Radioisotopes à visée diagnostique : l’imagerie fonctionnelle

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Production de l’astate 211

L’astate 211 est préparé au cyclotron CEMTHI à Orléans (France) selon la réaction nucléaire 209Bi(α, 2n)211At. Un dépôt de bismuth 209 (isotope stable) est directement déposé 20  sur une cible de cuivre par fusion du bismuth. Il est ensuite traité mécaniquement pour obtenir une épaisseur de 240 µm et une surface homogène plane. Cette épaisseur est nécessaire pour que toute l’énergie soit déposée et pour permettre un refroidissement efficace de la cible. Cette cible est ensuite irradiée pendant 2 heures par un faisceau de particules alpha à 28 MeV avec un courant moyen de 2 µA/h. Cette énergie d’irradiation de la cible correspond à une valeur de section efficace optimum (voir Figure 2).10

La médecine nucléaire

Le principe de la médecine nucléaire est d’injecter des isotopes radioactifs au patient et de cibler un organe ou une zone du corps dans le but de diagnostiquer ou de traiter des maladies. Le ciblage peut être associé aux propriétés intrinsèques du radionucléide utilisés (I- pour la thyroïde ou Ra2+ pour les os,…) ou être réalisé via une molécule vectrice (anticorps, peptide, sucre,…).1 Les propriétés radiophysiques et en particulier le type d’émissions radioactives des différents radionucléides définissent les deux grands axes de la médecine nucléaire : l’imagerie médicale et la thérapie. La Figure 3 montre les principaux éléments de la classification périodique ayant un potentiel intéressant pour la médecine nucléaire.

Radioisotopes à visée diagnostique : l’imagerie fonctionnelle

L’imagerie consiste à administrer un traceur radioactif au patient permettant sa détection externe. Les radionucléides pour la détection doivent être émetteur γ. Les photons (γ) constituent les rayonnements électromagnétiques les plus énergétiques et peuvent traverser le corps humain avec des énergies relativement faibles (entre 20 et 600 keV) suivant la localisation du radionucléide. Deux types d’imagerie sont possibles : la scintigraphie qui utilise des radionucléides émetteurs γ et la tomographie d’émission de positons (TEP) qui utilise des radionucléides émetteurs β+.
Dans cette dernière application, un positon (entielectron) s’annihile en rencontrant un électron pour donner naissance à deux photons d’égales énergies (511 keV) émis colinéairement à 180°.11 Ainsi la TEP permet de délivrer des images en trois dimensions pour détecter, par exemple, des cellules cancéreuse avec du fluor 18. En substituant les groupes hydroxyles d’une molécule de glucose par cet isotope, on forme le glucose marqué, 18 fluorodeoxyglucose (18FDG). Son utilisation, en tant que traceur de cellules cancéreuses, repose sur une particularité connue du métabolisme cellulaire tumoral : la consommation accrue du glucose.1
Pour la scintigraphie, différents isotopes radioactifs sont utilisés (voir Figure 4). Leur disponibilité, l’énergie des photons émis (20 et 600 keV) et la période sont des critères 22 primordiaux. La nature de l’élément est également un paramètre important puisque les propriétés chimiques vont conditionner la méthode de ciblage (isotope seul ou fixation sur un vecteur). En pratique, les isotopes les plus utilisés sont le technétium 99mTc, le thallium 201Tl, le xénon 133Xe, l’iode 131I et l’indium 111In.12
Le 99mTc mérite une attention particulière.13,14 Sa chimie est très riche car il existe sous différents degrés d’oxydation (0, 2, 4, 5, 6 et 7) pouvant être préparés selon les conditions du milieu. Ainsi, sa forme « stable » est la forme TcO4- qui peut être utilisée pour l’imagerie de la thyroïde et des glandes salivaires. En milieu plus réducteur, le cation TcO3+ peut être formé et stabilisé via la formation de complexes en présence de ligands organiques et inorganiques. Le DTPA (Diethylène Triamine Penta Acide) et le HDP (Hydroxymethylene Diphosphonate) sont par exemple utilisés respectivement en imagerie des reins et des os. Enfin, une suspension de colloïde piégeant le technétium est utilisée pour étudier les vaisseaux lymphatiques ou le foie.
