Les cancers ou tumeurs malignes de l’ovaire (TMO) sont essentiellement des adénocarcinomes, c’est-à-dire une tumeur maligne qui se développe sur les tissus muqueux ou glandulaires de cet organe. Ces TMO sont rares. L’incidence moyenne dans la population générale serait de 1/2 500 femmes après 50 ans, soit une incidence annuelle de 0,036 %. Elles concernent chaque année en France 4 500 femmes, et 3 500 femmes meurent (1). Elles sont épithéliales dans 90 % des cas et graves. Elles sont la 5ème cause des décès féminins. Le cancer de l’ovaire est un « silent killer ». Les signes d’appel n’apparaissent qu’en cas de tumeurs avancées (2). Le diagnostic des TMO est tardif, dont 60 % des tumeurs sont des stades III et IV, avec un âge médian de 60 ans et un pic à 75 ans. Ces deux facteurs, stade tardif et âge, aggravent le pronostic. La survie à 5 ans est de 30 % pour un stade III C, stade le plus habituel, contre 90 % pour un stade Ia. Un diagnostic à un stade plus précoce devrait diminuer la mortalité.
RAPPEL ANATOMIQUE DE L’OVAIRE
EMBRYOLOGIE
La genèse de l’ovaire comporte deux stades. D’abord, il y a un stade indifférencié, commun aux deux futurs gonades qui débute de la troisième semaine jusqu’à la cinquième semaine. A cette période , se forme la crête génitale aux dépens de l’épithélium cœlomique qui recouvre le corps de Wolff. Cette crête génitale émet des proliférations qui sont appelées « cordons médullaires » : on y trouve les prochains gonocytes : les ovules primordiaux et les futurs éléments nourriciers qui donneront les cellules folliculaires et vers la 7ème semaine survient le stade de différenciation de l’ovaire. Il se forme une double prolifération : une prolifération des cordons médullaires où pénètrent les gros éléments de la crête génitale, c’est- à- dire les gonocytes, puis la crête prolifère de nouveau, entrainant la formation de cordons corticaux qui aboutissent à l’ovaire définitif .
HISTOLOGIE
L’ovaire comprend deux parties :
– Une partie interne, la médullaire, constituée par un tissu conjonctif lâche avec des vaisseaux et de nombreux filets nerveux ;
– Une partie externe, la corticale, qui occupe les deux tiers de l’organe et se compose d’un stroma très dense formé par des fibroblastes, d’une albuginée, d’un épithélium germinatif à partir duquel se forment les cellules de la lignée germinale, qui subissent une évolution dont le terme final est le follicule de De Graaf .
ANATOMIE
Morphologie
L’ovaire est ovoïde et légèrement aplati.
La position de l’ovaire est différente selon si la femme est :
– Nullipare : dans ce cas, l’ovaire a un grand axe vertical ;
– Multipare : dans ce cas, l’ovaire a un grand axe qui est plutôt horizontal ;
– L’ovaire est blanc nacré.
Sa surface est irrégulière et mamelonnée. Un ovaire fait en moyenne : 3,5 x 2 x 1 cm. de longueur, de largeur et d’épaisseur. Son poids est de 8 à 10 grammes chez une femme adulte .
Topographie
Une coupe transversale de l’ovaire met en évidence deux zones : l’une périphérique, le cortex et l’autre centrale, la médula. L’ovaire n’est pas recouvert de péritoine mais d’un épithélium superficiel. Le péritoine se fixe uniquement au niveau du hile de l’ovaire sur le bord mésovarique :
• Epithélium superficiel : il tapisse l’ovaire et est formé d’une seule couche de cellules.
• Tunique albuginée : elle est située sous l’épithélium superficiel. Elle est constituée d’une mince lame de tissu conjonctif lâche.
• Stroma ovarique : c’est une sorte de tissu de soutien distribué dans le cortex et la médulla.
• Cortex ovarique : il contient des follicules ovariques primordiaux, primaires, secondaires et tertiaires des follicules atrétiques stade dégénératif des follicules ovariques, des corps lutéaux et des corps blancs.
• Médulla ovarique : elle est centrale et contient notamment les vaisseaux .
