Qu’est-ce qu’un objet de représentation sociale ?

Qu’est-ce qu’un objet de représentation sociale ?

Les représentations sociales, en tant que connaissances que les individus ont à propos de leur environnement, se déclinent en éléments se rapportant à un objet.D’après Flament et Rouquette (2003), pour être un objet de représentation sociale, un objet doit posséder une « saillance socio-cognitive ». Cette « propriété complexe », comme la nomme les deux auteurs, résulte de la réunion de deux aspects. En effet, l’objet en question doit avoir une « fonction de concept pour la plupart des individus » et doit, de plus, « constituer une référence fréquente dans les communications échangées au sein de l’unité sociale considérée » (Flament et Rouquette, 2003, p.32). Assurer une «fonction de concept« signifie que l’objet étudié doit renvoyer à une classe générale ou générique (par exemple, « il n’y a pas de représentation sociale du dentifrice mais une représentation sociale de l’hygiène (…), pas de représentation sociale des pantoufles mais une représentation sociale du confort » (Flament et Rouquette, 2003. p.32). Un objet de représentation sociale rassemble ainsi toute une série d’objets particuliers qui en constituent autant de spécifications ou d’illustrations. Notre objet de représentation sociale doit, toujours selon Flament et Rouquette (2003), « avoir une présence thématique récurrente dans les communications (aussi bien dans les conversations que dans les médias…) » (Flament et Rouquette, 2003, p. 33). Ces deux aspects particuliers d’un objet de représentation sociale semblent pouvoir s’appliquer aux deux-roues motorisés chez les adolescents. En effet, il s’agit bien là, non pas d’un simple objet physique ou seulement d’un moyen de transport, mais d’un concept dans lequel s’insèrent divers items (l’indépendance, la liberté, le risque ou la transgression…), qui en sont autant d’éléments caractéristiques. De plus, le cyclomoteur est un objet de discussion pour les jeunes, des sites ou des pages sur les réseaux sociaux lui sont consacrés ainsi qu’aux différentes pratiques qu’il occasionne. Les jeunes trouvent le cyclomoteur également dans les discours des adultes, de la prévention routière, dans les publicités des constructeurs à l’endroit des jeunes et bien sûr à travers les phases de formation à la conduite que sont l’ASSR (Attestation Scolaire de Sécurité Routière) ou le BSR (Brevet de Sécurité Routière). Si le cyclomoteur, du moins dans sa version inférieure à 50 cm3 est globalement absent de la vie des adultes, il s’agit là pour les adolescents d’un des sujets des plus préoccupants. Se pose pour eux la question d’une acquisition ou non, des moyens de l’acquérir puis des pratiques à adopter le cas échéant.

Les fonctions des représentations sociales

Pour Jodelet, « nous avons toujours besoin de savoir à quoi nous en tenir avec le monde qui nous entoure. Il faut bien s’y ajuster, s’y conduire, le maîtriser physiquement et intellectuellement, identifier et résoudre les problèmes qu’il pose. C’est pourquoi nous fabriquons des représentations (…). Elles nous guident dans la façon de nommer et de définir ensemble les différents aspects de notre réalité de tous les jours, dans la façon de les interpréter, statuer sur eux et, le cas échéant, prendre une position à leurs égards et de la défendre » (Jodelet, p.47 et 99). On attribue donc plusieurs fonctions aux représentations sociales. Elles permettent en effet aux individus de comprendre la réalité sociale dont ils sont entourés, elles donnent également du sens à leurs actions et, dans le même temps, orientent ces mêmes actions. Elles aident les individus à définir leur identité et à marquer leur appartenance à un groupe social. De ce fait, elles servent à réguler les relations entre les différents groupes sociaux.