Radioisotopes à visée thérapeutique en oncologie
Dans ce cas, on ne cherche pas des rayonnements qui peuvent traverser le corps, mais des rayonnements dont le parcours dans la matière est suffisamment faible pour déposer son 23 énergie directement au contact du tissu cible et ainsi le détruire. Contrairement au cas précédent, l’utilisation des radioisotopes vise une irradiation maximale sur le site pathogène. Les sources utilisées peuvent être de trois types : les émetteurs de particules bêta, alpha et les émetteurs d’électron Auger.
Le rayonnement bêta. Les particules β possèdent une énergie de l’ordre d’une centaine de keV et leur parcours peut atteindre quelques millimètres dans la matière.
Le rayonnement alpha repose sur l’instabilité du noyau atomique par émission d’un noyau d’hélium. Les particules α libérées avec une énergie de plusieurs MeV ont un trajet dans la matière beaucoup plus court (quelques dizaines de micromètres).
L’électron Auger est formé lorsque le noyau d’un atome excité contient un excès de protons. Il est produit lors des désintégrations précédentes. Un électron des couches profondes est capturé par un proton du noyau, entraînant la libération d’énergie communiquée à un électron périphérique qui est alors éjecté. Cette particule est peu énergétique et son parcours dans la matière n’excède que quelques microns.
Comme l’illustre le Schéma 1, le traitement envisagé est différent selon le rayonnement considéré. Le paramètre clé est le transfert d’énergie linéique (TEL). D’une part, il faut que l’énergie soit déposée au niveau de la tumeur sans irradiation des tissus sains. D’autre part, l’action est efficace dans la mesure où l’énergie est déposée sur l’ensemble de la 24 tumeur. Ainsi, une particule bêta est plus efficace pour des tumeurs de tailles micrométriques comme les tumeurs solides (cancer du sein). Les électrons Auger déposent leur énergie à proximité immédiate de leur lieu d’émission ; il faut donc que le radionucléide entre dans la cellule afin d’irradier directement le noyau, la destruction de l’ADN cellulaire par le rayonnement étant l’action conduisant à la destruction de la cellule. Enfin l’utilisation des particules alpha présente un intérêt pour l’éradication de petites masses tumorales ou de cellules cancéreuses, telles que les métastases ou pour le traitement de cancers diffus comme les leucémies. Du fait de sa grande toxicité (TEL importante), ce traitement est d’autant plus intéressant que des récentes études ont montré que l’irradiation alpha permet de détruire des cellules cancéreuses ne réagissant plus aux traitements classiquement utilisés tels que la chimiothérapie ou la radiothérapie.15
La plupart des radionucléides émetteurs alpha sont des noyaux lourds dont le numéro atomique est supérieur à 82. Différents critères de sélection sont nécessaires en vue d’une utilisation clinique : la disponibilité commerciale, la période et l’énergie des particules émises. La période doit être adaptée à une utilisation thérapeutique. Une liste de candidats potentiels a été établie pour les applications médicales et les plus prometteurs sont recensés dans le Tableau 1.16
Comme on peut le constater, l’astate 211 est un candidat prometteur. La mise en service du nouveau cyclotron ARRONAX de Nantes permettra d’augmenter la disponibilité de l’astate 211 et facilitera la recherche autour de son utilisation.
L’astate 211 en médecine nucléaire
Différents modes de préparation sont envisagés pour utiliser l’astate dans des applications médicales. La plupart des méthodes sont inspirées de celles utilisées pour l’iode, utilisé à la fois en imagerie fonctionnelle et pour la radiothérapie.
