Radiolyse de l’eau sorbée sur le dioxyde de plutonium

Effet du rayonnement sur l’eau sorbée sur le dioxyde de plutonium

Radiolyse de l’eau liquide

Les actinides sont principalement des émetteurs α, dont le caractère irradiant est susceptible de modifier le système chimique eau/oxyde des oxydes d’actinides. La radiolyse se définit par la rupture d’une ou plusieurs liaisons sous l’effet de rayonnements ionisants. Cet effet durayonnement sur la matière a été observé peu après la découverte par André Debierne de la capacité du radium à briser les molécules d’eau, en formant du dihydrogène, du dioxygène et de l’eau oxygénée H2O2. Le rendement radiolytique se définit comme le rapport de la quantité de matière, produite ou détruite par radiolyse, à la quantité d’énergie déposée. Il est noté G si c’est un rendement apparent et g si c’est un rendement primaire. Le premier correspond au rendement à un instant donné à la fin des étapes de radiolyse, le second considère le rendement à la fin de l’étape physico-chimique (non-homogène).
Dans le système international cette grandeur s’exprime en mol.J -1 , toutefois des rendements exprimés en molécules par 100 électronvolts (molécule/100eV) sont encore couramment rencontrés. La conversion entre ces deux grandeurs se fait de la manière suivante : 1 molécule / 100 eV = 1,0.36.10 -7 mol.J -1 .Les produits de radiolyse de l’eau présentent, vis-à-vis du plutonium au degré d’oxydation IV, un caractère réducteur (e aq et H∙) ou oxydant (OH∙ et H2O2). Dans le cas de l’eau liquide, ces différentes espèces réagissent entre elles selon les réactions du Tableau III [LEC11].

Radiolyse de l’eau à l’état gazeux

Les principaux produits de la radiolyse de l’eau vapeur sont H2, O2 et H2O2 [SPI90] . Le dihydrogène est le principal produit formé et sa production dépend de plusieurs paramètres, notamment la pression de vapeur d’eau [KAL90] . Une pression plus élevée favorise H2O + et H3O+et des pressions faibles OH +, H+ et O+. Les réactions ions-molécules sont favorisées par une augmentation de la pression. Les produits peuvent être consommés par des réactions inverses et ainsi reformer H2O.
La présence d’un oxyde métallique et donc d’une interface solide/gaz modifie significativement le mécanisme de la radiolyse de l’eau [LAV02, LAV03, PET01] . L’irradiation d’un système hétérogène solide-gaz entraine une redistribution de l’énergie entre les deux phases. Cela se traduit par une décomposition favorisée des molécules de la phase gazeuse. L’irradiation de la phase solide conduit à la formation de pair électron-trou liée appelée exciton. Ces porteurs de charges se séparent alors et migrent vers la surface mais la réaction inverse de recombinaison de cette paire peut limiter le transfert.
L’étude de Petrik montre que le transfert d’énergie entre les deux phases dépend de la largeur du gap de l’oxyde [PET01] . Les oxydes avec des gaps de l’ordre de 5eV conduisent à un maximum de transfert d’énergie interfacial. L’auteur établit alors un classement des oxydes en trois groupes : 1 – les oxydes diminuant les rendements radiolytiques en H 2 par rapport à l’eau liquide sans interface ; 2- les oxydes qui n’affectent pas les rendements radiolytiques en H2 et 3- les oxydes augmentant les rendements radiolytiques en H 2.

Radiolyse de l’eau sur PuO2 : travaux issus de la littérature ouverte

Plusieurs études ont porté sur la radiolyse de l’eau sorbée sur le dioxyde de plutonium selon différents protocoles expérimentaux.
1) Vladimirova et al. placent leurs échantillons de dioxyde de plutonium obtenus par calcination d’oxalate à 550°C et séchés à différentes températures entre 100 et 1200°C dans un réacteur fermé [VLA02] . L’eau est déposée directement sur la poudre dedioxyde de plutonium sous forme d’une quantité connue d’eau liquide et se situe entre 0,3 et 3% (Figure 17).

Radiolyse de l’eau sur PuO2 : travaux issus du laboratoire

Les études réalisées sur Atalante ont mis en œuvre un dispositif spécifique intégré en boîte-à-gants permettant simultanément d’imposer une humidité relative constante durant toute la durée de l’expérience et d’analyser la composition de la phase gazeuse à intervalle de temps choisi [VEN18, GAI13, DUB13] . Dans ces études, l’historique des échantillons de dioxyde de plutonium ainsi que leur méthode de préparation sont connus et maitrisés.
Ces études ont permis de mettre en évidence une production de dihydrogène non linéaire dans le temps [VEN18] . En effet la production de dihydrogène est linéaire pour des durées allant d’une vingtaine à une centaine d’heures. Ensuite cette production ralentit jusqu’à atteindre un état stationnaire au bout de quelques centaines d’heures. La Figure 25 présente l’évolution de la quantité de dihydrogène produite quand un échantillon de dioxyde de plutonium est conservé à une humidité relative de 60%.

