Qu’est-ce qu’évaluer aujourd’hui à l’école élémentaire ?

Historique de l’évaluation à l’école

Qu’est-ce qu’évaluer aujourd’hui à l’école élémentaire ? 

On distingue de nos jours dans l’enseignement primaire trois grands types d’évaluations. Avant une séquence, ce qui va servir de déclencheur ou de prétexte à l’apprentissage : l’évaluation diagnostique. Pendant la séquence sous forme d’une observation individualisée : l’évaluation formative. En toute fin d’apprentissage avec un travail synthétique sur ce qui a été travaillé : l’évaluation sommative. Chacune des évaluations a un intérêt qui lui est propre.

La première, lorsqu’elle est proposée, donne à l’enseignant une vision des prérequis de la classe, ce qui lui permettra de mieux envisager sa séquence et de l’affiner. La seconde, formative, est une observation plutôt qu’une évaluation selon Perrenoud Philippe car « elle n’est pas officielle, elle ne regarde que le maître et ses élèves, pas l’administration ». C’est à l’enseignant de créer des outils pour connaître au mieux sa classe- des grilles d’observations dans la plupart des cas, mais il peut également proposer une nouvelle forme de travail telle que l’autoévaluation. En effet, selon Scallon Gérard par exemple, l’élève a le goût et la capacité d’avoir un regard critique sur sa production et d’en évaluer la qualité. Donc, l’autoévaluation responsabilise les individus et elle comprend l’autoévaluation au sens strict et l’évaluation mutuelle entre pairs. Enfin, l’évaluation sommative cerne l’acquisition d’une compétence ou de différents objectifs, sachant qu’au moment de ce travail, la majorité des élèves sera sensée atteindre l’apprentissage en question.

L’évaluation est aujourd’hui omniprésente dans l’éducation, et ce du fait de la demande institutionnelle suivie par celle des parents. Nous allons voir dans un premier temps en quoi l’évaluation est nécessaire pour les membres de la haute institution de l’Education Nationale, puis nous montrerons la subjectivité de certaines formes d’évaluations.

La nécessaire évaluation par l’institution

Selon Perrenoud Philippe (La fabrication de l’excellence scolaire), le système éducatif français a une évidente norme d’excellence, et la fabrication d’un tel niveau d’exigence n’est pas inscrit que dans la loi mais également dans la culture de l’institution Ecole. La France a tendance à créer une école élitiste pour avoir des élèves excellents, ce qui implique nécessairement l’exclusion de certains éléments (encore 110 000 décrocheurs cette année selon le ministère de l’Education Nationale malgré une amélioration récente), d’où le mauvais classement de l’école de la République au niveau européen. S’appuyer sur l’économie de l’éducation peut être extrêmement intéressant pour comprendre pourquoi en haut de la pyramide on nous demande sans cesse d’évaluer. Déjà en 1993, De Ketele Jean Marie montrait qu’il existait cinq paradigmes de l’évaluation : au niveau pédagogique (les liens entre les pratiques pédagogiques des élèves et leur manière d’évaluer), docimologique (comment se passent les épreuves scolaires), psychologique (comparer une production scolaire à un modèle de référence), sociologique (s’intéresser au rôle de l’évaluation scolaire et à ses finalités) et économique (observer le coût du système comparé aux résultats obtenus). Le rôle de l’éducation serait donc d’évaluer pour réguler ; un système éducatif est efficace si on constate des résultats en fonction de ressources non marchandes (les temps d’enseignements, les outils pédagogiques etc).

De plus, les individus ont sans cesse l’habitude d’être classés et jugés à l’école, si bien qu’ils l’acceptent ensuite dans la société : c’est ce qu’on appelle la théorie de la correspondance selon Baudelot Christian (2004, les effets de l’éducation) qu’il a lui-même repris des économistes américains Bowles Samuel et Gintis Herbert (Correspondence and contradiction in educational theory, 2001). Ces derniers le définissent comme tel : « Schools prepare people for adult work rules, by socializing people to function well, and without complaint, in the hierarchical structure of the modern corporation. Schools accomplish this by what we called the correspondence principle, namely, by structuring social interactions and individual rewards to replicate the environment of the workplace ». Ainsi, l’éducation serait extraordinaire ; elle permettrait de construire une représentation de la réalité et de l’imposer à ses membres comme la définition légitime de la réalité. Bourdieu Pierre, célèbre sociologue, a lui-même ajouté que la croyance dans le fondement du système est ce qui lui permet de fonctionner ; on ne se rend pas compte de la pression qu’ont sur nous les institutions, c’est ce qu’il nomme la violence symbolique. Ainsi, l’évaluation fait partie intégrante de la norme scolaire aujourd’hui et elle n’est pas prête d’évoluer sans la réaffirmation sociétale de ce besoin de changement. Ajoutons qu’en France, depuis la loi d’orientation et de programmation pour la refondation de l’école de la République de 2013, les objectifs directement liés à l’évaluation seraient de « transmettre des connaissances et acquérir une culture générale ». En aucun cas on ne nous précise le type d’évaluation à employer, mais l’institution souhaite obtenir les meilleurs résultats possibles, puisque ces derniers sont ensuite comparés internationalement à ceux des autres systèmes éducatifs. Depuis 1989 et la loi Jospin, on cherche à observer les compétences acquises des élèves et beaucoup moins les connaissances. On veut passer d’une identité culturelle propre à une transmission de savoir-faire et savoir-être universels qui « transcendent les traditions nationales » selon Orivel François, dans une logique de mondialisation. Or, on sait qu’il est très difficile d’observer des compétences, d’autant plus que l’effet maitre (c’est-à-dire la variance des résultats entre élèves selon l’enseignant) est d’une ampleur considérable. On veut donc sans cesse évaluer à tous les niveaux, mais il ne faut jamais oublier de situer une prise d’évaluation dans son contexte. Lorsque ce dernier n’est pas pris en compte, la subjectivité de l’évaluation prend de l’ampleur.