Injection de l’astate « libre »
Par analogie avec l’iode, l’astate-211 se concentre au niveau de la thyroïde. Cette vectorisation liée aux propriétés intrinsèques de At- dans le corps humain le rend potentiellement intéressant pour le traitement du cancer de la thyroïde.17
Injection d’un vecteur marqué par l’astate 211
Dans ce cas, c’est le vecteur biologique qui sert le ciblage. Ce vecteur peut être l’anticorps qui reconnait spécifiquement un antigène à la surface des cellules tumorales, un fragment d’anticorps ou toute autre molécule biologique présentant des propriétés de « reconnaissance » (peptide,…). Pour cela, le radioisotope est lié à un agent bifonctionnel dont une fonction est utilisée pour se lier à l’astate et l’autre servant de site de fixation sur le vecteur (voir Figure 5). La source radioactive peut ainsi irradier les cellules ciblées.
La fixation sur le vecteur peut se faire par encapsulation (dans des cages de bore)17 ou via une liaison chimique. Par analogie avec les autres halogènes (I, F), la voie la plus couramment utilisée conduit à former une liaison covalente C-At. La voie de marquage (substitution électrophile ou nucléophile) et la nature de l’agent utilisé sont les deux paramètres les plus étudiés. Les études réalisées ont notamment montré que la liaison C-At est plus forte avec les noyaux aryles. L’un des réactifs les plus utilisés est la molécule N-succinimidyl 4-méthyl-3-(tri-n-butylstannyl) benzoate.18-20 Une fois marquée avec At-211, la molécule est purifiée puis couplée au vecteur. Une étude récente a montré que l’approche en une étape est également envisageable, c’est à dire que le réactif intermédiaire est fixé sur le vecteur biologique avant le marquage de At-211.18
Des essais cliniques ont été réalisés sur des patients atteints de cellules malignes tumorales persistantes au cerveau après une opération chirurgicale, amenant des résultats encourageants quant à l’utilisation de l’astate 211 comme agent thérapeutique.7 Il s’agissait d’un traitement local, c’est à dire que la molécule marquée est directement introduite dans la zone d’intérêt. L’utilisation de cette méthode de radiomarquage n’est plus envisageable lorsque le médicament est introduit de manière systémique. En effet, dans ce cas, une fragilité de la liaison C-At est observée dans le temps.21
Une autre voie de marquage a également été envisagée avec At-. Dans un article récent, Pruszynski et al. ont récemment proposé un mode de fixation basé sur la haute stabilité in vivo du complexe trans-[RhCl2(cis/trans-16S4-diol)]+.22 Des complexes de type AtMCl+ sont formés (M=Rh(III) ou Ir(III)) et ensuite complexés avec le ligand 1,5,9,13- tetrathiacyclohexadecane-3,11-diol. Une bonne stabilité in vitro est observé dans un tampon phosphate à pH 7,4 pendant 51 heures mais aucunes données de stabilité in vivo n’ont encore été reportées. Il s’agit d’une voie prometteuse qu’il reste à optimiser et valider.
D’autres voies de marquage ont également été abordées mais de manière moins rigoureuses, dans le sens où la nature de l’interaction avec At n’est pas connue. On peut ainsi citer des essais de sorption de At sur des colloïdes métalliques (tellure, argent) ou encore la complexation d’une forme cationique de l’astate avec le DTPA, un ligand notamment utilisé en médecine nucléaire avec Bi-213. C’est le caractère métallique de l’astate qui est « utilisé », c’est-à-dire qu’une forme cationique de l’astate est préparée et une liaison de type « coordination » est créée. Cependant, la stabilité in vitro du radioconjugué At-DTPA-anticorps est apparue nulle.8
La chimie de l’astate en solution aqueuse
Bien qu’il soit clair que la plupart des propriétés chimiques des halogènes soient applicables, l’extrapolation des propriétés chimiques de l’astate à partir de son plus proche voisin, l’iode, n’est pas toujours observée. On parle alors de son caractère métallique. Des incohérences apparaissent dans la littérature, notamment en ce qui concerne les formes de l’astate proposées en phase aqueuse (degré d’oxydation, nature des espèces). Ces dernières sont déduites en comparant leur comportement dans des conditions données avec celui observé pour des composés modèles. En effet, il n’existe pas d’outils spectroscopiques permettant d’identifier sans ambiguïté la nature des espèces formées à partir de l’astate.