Ces fonctions, évoquées par Jodelet, correspondent à ce qu’avait énoncé Moscovici (1961, 1984) à travers le rôle des représentations sociales dans le traitement de nouvelles informations ou d’un environnement inconnu. Pour lui, les groupes ou les ensembles sociaux vont reconstruire leurs réalités en créant un cadre commun d’interprétation du monde. Ce cadre commun rend les individus capables de comprendre et d’expliquer les objets qui les entourent. De fait, ils seront capables d’appréhender et de contrôler les phénomènes ou les événements qui ont un impact sur leurs vies. Par exemple, si un nouvel objet social influence la vie quotidienne des individus comme ont pu le faire internet (De Rosa & Bocci, 2000), ou l’euro (Roland-Lévy, 2002, 2003), ce nouvel objet ou nouveau phénomène deviendra un objet de représentation sociale. Ce qui sous tend la mise en place des représentations sociale est selon Moscovici (1984, 2002) notre tendance à craindre les objets ou événement inconnus. Donner un nom ou une explication à ces objets nous permet alors d’être plus à l’aise en exerçant un potentiel contrôle sur eux. Comme nous l’avons vu précédemment, ce processus ne peut simplement être réduit à un niveau individuel. S’il y a bien des processus cognitifs individuels qui jouent un rôle important dans la formation des représentations sociales, il s’agit avant tout d’un processus social. Les individus partagent entre eux des informations à propos d’un nouveau phénomène vont conjointement essayer de trouver un consensus à propos de cet objet social. Nous pouvons ainsi dire, en reprenant Moscovici (1984), que la communication, que la reconstruction de la réalité et que le contrôle de l’environnement forment des composants inhérents aux représentations sociales. Il nous faut également prendre deux autres aspects importants en considération. Premièrement les différents groupes, en fonction de leur histoire et de leur passé, sont animés par des systèmes de valeurs, des normes et des savoirs différents. Deuxièmement, les représentations sociales servent de guides pour l’action et les pratiques réelles. En d’autres termes elles nous donnent des indications voir des instructions sur la façon dont nous devons nous comporter dans certaines situations dans lesquelles il est utile de savoir ce qui peut être fait ou non à l’intérieur d’un groupe social donné. En résumé selon Moscovici (2002) le but principal de chaque représentation et l’appréhension d’un phénomène inconnu en vue de le rendre familier et explicable. Plus tard, Abric (1994), en continuateur de Moscovici proposera quatre types de fonctions caractéristiques des représentations sociales. Il s’agit de fonctions de savoir, de fonctions identitaires, de fonctions d’orientation et de fonctions de justification. La première fonction évoquée par Abric (1994) est la fonction de savoir. Elle concerne les informations qui aident les membres d’un groupe ou d’une société à acquérir puis à intégrer le savoir de façon compréhensibles et cohérente au regard de leurs connaissances et de leur système de valeurs préexistants. Cette fonction facilite la communication entre les individus et leur permet de construire un cadre commun de référence. La seconde fonction concerne les aspects identitaires. Plus précisément, elle permet la construction d’une identité en définissant la spécificité de chaque groupe. Au-delà des fonctions cognitives, les individus et les groupes s’inscrivent dans des cadres de référence à  l’intérieur de champ plus larges, comme par exemple la société ou la culture, qui constitue l’identité sociale. Cette identité est liée aux normes et aux valeurs qui sont déterminées par le groupe lui-même et par son histoire. Cette fonction identitaire permet le contrôle du groupe sur ses membres. La troisième fonction évoquée par Abric (1994) est une fonction d’orientation. Il indique que l’interprétation de la réalité induit une base appropriée pour l’action. En d’autres termes il indique que les représentations guident les comportements. Ce guidage comporterait trois phases. Premièrement il détermine le but d’une situation, il génère un système d’anticipation puis enfin, il possède une nature prescriptive. Cette dernière dimension de la fonction d’orientation concerne la définition de ce qu’il est admis ou acceptable de faire dans un contexte social donné.  La quatrième et dernière fonction des représentations selon Abric (1994) est la fonction de justification. Il entend par cette fonction qu’il serait possible de justifier les conduites a posteriori. Les individus pourraient ainsi expliquer et rationaliser leurs comportements dans le cadre d’une situation auprès de leur pairs ou d’autrui.