Caractérisation du lot d’étude

Le Tableau X regroupe les proportions des différents isotopes constitutifs du lot de dioxyde de plutonium préparé pour cette étude. L’énergie des particules α/β émises ainsi que la période des différents isotopes sont également reportées.
Le débit de dose émis par le dioxyde de plutonium qui correspond à l’énergie émise par unité de temps et de masse, est calculé au moyen de l’Équation 12 qui prend en compte la contribution de chaque isotope au débit de dose.

Recalcination des lots

Certains lots ont été recalcinés entre deux expériences (Tableau XII). La recalcination a pour but de désorber au maximum l’eau adsorbée en surface et de remettre la surface du dioxyde de plutonium à son état initial. La recalcination est réalisée dans un four tubulaire, sous balayage de gaz, selon deux cycles constitués d’une rampe de 10°C.min -1 de la température ambiante à la température souhaitée sous deux atmosphères différentes : Air, puis Argon. Cette température correspond à la température de calcination à laquelle est soustraite 50°C. Cette température de recalcination est délibérément fixée inférieure à la température de calcination initiale pour ne pas modifier la surface spécifique.

Cellule de radiolyse et analyse des gaz

Cellules de conditionnement de l’échantillon

Un dispositif spécifique a été développé au laboratoire pour l’étude de la radiolyse de l’eau adsorbée sur le dioxyde de plutonium. Ce dispositif est composé de cellules en verre (Figure 29) et d’un appareillage d’analyse de gaz. Une série de vannes en polytetrafluoroéthylène (PTFE) permet d’effectuer le conditionnement de l’atmosphère et de garantir l’étanchéité de la cellule. Ces matériaux ont été employés car la littérature ne relève pas de réactivité particulière de ces matériaux vis-à-vis des gaz d’intérêt (principalement H2). Il est possible de connecter la cellule à un appareillage de micro-chromatographiegazeuse (µGC), utilisé pour l’analyse et la quantification des gaz constitutifs de l’atmosphère de la cellule.

Etude de l’interface

Dans une dernière étape, il a été décidé de chercher à observer et caractériser la couche de dioxyde de plutonium pour déterminer un éventuel changement de degrés d’oxydation du plutonium. Malheureusement, dans la période de thèse, ce travail n’a pas pu aboutir. Toutefois la première étape qui correspond à la consommation de l’eau adsorbée est rapportée en vue de travaux complémentaires ultérieurs.
L’échantillon de dioxyde de plutonium utilisé pour cette étude est identique au précédent et a été récupéré après un an de stockage en boite à gants sans conditions particulières. L’échantillon a ensuite été recalciné à 700°C durant deux jours comme indiqué précédemment. Après la recalcination, cet échantillon a été conditionné sous atmosphère argon sans imposer d’humidité relative à l’intérieur de la cellule. Les seules molécules d’eau présentes seront donc celles adsorbées à la surface de l’échantillon de dioxyde de plutonium depuis l’atmosphère de la boite à gants lors des étapes de transfert de l’échantillon. L’absence d’une humidité relative dans l’atmosphère de la cellule ne permet donc pas un renouvellement du nombre de molécules d’eau adsorbé à la surface du dioxyde de plutonium. Comme précédemment, le modèle cinétique a été utilisé pour évaluer la vitesse de formation initiale et la concentration de dihydrogène à l’état stationnaire.