Spéciation en milieu non complexant
En raison de la faible disponibilité de l’astate, la forme des espèces présentes en solution aqueuse a été déduite d’études systématiques réalisées avec l’élément à l’échelle des ultras traces. Il s’ensuit une littérature controversée, dans laquelle le comportement de l’astate est souvent qualifié de caméléon.23 A pH nul et dans la gamme de potentiel de stabilité de l’eau, trois degrés d’oxydation de l’astate ont été identifiés (voir Schéma 2) : le premier dans des conditions réductrices (en présence de Na2S2O3, E ~ 0,2 V vs. ENH), le second dans des conditions oxydantes (en présence de K2Cr2O7 ou Na2S2O8, E ~ 1 V vs. ENH) et le dernier sans la présence d’agent redox (E ~ 0,5 V vs. ENH). Trois formes chimiques distinctes de l’astate correspondent à ces différents degrés d’oxydation. Pour facilité la lecture de ce travail, elles seront nommées espèce I, II et III, respectivement.
Méthodologie expérimentale
Extraction de l’astate 211
Il existe deux types de protocoles pour isoler l’astate de la cible irradiée qui sont dénommées « voie sèche » et « voie humide ».
• Extraction par voie sèche
Plusieurs auteurs ont proposé une méthode par distillation à sec de l’astate. La cible est chauffée à environ 650°C et l’astate est sublimé de manière sélective et entraîné à l’aide d’un courant d’argon, d’azote, d’air ou encore avec un mélange N2/O2.36 Il est finalement récupéré par adsorption ou condensation. Différentes démarches ont été testées pour le récupérer : adsorption sur une surface d’argent avant distillation dans du méthanol ou une phase aqueuse,36 adsorption sur une colonne de gel de silice conditionnée par une solution d’hydroxyde de sodium (NaOH)20 ou enfin adsorption directement dans des capillaires en Peek.37 La méthode par voie sèche présente l’avantage d’être rapide et de pouvoir récupérer l’astate-211 avec un haut niveau de pureté (chimique, radionucléidique). L’adsorption par condensation dans des capillaires est une méthode de choix puisqu’elle permet de récupérer l’astate dans n’importe quel milieu (dans la mesure où une désorption significative est observée) à des activités spécifiques importantes.
• Extraction par voie humide
Le dépôt de bismuth irradié est dissout et l’astate est isolé de la solution en utilisant un procédé chimique. Plusieurs méthodes sont proposés dans la littérature,36 la plus couramment utilisée étant basée sur la spécificité de l’astate à être extrait de manière sélective dans des solvants organiques (diisopropylether, benzène, sulfure de carbone) depuis une solution acide (HNO3, HClO4 et HCO2H).18 Dans ce travail, la voie humide a été utilisée et la méthodologie suivie est la suivante.
La cible de Bi irradiée est dissoute en présence de HNO3 à 10,6 mol/L (4 fois 0,5 mL). La solution active est ensuite évaporée et le résidu d’astate est dissout dans 3 mL de HNO3 à 4,8 mol/L. Une extraction sélective de l’astate depuis le milieu acide est réalisée par extraction liquide/liquide avec le diisopropylether (0,5 mL DIPE pendant 10 min, deux fois). L’avantage de ce solvant est qu’il présente une affinité pour la forme d’astate (non connue) présente en solution aqueuse à l’inverse des autres éléments présents en phase aqueuse (Bi, Cu et les produits d’activation de la cible : 66Ga, 67Ga). Cependant, une partie de ces éléments/isotopes est coextrait dans la phase organique du fait de la solubilité partielle de l’acide nitrique dans le DIPE.38-40 Pour ce travail, deux protocoles de désextraction de l’astate en phase aqueuse ont été utilisés.