Moyens de fixité de l’ovaire
L’ovaire est mobile et est maintenu par 4 principaux moyens de fixité :
• Le ligament propre de l’ovaire ou ligament utéro-ovarien : Il unit l’extrémité inférieure de l’ovaire à la corne utérine. En arrière et en bas de la trompe, il est accompagné par le rameau ovarique de l’artère utérine ;
• Le ligament suspenseur de l’ovaire ou ligament lombo-ovarien : il naît dans la région lombaire et croise les vaisseaux iliaques externes. il se divise à sa terminaison en deux faisceaux ovariques et tubaires :
– Le faisceau ovarique qui se fixe à l’extrémité supérieure et au bord mésovarique de l’ovaire ;
– Le faisceau tubaire qui se fixe au niveau de l’infundibulum : pavillon de la trompe. Il est constitué de fibres conjonctives et musculaires lisses, il entoure le pédicule vasculo-nerveux ovarique.
• Le ligament infundibulo-ovarique : il unit l’extrémité supérieure de l’ovaire à l’infundibulum de la trompe. Il maintient l’ovaire proche de la trompe pour permettre la captation de l’ovocyte par la trompe.
• Le mésovarium ou méso de l’ovaire : c’est une structure péritonéale. Le péritoine se réfléchit au niveau du bord antérieur ou mésovarique autour des éléments de fixation. Cette réflexion détermine le hile de l’ovaire laissant passer les vaisseaux et les nerfs. il unit l’ovaire au feuillet postérieur du ligament large. L’ovaire n’est pas recouvert de péritoine sauf au niveau du hile où s’insère ces 4 structures .
La vascularisation
Les artères
Les ovaires sont vascularisés grâce aux artères ovariques et utérines.
– Les artères ovariques : ce sont les artères principales de la vascularisation de l’ovaire. Elles naissent de la face antérieure de l’aorte au niveau lombaire, entre les artères rénales et mésentériques inférieures. En effet, embryologiquement, les ovaires se situent au niveau lombaire. Ils descendront par la suite. D’où l’origine haute des artères ovariques. Elles descendent en bas et latéralement, en croisant l’uretère, vers le pli inguinal. Elles se terminent à l’extrémité tubaire de l’ovaire où elles se divisent en deux branches : tubaire latérale et ovarienne latérale.
– L’artère utérine : elle prend son origine au niveau de l’artère iliaque interne. Elle longe le bord latéral de l’utérus et arrive de la corne utérine. Elle se divise en deux branches : tubaire médiale et ovarienne médiale. Ces deux systèmes, ovarique et utérin, s’anastomosent au niveau de la trompe et de l’ovaire pour former les arcades ovariques infra-tubaire et infra-ovarique.
Les veines
Il existe plusieurs veines naissant des faces médiale et latérale de l’ovaire. Ces veines se réunissent en un plexus veineux pampiniforme situé dans le mésovarium. Il y a ensuite formation d’une ou deux veines ovariques qui rejoignent la région lombaire: A droite : elles ou elle se draine dans la veine cave Inférieure directement. Il arrive qu’elles ou elle se draine dans la veine rénale droite A gauche : elle ou elles se drainent dans la veine rénale gauche. Les lymphatiques de l’ovaire se jettent dans les ganglions latero-aortiques.
L’innervation
Les nerfs dérivent essentiellement du plexus ovarique qui dérive du ganglion aortico-rénal et du plexus rénal. Le nerf latéral de l’utérus donne un ou deux rameaux qui atteignent l’extrémité utérine de l’ovaire .
PHYSIOLOGIE
L’ovaire a une activité très importante de synthèse hormonale. Le follicule, lors des 14 derniers jours de sa croissance, synthétise des œstrogènes et plus particulièrement de l’œstradiol. Cette synthèse augmente progressivement jusqu’à l’ovulation. Cette phase est appelée phase folliculaire. Après l’ovulation, la synthèse d’œstradiol diminue et le corps jaune sécrète essentiellement de la progestérone. On appelle cette phase la phase lutéale. La synthèse de progestérone va durer pendant toute la vie du corps jaune et son taux va chuter lors de la formation du corps blanc. Le fonctionnement de l’ovaire étant cyclique, une nouvelle phase folliculaire va succéder à la phase lutéale .