Une approche originale entre le niveau individuel et le niveau collectif

Durant l’histoire de la psychologie, le schisme entre les phénomènes psychologiques individuels et collectifs a été un sujet largement débattu. La distinction entre le niveau individuel et collectif apparaît déjà dans le travail de Wundt (Pleh, 2000). Wundt a évoqué son travail sous l’angle de deux approches principales: la psychologie populaire, qui concerne une communauté donnée et la psychologie expérimentale, qui concerne l’individu. L’objectif de Moscovici (1961, 2008) et d’autres auteurs qui travaillent dans le cadre des représentations sociales est de relier ces deux approches. Moscovici (2008) visait la création d’une psychologie sociale qui ne serait pas « ciblée, décontextualisée et strictement individuelle » et son mérite principal réside dans l’équilibre qu’il a trouvé entre les théories collectivistes et individualistes. Afin de trouver cet équilibre, il s’est inspiré de la littérature classique des psychologues, mais aussi, comme nous l’avons vu plus haut de la sociologie et notamment des travaux de Durkheim (1898). La théorie des représentations sociales découle ainsi de la théorie de Durkheim, qui déjà, distingue les représentations individuelles de représentations collectives. Moscovici vise à reformuler la place de la psychologie sociale par le biais du concept de représentations sociales qui diffère de représentations individuelles et collectives de Durkheim (1898). Selon lui, les représentations sociales par leur nature sociale permettent d’aller au-delà des processus individuels et d’autre part, elles diffèrent des représentations collectives de Durkheim. Celles ci sont décrites comme rigides en termes de structures et définissant la façon de penser des grands groupes telles que les sociétés. Moscovici affirme que les représentations sociales sont diversifiées au sens où elles sont propres à un groupe donné. Ainsi, ce groupe sera différent d’un autre groupe social qui ne partage pas la même représentation. En ce sens, il est difficile de se référer à une représentation d’un objet social qui serait interprété de façon similaire par toute une société. En outre, selon Moscovici (1961, 2008) les représentations sociales ne disposent pas de  structures aussi rigides que les représentations collectives, car elles peuvent évoluer, surtout sous l’influences de pressions externes.

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Table des matières

1. Introduction
2. Approche conceptuelle
2.1. Les représentations sociales comme expressions des normes valeurs et attitudes d’un groupe
2.1.1. De Durkheim à Moscovici, du concept à la théorie
2.1.2. Définition et caractéristiques des représentations sociales
2.1.3 Processus psychologiques à l’œuvre dans la production des représentations sociales
2.1.4. Qu’est-ce qu’un objet de représentation sociale ?
2.1.5. Les fonctions des représentations sociales
2.1.6. Une approche originale entre le niveau individuel et le niveau collectif
2.2. L’approche structurale des représentations sociales
2.2.1 Le noyau central
2.2.2. Propriétés et Caractéristiques du noyau central
2.2.3. Le système périphérique
2.2.4. Les principes organisateurs: une hypothèse alternative à celle du noyau central
2.3. Les pratiques sociales comme facteur de transformation des représentations sociales
2.4. Aspects normatifs des représentations sociales
2.4.1. Représentations, normes et influence sociale
2.4.2 La théorie de la conditionnalité
2.4.3. Zone muette et masquage des représentations sociales
2.4.4 Technique de substitution et norme d’internalité
2.4.5. Représentation sociale et modèles normatifs
3. Adolescents et cyclomoteurs, une association risquée
3.1 « L’objet » cyclomoteur
3.1.1 Un parc en nette diminution
3.1.2 Débridage et détournement de la loi
3.2 Une formation spécifique
3.3 Les adolescents conducteurs
3.4 Accidentologie
3.5 Facteurs accidentogènes
3.6. Vers une approche psycho-sociale des adolescents scootéristes
3.6.1. De la nécessaire prise en compte du contexte social
3.6.2 Une relation particulière au risque
4. Phase exploratoire
4.1. Associations libres
4.2. Résultats des associations libres
5. Problématique
6. Méthodologie et strategies d’analyse
7. Conclusion

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