Le premier protocole est basé sur les travaux de Neirinckx et al.41 La désextraction de l’astate est réalisée avec 1 mL d’une phase aqueuse contenant NH3OHCl (100 g/L). Elle est basée sur la réduction de la forme oxydée de l’astate extraite dans le DIPE, plus probablement sous la forme At-. L’espèce réduite obtenue ne présente pas d’affinité significative pour le DIPE. Cette opération est répétée quatre fois. La solution aqueuse résultante est ensuite mélangée avec 0,4 mL de HCl (6 mol/L) et 0,88 mL de H2O2 (30 %). L’agent réducteur est finalement éliminé par chauffage sous agitation afin d’obtenir une solution stock ayant une activité spécifique de 1 MBq/mL soit environs 6 10-11 mol/L. Cette solution contient en plus de At-211, du DIPE (20 ppm) ainsi que les éléments Bi et Cu (respectivement 250, 300 ppm) présents dans la phase organique. Ces espèces chimiques, une fois diluées dans le milieu réactionnel (facteur de 5000), ne sont pas considérées dans les simulations. Ce protocole a été utilisé pour la moitié des expériences réalisées. Un autre protocole a été mis en place par Alliot et al.42 Les éléments provenant de la cible sont les premiers éliminés en mélangeant pendant 5 minutes la phase organique avec 1 mL d’une phase aqueuse contenant HCl (1 mol/L). A ce pH, le coefficient de partage de l’astate entre la phase aqueuse et le DIPE reste significatif et limite la perte d’astate (<5 %). Cette étape est répétée deux fois. L’astate est ensuite désextrait en présence de NaOH (0,1 mol/L). La désextraction est expliquée par la formation d’une forme d’astate en phase aqueuse non soluble dans le DIPE. On obtient finalement une solution stock avec une activité volumique de 1 MBq/mL. L’avantage de ce deuxième protocole est qu’aucun agent réducteur n’est introduit et que les impuretés métalliques peuvent être éliminées. Dans la suite de ce mémoire, il ne sera plus fait référence à la nature du protocole d’extraction utilisé.
La pureté isotopique de l’astate est contrôlée par spectroscopie gamma avec un détecteur au germanium « ultra low-background » de Canberra. La largeur de la raie à mi hauteur ( Full Widths at Half Maximum, noté FWMH) est de 1,04 keV à 122 keV (mesures de cobalt-57) et 1,97 keV à 1332 keV (mesures de cobalt-60). L’activité de la solution est mesurée avec le même détecteur dans une géométrie préalablement calibrée avec des sources gamma standards. L’activité est mesurée à la fois sur les raies X du 211Po et 211At et la raie γ à 687 keV de 211At (voir Annexe 1).43 Cette mesure est réalisée après chaque extraction de l’astate de la cible irradiée.
La pureté chimique de la solution a également été vérifiée sur une solution stock d’astate. Les impuretés présentes dans la solution stock sont déterminées par des mesures avec un COTmètre (Carbone Organique Total, Shimadzu TOC-V CSH/CSN Analyser) et par ICPMS (Inductively Coupled Plasma Mass Spectrometry, PQ-Excel ICP-MS (VG-Elemental)).
