Les cancers des voies aรฉrodigestives supรฉrieures (VADS), se dรฉfinissent comme lโensemble des cancers dรฉveloppรฉs aux dรฉpens de la cavitรฉ buccale, du pharynx, du larynx et des cavitรฉs nasosinusiennes [1]. Cette entitรฉ traduit peu la diversitรฉ diagnostique, pronostique et thรฉrapeutique des diffรฉrentes localisations de ces cancers. Environ 15000 nouveaux cas de cancers des VADS par an, sont enregistrรฉs en France. Ils se situent au 5รจme rang des cancers les plus frรฉquents en France et au 6รจme au niveau mondial. Ces cancers des VADS touchent en majoritรฉ lโhomme (95 %). Le carcinome รฉpidermoรฏde est le type histologique le plus frรฉquemment retrouvรฉ dans les cancers de la cavitรฉ buccale, de lโoropharynx et du larynx [1,2]. Dโautres types histologiques prรฉdominent dans les localisations nasopharyngรฉe et naso-sinusienne. Les cancers ORL rares, reprรฉsentent une entitรฉ peu frรฉquente (moins de 10 % des cancers de la tรชte et du cou), particuliรจre de par leur histologie (sarcomes, mรฉlanomes malins, variants des carcinomes รฉpidermoรฏdes conventionnels) et ou leur localisation (sinus, glandes salivaires, oreille, sites eux mรชmes dโhistologies diverses). La difficultรฉ diagnostique de ces cancers, explique souvent le recours ร des experts, et parfois ร des techniques biomolรฉculaires complรฉmentaires de lโhistologie morphologique et de lโimmunohistochimie classiques [3]. La prise en charge thรฉrapeutique fait appel ร diffรฉrents moyens, intรฉgrant la chirurgie, la radiothรฉrapie et la chimiothรฉrapie avec diffรฉrentes indications reposant sur des critรจres histocliniques classiques, mais รฉgalement des spรฉcificitรฉs histologiques et le grade. La prise en charge des cancers, impose une collaboration multidisciplinaire, elle est discutรฉe en rรฉunion de concertation pluridisciplinaire, associant des chirurgiens, des oncologues, des radiothรฉrapeutes, des radiologues et des anatomopathologistes avec un quorum minimal de trois spรฉcialitรฉs diffรฉrentes reprรฉsentรฉes [1,2].
Le pronostic des cancers ORL rares est sombre, dโabord local : la rรฉcidive locale est la premiรจre cause dโรฉchec, survenant le plus souvent au cours des deux premiรจres annรฉes, mais รฉgalement la survenue prรฉcoce de mรฉtastases viscรฉrales. En Afrique en gรฉnรฉral et, au Sรฉnรฉgal en particulier, les รฉtudes sur le sujet sont trรจs rares, il nous a paru alors, intรฉressant de mener cette รฉtude. Lโobjectif de notre travail รฉtait de dรฉcrire le profil รฉpidรฉmiologique, les aspects cliniques, thรฉrapeutiques, รฉvolutifs et pronostiques de ces cancers orl rares, et de les comparer aux donnรฉes de la littรฉrature.
Rappel anatomique sur les VADS
Anatomie descriptive
On regroupe sous le terme de VADS, l’ensemble des cavitรฉs, tapissรฉ de muqueuses, qui constitue la partie haute de la voie respiratoire et de la voie digestive (Fig.1). Lโappareil respiratoire est un ensemble complexe de structures anatomiques, constituรฉ de conduits, chargรฉs dโacheminer lโoxygรจne inspirรฉ jusquโau sang en vue dโalimenter les tissus grรขce ร la circulation sanguine et, dโรฉliminer le gaz carbonique produit par lโorganisme. Au plan anatomique, lโappareil respiratoire est subdivisรฉ en 2 parties : Un appareil haut, encore appelรฉ voies aรฉriennes supรฉrieures (VAS) ou hautes, et un appareil bas dรฉnommรฉ voies respiratoires infรฉrieures (VRI) ou basses. Les VAS comprennent successivement :
– les fosses nasales
– le cavum
– lโoropharynx
– le larynx
Les VRI comprennent :
– la trachรฉe cervicale, et thoracique
– les bronches (2 bronches souches, les bronchioles)
– les alvรฉoles pulmonaires
La voie digestive haute commence par les lรจvres et comprend successivement, la cavitรฉ buccale, l’oropharynx et l’hypopharynx. Elle s’arrรชte ร l’origine de l’ลsophage, au niveau d’un sphincter musculaire, la bouche ลsophagienne. L’oropharynx est le carrefour oรน se croisent les voies respiratoire et digestive [4].