Conclusion

La formation de dihydrogène augmente linéairement immédiatement après le conditionnement sous atmosphère inerte (argon) de l’échantillon. Au bout de plusieurs heures, la vitesse de production de dihydrogène diminue jusqu’à devenir presque nulle et atteint une concentration de dihydrogène stable au cours du temps. Du fait du protocole expérimental d’analyse, cet état stationnaire ne peut provenir d’une décomposition totale de l’eau présente dans la cellule, contrairement aux observations de Vladimirova et al. [VLA02] . Il est possible de déterminer la vitesse initiale de production de dihydrogène, V 0 exprimée ici en cm 3 .gPuO2 -1 .h -1 , mesurée à partir des premières mesures, et la concentration stationnaire de dihydrogène, noté [H2]stat et exprimé en cm 3 .gPuO2 -1, mesurée à partir des dernières mesures. La comparaison avec les précédents résultats du laboratoire [VEN18] a permis de montrer une variation linéaire de la cinétique initiale ainsi que la concentration stationnaire avec le débit de dose. Dans le cas de la variation de la cinétique initiale, cet effet avait déjà été remarqué dans d’autres études [SIM13] , où la quantité de dihydrogène produit pouvait être lié au débit de dose du plutonium et donc au rayonnement émis. Par contre la concentration à l’état stationnaire, dans le cas d’une humidité relative constante, n’a jamais été observée en dehors du laboratoire [VEN18].
Pour mieux appréhender le mécanisme derrière cet état stationnaire, un échantillon similaire à l’analyse sous atmosphère inerte a été conditionné en présence d’une faible concentration de dihydrogène (0,2%). Lors de cette expérience, la teneur en dihydrogène décroît dans la cellule au cours du temps. Au bout de quelques jours, cette diminution se stabilise jusqu’à une certaine concentration. Les mesures ont permis de constater que cet état stationnaire était identique à celu observé précédemment. Cette même concentration stationnaire suggère un équilibre entre deux réactions, une de production de dihydrogène par radiolyse de l’eau adsorbée, et une réaction de consommation de dihydrogène. Un modèle cinétique a été proposé sur la base de ces observations, qui semble rendre compte de l’évolution de la concentration de dihydrogène au cours du temps. La comparaison de ces deux atmosphères de conditionnement a été reproduite sur ces mêmes échantillons après une étape de recalcination. De nouveau, la concentration de dihydrogène à l’état stationnaire atteint un niveau identique, confirmant la proposition de modèle cinétique suggérée précédemment. Néanmoins, la concentration stationnaire de dihydrogène apparait environ quatre fois plus importante, suggérant une modification de l’état de surface du matériau comme envisagée par l’étude de Venault et al. [VEN18].

Chromatographie gazeuse inverse : Etat de l’art

Présentation

La chromatographie gazeuse inverse (CGI) a été présentée pour la première fois dans les années 1940 [MOH14] . Le principe de la technique fut introduit dans les années 1960 et 1970 suite aux travaux de Kiselev [KIS69] puis Conder et Young [CON79] . La technique s’est ensuite développée, notamment pour l’étude de polymères dans le domaine pharmaceutique, de matériaux inorganiques (silice, minerais…) mais aussi pour des matériaux dont la réactivité de surface joue un rôle important comme les surfactants ou les nanomatériaux [MOH14] . Cette technique a pour objectif de décrire les propriétés de surface, aussi bien au niveau chimique que morphologique. Elle a pour ambition de rendre compte de la réactivité chimique des surfaces, des propriétés acido-basiques, et doit permettre de déterminer la répartition des différents sites d’adsorption à la surface d’un solide.

La CGI à dilution infinie (CGI- DI)

La chromatographie gazeuse inverse à dilution infinie consiste à injecter les sondes moléculaires en quantité extrêmement faible dans une colonne, ce qui correspond à de faibles pressions partielles dans l’isotherme d’adsorption [MOH14] . Dans ce cas les interactions entre les molécules sondes deviennent négligeables autant en phase gazeuse qu’au niveau de la phase adsorbée, et les quantités adsorbées en surface varient linéairement avec la pression partielle. Dans ce domaine, le volume de rétention net de la sonde est proportionnel à la surface du matériau.
Une expérience en dilution infinie consiste donc à injecter dans la colonne des sondes moléculaires gazeuses diluées par le gaz vecteur. L’interaction entre la surface du solide, constituant la phase stationnaire, et les molécules injectées est corrélée à l’énergie de surface γs du matériau. L’énergie de surface γs est la résultante de deux composantes (Équation 20) [TIS09] . La composante dispersive γs d correspond aux interactions de type London et la composante spécifique γs sp traduit toutes les autres interactions tels que les interactions de Debye, de Keesom ainsi que les liaisons hydrogène[PAR97].

Etude des oxydes d’actinide par CGI

A notre connaissance, les oxydes d’actinides ont fait l’objet de seulement deux études : celle de Jérémy Gaillard [GAI13, GAI14] et celle d’Adrien Dubreuil [DUB13] également au laboratoire. Jérémy Gaillard a initié l’étude du dioxyde de thorium par la méthode de concentration finie [GAI13] . L’étude a été réalisée sur un dioxyde de thorium non hydraté suite à la calcination d’un sel d’oxalate de Th(IV) à 800°C sous air. La Figure 53 représente la FDRJde l’octane sur un dioxyde de thorium calciné à 800°.