Principe
La chimie de l’astate ne peut être étudiée qu’à l’échelle des ultras traces (< 10-12 mol/L). Deux méthodes ont été utilisées dans la littérature : une méthode utilisant un appareil d’electromobilité44 et une méthode basée sur le partage de l’astate dans un système biphasique. L’appareil d’electromobilité n’est pas accessible dans notre laboratoire. Nous nous sommes donc concentrés sur la deuxième méthode. Le principe de base est qu’une espèce de l’astate est caractérisée par un coefficient de distribution donné, et qu’une variation de ce coefficient traduit un changement de spéciation. Cette méthode a surtout été utilisée qualitativement pour mettre en évidence les états redox de l’astate et la formation de complexe avec l’espèce At(x)+.45 Elle a également été utilisée pour obtenir des paramètres quantitatifs. Les fondements de cette méthode seront décrits par la suite. Elle peut être utilisée en mode dynamique via des techniques de chromatographie (HPLC, par exemple)46 ou en mode statique.47 L’avantage de la deuxième technique est que l’état d’équilibre est atteint. Cette méthode est basée sur les travaux de Schubert dans les années 1950.48-50 Il a essentiellement développé son concept autour du partage solide/liquide et concerne l’utilisation de résines échangeuses d’ions pour déterminer les propriétés d’interaction entre un radiométal M+a à l’échelle des traces et un agent complexant A-b.
Cette interaction peut être décrite par l’équilibre suivant : Mx Axay-ybKc xM+a+ yA-b
D’après la loi d’action de masse, la constante de dissociation Kc apparente associée à cet équilibre est définie par : + a  x−b   y Kc = M ×  A Eq. 1.
Afin de déterminer cette constante, la méthode s’organise en deux étapes. Dans un premier temps, le comportement du métal d’intérêt est étudié vis-à-vis d’une résine échangeuse de cation. Pour une masse de résine (m) et un certain volume de solution (V), l’adsorption du cation apparaît linéaire avec la concentration du traceur métallique et est définie par une constante λ0 : M+a + aR-X-M(R-X)a avec M+a le cation métallique, et R-X- le site anionique d’échange de la résine. λ = [M (R − X )a ] = constante = a0 × V Eq. 2.
Le partage λ0 est défini par a0, le pourcentage de M+a adsorbé sur la résine, et s0, le pourcentage de M+a restant en solution (s0 = 100-a0).
Dans un deuxième temps, le pourcentage d’adsorption du métal (a) est étudié dans les mêmes conditions (pH, force ionique, V et m) en présence d’une certaine concentration du −bdéterminerKc, il considère que le complexe formé en ligand d’intérêt (  A). Afin de solution ne s’adsorbe pas sur la résine. Ainsi l’équation 2 est définie par : +a= [M (R − X )a ] / λ0Eq. 3.
En substituant la valeur de M+a dans l’équation 1, on obtient : [ M (R − X )a ]x−by Kc=×  AEq. 4. xa − ybλ0   M x Ay
La concentration du complexe formé du métal restant en solution : s − a0 λ0 cest exprimée en fonction de la concentration M x Ay (avec s le pourcentage de métal présent en solution).
Ainsi la constante de dissociation s’exprime par une expression analytique dépendant de la −ben concentration du ligand (  A), la concentration du métal adsorbée sur la résine (λ et λ0 l’absence de ligand) et la concentration du métal restant en solution (a et a0 en l’absence de ligand): = [ a ]x−b   y Soit A Eq. 5.
Dans les conditions de concentrations utilisées, la concentration en ligand à l’équilibre peut être considéré égale à celle introduite. Tous les paramètres sont donc connus pour déterminer Kc. Cette étude a été menée par exemple pour étudier la constante de dissociation du tartrate de strontium.48 Les expériences ont été menées en présence de 0,5 g de résine échangeuse de cation (avec des sites ammonium) et 50 mL d’une solution de radiostrontium à 2 10-8 mol/L. SrTar Kc Sr 2+  + Tar 2−
Pour des mesures réalisées avec deux concentrations d’acide tartrique, la constante de dissociation Kc est égale à 1,99 10-2 et 2,04 10-2. La valeur moyenne 2,02 10-2 ou pKc = 1,69 est en bonne accord avec la valeur de Carman et al. (pKc=1,65) obtenue par titration d’un mélange de chlorure de strontium et chlorure de potassium par l’acide tartrique à l’échelle pondérable.51 L’objectif est d’adapter cette méthodologie expérimentale par compétition aux problématiques autour de l’astate.