Contrôle du fonctionnement ovarien
Le fonctionnement des ovaires est contrôlé par deux formations situées à la base du cerveau : l’hypothalamus et l’hypophyse. L’hypothalamus sécrète une hormone, le Gonadotrophin Releasing Hormone (GNRH) qui va stimuler l’hypophyse. En réponse, l’hypophyse va sécréter deux hormones gonadotrophines : la Follicule Stimulating Hormone et la Luteinizing Hormone qui vont à leur tour agir sur les ovaires. Par leurs secrétions hormonales c’est-à-dire la progestérone et l’œstrogène vont réguler le fonctionnement de l’hypothalamus et de l’hypophyse rétrocontrôle. Les modalités du contrôle varient en fonction du stade de développement des follicules. En phase folliculaire, la FSH stimule la croissance des follicules et la synthèse d’œstradiol. En retour, l’œstradiol va réguler la sécrétion de FSH. En fin de phase folliculaire, la forte quantité d’oestradiol secrétée par l’ovaire va stimuler l’hypothalamus et l’hypophyse, ce qui va entraîner une décharge brutale et très importante de LH (pic de LH), qui va induire l’ovulation et la maturation ovocytaire. En phase lutéale, c’est la LH qui va stimuler le corps jaune, lequel, en réponse, synthétise de la progestérone. En fin de phase lutéale, la LH va chuter, entraînant la lutéolyse. S’il y a grossesse, l’embryon secrète l’hCG : human Chorionic Gonadotropin qui a le même effet que la LH et qui va donc stimuler le corps jaune et empêcher la lutéolyse. Les hormones ovariennes : les œstrogènes et la progestérone passent dans le sang et vont venir agir sur leurs organes cibles .
LES CANCERS DE L’OVAIRE
GENERALITES
Le cancer de l’ovaire est une tumeur maligne qui se développe sur les tissus muqueux ou glandulaires de cet organe. Il se multiplie généralement à partir du revêtement de surface des ovaires. La forme la plus fréquente est le carcinome épithélial de l’ovaire. Les formes rares, comme les tumeurs germinales de l’ovaire ou les tumeurs borderline, justifient d’une prise en charge spécifique. Le cancer de l’ovaire est en général de mauvais pronostic car il est souvent de découvert tardivement. L’ovaire est situé dans le petit bassin et une lésion tumorale peut se développer lentement sans signes cliniques. Le traitement repose sur une chirurgie la plus complète possible associée à la chimiothérapie qui réduit le risque de récidive. Causes ou facteurs de risque Il n’y a pas de cause spécifique du cancer de l’ovaire, à l’exception des cancers génétiques. Cinq à dix pour cent des cas sont familiaux associant cancer du sein et de l’ovaire, soit dans le cadre d’un syndrome de Lynch de type II ou d’une mutation du gène BRCA1 dans le Chromosome 17q21 ou BRCA2. Une anomalie de ces deux derniers gènes est retrouvée dans un peu plus de 10 % des cas de cancer de l’ovaire (9). L’utilisation d’un traitement substitutif pour la ménopause augmenterait légèrement le risque de cancer ovarien (10). Certains médicaments utilisés dans le traitement de la stérilité ont été suspectés un temps comme possiblement cancérigènes. Cela n’a pas été confirmé lors d’une étude de grande ampleur (11). La nulliparité, l’âge précoce des premières règles et une ménopause tardive seraient également associés avec une augmentation du risque (12). Plusieurs hypothèses ont été avancées comme : le traumatisme répété de l’ovaire par le nombre d’ovulations, ainsi que le rôle de la sécrétion des hormones gonadotropes, d’une inflammation chronique .