Les fosses nasales et sinus para nasauxย
Les fosses nasales
Les fosses nasales, sont 2 cavitรฉs situรฉes de part et dโautre dโune cloison mรฉdiane, au centre du massif osseux facial. Elles sont placรฉes au-dessus de la cavitรฉ buccale, au-dessous de lโรฉtage antรฉrieur de la base du crรขne, en dedans des orbites et des os maxillaires, en avant du rhinopharynx. prรฉsentent ร dรฉcrire 4 parois (une paroi mรฉdiale, une paroi latรฉrale complexe, une paroi supรฉrieure et une paroi infรฉrieure).
Les sinus para nasaux
โข Le sinus maxillaire
Le sinus maxillaire (ou antre de Highmore) est une cavitรฉ pneumatique, creusรฉe dans le corps de lโos maxillaire et annexรฉe ร la fosse nasale avec laquelle elle communique par un ostium sโouvrant dans le mรฉat moyen. Il est de forme pyramidale triangulaire, ร sommet externe zygomatique et ร base interne. Il est situรฉ en dessous des cavitรฉs orbitaires et, surplombe latรฉralement la cavitรฉ buccale. Ainsi, il est en rapport รฉtroit avec les dents dites sinusiennes (les prรฉmolaires et les molaires supรฉrieures).
โข Le sinus ethmoรฏdal
Lโethmoรฏde est un os impair, mรฉdian et symรฉtrique qui appartient ร la fois ร lโรฉtage antรฉrieur de la base du crรขne et au massif facial. Il est constituรฉ de quatre parties : la lame verticale, la lame horizontale ou lame criblรฉe de lโethmoรฏde et deux masses latรฉrales appendues ร la lame horizontale.
La lame verticale est divisรฉe en deux, par la lame horizontale :
โจย ร sa partie supรฉrieure : lโapophyse crista galli, qui est intracrรขnienne.
โจย ร sa partie infรฉrieure, la lame perpendiculaire qui est endonasale.
Elle participe ร la formation de la cloison nasale. La lame horizontale ou lame criblรฉe est perforรฉe dโorifices, livrant le passage aux filets olfactifs et ร des dรฉhiscences de la dure-mรจre.
Les masses latรฉrales : elles sont appendues aux bords externes de la lame horizontale et sโinterposent entre les FN et les cavitรฉs orbitaires.
Elles sont pneumatisรฉes par les cellules ethmoรฏdales, constituant le labyrinthe ethmoรฏdal qui sโouvre dans les FN au niveau des mรฉats supรฉrieur et moyen.
โจย Le sinus frontal
Il est constituรฉ de 2 cavitรฉs pneumatiques paires asymรฉtriques, creusรฉes dans lโรฉpaisseur de lโos frontal, ร la jonction entre lโรฉcaille et la partie horizontale. Il est annexรฉ aux fosses nasales avec lesquelles, il communique par le canal naso frontal. Il est constituรฉ de 4 parois (antรฉrieure ou cutanรฉe, postรฉrieure ou cรฉrรฉbrale, mรฉdiale ou inter sinusienne et une paroi infรฉrieure ou orbito nasale).
โจย Le sinus sphรฉnoรฏdal
Cavitรฉ aรฉrique paire et paramรฉdiane, creusรฉe dans le corps du sphรฉnoรฏde, elle est annexรฉe ร la partie postรฉro supรฉrieure des fosses nasales. Il sโouvre de part et dโautre de la ligne mรฉdiane par un ostium. De forme cubique, il prรฉsente ร dรฉcrire 6 parois (une paroi antรฉrieure ou nasale, une paroi postรฉrieure, une paroi supรฉrieure ou toit, une paroi infรฉrieure ou plancher, une paroi latรฉrale ou ophtalmologique, une paroi mรฉdiale ou inter sinusienne).
Le cavumย
Le cavum ou rhinopharynx est la partie supรฉrieure du pharynx, exclusivement aรฉrienne et non digestive, qui communique en avant avec les FN par les choanes. Il est situรฉ :
โจย derriรจre le squelette de la face
โจย en avant du rachis cervical supรฉrieur
โจย en dessous de la base du crรขne
โจย au-dessus du voile du palais
Gรฉnรฉralitรฉs sur les cancers orlย
Etiopathogรฉnie des cancers des VADSย
Les facteurs toxiques
Les cancers des VADS sont en rapport avec une intoxication alcoolotabagique, dans 90% des cas, exception faite aux cancers nasosinusiens et du cavum. Un certain nombre de cancer de la cavitรฉ buccale et du larynx prรฉsente รฉgalement dโautres facteurs de risque [9].