Présentations des protocoles expérimentaux
Tous les produits commerciaux utilisés sont de qualités supérieures pour analyse. Toutes les solutions sont préparées en utilisant de l’eau Milli-Q et les expériences sont menées à la température du laboratoire climatisé (22 ± 3°C). Pour permettre un bon contrôle des conditions d’équilibres des solutions aqueuses et des paramètres du milieu (valeur de Eh et pH), toutes les expériences sont menées en réacteur fermé en mode statique (expériences de type « batch »). Les méthodes de compétition basées sur les séparations solide/liquide et liquide/liquide sont abrégées respectivement par MCSL et MCLL. On décrit dans cette partie le principe des méthodologies.
1.3.1. Méthode de Compétition entre une phase Solide et Liquide (MCSL)
Pour la méthode MCSL, une petite quantité de suspension stock de résine cationique ou anionique conditionnée est mélangée dans des tubes en polypropylène avec le milieu d’étude (5 mL) pour obtenir un rapport solide/liquide (m/V) de 0,5 g/L. Après équilibration du système, l’astate est ajouté (1000 Bq). Des mesures de cinétique montrent que le temps requis pour atteindre l’équilibre est inférieur à 2 heures. Le coefficient de sorption est défini comme suit : Kd = Atot − Asol × V Eq. 6. avec Atot l’activité totale d’astate dans la suspension, Asol l’activité dans la solution, V est le volume de la phase aqueuse et m la masse de résine sèche (définie comme la masse pesée de résine en g après séchage à 105°C pendant 12 heures) introduite dans le système. La séparation entre les phases solide et liquide est réalisée par centrifugation (500 g).
Lorsque l’on travaille à l’échelle des traces, le radioisotope peut s’adsorber de manière significative sur les parois du tube utilisé pour réaliser nos expériences. Une possibilité est de tenir compte de ce phénomène d’adsorption et de réaliser un « blanc » (astate dans le milieu d’étude) en parallèle de l’expérience de sorption. Des études préliminaires ont montré que cette méthode n’est pas précise avec des concentrations d’astate de l’ordre de 10-15 mol/L. En effet, l’adsorption de l’astate sur les tubes est apparue dépendante du tube utilisé. Pour remédier à cette difficulté, Atot est mesurée directement dans l’échantillon. La suspension est vigoureusement agitée afin qu’un prélèvement homogène soit effectué pour des analyses de radioactivité. L’échantillon est prélevé en utilisant un embout de pipette de 5 mL. Des études préliminaires ont montré que l’échantillon était homogène, c’est à dire que la masse de résine prélevée et déterminée, après évaporation de l’eau, correspondait avec moins de 2% d’erreur à la masse attendue considérant le rapport m/V de la suspension. Les incertitudes associées aux valeurs de Kd sont calculées selon l’équation suivante: σ = Kd σ A2 + σ A2 + σ A2 + σ 2 + σ 2 Eq. 7.
Méthode de Compétition entre une phase Liquide aqueuse et une phase Liquide organique (MCLL)
Pour la méthode MCLL, 5mL de phases organique et aqueuse sont mises en contact. Après équilibration du système biphasique, une petite quantité de la solution stock d’astate (1000 Bq) est ajoutée et les tubes sont mis à agiter pendant 2 heures. Cette durée d’agitation a été jugée comme suffisante pour atteindre l’équilibre du système. Après séparation des phases par centrifugation, 1 mL de chaque phase est prélevé et analysé. Le coefficient de distribution est défini par : D = Vaq × Aorg Eq. 8. V× A avec Vorg et Vaq représentant respectivement le volume des phases organique et aqueuse, Aorg et Aaq définissent l’activité de l’astate mesurée dans la phase organique et la phase aqueuse. Les incertitudes associées à D sont calculées selon l’équation suivante  σD=D σ A2 σ A2 σV2 σV2 Eq. 9. org  +aq  +org  +aq AorgAaqVorgVaq.