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Table des matières
INTRODUCTION
PREMIERE PARTIE : RAPPELS
1. RAPPEL ANATOMIQUE DE L’OVAIRE
1.1. EMBRYOLOGIE
1.2. HISTOLOGIE
1.3. ANATOMIE
1.3.1. Morphologie
1.3.2. Topographie
1.3.3. Moyens de fixité de l’ovaire
1.3.4. La vascularisation
1.3.4.1. Les artères
1.3.4.2. Les veines
1.3.5. L’innervation
1.4. PHYSIOLOGIE
1.4.1. Contrôle du fonctionnement ovarien
2. LES CANCERS DE L’OVAIRE
2.1. GENERALITES
2.2. ANATOMOPATHOLOGIE
2.2.1. Classification histopathologique des carcinomes épithéliaux de l’ovaire par l’OMS
2.2.2. Classification histopathologique des lésions non épithéliales de l’ovaire par l’OMS
2.3. DIAGNOSTIC
2.3.1. Circonstances de découverte
2.3.2. Examen clinique
2.3.3. Examens complémentaires
2.3.3.1. Échographie pelvienne et abdominale
2.3.3.2. Scanner (ou IRM) abdomino-pelvien
2.3.3.3. La cœlioscopie diagnostique
2.3.3.4. Radiographie pulmonaire
2.3.3.5. Marqueurs de cancer ovarien
2.4. EVOLUTION ET PRONOSTIC
2.5. TRAITEMENT
2.5.1. Traitement chirurgical
2.5.1.1. La laparotomie initiale
2.5.1.2. L’intervention de cytoréduction précoce (ou chirurgie d’intervalle)
2.5.1.3. L’intervention d’évaluation (ou « second look »)
2.5.1.4. La chirurgie des stades métastatiques
2.5.2. Traitement médical
2.5.2.1. La chimiothérapie intra-péritonéale
2.5.2.2. La chimiothérapie de consolidation
2.5.2.3. La chimiothérapie de deuxième ligne
2.5.2.4. Autres
2.5.3. Stratégie thérapeutique
2.5.3.1. Les stades limités (I et II)
2.5.3.2. Les stades III et IV
2.6. SURVEILLANCE ET TRAITEMENT DE RECHUTE
DEUXIEME PARTIE : NOTRE ETUDE PROPREMENT DITE
1. PATIENTES ET METHODE
1.1. TYPE D’ETUDE
1.2. POPULATION D’ETUDE
1.2.1. Critères d’inclusion
1.2.1.1. Cadre de l’étude
1.2.1.2. Diagnostic anatomopathologique après laparotomie
1.3. CRITERES D’EXCLUSION
1.4. PARAMETRES A ANALYSER
1.5. Méthodes d’analyse des paramètres
2. RESULTATS
2.1. CARACTERISTIQUES DE NOTRE POPULATION D’ETUDE
2.1.1. Taille de notre population d’étude
2.1.2. Répartition des patientes
2.1.2.1. Selon l’âge
2.1.2.2. Selon la parité
2.2. LE DIAGNOSTIC DU CANCER OVARIEN
2.2.1. L’année de découverte du cancer ovarien
2.2.1.1. Les moyens de découverte de cancer ovarien
2.2.2. Les éléments anamnestiques observés (Antécédents tumoraux)
2.2.3. Les antécédents familiaux de cancer
2.2.4. Les signes cliniques et échographiques
2.2.5. Les bilans d’extension réalisés
2.2.6. Les signes biologiques
2.2.6.1. Dosage des marqueurs tumoraux
2.2.6.2. Examen cytologique du liquide d’ascite
2.2.7. Résultats anatomopathologiques
2.2.7.1. Classification selon le stade FIGO au moment de la découverte du cancer ovarien
2.2.7.2. Répartition des patientes selon le grade WHO
2.2.7.3. Résultats des examens histologiques des pièces opératoires
2.2.8. Les modalités thérapeutiques chirurgicales
2.2.9. La chimiothérapie
2.2.10. La corticothérapie
2.2.11. La radiothérapie
1.1.1. Evolution des patientes
TROISIEME PARTIE : DISCUSSIONS ET SUGGESTIONS
1. EPIDEMIOLOGIE
1.1. FREQUENCE
1.2. ETHNIE
1.3. AGE
1.4. PARITE
2. ETUDE CLINIQUE
2.1. ANNEE DE DECOUVERTE DE CANCER L’OVAIRE
2.2. LES ANTECEDENTS PERSONNELS ET FAMILIAUX
2.3. SIGNES CLINIQUES
2.4. PLACE DES EXAMENS COMPLEMENTAIRES
2.5. BILAN D’EXTENSION
2.6. PLACE DE L’EXAMEN ANATOMOPATHOLOGIQUE
3. PRISE EN CHARGE DES TUMEURS MALIGNES DE L’OVAIRE
3.1. LE TRAITEMENT CHIRURGICAL
3.2. LES TRAITEMENTS ADJUVANTS : CHIMIOTHERAPIE, RADIOTHERAPIE, CORTICOTHERAPIE
4. EVOLUTION
5. SUGGESTIONS
5.1. L’ANALYSE DE LA SITUATION A LA PREDOMINANCE DES MERINA PAR RAPPORT AUX AUTRES ETHNIES
5.2. AMELIORATION DE LA PRISE EN CHARGE DE CANCER DE L’OVAIRE
CONCLUSION
BIBLIOGRAPHIE