โจย Le tabac
Le tabagisme chronique est le facteur de risque majeur. Le risque est dโautant plus important ร partir de 20 paquet-annรฉes [2]. Ce dernier รฉtant mesurรฉ par, le nombre de cigarettes consommรฉes par jour, rapportรฉ en nombre de paquet, multipliรฉ par le nombre dโannรฉes de consommation. Le tabac agirait :
– par brรปlure chronique,
– par ses composants toxiques (nicotine, monoxyde de carbone, phรฉnol, aldรฉhyde),
– par ses composants cancรฉrigรจnes (hydrocarbures aromatiques polycycliques).
Le tabagisme passif est aussi incriminรฉ, par des auteurs japonais comme facteur de risque รฉlevรฉ, de cancer des VADS. Ce risque serait de 3 fois plus important, pour un sujet ayant un conjoint fumeur, que pour un sujet tรฉmoin non exposรฉ [10,11].
โจย Lโalcool
Lโalcoolisme chronique constitue le 2รจme facteur de risque de survenue dโun cancer des VADS. Ce risque est dโautant plus รฉlevรฉ ร partir de 40 ร 60 g de consommation dโalcool pur par jour (en g/j). Cette derniรจre, se calcule par le volume dโalcool ingรฉrรฉ (en ml), multipliรฉ par le degrรฉ dโalcool, multipliรฉ par 0,8 (masse volumique de lโalcool). Lโalcool agirait รฉgalement :
– par action irritante locale directe par lโรฉthanol,
– par la dรฉgradation des moyens hรฉpatiques, notamment de rรฉsistance aux agressions externes et aux carences nutritionnelles (avitaminose A),
– par son rรดle de solvant des substances cancรฉrigรจnes du tabac [9].
Lโintoxication simultanรฉe ร lโalcool et au tabac, a un effet synergique sur le risque de dรฉveloppement dโune tumeur maligne des VADS [2]. Il a รฉtรฉ dรฉmontrรฉ que, si le risque relatif de dรฉvelopper un cancer des VADS est de 1 chez les ยซnon buveurs, non fumeursยป, il est de 2,33 chez les ยซgrands fumeurs, non buveursยป, de 2,43 chez les ยซgrands buveurs, non fumeursยป et de 15,5 chez les ยซ grands fumeurs, grands buveurs ยป [11,12].
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Table des matiรจres
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : GรNรRALITรS
I. Rappel anatomique sur les VADS
I-1 Anatomie descriptive
I-2 Vascularisation des VADS
I-3 Innervation des VADS
I-4 Drainage lymphatique des VADS
II. Gรฉnรฉralitรฉs sur les cancers ORL
II-1 Etiopathogรฉnie des cancers des VADS
II-1.1 Facteurs toxiques
II-1.2 Facteurs infectieux
II-1.3 Facteurs nutritionnels
II-1.4 Autres facteurs de risque
II-2 Diagnostic
II-2.1 Circonstances de dรฉcouverte
II-2.2 Examen clinique
II-2.3 Examens complรฉmentaires
II-2.4 Bilan dโextension
II-3 Anatomie pathologie
II-3.1 Rappel sur les techniques dโexamens anatomo cyto – pathologiques
II-3.2 Quelques types histologiques rares
II-3.3 Facteurs pronostiques
II-4 Traitement
II-4.1 Buts
II-4.2 Moyens
II-4.3 Indications
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE
I. Matรฉriels et Mรฉthodes
I-1 Cadre dโรฉtude : Hรดpital Principal de Dakar
I-2 Patients et Mรฉthodes
I-2.1 Type et durรฉe de lโรฉtude
I-2.2 Critรจres dโinclusion et de non inclusion
I-2.3 Collecte et analyses des donnรฉes
I-2.4 Code รฉthique
I-2.5 Limites mรฉthodologiques
II. Rรฉsultats
II-1 Nos observations
II-2 Analyse des rรฉsultats
II-2.1 Au plan รฉpidรฉmiologique
II-2.2 Au plan clinique
II-2.3 Au plan paraclinique
II-2.4 Au plan thรฉrapeutique
II-2.5 Au plan รฉvolutif
III. Discussion
III-1 Au plan รฉpidรฉmiologique
III-2 Au plan clinique
III-3 Au plan paraclinique
III-4 Au plan thรฉrapeutique
III-5 Au plan รฉvolutif
CONCLUSION
REFERENCES