Le rapport de stage ou le pfe est un document d’analyse, de synthèse et d’évaluation de votre apprentissage, c’est pour cela chatpfe.com propose le téléchargement des modèles complet de projet de fin d’étude, rapport de stage, mémoire, pfe, thèse, pour connaître la méthodologie à avoir et savoir comment construire les parties d’un projet de fin d’étude.

Table des matières
Introduction Générale
Contexte de l’étude 
Orientation de l’étude 
Partie A. – Radiolyse de l’eau sorbée sur le dioxyde de plutonium
I. Etat de l’art
I.1. Adsorption de l’eau à la surface du dioxyde de plutonium
I.1.1. Définition et type d’adsorption
I.1.2. Le dioxyde de plutonium : PuO2
I.1.3. Effet chimique de l’adsorption de l’eau sur le dioxyde de plutonium
I.1.4. Adsorption/ désorption de l’eau sur le dioxyde de plutonium
I.2. Effet du rayonnement sur l’eau sorbée sur le dioxyde de plutonium
I.2.1. Radiolyse de l’eau liquide
I.2.2. Radiolyse de l’eau à l’état gazeux
I.2.3. Radiolyse de l’eau sur PuO2 : travaux issus de la littérature ouverte
I.2.4. Radiolyse de l’eau sur PuO2 : travaux issus du laboratoire
I.3. Conclusion
II. Orientation et objectif de l’étude
III. Méthodologie
III.1. Préparation et caractérisation du dioxyde de plutonium
III.1.1. Précipitation de l’oxalate de plutonium
III.1.2. Conversion en oxyde
III.1.3. Caractérisation du lot d’étude
III.1.4. Recalcination des lots
III.2. Cellule de radiolyse et analyse des gaz
III.2.1. Cellules de conditionnement de l’échantillon
III.2.2. Analyse des gaz par µCPG
IV. Résultats expérimentaux et discussion
IV.1. Paramètres de l’étude
IV.1.1. Accumulation de dihydrogène en atmosphère neutre Argon
IV.1.2. Consommation du dihydrogène
IV.2. Etude de l’interface
V. Conclusion
Partie B – Caractérisation des surfaces d’oxyde d’actinides par CGI
I. Introduction
II. Chromatographie gazeuse inverse : Etat de l’art
II.1. Présentation
II.2. La CGI à dilution infinie (CGI-DI)
II.3. La CGI à concentration finie CGI-CF
II.4. Etude de l’oxyde de cérium par CGI
II.5. Etude des oxydes d’actinide par CGI
II.6. Conclusion et Perspectives
III. Etude expérimentale du dioxyde de thorium
III.1. Synthèse de l’oxalate de thorium
III.2. Conversion en dioxyde de thorium
III.3. Caractérisation des matériaux
III.3.1. Caractérisation des oxalates de thorium
III.3.2. Caractérisation des dioxydes de thorium
III.4. Préparation des colonnes CGI
III.4.1. Caractérisation des colonnes de ThO2 « sec »
III.4.2. Préparation des colonnes de ThO2 « hydraté »
III.5. Résultats : mesure de l’énergie de surface des oxydes d’actinide
III.5.1. Méthodologie : cas du dioxyde de thorium
III.5.2. Répétabilité de la méthode (cas de CeO2)
III.6. Résultats & discussions : cas du dioxyde de thorium non hydraté
III.6.1. Effet de la température de calcination de l’oxalate de thorium
III.6.2. Effet de la durée d’entreposage de l’oxalate de thorium
III.7. Résultats / Discussions : cas du dioxyde de thorium traité chimiquement
III.8. Résultats & discussions : cas du dioxyde de thorium hydraté
III.9. Résultats : mesure de l’hétérogénéité de surface des oxydes d’actinide
III.9.1. Méthodologie de la CGI – CF
III.9.2. Premiers résultats
III.9.3. Effet du temps d’entreposage préalable de l’oxalate
III.9.4. Impact du traitement chimique
IV. Etude expérimentale préliminaire des oxydes d’uranium
IV.1. Synthèse des précurseurs d’oxyde d’uranium
IV.1.1. Précipitation de l’oxalate d’uranium IV U(C2O4)2.6H2O
IV.1.2. Précipitation de l’oxalate d’uranium VI UO2(C2O4).3H2O
IV.1.3. Précipitation du peroxyde d’uranium VI UO2(O2).2H2O
IV.2. Synthèse des oxydes d’uranium
IV.2.1. Conversion en UO2
IV.2.2. Conversion en U3O8
IV.2.3. Conversion en UO3
IV.3. Caractérisation des oxydes d’uranium
IV.4. Préparation des colonnes
IV.5. Résultats/Discussion
V. Conclusion
Conclusion générale
Bibliographie 
Annexes

Lire le rapport complet

Télécharger aussi :

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *