe, souvent sans conséquences. De plus, de nombreuses ruptures de digues se sont produites sur cette commune pendant les grandes crues du XIXème siècle. Le territoire communal est en pente légèrement descendante d’est en ouest « Les fonds » de Berthenay désignent la pointe de la commune qui est aussi le niveau le plus bas, et donc le plus touché par l’infiltration de l’eau. C’est d’ailleurs historiquement une zone non habitée.
Les différents acteurs intervenant dans la gestion du risque d’inondation
Les services de l’Etat se partagent l’essentiel des compétences en matière de prévention des inondations
Différents acteurs ayant des rôles complémentaires sont en charge de la prévention du risque d’inondation lié à la Loire Seulement cette multiplicité d’acteurs rend la compréhension de la répartition des responsabilités plus difficile. L’Etat a un rôle central dans la gestion du risque inondation. Historiquement, il a été responsable de l’endiguement du fleuve ainsi que de l’entretien des levées. Les Missions InterServices de l’Eau sont des structures regroupant les services de l’Etat et les établissements publics ayant une compétence dans la gestion de la ressource eau : Préfecture, DDEA, DREAL, DDASS, Service Navigation, Conseil Supérieur de la Pêche et Agence de l’Eau. Par rapport au risque d’inondation, les MISE sont en charge de la police de l’eau sur le fleuve. La DDEA est chargée de l’entretien du lit et des levées ainsi que de la mise en œuvre des PPRi. La DREAL Centre doit effectuer le recensement des repères de crue.
Elle réalise aussi l’Atlas des Zones Inondables qui est consultable en ligne sur Internet, ainsi que le Schéma Directeur de Prévision des Crues dont le rôle est de «définir l’organisation de la surveillance, de la prévision et de la transmission de l’information sur les crues dans le bassin Loire-Bretagne » (SDPC, 2005). La surveillance de la hauteur des rivières est effectuée par le réseau CRISTAL. Le Service de Prévision des Crues se charge de la prévision et de l’annonce des crues, ainsi que de diffuser les cartes de vigilance relatives à l’inondation. Enfin la Préfecture alerte les maires et organise les secours dès lors que les évènements dépassent l’échelle communale.
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Table des matières
Introduction
Partie 1 Présentation de la recherche
1. Définition des termes de la recherche
2. Présentation de la problématique
Partie 2 Contexte de réalisation de la Recherche
1. Rappel historique des inondations dans la région de Tours, ou pourquoi le
risque a été oublié
11. Les inondations du XIXème siècle
12. Les habitants de Tours n’ont pas connu de catastrophe de leur vivant
13. Les rappels du passé passent inaperçu
2. Explication de l’aléa inondation à Tours
21. Des évènements climatiques combinés pour provoqués une crue centennale
22. Parmi les 3 types d’inondation, le plus dangereux est la rupture de digue
23. Cartographie de l’aléa inondation sur les communes de Tours et Berthenay
3. Les différents acteurs intervenant dans la gestion du risque d’inondation
31. Les services de l’Etat se partagent l’essentiel des compétences en matière de
prévention des inondations
32. Les collectivités locales
4. Les habitants face au risque : peu d’outils sont à leur disposition
41. Une faible quantité d’information a été communiquée aux habitants
42. La responsabilité attribuée aux habitants dans les documents de prévention est
faible
43. Les habitants ont confiance dans les digues
5. Le contexte des inondations en France pendant les enquêtes de terrain
Partie 3 Analyse de la perception du risque dans la vallée de la Loire
1. Protocole d’enquête auprès de la population
11. L’entretien semi-directif
12. Le questionnaire
2. Analyse des entretiens
21. Les habitants ignorant le risque
22. Les habitants qui nient le risque
23. Les habitants qui délèguent la responsabilité
24. Les habitants préparés au risque d’inondation
3. Analyse des questionnaires
31. Les risques craints par la population
32. La perception du risque et sentiment de sécurité
33. Impact du fait d’avoir déjà vécu une inondation sur la perception du risque
34. Ancienneté de la vie en zone inondable et perception du risque
35. Le rôle de l’information dans la perception du risque
36. Les signaux émis par le territoire influent sur la perception du risque
37. Les comportements
Conclusion
Bibliograpshie
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