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Table des matières

Introduction générale
Chapitre 1 Rappels bibliographiques
1. Généralités
1.1. L’atome astate
1.2. L’astate 211
1.3. Production de l’astate 211
2. La médecine nucléaire
2.1. Radioisotopes à visée diagnostique : l’imagerie fonctionnelle
2.2. Radioisotopes à visée thérapeutique en oncologie
3. L’astate 211 en médecine nucléaire
3.1. Injection de l’astate « libre »
3.2. Injection d’un vecteur marqué par l’astate 211
4. La chimie de l’astate en solution aqueuse
4.1. Spéciation en milieu non complexant
4.2. Spéciation en présence d’agent complexant
5. Conclusion
Chapitre 2 Méthodologies
1. Méthodologie expérimentale
1.1. Extraction de l’astate 211
1.2. Principe
1.3. Présentations des protocoles expérimentaux
1.3.1. Méthode de Compétition entre une phase Solide et Liquide (MCSL)
1.3.2. Méthode de Compétition entre une phase Liquide aqueuse et une phase Liquide organique (MCLL)
1.3.3. Outils analytiques
1.4. Détermination des constantes thermodynamiques standards
1.5. Caractérisation du comportement de l’astate dans un système biphasique
1.5.1. Cas du système liquide/solide
1.5.2. Cas du système liquide/liquide
1.5.3. Bilan
2. Méthodologie théorique
2.1. Principe
2.2. La méthode Hartree-Fock
2.3. Théorie de la Fonctionnelle de la Densité
2.4. Bases de fonctions et pseudo-potentiels
2.5. Le modèle de solvatation « Polarizable Continuum Model » (PCM)
Chapitre 3 Spéciation de l’astate en milieu aqueux acide non complexant
1. Méthodologie expérimentale
1.1. Conditions expérimentales et présentation des expériences
1.2. Détermination des propriétés électrochimiques
2. Méthodologie théorique
2.1. Calculs en phase gaz
2.2. Calculs de solvatation
3. Résultats
3.1. Oxydation de l’espèce I en espèce II
3.2. Oxydation de l’espèce II en espèce III
4. Discussion
5. Conclusion
Chapitre 4 Propriétés de complexation de At+ et AtO+
1. Méthodologie expérimentale
1.1. Conditions expérimentales et présentation des expériences
1.2. Détermination de constante thermodynamique
1.3. Résultats
1.3.1. Etude de l’interaction entre At(x)+ et SCN1.3.2. Etude de l’interaction entre At(x)+ et Cl- et Br
1.4. Bilan
2. Méthodologie théorique
2.1. Calcul en phase gaz
2.2. Calcul de solvatation
2.3. Résultats
2.4. Discussion autour d’études de cas
2.5. Bilan
Chapitre 5 Etude de l’interaction de At+ et AtO+ avec l’eau
1. Méthodologie expérimentale
1.1. Conditions expérimentales et présentation des expériences
1.2. Détermination des propriétés d’hydrolyse
2. Méthodologie théorique
3. Résultats
3.1. Par la méthodologie expérimentale
3.1.1. Interaction entre AtO+ et l’eau
3.1.2. Interaction entre At+ et l’eau
3.2. Par la méthodologie théorique
3.2.1. Interaction entre AtO+ et l’eau
3.2.2. Interaction entre At+
et l’eau
4. Discussion
5. Conclusion
Conclusion et perspectives
Annexe A Détection de l’astate 211 par spectroscopie gamma
Annexe B Géométrie optimisée de système à base d’astate
Références bibliographiques

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