Une évaluation subjective

Une évaluation qui convient parfaitement aux élèves en réussite peut gravement poser problème à d’autres qui se découragent et finissent par être stigmatisés. Ils intériorisent leurs difficultés ; on dit qu’ils ont un sentiment d’incompétence acquise. Et pourtant, la difficulté scolaire n’est pas un manque ; elle est faite d’un nombre conséquent de malentendus. En effet, pour une même consigne lors d’une évaluation, l’élève doit identifier à la fois l’objet d’apprentissage, les enjeux cognitifs des tâches et des situations données, ou encore le degré d’exigence de l’enseignant. Un élève qui n’est pas capable lors d’une évaluation de mesurer précisément ce qu’on attend de lui pourra alors se retrouver en difficulté, sans qu’on sache s’il maitrise ou non la compétence demandée. Un contexte complexe gravite autour du travail à réaliser et l’enseignant se doit de le prendre en compte. L’évaluation est donc pour une grande partie subjective, ce qui ne va pas aider certains élèves à trouver la légitimité qu’ils recherchent.

Néanmoins, l’institution a fort heureusement évoluée sur un point primordial qui régissait précédemment l’évaluation : les notes. Un sociologue, Merle Pierre, a étudié de très près la notation en montrant très justement les biais qu’elle pouvait amener dans ses livres « Les notes ; secret de fabrication » et « Enquête sur le jugement professoral ». Entre les effets d’ordre de correction des copies (chaque copie est notée différemment à l’égard des positions des autres copies), de statut social et scolaire des élèves (le niveau scolaire, l’origine sociale, ou même le sexe et l’apparence physique peuvent jouer sur la notation) ainsi que du contexte de scolarisation (l’effet établissement et l’effet classe qui font surestimer ou sous estimer des résultats.), la note n’est que subjectivité. Merle Pierre ajoute que ce sentiment est encore accru chez les enseignants débutants puisqu’on a « du mal à se défaire de l’élève qu’il y a derrière la copie, on n’est pas encore passé de l’autre côté du miroir, on a encore des scrupules, on est du côté des élèves. ». Le fait de supprimer progressivement la notation de l’école primaire (le secondaire et le supérieur ont encore du travail sur ce point) permet de diminuer significativement les effets de classement et de jugement des élèves. Toutefois, on n’a pas encore trouvé l’évaluation idéale ; entre les couleurs, les lettres, les smileys ; impossible de se défaire de la volonté de comparaison de certains enfants et surtout des parents. L’arrivée de nouvelles générations à l’école permettra peut-être d’amorcer une véritable prise de conscience. Quant à la façon d’évaluer -et non pas la transmission des résultats- c’est ce que nous allons voir à présent dans la deuxième partie, en nous demandant en quoi l’évaluation peut-elle posséder des intérêts propres à chaque acteur de la communauté éducative.

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Table des matières

Introduction
Partie 1 : Les pratiques d’évaluation en question
1-Historique de l’évaluation à l’école
1.1 Qu’est-ce qu’évaluer aujourd’hui à l’école élémentaire ?
1.2 La nécessaire évaluation par l’institution
1.3 Une évaluation subjective
2-Pourquoi évaluer autrement ? Intérêts croisés des acteurs de la communauté éducative
2.1 Des élèves demandeurs d’une évaluation basée sur la confiance
2.2 L’évaluation du côté des parents
2.3 Evaluer en tant qu’enseignant
2.4 Evaluer selon le contexte dans de perpétuelles interactions
3-Les pratiques d’autorégulation : une solution viable ?
Partie 2 : Leviers et freins de l’autorégulation à l’école primaire
1-L’évaluation vue par l’institution
2-L’évaluation vue par les enseignants
2.1 Les données quantitatives
2.2 Analyse des réflexions enseignantes
2.3 Une évaluation formative passée au crible
2.4 Retour réflexif
2.5 Une dernière rencontre
3-L’évaluation vue par les élèves
3.1 Les données
3.2 Analyse des paroles d’élèves
3.3 Objectifs évaluatifs et correctifs : résultat d’une enquête quantitative
4-L’évaluation vue par les parents
4.1 Les données
4.2 Analyse des données
4.3 Le cas de l’autorégulation
4.4 Notation et subjectivité
Partie 3 : Pour un élève acteur en pratique
1-Contexte de stage et mise en place du « projet »
1.1 Présentation de l’école et de la classe
1.2 Présentation des dispositifs mis en place
2- Analyse
2.1 Les dictées
2.2 Les poésies
2.3 L’anglais
2.4 L’éducation Morale et civique
2.5 Le travail de groupe
2.6 L’apprentissage des leçons
2.7 La gestion du comportement
2.8 La gestion quantitative du travail
2.9 Mon travail d’enseignante
3- Mon Constat vis-à-vis des hypothèses de départ
4- Conclusion
5- Bibliographie
6- Annexes
Conclusion

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